COMMISSION DES AFFAIRES EUROPÉENNES
Mercredi 23 février 2022
Présidence de Mme Sabine Thillaye, Présidente de la Commission
La séance est ouverte à 14 heures 36.
Le premier point à l'ordre du jour est l'examen de la proposition de résolution européenne (PPRE) déposée par notre collègue Julien Aubert visant à sauvegarder la lavandiculture française. Elle nous conduit à nous pencher sur un sujet suscitant une grande inquiétude chez les producteurs de l'huile essentielle de lavande. Ce faisant, nous sommes, parlementaires nationaux, parfaitement dans notre rôle, entre un échelon européen qui doit définir des réglementations applicables à vingt-sept États membres et des territoires qui peuvent avoir le sentiment que leurs préoccupations ne sont pas suffisamment prises en compte.
La thématique de la PPRE concerne l'avenir de la filière française des PPAM, autrement dit des plantes à parfum aromatiques et médicinales. Plus précisément, il s'agit de la production d'huiles essentielles, un des principaux débouchés de la filière.
Le marché des huiles essentielles est florissant : au niveau international, il représente 24 milliards d'euros. Grâce à sa filière PPAM de grande qualité, la lavande fine française bénéficie de sa propre AOP et, en 2018, l'exportation de PPAM a rapporté près de 1,4 milliard d'euros à la France, dont 1,3 milliard grâce à l'huile essentielle.
Dans sa PPRE, Julien Aubert se concentrait sur le cas de la lavande, fleuron de cette filière. En effet, la France est le premier producteur de lavandin au monde et le deuxième producteur de lavande, derrière la Bulgarie. En Provence, l'économie locale repose en grande partie sur la culture de la lavande, qui génère 9 000 emplois directs et 17 000 emplois indirects.
Par ailleurs, dans le Sud de la France, la lavande est souvent la seule production possible pour les agriculteurs vivants sur les plateaux secs et non-irrigables. Emblème de la région, la lavande est aussi un atout précieux, tant en termes économiques qu'écologiques, qu'il est primordial de préserver.
Dans mon rapport, j'ai souhaité élargir la proposition de Julien Aubert à toutes les PPAM parce qu'elles sont toutes soumises à la même réglementation européenne : le règlement relatif à l'enregistrement, l'évaluation et l'autorisation des produits chimiques (REACH). Combiné avec le règlement relatif à la classification, à l'étiquetage et à l'emballage des substances et des mélanges (CLP), ce règlement REACH concerne les huiles essentielles, qui sont considérées comme « des substances hydrophobes de composition complexe, dérivées de plantes, contenant des composés organiques volatiles tels que des alcools […] en proportions variables », « dont l'innocuité pour la santé et l'environnement ne saurait être garantie sans une évaluation au préalable de la sécurité chimique ».
Entré en vigueur pour la majorité des distillateurs en 2018, il est désormais question, dans le cadre du Pacte vert européen, de le réviser à l'horizon 2025. Or, les producteurs de lavande sont très inquiets et se sont ainsi vivement mobilisés. Le Gouvernement s'est montré à l'écoute, le ministre de l'Agriculture suit d'ailleurs ce dossier activement et s'est rendu plusieurs fois sur place. Il a également créé un comité interministériel pour les huiles essentielles, qui constitue une instance de dialogue utile pour les producteurs et les ministères concernés.
Pour autant, l'inquiétude des producteurs a plusieurs fondements. En premier lieu, la mise en conformité de la filière PPAM au règlement REACH a déjà coûté 1,2 million d'euros et n'a pu se faire que grâce au volontarisme des producteurs ainsi qu'au soutien financier et logistique de l'État et des établissements publics comme FranceAgriMer.
Or, moins de quatre ans après l'entrée en vigueur de ce règlement pour la plupart des producteurs, il est déjà prévu de renforcer la réglementation pour une vaste majorité d'entre eux. Ainsi, deux problèmes se posent :
En premier lieu, les huiles essentielles sont des substances complexes. Par exemple, l'huile essentielle de lavande contient 600 molécules, alors que dans le même temps un produit de synthèse peut n'en contenir qu'une. La Commission européenne, en envisageant d'utiliser une méthode de classification molécule par molécule, mettrait donc en place une procédure inadaptée à des substances aussi complexes que les huiles essentielles.
En outre, cette procédure engendrerait d'importants coûts (de tests notamment) que la filière des PPAM ne pourrait supporter seule. En effet, les devis demandés par les producteurs montrent que cela pourrait s'élever à 1,2 milliard d'euros.
Dans le même temps, la Commission européenne prévoit de renforcer le règlement CLP sur la classification et l'étiquetage, en particulier concernant les perturbateurs endocriniens. Deux classes de produits seront créées : la classe 1 pour les perturbateurs dangereux ayant un effet néfaste avéré et la classe 2 pour les perturbateurs suspectés. Si les critères pour intégrer la deuxième catégorie sont encore mal connus, la filière craint d'être frappée par ricochet.
Il faut donc éviter toute confusion entre les perturbateurs endocriniens et les substances entraînant une activité endocrinienne. Les huiles essentielles se trouvent dans ce dernier cas de figure mais la durée des effets et leur réversibilité montrent qu'elles ne sont pas des perturbateurs endocriniens.
Que l'Union européenne envisage de durcir la réglementation sur les produits chimiques pour améliorer la sécurité du consommateur et de l'environnement est une très bonne nouvelle. Néanmoins, parce qu'elles sont couvertes par la même réglementation, les huiles essentielles pourraient être concernées. Par cette proposition de résolution, nous plaidons pour que les spécificités de ces produits naturels soient mieux prises en compte.
Si dans la version initiale, notre collègue Julien Aubert recommande de considérer les huiles essentielles comme un produit agricole et ainsi de les exclure du règlement REACH, la proposition actuelle met en avant une autre approche. Considérer les huiles essentielles comme des produits agricoles ne change pas puisque la réglementation européenne s'applique dès qu'un produit est commercialisé dans le marché intérieur.
Dans le même temps, exclure les huiles essentielles du règlement REACH n'est pas une solution à long terme. En effet, les producteurs n'y sont pas tous favorables. Ils ont fait l'effort de s'adapter à ce règlement dont ils connaissent maintenant le processus et ne demandent pas nécessairement à en sortir.
Ainsi, il s'agit d'établir une distinction claire entre les petits producteurs et les productions à des fins industrielles. Les petits producteurs, qui ne sont pas concernés par le règlement REACH, doivent rester dans ce cas de figure. De même, le commerce au détail d'huiles essentielles doit être exempté de la révision du règlement CLP.
Pour les productions à des fins industrielles, couvertes par le règlement REACH, il est proposé qu'ils soient également exemptés des nouvelles exigences techniques. Les coûts financiers engendrés par ces nouvelles exigences sont trop élevés par rapport à ce que peut supporter une petite filière, comme celle des PPAM. En outre, la PPRE demande des clarifications sur la classification des perturbateurs endocriniens, afin que la filière puisse se préparer en amont.
En tout état de cause, l'Union européenne et le Gouvernement devraient prévoir des mesures transitoires, échelonnées et adaptées en vue des révisions des règlements REACH et CLP.
D'un point de vue politique, je suis satisfait que le cas de la lavandiculture ait pu être inclus dans l'agenda de la présidence française de l'Union. En effet, j'espère que le Gouvernement français fera usage de l'influence que lui octroie la présidence pour apporter une solution définitive à cette problématique.
Le choix d'élargir la PPRE de la lavande aux PPAM me paraît contestable parce que la lavande demeure un cas à part. Aujourd'hui, la lavande française est concurrencée par celle provenant de Bulgarie, de sorte que si les négociations européennes aboutissent à étouffer la filière française, contrairement à d'autres plantes à parfum, celle-ci disparaîtra.
Le point principal de la PPRE est de traiter différemment l'huile essentielle de lavande, qui n'est pas un produit chimique. Les grands producteurs de lavande ont intérêt à mettre en avant leur adaptation au règlement REACH, pour justifier leur volonté de ne pas revenir en arrière. En revanche, les plus petits jusqu'ici exemptés ne souhaitent pas être absorbés par ce règlement, tout l'enjeu étant alors de savoir comment les protéger au mieux.
En espérant obtenir des négociations européennes que cette situation soit pérennisée, je crains que la parole de la Commission européenne en 2022 soit étouffée en 2026, en 2030 ou même en 2035. En effet, dès le départ, il y a une erreur dans la conception du règlement REACH.
Les huiles essentielles sont définies comme des substances chimiques par ce règlement, alors même qu'elles ne peuvent pas l'être. Par définition, une substance chimique est une substance manufacturée ou produite par l'homme. Cependant, s'agissant des huiles essentielles, le distillateur ne produit rien : l'huile essentielle est produite par la plante !
Analyser une huile essentielle molécule par molécule, autrement dit de la même manière qu'un produit chimique, est une erreur de logique. Une huile essentielle est un tout et il est impossible de dissocier les molécules dans une huile essentielle qui peut en contenir jusqu'à 600.
De la même manière, des chiffres intéressants sont mis en lumière par ce rapport, démontrant que l'appréhension du coût réel de l'adaptation bureaucratique a été mal envisagée dès le départ.
Pourquoi la filière s'est-elle adaptée à REACH et pourquoi faut-il en sortir ? Parce que de mon point de vue, la maintenir dans le cadre des produits chimiques ne la protègera pas des futurs durcissements en matière de régulation. La situation actuelle est très coûteuse pour les petits producteurs et elle sera amenée à s'empirer si nous relâchons la pression.
En outre, Thierry Breton indique dans sa réponse aux producteurs que REACH ne s'applique pas aux produits agricoles. Cela est vrai mais considérer les produits issus de la lavandiculture comme des produits agricoles serait un tremplin pour obtenir un traitement particulier sur la durée. Il faut faire la distinction entre produits de synthèse et produits artisanaux, qui nécessitent des méthodes de production bien spécifiques, comme l'extraction à froid. Il y a aussi une distinction à faire sur les risques sanitaires. Les produits chimiques créés par l'homme sont à l'origine de tels problèmes, tandis que la filière artisanale a fait des efforts importants sur les effets allergènes ou irritants de ses produits.
Si la politique de la Commission européenne en la matière n'évolue pas, les petits producteurs, qui fabriquent de l'huile essentielle de bonne qualité, finiront par périr. Ils ne pourront pas faire face aux grandes entreprises qui elles, ont de grands moyens et le pouvoir d'exercer du lobbying auprès de la Commission. Selon moi, pour qu'il y ait justice, nous nous devons de traiter deux choses différentes de manière différente.
Nous savons l'importance de la lavandiculture dans nos régions, en particulier dans le quart sud-est de la France. Outre son poids économique, cette filière revêt une importance culturelle et touristique. Le label AOC reconnaît en outre toute cette richesse de nos territoires locaux.
Au nom de mon groupe, je voudrais rappeler l'importance de la culture de la lavande et plus globalement de la filière des plantes à parfum aromatiques et médicinales. En effet, plusieurs milliers d'exploitations et autant d'emplois induits sont en jeu.
Face aux enjeux de la réglementation, la proposition de résolution que nous examinons aujourd'hui se concentre dans sa version initiale sur la classification des huiles essentielles de lavande, préconisant de les faire passer de la catégorie « produits chimiques » à celle de « produit agricole ». Or, si l'intention de préserver cette filière est judicieuse, la solution avancée ici imposerait de modifier la définition de produit agricole au sens du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne (TFUE). Cela nécessiterait une révision des traités européens. C'est pourquoi cette proposition n'est ni réaliste, ni réellement opérable. Nous devons donc travailler sur les modalités de contrôle des toxicités afin de protéger les producteurs et s'assurer que les nouveaux critères répondant aux exigences de santé publique n'engendrent pas un surcoût économique exorbitant.
Le travail du Gouvernement, en partenariat avec les acteurs de la filière, a déjà permis de faire évoluer le projet de la Commission européenne. Ainsi, la nécessité d'apporter des preuves scientifiques concernant les trois critères permettant de qualifier une substance de perturbateur endocrinien a été intégrée. Cela constitue une première victoire mais nous devons poursuivre le travail de protection de la filière en apportant des solutions précises et adaptées.
La Commission a elle-même confirmé qu'il n'y aurait pas de proposition avant fin 2022. Nous avons donc le temps d'entamer un travail de réflexion approfondi sur la réglementation afin de s'assurer qu'elle reste cohérente avec la réalité du terrain. Notre groupe soutient la réécriture de cette PPRE proposée par le rapporteur afin d'ouvrir des pistes de réflexion concernant le travail juridique à poursuivre. Cela nous permettra d'adapter la réglementation européenne aux enjeux de la transition écologique, tout en veillant à protéger nos producteurs.
À cet égard, sur quels aspects du contrôle vous paraît-il nécessaire de se concentrer afin de trouver un juste compromis, protecteur de la filière et en conformité avec les enjeux sanitaires ?
Je soutiens l'approche de mon collègue Julien Aubert selon laquelle l'enjeu réside dans la classification de l'huile essentielle. Si nous souhaitons protéger notre filière, il est nécessaire de revenir aux fondamentaux et expliquer clairement notre démarche.
Je partage la même préoccupation que mes collègues. Les huiles essentielles ne sont pas des produits chimiques. Nous devons davantage insister sur ce point pour que cela soit le plus clair possible.
Aujourd'hui en France, 150 producteurs fabriquent environ 84 tonnes d'huile essentielle de lavande. Par un calcul simple consistant à diviser 84 par 150 il apparaît que de nombreux producteurs ne sont pas concernés par le règlement REACH. La grande majorité est en dessous de la tonne de production. Concernant les activités de vente d'huiles essentielles, d'aromathérapie ou d'autres activités médicinales, nous souhaitons que le seuil de 0,1 tonne ne rentre pas dans la réglementation REACH.
La PPRE de notre collègue Julien Aubert a le mérite d'ouvrir la voie à ces discussions, malgré le peu de temps qu'il nous reste. Les activités sont concentrées dans la région Sud. La Bulgarie est également soumise à REACH, il est donc difficile de parler de distorsion de la concurrence. En revanche, nos procédés sont protégés par le label AOC, ce qui offre une garantie pour la reconnaissance de notre savoir-faire.
Article unique
Amendement n 1 de M. Adrien Morenas.
En souscrivant pleinement à l'objectif initial de la PPRE de Julien Aubert, pour la préservation de la lavandicutlure, cet amendement propose néanmoins une nouvelle rédaction. Je suggère d'emblée que la PPRE couvre toutes les plantes à parfums et non pas seulement la lavande. Elles sont toutes dans le même cas de figure, certaines d'entre elles représentant même un revenu bien inférieur. La révision de réglementation ajouterait des difficultés.
Ensuite, considérant les efforts faits par les producteurs d'une à dix tonnes pour s'adapter à REACH, je suggère qu'ils restent dans le cadre réglementaire, comme ils le souhaitent par ailleurs.
Néanmoins, nous demandons des clarifications sur les révisions à venir et leur implication sur les producteurs, concernant notamment les perturbateurs endocriniens. Nous suggérons d'exempter les producteurs d'1 à 10 tonnes de nouveaux tests toxicologiques et écotoxicologiques, une mesure envisagée par la commission européenne. Concernant les petits producteurs de moins d'une tonne qui ne sont pas couverts par REACH, nous demandons à ce qu'ils en demeurent préservés. Les flacons d'huiles essentielles vendus au détail ne doivent pas être concernés par les nouvelles exigences.
À mon sens, cette réécriture est la meilleure façon de soutenir les petits producteurs et cette petite filière, tout en maintenant une grande sécurité pour le consommateur et l'environnement.
La commission adopte l'amendement.
Amendement n°1 de M. Adrien Morenas.
Cet amendement a pour but de faire correspondre le titre à l'esprit de la réécriture en l'élargissant à toutes les plantes à parfum aromatiques et médicinales.
La commission adopte l'amendement.
Elle adopte l'article unique ainsi modifié.
L'ensemble de la proposition de résolution européenne est adopté.
Nous allons entendre Marietta Karamanli qui doit intervenir pour sa communication sur la taxonomie, un sujet au combien d'actualité que la Commission des affaires européennes ne pouvait pas négliger.
La prochaine mandature va être conduite à s'occuper du sujet de la taxonomie, sur le plan législatif et également par le biais de différents rapports qui seront nécessaires pour éclairer les positions françaises et européennes.
Le 2 février 2022, la Commission européenne a présenté un acte délégué complémentaire au règlement « taxonomie verte » de 2020, incluant le gaz et le nucléaire parmi les activités de transition. Ce choix a été abondamment commenté, et la communication que je présente aujourd'hui s'inscrit dans le cadre de ce débat, avec deux objectifs principaux. Le premier est de vous présenter l'architecture globale de cette taxonomie. Elle est un instrument complexe dont l'influence sera croissante dans les années à venir. Les neuf auditions que j'ai réalisées soulignent que la taxonomie engage la crédibilité et l'ambition des politiques européennes à long terme : une taxonomie européenne insuffisamment crédible ne permettrait pas d'atteindre nos objectifs climatiques et serait concurrencée par les classifications étrangères. Le second objectif de ma communication est de vous présenter, sans m'engager dans le fond des débats de politique énergétique, les interrogations et les enjeux que soulève à mon sens cette classification. Je précise d'ailleurs que, faute de temps, je me concentrerai ici sur une synthèse de mes travaux. Vous pourrez voir l'intégralité de cette communication sur le site internet de notre commission. Vous l'aurez compris, la taxonomie européenne n'est pas un document technique désincarné, mais un véritable instrument politique sur lequel repose une partie de la stratégie environnementale et climatique européenne.
Je voudrais d'abord montrer que cet instrument économique et financier révèle des choix politiques forts. La « taxonomie verte » européenne est un système de classification des activités économiques et financières selon leur contribution à la réalisation des objectifs climatiques, créé par un règlement européen de 2020. Ce système vise à donner aux investisseurs une définition commune des activités vertes et, en renforçant l'information sur les marchés par un cadre non contraignant, à réorienter les flux financiers vers les activités vertes.
Pour définir cet instrument, la Commission européenne s'est basée sur les travaux d'un groupe d'experts et a défini six objectifs environnementaux, dont l'atténuation du changement climatique. Pour pouvoir intégrer la taxonomie verte, une activité doit donc concourir à l'un de ces six objectifs. Elle doit en outre respecter deux autres conditions : ne causer aucun préjudice significatif à l'un des cinq autres objectifs, principe « do not significantly harm », et respecter des garanties en matière de droits humains et de droit du travail. La taxonomie ne prévoit en l'état qu'une seule obligation pour les acteurs financiers : celle de publier et communiquer la part de leurs actifs qui entrent dans cette classification. Les activités contribuant à l'objectif d'atténuation du changement climatique sont ensuite classées selon trois catégories : durables, habilitantes, et de transition. Le Parlement européen et le Conseil, dans le règlement adopté en 2020, ont largement renvoyé les modalités de mise en œuvre de la taxonomie à des actes délégués complémentaires proposés par la Commission européenne, notamment en ce qui concerne la définition du périmètre des activités à inclure.
La Commission a jusqu'à présent proposé trois actes délégués. Le dernier acte délégué, proposé le 2 février dernier, est celui qui a eu la plus forte résonance car il propose d'inclure le gaz et le nucléaire dans la taxonomie en tant qu'activités de transition. La Commission européenne considère en effet que le gaz fossile et le nucléaire sont nécessaires pendant une période transitoire, comme leviers de décarbonation et moyens de sortir du charbon. L'intégration de ces énergies à la taxonomie est proposée selon des conditions strictes et toutes les centrales ne sont donc pas concernées.
Cette inclusion suscite toutefois des oppositions plus ou moins fortes et complexes au sein des institutions européennes et des États membres, répondant à des logiques à la fois partisanes et nationales. Malgré des oppositions fortes de la part de certains États membres, exprimées dans chacune des institutions européennes, le rejet de cet acte délégué, qui peut intervenir au Conseil et au Parlement européen sous quatre mois, ou six mois en cas de prolongation, semble improbable au regard des majorités requises. La France a créé une alliance en faveur du nucléaire et défend désormais la complémentarité des énergies, notamment en vue d'établir un soutien mutuel avec l'Allemagne, favorable au gaz. L'Allemagne, avec l'entrée des écologistes au gouvernement dans la nouvelle coalition, pourrait néanmoins revenir sur sa position.
Plusieurs États membres restent fermement opposés au principe même d'intégration des deux sources d'énergie, comme l'Espagne, le Danemark, le Luxembourg et l'Autriche. Ils envisagent désormais des recours devant la Cour de Justice de l'Union européenne, comme l'ont par ailleurs annoncé plusieurs ONG.
Nous voyons ainsi déjà, chers collègues, que les enjeux que cette taxonomie soulève sont nombreux et variés.
Pour faire face à ces enjeux et pour s'inscrire en pleine cohérence avec nos objectifs climatiques et environnementaux, la taxonomie européenne doit être assortie de garanties, particulièrement en ce qui concerne le gaz et le nucléaire.
Ces garanties doivent d'abord être des garanties politiques. Les auditions réalisées soulignent l'importance d'établir une classification lisible et consensuelle, afin d'envoyer un signal clair et de rendre la taxonomie pleinement efficace. Le compromis politique réalisé en incluant le gaz et le nucléaire dans la catégorie des énergies de transition fragilise et brouille ce signal et rend très extensive la notion de « transition » : la construction de nouvelles centrales nucléaires se ferait par exemple en France jusqu'en 2050, et leur exploitation perdurerait au‑delà de 2100. Certains fonds d'investissement ont d'ailleurs déjà déclaré qu'ils ne financeraient pas ces énergies, qu'ils jugent trop polluantes.
La cohérence et l'ambition de la taxonomie européenne sont d'autant plus importantes qu'elle s'inscrit dans un cadre international concurrentiel. La Chine est par exemple en train d'établir sa propre taxonomie et en a exclu le gaz, ce qui pourrait la rendre plus attractive aux yeux des investisseurs qui seront, en dernier lieu, les seuls juges du succès de la taxonomie européenne.
Par ailleurs, des questions entourent les effets financiers, sociaux et économiques que la taxonomie européenne produira. Il nous faut privilégier une approche scientifique, qui suppose une évaluation et un suivi précis de tous les bénéfices, risques et coûts engendrés. Il est absolument essentiel à mon sens de s'assurer que la réorientation de flux financiers visée par la taxonomie ne se fasse pas au détriment de fonds initialement prévus pour les énergies renouvelables, qui restent essentielles dans la réussite de la transition énergétique et doivent être encouragées sans délais ni réserves.
Enfin, le choix de recourir à des actes délégués, fréquent en matière financière où ces actes font parfois plusieurs centaines de pages, peut susciter des interrogations : le Parlement européen et le Conseil ne peuvent qu'accepter ou rejeter de tels actes, qui sont censés ne pouvoir modifier que des éléments non essentiels de l'acte législatif. Nous voyons là qu'il s'agit également d'un acte politique majeur, posant la question de la vitalité de notre démocratie européenne. Ces garanties feront de la taxonomie européenne un instrument crucial permettant de réorienter utilement les fonds, alors que les besoins de financement de la transition énergétique sont élevés.
Le travail réalisé dans le cadre de cette communication laisse donc penser que, moyennant l'apport de certaines garanties juridiques, politiques, économiques et financières au cadre réglementaire en cours d'élaboration, la taxonomie européenne pourra produire des effets utiles.
Si la taxonomie laisse chaque État membre libre d'utiliser les moyens qu'il souhaite pour atteindre la décarbonation, elle ambitionne de devenir demain un référentiel utilisé dans le cadre d'autres réglementations européennes et nationales. C'est là, à mon sens, son principal apport qui ne doit pas être négligé : au-delà des flux financiers privés, elle pourrait également concerner à l'avenir et sur le long terme nos finances publiques, pour la certification des obligations vertes, ou pour l'établissement de budgets verts européens et nationaux. Ce travail de classification doit donc affirmer notre continent comme un moteur de la transition climatique et énergétique au niveau mondial, c'est pourquoi nous devons rester vigilants face aux interrogations que soulève l'inclusion du gaz et du nucléaire.
La taxonomie européenne doit également être vue comme faisant partie d'un ensemble d'instruments et de politiques visant à atteindre nos objectifs climatiques et environnementaux, tel que celui de neutralité climatique en 2050. Elle s'ajoute ainsi à d'autres paquets législatifs majeurs, tel que le paquet « Fit for 55 » proposé l'an passé.
Il s'agit par ailleurs de mettre les autres politiques de l'Union en cohérence avec les objectifs affichés par la taxonomie. Nos auditions ont par exemple révélé des inquiétudes sur les éventuels blocages de financements publics directs qui pourraient survenir dans le futur en raison d'un régime des aides d'État mal adapté.
Enfin, je voudrais conclure en revenant sur certaines propositions faites par nos interlocuteurs, qui pourraient et devraient nous inspirer.
D'une part, il serait utile de créer une communauté d'experts européens sur le coût de la décarbonation et de prendre en compte les effets et les coûts du nucléaire sur la biodiversité et la santé et non seulement au niveau des déchets.
D'autre part, il serait opportun que la notion même de ressources durables fasse l'objet d'un consensus permettant de mieux articuler décarbonation et énergies réellement renouvelables.
Enfin, la question des filières industrielles des énergies renouvelables devrait être un élément de réflexion et d'évaluation pris en compte dans les analyses.
La réflexion que nous amorçons ici devra ainsi nécessairement être élargie, au niveau national et européen, aux grands choix de mix énergétique et de transition écologique pour les décennies à venir.
Dans cette perspective, je ne peux qu'exhorter l'Assemblée nationale, sous la prochaine législature, à poursuivre nos travaux. Il s'agit d'une communication qui illustre l'état de la situation et des débats actuellement. Un acte juridiquement plus contraignant, comme un avis ou une résolution ne peut intervenir qu'après le mois de juin.
Le sujet est très important car nous devons connaître les moyens pour orienter les financements privés vers la transition écologique et avancer ainsi sur la question de la décarbonation. Il faut souligner également que la taxonomie verte n'est qu'un indicateur. Les investisseurs qui sont complètement opposés au gaz et au nucléaire refuseront d'orienter leurs capitaux vers ces sources d'énergie, indépendamment de leur inclusion dans la taxonomie. La classification des énergies reste malgré tout nécessaire.
Vous avez fait également le lien entre la taxonomie et les aides d'État et il faut souligner que des nombreuses questions doivent encore être clarifiées.
Mme Frédérique Dumas. Dans votre communication vous avez affirmé que sur le sujet de la taxonomie, les réactions étaient « nationales et partisanes ». Je considère que chaque pays a des intérêts nationaux et des interrogations profondes sur ces sujets.
Pourriez-vous expliquer quelles sont les « garanties juridiques, politiques, économiques et financières » auxquelles vous faites référence dans votre communication ?
Vous avez évoqué également le fait de différencier les activités qui permettent la décarbonation et les énergies renouvelables et je considère que ce point est très important. À titre personnel, je pense qu'il est nécessaire de détendre le sujet du nucléaire et d'engager un dialogue constructif entre les États membres.
Le sujet de la taxonomie européenne est extrêmement important en raison de ses conséquences sur les financements et la structure budgétaire européenne. L'inclusion du gaz dans la taxonomie, sachant que l'objectif du texte est de « contribuer de manière substantielle à l'atténuation et à l'adaptation au changement climatique », est problématique. Nous savons que le gaz participe de manière importante au réchauffement climatique.
Le fait de devoir inclure le gaz dans la taxonomie pour permettre l'inclusion du nucléaire, alors que cette dernière est nécessaire pour la transition énergétique de certains États membres, donne une mauvaise image de l'Europe.
Je n'imagine pas comment pourrions-nous atteindre un compromis connaissant les fortes oppositions de la population de certains États membres à l'énergie nucléaire.
Sur la question des intérêts « nationaux et partisans », il ne s'agit pas d'employer ces termes dans un sens péjoratif mais d'illustrer une réalité plus complexe. Au Parlement européen, les différents groupes politiques ont des positions bien définies sur les questions énergétiques mais, les députés européens, en fonction des intérêts de leurs États membres, peuvent avoir une position différente par rapport à celle de leur groupe. A titre personnel, je considère qu'il faudrait limiter le recours aux actes délégués.
Sur les garanties économiques et financières, il faut s'assurer que l'inclusion du gaz et du nucléaire ne détourne pas les fonds destinés aux énergies renouvelables.
Il faut mentionner également les garanties écologiques, notamment avec la question du traitement des déchets. Il s'agit d'un sujet délicat, car nous n'arrivons pas à trouver des solutions pérennes malgré la volonté de la France. Les prochains débats devront traiter sérieusement cette dimension.
Concernant l'énergie nucléaire, les experts remarquent qu'il existe un manque de production d'électricité à partir d'énergies renouvelables. Le débat sur la qualification de l'énergie nucléaire en tant qu'énergie de transition n'est toujours pas tranché dans la communauté d'experts.
Je suis totalement d'accord avec le Président Chassaigne sur les conséquences de la taxonomie concernant d'autres sujets comme l'architecture budgétaire de l'Union.
Nous allons maintenant examiner un sujet de la plus grande importance : celui de la défense commerciale de l'Union.
Les termes du débat sont connus : l'Union européenne est accusée, peut-être à tort, notre rapporteure nous le dira, de faire preuve de trop de naïveté sur la scène commerciale internationale, en recourant de façon trop timide aux outils de défense commerciale dont elle dispose, en acceptant trop facilement la prise de contrôle d'entreprises stratégiques par des investisseurs étrangers, ou encore en ouvrant ses marchés publics aux entreprises des pays tiers y compris lorsqu'il s'agit d'entreprises d'États qui n'ouvrent pas leurs propres marchés publics.
Quelle que soit la réalité de ce reproche, il est clair que la situation a évolué et que l'Union européenne semble désormais plus déterminée à défendre ses intérêts au nom de l'impératif – de plus en plus partagé au sein des États membres – d'autonomie stratégique et de protection de ses producteurs.
C'est avec un peu d'émotion que j'ai l'honneur de vous présenter ce rapport d'information sur la défense commerciale européenne, le dernier de cette mandature.
Si le sujet revêt une certaine complexité du fait de sa technicité, il illustre, selon moi, parfaitement la mue endossée par l'Union européenne ces dernières années pour exiger une plus grande réciprocité dans ses rapports avec le reste du monde. La dernière plainte, déposée le 18 février dernier par l'Union auprès de l'OMC contre la Chine, qui est accusée d'avoir empêché des entreprises européennes de protéger leurs brevets, témoigne de la volonté de Bruxelles de défendre davantage nos intérêts économiques.
Ouverte au commerce, l'Union s'est en effet appuyée sur les instruments de défense commerciale à sa disposition pour s'affirmer face aux pratiques commerciales déloyales de pays tiers et réclamer des conditions de concurrence équitables pour ses producteurs. L'Union ne s'est d'ailleurs pas contentée de mobiliser ses instruments ; elle les a récemment profondément rénovés pour s'assurer de leur efficacité dans un contexte de tensions commerciales accrues et continues. Elle continue aujourd'hui d'élargir la palette d'outils dont elle dispose. Je vais tâcher de revenir sur chacun de ces points.
Stricto sensu, il existe trois instruments de défense commerciale : les mesures antidumping, les mesures antisubventions, les mesures de sauvegarde. Si l'on exclut les mesures de sauvegarde, qui représentent une infime partie des mesures en vigueur, les deux premiers instruments ont vocation à intervenir lorsque des produits importés au sein de l'Union sont vendus, du fait du dumping ou des subventions dont ils font l'objet, à des prix artificiellement bas. Ce faisant, ils exposent les producteurs européens des secteurs concernés à une concurrence déloyale.
Environ 150 mesures de défense commerciale sont aujourd'hui en vigueur dans l'Union. Ces mesures sont réparties de la façon suivante : 86 % sont des mesures antidumping, 12 % sont des mesures antisubventions, les 2 % restants représentent des mesures de sauvegarde.
En ce qui concerne les pays visés par ces mesures, je ne vous surprendrai pas, je crois, en vous indiquant que près de deux tiers des mesures en vigueur ciblent des produits chinois ; viennent ensuite les produits en provenance de Russie, d'Inde et des États-Unis.
Dans les faits, l'Union recourt moins aux instruments de défense commerciale que ses partenaires, mais cela ne signifie pas pour autant qu'elle fasse preuve d'une naïveté absolue en la matière. Par exemple, les États-Unis et l'Union présentent un volume d'importations de marchandises en provenance du reste du monde similaire, mais les États-Unis affichent pourtant un nombre de droits en vigueur quatre fois supérieurs. Toutefois, un des facteurs explicatifs de cet inégal recours réside dans l'approche différente des deux puissances en matière de défense commerciale : les États-Unis préfèrent imposer un très grand nombre de droits quitte à être déboutés par la suite par l'OMC, tandis que l'Union européenne n'impose des droits que lorsqu'elle est plus ou moins certaine de la régularité de ses mesures et préserve ainsi ses entreprises d'une forme d'instabilité réglementaire qui leur serait préjudiciable.
L'efficacité de la défense commerciale européenne est réelle : selon les estimations de la Commission, ce sont près de 350 000 emplois directs qui seraient protégés par les mesures en vigueur. Un rapport récent de la Cour des comptes européenne a souligné que le système de protection des entreprises de l'UE contre les importations faisant l'objet d'un dumping ou subventionnées fonctionnait bien.
Néanmoins, nous devons reconnaître que cette efficacité est partielle. Elle a besoin d'être améliorée car l'Union a longtemps eu tendance à aller au-delà des règles de l'OMC, faisant preuve parfois d'une attitude conciliante, voire naïve vis-à-vis des États tiers qui recourent au dumping ou aux subventions. Les instruments de la défense commerciale européenne ont donc été profondément révisés à partir de 2017, pour remédier aux lacunes et pour les adapter à certaines nouvelles réalités économiques, au premier rang desquelles la montée en puissance de la Chine. Concrètement, les mesures de défense commerciale sont désormais mises en œuvre de façon plus systématique, plus rapide et plus sévère pour défendre au mieux l'intérêt des entreprises européennes.
Une innovation majeure a également été la nomination en 2020, d'un procureur commercial au sein de l'Union qui permet d'incarner véritablement la défense commerciale européenne auprès de nos entreprises, mais également vis-à-vis du reste du monde. Cette nomination témoigne d'un revirement au niveau européen que je veux ici saluer : la Commission européenne ne cherche plus uniquement à multiplier les accords commerciaux avec des partenaires mais s'assure désormais aussi que ceux déjà signés aient des retombées sonnantes et trébuchantes pour les entreprises européennes.
Aujourd'hui, au-delà d'une modernisation, la défense commerciale européenne est sujette à un réel élargissement dans le cadre de la nouvelle stratégie commerciale de l'Union adoptée en février 2021. Sans constituer de véritables instruments de défense commerciale, de nouveaux instruments, dits autonomes, ont vocation, comme les IDC, à permettre à l'Union européenne et à ses États membres de mieux faire valoir leurs droits, lorsqu'ils sont confrontés à des pratiques commerciales déloyales ou à une absence de réciprocité dans les échanges commerciaux. Il m'a, ainsi, paru pertinent d'aborder ces instruments dans le cadre de ce rapport sur la défense commerciale européenne, en ce qu'ils poursuivent les mêmes objectifs que ceux habituellement assignés aux IDC.
Ces nouveaux instruments doivent permettre de mieux lutter contre les subventions sur les marchés tiers, d'exiger une plus grande réciprocité dans l'accès aux marchés publics ou encore de répliquer aux tentatives de coercition économique dont ferait l'objet l'Union ou l'un de ses États membres.
En ce qui concerne l'absence de réciprocité dans l'ouverture des marchés publics en défaveur des entreprises européennes, j'aimerais partager avec vous un exemple qui me paraît particulièrement révélateur et que j'emprunte à un rapport d'information publié récemment par la commission des Affaires étrangères et présenté par les députés Maud Gatel et Didier Quentin : alors que les chercheurs du CNRS travaillent avec des supercalculateurs américains, les industriels européens ne sont pas autorisés à répondre à la commande publique américaine pour ces mêmes équipements. Ce n'est pas normal !
Par ailleurs, d'autres instruments en train d'être créés, bien qu'ils poursuivent en priorité des objectifs différents, auront aussi une influence en matière de commerce extérieur. Cela illustre la place centrale qu'occupe désormais la politique commerciale et la nécessité de la mettre en cohérence avec la politique industrielle, nos efforts en matière d'écologie, mais aussi la protection des droits de l'homme. À ce titre, le règlement établissant un mécanisme d'ajustement carbone aux frontières de l'Union, proposé par la Commission européenne le 14 juillet dernier, fait partie des exemples les plus pertinents pour souligner le caractère transversal des enjeux climatiques et commerciaux. Plus récemment, le commissaire Thierry Breton a présenté sa proposition du Chips Act européen qui vise à renforcer la production de semi-conducteurs dans l'Union pour consolider notre autonomie industrielle et notre marge de manœuvre en matière commerciale. Au niveau des initiatives prises par l'Assemblée nationale ou notre commission des Affaires européennes, je pense aussi aux résolutions adoptées, en janvier dernier, concernant la situation des Ouïghours en Chine et le devoir de vigilance des multinationales.
La France est particulièrement investie sur la création des nouveaux instruments commerciaux et entend utiliser la PFUE pour faire avancer les négociations sur ces dossiers. Je salue cette volonté et m'y associe, tout en précisant que le seul élargissement des instruments dont dispose l'Union n'apporte qu'une réponse certes bienvenue mais partielle : il est absolument nécessaire, sur ce sujet, pour l'Union européenne et pour la France, de continuer à œuvrer à une réforme de l'OMC afin, notamment, de débloquer l'organe de règlement des différends, aujourd'hui paralysé, et d'adopter de nouvelles règles plus contraignantes en matière de contrôle des subventions.
En conclusion, je recourrai à cette maxime latine qui exprime parfaitement la philosophie avec laquelle l'Union européenne recourt aux instruments de défense commerciale et développe de nouveaux outils : si vis pacem, para bellum, « si tu veux la paix, prépare la guerre. » La défense commerciale européenne n'a, en théorie, pas vocation à être utilisée mais son « arsenal » est indispensable pour assurer à l'Union européenne et à ses États membres une crédibilité dans leur rapport avec leurs partenaires : son existence et son renforcement actuel doivent permettre de dissuader les États qui seraient tentés de le faire de recourir à des pratiques commerciales déloyales. Nous devons aujourd'hui renforcer cet arsenal en poursuivant la voie prise par la Commission européenne et les ambitions exprimées par la présidence française du Conseil de l'Union européenne.
Cet état des lieux très précis montre bien que nous avons fait des progrès depuis 2017 sur les sujets de politique commerciale, et que nous avons notamment perdu notre naïveté en la matière.
Nous avons multiplié les accords de libre-échange dans le passé, dont les conséquences sont, hélas, multiples et néfastes. Le dumping et la libéralisation affectent nos entreprises, notre souveraineté, notre budget et surtout notre environnement. Je souhaiterais revenir sur deux sujets auxquels je tiens particulièrement : l'agriculture et la transition écologique.
L'agriculture française est passée de 90 à 180 milliards d'euros de produits importés entre 2000 et 2016 et l'excédent agricole français a été divisé par deux entre 2011 et 2017. À ce rythme de décroissance, notre pays connaîtra son premier déficit agricole en 2023. Malheureusement la politique agricole commune reste un instrument inégalitaire qui favorise les grandes entreprises agricoles. Les clauses de sauvegarde commerciales ne sont jamais vraiment mobilisées en matière agricole, par manque de volonté politique de la part de la Commission et à défaut d'un dispositif efficace de suivi des marchés.
Concernant la transition écologique, les références aux engagements environnement restent souvent limitées à des déclarations non contraignantes dans les accords commerciaux, aucune sanction n'étant envisagée en cas de manquement. Le cas de l'accord entre l'Union européenne et l'Indonésie est emblématique : cette dernière, malgré son engagement réaffirmé en faveur de l'Accord de Paris, a porté devant l'organe de règlement des différends de l'Organisation mondiale du commerce la décision européenne visant à restreindre l'importation d'huile de palme. L'huile de palme est pourtant fortement émettrice de CO², responsable de la déforestation, porte atteinte à la biodiversité et augmente la vulnérabilité des sols. Cependant, l'Union européenne est incapable de procéder à des restrictions de son importation. Une meilleure défense commerciale aurait des effets positifs sur notre marché, permettant par exemple un revenu décent pour nos agriculteurs, de lutter contre le travail forcé et la déforestation et de limiter les émissions de carbone et de méthane.
Dans le cadre de sa Présidence du Conseil de l'Union, la France doit renforcer la politique commerciale européenne plutôt que de négocier de nouveaux accords commerciaux. Elle doit prémunir l'Europe contre les législations extraterritoriales américaines et pousser des législations, comme la loi Potier sur le devoir de vigilance, contre l'accaparement des terres agricoles et pour le renforcement du devoir de vigilance au niveau européen. La France doit s'assurer que les produits importés soient soumis aux standards européens. De tels projets pourraient-ils être annoncés par la Commission ? Le temps presse.
Le 13 et 14 février dernier, les ministres européens chargés du commerce se sont réunis à Marseille pour travailler sur la stratégie et les priorités de la politique commerciale de l'Union. Cette réorientation est pensée en cohérence avec la politique de la Commission européenne, qui a défini sa nouvelle ambition commerciale à travers trois grandes caractéristiques : ouverte, durable, dynamique.
Nous pouvons nous féliciter de cette dynamique qui traduit la montée des préoccupations environnementales, la volonté accrue de protéger nos entreprises et de préserver notre économie ouverte sur le monde.
Pour répondre à ce défi, il est important de se doter des bons outils, tel que l'Instrument pour les marchés publics (IPI) sur lequel porte votre première recommandation et qui permet de limiter l'accès aux marchés publics européens aux entreprises de pays n'offrant pas de conditions d'accès similaires. Négocié depuis 2012, ce mécanisme pourrait voir le jour sous la présidence française. Pourriez-vous nous indiquer où en sont les négociations en cours et comment sa mise en œuvre se déroulera ?
Je soutiens les propos du Président Chassaigne : peu d'instruments sont contraignants et les sanctions sont rares. La France continue à soutenir l'accord d'investissement entre l'Union et la Chine, alors que les principes éthiques et écologiques ne sont pas respectés. L'écart entre les discours et les actes est très fort. L'absence de réciprocité est réelle : nos marchés sont plus ouverts que les marchés américains. Puisque l'on n'arrive pas à obtenir la réciprocité, pourquoi ne fait-on pas l'inverse et ne fermons-nous pas nos marchés ?
Nous avons senti un véritable changement d'attitude et de volonté chez nos interlocuteurs pendant les auditions, ce qui m'a rassérénée. La naïveté du laisser-faire est terminée, même s'il reste effectivement beaucoup à faire. Concernant l'agriculture, nous comptons beaucoup sur les avancées ce semestre, notamment à travers l'introduction des clauses miroirs portées par le ministre de l'agriculture, qui permettrait de rééquilibrer les conditions de concurrence.
Les négociations sont bien avancées sur l'accord IPI. Des exemptions sont prévues concernant les pays les moins développés de l'Union et la question des seuils est à l'étude. Nous espérons aboutir sur ce sujet qui est discuté depuis une dizaine d'années pendant la PFUE.
Nous avons en effet été trop laxistes et naïfs et nous devons désormais réagir. L'arsenal des mesures que j'évoque doit pouvoir rétablir des conditions commerciales équitables.
L'accord obtenu au sein de l'OCDE le 8 octobre 2021 pour une réforme de la fiscalité constitue un évènement de la plus grande importance, qui aura des conséquences fortes à la fois sur le processus européen d'harmonisation de la fiscalité des sociétés et sur la constitution de nouvelles ressources propres pour le budget de l'Union européennes.
Après des années de travail sur les défis fiscaux posés par la numérisation de l'économie dans le cadre du plan de l'OCDE et du G20 de lutte contre l'érosion de la base d'imposition et le transfert de bénéfices (BEPS), un accord politique a été conclu le 8 octobre dernier posant les bases d'une réforme des règles de la fiscalité internationale pour faire en sorte que les multinationales paient une juste part d'impôt quel que soit le lieu où elles exercent leurs activités. La numérisation de l'économie avait rendu obsolètes les règles actuelles, qui reposent sur la définition d'un établissement stable permettant à l'État d'imposer les bénéfices d'une entreprise étrangère. Aujourd'hui, les entreprises peuvent générer des bénéfices élevés dans un pays sans y avoir d'établissement stable.
Cet accord sur une réforme systémique est l'aboutissement d'un travail considérable mené par le secrétariat de l'OCDE, sous la houlette de Pascal Saint-Amans, avec les négociateurs des États membres du cadre inclusif. Il est soutenu par 137 pays, dont les 27 membres de l'Union européenne. L'Estonie, la Hongrie et l'Irlande, d'abord réticents, ont finalement rejoint l'accord.
La réforme repose sur deux piliers. Le pilier I vise à assurer une répartition plus équitable des droits d'imposition sur les bénéfices des entreprises multinationales les plus grandes et les plus rentables entre les pays de siège et les pays dits « de marché ». Le pilier II a pour objectif d'assujettir les bénéfices des entreprises multinationales à un taux d'imposition minimum de 15 %.
Nous n'allons pas entrer dans les détails très techniques de ces deux piliers, dont tous ne sont d'ailleurs pas encore arrêtés, mais en présenter les grandes lignes, avant de mettre l'accent sur les conséquences de la réforme dans le droit de l'Union européenne.
Le champ d'application du pilier I a évolué depuis le début de la négociation. Alors que les grandes entreprises du numérique étaient particulièrement ciblées à l'origine, la réforme concernera finalement les plus grandes entreprises multinationales, en fonction de critères de chiffre d'affaires et de rentabilité, quel que soit leur secteur d'activité, à de rares exceptions comme les services financiers réglementés et les activités minières, car leurs bénéfices sont déjà liés à l'endroit où ils sont réalisés.
Les entreprises concernées sont les multinationales dont le chiffre d'affaires mondial dépasse 20 milliards d'euros et dont la rentabilité, c'est-à-dire le bénéfice moyen avant impôt rapporté au chiffre d'affaires, est supérieure à 10 %. Les entreprises américaines représenteraient 40 % des entreprises concernées et 60 % des profits à redistribuer. Une grande entreprise comme Amazon ne sera concernée que pour ses activités de cloud, l'activité de vente en ligne n'étant pas suffisamment profitable.
Pour la centaine d'entreprises concernées, 25 % des bénéfices au-delà du seuil de rentabilité de 10 % seront réattribués aux juridictions du marché, à partir d'une clé de répartition fondée sur le chiffre d'affaires. Ces bénéfices réattribués constituent ce que l'on désigne comme « montant A ». Selon les estimations de l'OCDE, plus de 125 milliards de dollars de bénéfices devraient être réattribués chaque année aux juridictions de marché.
Il a pu y avoir une certaine confusion dans le grand public. Avec le « montant A », il ne s'agit pas d'imposer des bénéfices qui ne l'étaient pas – ces entreprises payent déjà des impôts – mais de répartir différemment les droits d'imposer entre États. Par exemple, une grande entreprise du numérique paiera un peu moins d'impôts aux États-Unis et un peu plus en Europe, et un grand groupe de luxe français paiera un peu moins d'impôts en France et un peu plus en Chine.
Pour déterminer quels pays pourront bénéficier de cette réallocation des droits d'imposition, une nouvelle règle du lien (nexus) est créée : la multinationale concernée devra réaliser au moins 1 million d'euros de chiffre d'affaires dans le pays concerné. Ce seuil est ramené à 250 000 pour les petites juridictions dont le PIB est inférieur à 40 milliards d'euros.
Les grandes entreprises du numérique, qui étaient visées par les taxes numériques mises en place au niveau national ou envisagées au niveau européen, étant soumises aux nouvelles règles du pilier I, l'accord conclu à l'OCDE prévoit la suppression des mesures unilatérales existantes, telles que la taxe française, et le statu quo, c'est-à-dire l'interdiction d'introduire de nouvelles mesures analogues. La réforme sonne ainsi le glas du projet de redevance numérique européenne, qui était censée venir alimenter les ressources propres du budget de l'Union, nous y reviendrons. Personnellement, je me félicite que cette réforme aboutisse à la suppression des taxes numériques, que j'ai toujours considérées comme une mauvaise réponse à une question légitime. Ces taxes sont susceptibles d'engendrer des surcoûts pour les consommateurs et des conflits commerciaux.
Le pilier I comprend également un « montant B » concernant les activités de commercialisation et de distribution, mais il s'agit plus d'une simplification des règles existantes que d'une réforme systémique.
Le pilier II introduit un impôt mondial minimum sur les sociétés réalisant un chiffre d'affaires d'au moins 750 millions d'euros, dont le taux a été fixé à 15 %. Il a été fixé à un niveau permettant d'obtenir l'accord de pays comme l'Irlande, qui a construit son modèle de développement économique sur un taux d'imposition faible (12,5 %) et stable. Ainsi, en application du pilier II, un groupe français ayant une filiale ne payant que 2 % d'impôt sur les sociétés dans un paradis fiscal serait redevable à l'État français à hauteur de 13 %. Le taux d'imposition effectif sera calculé juridiction par juridiction en utilisant une définition commune des impôts couverts et une base d'imposition déterminée par référence au résultat comptable.
Le pilier II aura le statut d'une approche commune, et non d'un standard minimum, ce qui signifie que les membres du cadre inclusif ne sont pas tenus de l'adopter, mais d'accepter que les autres membres du cadre inclusif le fassent.
Outre le taux, qui est l'élément le plus visible pour le grand public, l'assiette fiscale à considérer a fait l'objet de nombreuses discussions pour trouver une solution qui ne déstabilise pas les pays, comme la Hongrie, dont le modèle économique reposait jusqu'ici sur une fiscalité basse pour attirer des investissements réels, et non liés à l'optimisation fiscale. Des exceptions fondées sur des critères de substance prévoient d'exclure un montant de revenu représentant 5 % de la valeur nette des actifs corporels et de la masse salariale au terme d'une période de transition de 10 ans.
Selon l'OCDE, l'impôt minimum devrait générer environ 150 milliards de dollars de recettes fiscales supplémentaires à l'échelle mondiale. L'observatoire européen de la fiscalité a évalué à environ 70 milliards d'euros les recettes fiscales supplémentaires pour les États membres de l'Union européenne.
La deuxième partie de notre communication porte sur le calendrier envisagé pour l'entrée en vigueur de l'accord.
L'OCDE a déterminé un plan de mise en œuvre extrêmement volontariste, pour une application concomitante des deux piliers en 2023. La déclaration du 8 octobre 2021 ne constitue pas l'accord final, mais un engagement politique ; les parties favorables à la déclaration poursuivent les négociations sur les projets de textes juridiques, de règles types et de commentaires.
Même si la même date d'entrée en vigueur est visée pour les deux piliers, les travaux techniques avancent à des rythmes différents. Le pilier II, qui ne nécessite pas de convention multilatérale mais des modifications des législations nationales ou européennes, est plus avancé. L'OCDE a publié fin décembre 2021 le modèle pour faciliter la transposition de ses règles en droit interne.
Le travail technique et politique restant à accomplir sur le pilier I est plus important. Il s'articule autour d'une douzaine de modules. L'un d'entre eux consiste à préciser le champ d'application. L'accord politique prévoit par exemple que le pilier I ne s'applique pas aux entreprises extractives, il reste à définir précisément les activités extractives. Un autre sujet à très fort enjeu financier et politique est la règle d'élimination des doubles impositions, qui consiste à déterminer à quel pays on prend l'argent qu'on va redistribuer aux pays de marché. Par exemple, pour un grand groupe de luxe français, va-t-on prendre les bénéfices à réattribuer aux juridictions de marché à la France, pays de siège, à tous les pays où le groupe a une profitabilité au-dessus de 10 % ou, parmi ces pays, prioritairement aux pays où la profitabilité est exceptionnelle, de fait les paradis fiscaux ?
L'objectif est de parvenir à un accord sur les différents modules au premier semestre pour que la convention multilatérale nécessaire à la mise en œuvre du pilier I puisse être signée pour la réunion des ministres des finances du G20 fin juillet. Une consultation publique vient tout juste de se terminer sur un projet de règles types pour le lien et la source du chiffre d'affaires.
Une fois signée, il faudra que les États ratifient la convention le plus tôt possible, pour permettre sa prise d'effet en 2023 après qu'une masse critique de juridictions l'aura ratifiée. La principale interrogation porte sur la ratification par le Congrès américain.
Quelles sont les conséquences pour la législation européenne ?
Comme Frédérique Dumas et Xavier Paluszkiewicz l'avaient montré dans leur rapport sur l'espace fiscal européen, un certain nombre d'États membres n'envisagent d'intervention de la législation européenne dans le domaine de la fiscalité des entreprises que dans le cadre d'accords au niveau international, pour préserver la compétitivité des économies européennes et des conditions de concurrence équitables. Cet accord est donc important pour l'Union européenne et aura plusieurs conséquences très directes.
La première, nous l'avons évoquée, est l'abandon de tout projet de taxe numérique européenne. Comme il s'agissait d'une des pistes prévues par l'accord interinstitutionnel de décembre 2020 pour de nouvelles ressources propres du budget de l'Union, la Commission a dû trouver une solution de repli. Elle a ainsi proposé le 22 décembre 2021 une nouvelle ressource propre constituée de 15 % de la part des bénéfices résiduels des entreprises multinationales réattribuée aux États membres dans le cadre du pilier I. Elle estime que cette ressource pourrait rapporter entre 2,5 et 4 milliards d'euros par an, mais il n'y a pas d'étude d'impact à proprement parler à ce stade, l'accord sur le pilier I n'étant pas finalisé. De lourdes incertitudes pèsent encore sur la mise en œuvre de cette ressource. Elle ne pourra en effet s'appliquer qu'après la prise d'effet de la convention multilatérale en cours d'élaboration à l'OCDE et l'adoption d'une directive relative à la mise en œuvre de l'accord mondial sur la réattribution des droits d'imposition, que la Commission ne pourra proposer qu'une fois que la convention multilatérale aura été rédigée. Le chemin est semé d'embûches, puisque, outre l'unanimité sur la directive, la mise en œuvre de cette ressource dépend de la ratification de la convention multilatérale par des pays n'appartenant pas à l'Union européenne. En outre, sur le plan européen, cette proposition peut soulever des interrogations. Il faudra en effet s'intéresser au montant net des bénéfices résiduels réattribués, et pas seulement aux bénéfices réattribués : certains États européens, comme le Danemark, devraient perdre plus de recettes qu'ils n'en gagneront. Sur le plan des principes, certains pays pourraient également faire valoir que, l'Union européenne n'ayant qu'une compétence résiduelle en matière de fiscalité directe, il n'est pas légitime de fonder une ressource propre du budget de l'Union sur l'impôt sur les sociétés, qui revient aux États. Souvenons-nous du serpent de mer de l'assiette commune consolidée pour l'impôt des sociétés (ACCIS).
Sur le pilier II, la Commission a d'ores‑et‑déjà présenté, fin décembre, une proposition de directive pour mettre en place l'imposition minimale des multinationales dans l'Union européenne de manière cohérente et compatible avec le droit de l'Union. Son adoption constitue une priorité pour la présidence française et pour la Commission. La proposition de la Commission reprend fidèlement les règles types adoptées par le cadre inclusif, sous réserve d'adaptations qui visent pour l'essentiel à éviter toute discrimination contraire à la liberté d'établissement au sein de l'Union entre situations internes et transfrontalières. Les adaptations les plus notables sont, d'une part, l'obligation pour les États membres d'appliquer l'impôt minimum, pour éviter toute distorsion sur le marché intérieur, et, d'autre part, l'extension du champ d'application du pilier II aux entreprises purement nationales dépassant les 750 millions d'euros de chiffre d'affaires, pour respecter la liberté d'établissement. La négociation entre États membres vient tout juste de commencer. Le principal obstacle pourrait venir de la volonté de quelques pays (Estonie, Hongrie et Pologne) d'attendre la finalisation du pilier I pour engager la transposition du pilier II. Même si les deux piliers sont indépendants juridiquement, ces pays estiment qu'ils sont liés politiquement. Ils n'ont consenti au pilier II, qui remet en cause leurs incitations fiscales à l'investissement, que parce qu'il y avait le pilier I. Plusieurs pays s'inquiètent en outre du calendrier très ambitieux de la présidence française, qui vise une adoption par le Conseil au premier semestre, alors que le projet de texte est techniquement compliqué et qu'il convient d'en mesurer les effets sur les entreprises nationales.
L'accord est en effet qualifié « d'historique » par la presse. Néanmoins, je ne suis pas sûre d'avoir bien compris comment serait garanti le caractère équitable du processus de réattribution des bénéfices.
Il y a deux piliers : le pilier I qui est effectivement le pilier de réattribution, et le pilier II qui fixe le taux minimum.
Jusqu'à présent tout était réglé par des conventions fiscales bilatérales qui reposaient sur la règle de « l'établissement stable », physique, avec des critères comme le nombre de salariés ou la surface occupée. Mais il y a de plus en plus une déconnexion entre le lieu des opérations et le lieu où est réalisé le profit, surtout dans le domaine de l'économie numérique. Cela montre que l'établissement physique n'est plus un critère pertinent. Il ne faut pas s'intéresser uniquement à la localisation de la propriété intellectuelle, mais aussi au lieu de résidence des consommateurs. Il s'agissait donc de déplacer l'imposition vers le « pays de marché », où est réalisé le chiffre d'affaires.
La difficulté c'est que cette nouvelle approche favorise les pays avec beaucoup de consommateurs, comme la France ou l'Allemagne. Mais l'application du pilier I fera perdre des recettes fiscales à certains plus petits pays, comme Malte ou le Danemark. Le Danemark a par exemple une très grande entreprise pharmaceutique, Novo Nordisk, qui réalise l'essentiel de son chiffre d'affaires aux États-Unis. Dans ces conditions, il sera difficile de lui faire accepter de payer en plus une taxe de 15 % sur les produits redistribués pour alimenter une nouvelle ressource propre.
Le processus de réattribution des bénéfices est-il bien déterminé ou ne faut-il pas un accord supplémentaire ?
Il existe déjà un accord politique – grâce à l'action de Donald Trump, qui est le premier président américain à ouvrir la discussion sur une réforme de la fiscalité internationale. C'est déjà un exploit. Les modalités techniques restent à définir, mais il est possible d'y parvenir. Il reste une incertitude politique sur la ratification de la convention multilatérale par le Congrès américain.
Le rapport Oxfam le confirme : les inégalités n'ont jamais été aussi élevées. En France, les cinq milliardaires les plus riches possèdent autant que 40 % des Français les plus pauvres. Pendant la crise sanitaire, les grandes entreprises ont profité de milliards d'aides publiques, sans payer davantage d'impôts. Avec la liberté de circulation des capitaux, ces entreprises contraignent les États à se livrer à une coûteuse concurrence fiscale. Ironiquement, l'Union européenne est la zone du monde où la concurrence fiscale est la plus forte ! Vous avez parlé de l'Irlande, où l'impôt sur les sociétés n'est que de 12,5 % et Apple n'a payé qu'un impôt sur les sociétés de 0,05 %. La liste européenne des paradis fiscaux (Irlande, Luxembourg) n'est assortie d'aucune sanction et les paradis fiscaux européens en sont exclus.
J'en viens à la réforme de la fiscalité internationale des entreprises. C'est à cause des États membres de l'Union européenne que le taux minimal d'impôt sur les sociétés a été réduit à 15 %, alors que la secrétaire d'État américaine au Trésor avait proposé un taux de 21 %. Vous avez parlé d'un plan « extrêmement volontariste », je ne crois pas que cette expression soit adéquate. Avec un taux de 21 %, la France aurait récupéré 26 milliards d'euros ; avec le taux retenu de 15 %, la France ne récupérerait que 4,3 milliards d'euros. Un taux d'imposition de 70 % – on n'en est pas là ! – couvrirait même presque 40 % du budget annuel de NextGenerationEU.
Il y a aussi un paradoxe, que je ne suis pas sûr de bien comprendre : en raison du seuil de rentabilité de 10 %, certaines des très grandes entreprises comme Amazon semblent être exclues du nouveau régime fiscal à cause du manque de segmentation de leurs activités.
En outre, l'accord de l'OCDE entraînerait une redistribution, mais uniquement entre les pays riches : le premier pilier profite aux pays ayant un grand nombre de consommateurs, et le deuxième pilier profite aux pays ayant beaucoup de sièges sociaux. Les pays en développement seraient donc exclus.
Cette réforme présente finalement de nombreuses difficultés. N'est-elle pas l'expression de la grande hypocrisie de nos États libéraux ? Selon vous, la réforme a-t-elle une chance d'être votée en Europe ainsi qu'aux États-Unis ?
Concernant la première question, nos travaux ont permis d'approfondir la question des garanties apportées par la réforme pour obtenir une répartition plus équitable des bénéfices et des droits d'imposition notamment concernant les entreprises multinationales les plus profitables. Cette réforme a le mérite de permettre que, par exemple, un groupe français ayant une filiale qui ne paye que 2 % d'impôt sur les sociétés dans un paradis fiscal devienne redevable à l'État français à hauteur de 13 %. La réforme permet donc une meilleure équité. De plus, l'instauration d'un impôt minimum mondial devrait générer environ 150 milliards de dollars de recettes fiscales supplémentaires au niveau mondial. Ces recettes pourront alimenter le budget des États et financer les politiques publiques. Cette réforme n'est pas parfaite, et elle aurait peut-être pu être plus ambitieuse mais elle a le mérite d'être parvenue à un consensus politique, bien que l'aspect technique demande encore du travail. Ce consensus a été adopté par 141 États, ce qui n'est pas négligeable.
Enfin, concernant votre seconde question, pour ce qui est de notre ambition en termes de calendrier, nous souhaitons aller le plus rapidement possible.
Effectivement, la réforme n'est pas parfaite mais pour en revenir à la première question, la réforme met un terme à la concurrence déloyale puisque l'État pourra prélever la différence entre les taux d'imposition. Un taux de 21 % aurait été préférable mais pour avoir l'accord de tous, un compromis était nécessaire. Il est préférable d'avoir moins de concurrence déloyale et un taux moins important plutôt que de ne pas avoir d'accord.
Concernant Amazon, l'entreprise a une profitabilité d'environ 35 % pour ses activités relatives au cloud. Ainsi, ils entrent dans les critères déterminés par la réforme. Pour le reste des activités et notamment la distribution, Amazon entre dans le piller B qui permet l'harmonisation des règles. Ainsi, cette activité sera toujours imposée.
Que pouvons-nous dire aux citoyens européens concernant ce dispositif et son apport ? Cette réforme représente un accord politique très important bien que certaines modalités doivent encore être déterminées. De plus, au-delà de l'augmentation de l'imposition au niveau européen, quels seront les bénéfices pour les États membres de l'Union ? La réforme pourrait-elle avoir des effets induits sur la relocalisation d'activités industrielles, ou encore de développement et de recherche ?
Nous pouvons dire aux citoyens européens que là où nous avons échoué à l'échelle européenne, nous avons réussi à l'échelle mondiale. Il est d'ailleurs préférable que cette réforme soit à l'échelle mondiale puisque la concurrence déloyale intervient partout dans le monde. Concernant la relocalisation, je ne pense pas que la réforme permettra de relocaliser des activités en tant que telles, même s'il serait intéressant d'étudier les effets de la réforme. La réforme aura un impact sur la réduction de la concurrence fiscale déloyale qui nous impacte au sein de l'Union européenne et de permettre que certaines entreprises américaines payent un peu plus d'impôts en France. Ainsi, la réforme pourrait éventuellement avoir pour conséquence de relocaliser certains impôts, puisque la réforme permet de réduire les incitations à partir vers des paradis fiscaux. Cependant, une des discussions difficiles est de savoir si nous devons taxer les pays dans lesquels les entreprises ayant une profitabilité supérieure à 10 % sont ou bien si nous devons taxer directement et de façon très forte les paradis fiscaux. La seconde option me paraît préférable. Dans ce contexte, il y aurait effectivement une relocalisation de certaines entreprises qui n'auraient plus d'intérêts à aller dans des pays comme l'Irlande ou le Luxembourg.
L'Irlande est un bon exemple car elle a réussi à attirer beaucoup d'entreprises industrielles. Ces entreprises n'avaient, a priori, pas vocation à aller automatiquement en Irlande. Ainsi, il serait très intéressant de prendre en compte les effets de cette réforme concernant cet aspect mais ces effets sont peut-être difficiles à estimer à ce stade.
Le but de cette réforme n'est pas initialement d'influencer les mouvements de capitaux mais surtout de réduire l'optimisation fiscale qui est inéquitable. Dans l'ancien système, les entreprises allaient vers les États qui sont des paradis fiscaux et permettaient donc aux entreprises de faire de l'optimisation fiscale. La réforme permet d'éviter cette forme d'optimisation fiscale tout en ne décourageant pas les investissements. Les capitaux iraient toujours dans les pays qui ont besoin de développer leurs activités économiques comme, par exemple la Hongrie.
Les études relatives à la relocalisation des capitaux sont très difficiles à réaliser et les États eux-mêmes n'arrivent pas à le faire. La réforme permettra peut-être d'obtenir plus d'informations.
Sur le rapport de , la commission a examiné les textes soumis à l'Assemblée nationale en application de l'article 88.4 de la Constitution.
Aucune observation n'ayant été formulée, la Commission a pris acte des textes suivants :
Budget de l'Union européenne
- Proposition de virement de crédits N° DEC 05/2022 à l'intérieur de la section III - Commission - du budget général pour l'exercice 2022 ( DEC 05/2022- E 16451).
- Proposition de Directive du Conseil relative à la mise en place d'un niveau minimum d'imposition mondial pour les groupes multinationaux dans l'Union ( COM(2021) 823 final- E 16458).
Commerce extérieur
- Décision du Conseil relative à la position à prendre au nom de l'Union européenne au sein des comités techniques de l'évaluation en douane et des règles d'origine institués sous les auspices de l'Organisation mondiale des douanes, en ce qui concerne respectivement l'adoption d'avis consultatifs, de commentaires, de notes explicatives, d'études de cas, d'études et d'actes similaires concernant la valeur en douane des marchandises importées au titre de l'accord sur la mise en œuvre de l'article VII de l'accord général sur les tarifs douaniers et le commerce de 1994, et l'adoption d'avis consultatifs, de renseignements, d'avis et d'actes similaires sur la détermination de l'origine des marchandises au titre de l'accord sur les règles d'origine ( COM(2022) 29 final - E 16460).
Concurrence
- Règlement du Parlement européen et du Conseil modifiant le règlement (UE) n° 1025/2012 en ce qui concerne les décisions des organisations européennes de normalisation relatives aux normes européennes et aux publications en matière de normalisation européenne ( COM(2022) 32 final - E 16432).
Espace de liberté de sécurité et de justice
- Décision du Conseil autorisant les États membres à signer, dans l'intérêt de l'Union européenne, le deuxième protocole additionnel à la convention sur la cybercriminalité relatif au renforcement de la coopération et de la divulgation de preuves électroniques ( COM(2021) 718 final - E 16278).
- Décision du Conseil concernant les activités de communication de l'Union à l'appui de la mise en œuvre du traité sur le commerce des armes ( 13813/21- E 16318).
- Accord entre l'Union européenne et la République du Pérou établissant un cadre pour la participation de la République du Pérou à des opérations de gestion de crises menées par l'Union européenne ( 14385/21 LIMITE- E 16320).
- Décision du Conseil modifiant la décision 2014/512/PESC concernant des mesures restrictives eu égard aux actions de la Russie déstabilisant la situation en Ukraine ( 14987/21 LIMITE- E 16321).
- Proposition de règlement du parlement européen et du conseil relatif à la protection de l'Union et de ses États membres contre la coercition économique exercée par des pays tiers ( COM(2021) 775 final- E 16378).
Fiscalité
- Directive du Conseil établissant des règles pour empêcher l'utilisation abusive d'entités écrans à des fins fiscales et modifiant la directive 2011/16/UE ( COM(2021) 565 final - E 16456).
- Directive du Conseil modifiant la directive 2006/112/CE en ce qui concerne la prolongation de la période d'application du mécanisme d'autoliquidation facultatif aux livraisons de certains biens et prestations de certains services présentant un risque de fraude et du mécanisme de réaction rapide contre la fraude à la TVA ( COM(2022) 39 final – E 16468).
Institutions
- Décision du Conseil portant désignation des membres du comité prévu à l'article 255 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne ( 14102/21 LIMITE- E 16267).
- Décision du Conseil portant titularisation d'un fonctionnaire nommé à un poste de directeur général au secrétariat général du Conseil de l'Union européenne ( 14113/21 LIMITE- E 16268).
- Décision du Conseil portant nomination d'un membre et de deux suppléants du Comité des régions, proposés par la République de Finlande ( 14186/21- E 16273).
- Comité consultatif pour la coordination des systèmes de sécurité sociale Nomination de M. Tilen ZUPAN, membre titulaire pour la Slovénie, en remplacement de Mme Nuša MAJHENC, démissionnaire ( 14323/21- E 16275).
- Décision du Conseil portant nomination du suppléant du président de la chambre de recours de l'Office communautaire des variétés végétales ( 14438/21- E 16298).
- Décision du Conseil relative à la position à prendre, au nom de l'Union européenne, au sein du Comité mixte institué par l'accord EEE, en ce qui concerne la modification du protocole 4 sur les règles d'origine dudit accord ( COM(2021) 772 final – E 16310).
- Comité consultatif pour la sécurité et la santé sur le lieu du travail Nomination de M. Sebastian HAUS-RYBICKI, membre suppléant pour l'Allemagne, en remplacement de Mme Ellen ZWINK, démissionnaire ( 14052/21- E 16313).
- Conseil d'administration de la Fondation européenne pour l'amélioration des conditions de vie et de travail Nomination de M. Kevin DALY, membre pour l'Irlande, en remplacement de Mme Fiona WARD, démissionnaire ( 14056/21- E 16314).
- Décision du Conseil modifiant le règlement intérieur du Conseil ( 15087/21- E 16322).
- Décision du conseil portant nomination de quatre membres du Comité des régions, proposés par la République italienne ( 15000/21- E 16328).
- Conseil d'administration de l'Agence européenne pour la sécurité et la santé au travail Nomination de M. Sebastian HAUS-RYBICKI, membre suppléant pour l'Allemagne, en remplacement de Mme Ellen ZWINK, démissionnaire ( 5065/22- E 16347).
- Décision du Conseil portant nomination d'un membre du Comité des régions, proposé par la Hongrie ( 5061/22- E 16353).
- Comité consultatif pour la sécurité et la santé sur le lieu du travail Nomination de M. Sebastian SCHNEIDER, membre pour l'Allemagne, en remplacement de Mme Sonja KÖNIG, démissionnaire ( 5126/22- E 16356).
- Conseil d'administration de l'Agence européenne pour la sécurité et la santé au travail Nomination de M. Sebastian SCHNEIDER, membre pour l'Allemagne, en remplacement de Mme Sonja KÖNIG, démissionnaire ( 5129/22- E 16357).
- Comité consultatif pour la libre circulation des travailleurs Nomination de M. Maximilian BUCHLEITNER, membre titulaire pour l'Autriche, en remplacement de Mme Margit KREUZHUBER, démissionnaire ( 5270/22- E 16358).
- Conseil d'administration du Centre européen pour le développement de la formation professionnelle Nomination de M. Gilles WALERS, suppléant pour le Luxembourg, en remplacement de M. Daniel SCHROEDER, démissionnaire ( 5338/22- E 16359).
- Conseil d'administration du Centre européen pour le développement de la formation professionnelle Nomination de M. Marc GROSS, membre pour le Luxembourg, en remplacement de M. Charles BASSING, démissionnaire ( 5336/22- E 16375).
- Comité consultatif pour la sécurité et la santé sur le lieu du travail Nomination de Mme Charlotte REIFF, membre pour l'Autriche, en remplacement de Mme Ingrid REIFINGER, démissionnaire ( 5401/22- E 16376).
- Décision du Conseil portant désignation de deux membres et de trois suppléants du conseil d'administration de l'agence de l'Union européenne pour la coopération des régulateurs de l'énergie ( 14721/21- E 16377).
- Règlement (UE) de la commission rectifiant certaines versions linguistiques de l'annexe I du règlement (CE) n° 2195/2002 du Parlement européen et du Conseil relatif au vocabulaire commun pour les marchés publics (CPV) ( D075760/1- E 16418).
- Décision du Conseil portant nomination d'un membre du Comité des régions, proposé par la République fédérale d'Allemagne ( 5810/22- E 16427).
Marché intérieur, biens et services
- Décision du Conseil sur la position à prendre au nom de l'Union européenne au sein du Forum mondial de l'harmonisation des règlements concernant les véhicules de la Commission économique pour l'Europe des Nations unies en ce qui concerne les propositions de modifications à apporter aux règlements ONU nos 0, 9, 10, 13, 39, 46, 51, 53, 55, 63, 78, 79, 90, 107, 108, 109, 116, 117, 121, 125, 141, 142, 148, 149, 152, 154, 160, 161, 162 et 163, la proposition de nouveau règlement ONU sur les pneumatiques à clous, la proposition de nouveau règlement technique mondial (RTM) ONU sur la durabilité des batteries des véhicules électriques, la proposition de modifications à apporter à la résolution d'ensemble R.E.5, la proposition d'autorisation d'élaborer un amendement 4 au RTM ONU nº 3 et la proposition d'autorisation d'élaborer un nouveau RTM ONU sur les émissions de particules des freins ( COM(2022) 36 final - E 16466).
Politique économique, budgétaire et monétaire
- Décision du Parlement européen et du Conseil portant attribution d'une assistance macrofinancière à l'Ukraine ( COM(2022) 37 final - E 16467).
- Proposition de Décision d'exécution du conseil modifiant la décision d'exécution 2013/54/UE en ce qui concerne l'autorisation accordée à la République de Slovénie de continuer à appliquer la mesure particulière dérogatoire à l'article 287 de la directive 2006/112/CE relative au système commun de taxe sur la valeur ajoutée ( COM(2022) 40 final- E 16469).
- Proposition de Règlement du conseil modifiant le règlement (UE) 2021/2085 établissant les entreprises communes dans le cadre d'Horizon Europe en ce qui concerne l'entreprise commune "Semiconducteurs" ( COM(2022) 47 final- E 16471).
Politique étrangère et de sécurité commune(PESC)
- Décision du Conseil modifiant la décision 2011/101/PESC concernant des mesures restrictives en raison de la situation au Zimbabwe ( 5640/22 LIMITE- E 16441).
- Règlement du Conseil modifiant le règlement (CE) nº 314/2004 concernant des mesures restrictives en raison de la situation au Zimbabwe ( 5642/22 LIMITE- E 16442).
- Décision du Conseil modifiant la décision (PESC) 2016/1693 concernant des mesures restrictives à l'encontre de l'EIIL (Daech) et d'Al-Qaida et de personnes, groupes, entreprises et entités associés ( 5675/22 LIMITE- E 16443).
- Règlement d'exécution du Conseil mettant en œuvre le règlement (UE) 2016/1686 instituant des mesures restrictives supplémentaires à l'encontre de l'EIIL (Daech) et d'Al‑Qaida ainsi que des personnes physiques et morales, des entités ou des organismes qui leur sont liés ( 5677/22 LIMITE- E 16444).
- Décision du Conseil modifiant la décision (PESC) 2016/1693 concernant des mesures restrictives à l'encontre de l'EIIL (Daech) et d'Al-Qaida et de personnes, groupes, entreprises et entités associés Règlement d'exécution du Conseil mettant en œuvre le règlement (UE) 2016/1686 instituant des mesures restrictives supplémentaires à l'encontre de l'EIIL (Daech) et d'Al-Qaida ainsi que des personnes physiques et morales, des entités ou des organismes qui leur sont liés ( 5679/22- E 16445).
- Décision du Conseil modifiant la décision 2014/145/PESC concernant des mesures restrictives eu égard aux actions compromettant ou menaçant l'intégrité territoriale, la souveraineté et l'indépendance de l'Ukraine ( 5713/22 LIMITE- E 16446).
- Règlement d'exécution du Conseil mettant en œuvre le règlement (UE) n° 269/2014 concernant des mesures restrictives eu égard aux actions compromettant ou menaçant l'intégrité territoriale, la souveraineté et l'indépendance de l'Ukraine ( 5715/22 LIMITE- E 16447).
- RÈGLEMENT DU CONSEIL modifiant le règlement (CE) n° 765/2006 concernant des mesures restrictives à l'encontre de la Biélorussie ( 14506/21 LIMITE- E 16448).
- Décision du Conseil modifiant la décision 2012/642/PESC concernant des mesures restrictives en raison de la situation en Biélorussie ( 14508/21 LIMITE- E 16449).
- Décision du Conseil modifiant la décision (PESC) 2018/907 prorogeant le mandat du représentant spécial de l'Union européenne pour le Caucase du Sud et la crise en Géorgie ( 14856/21 LIMITE- E 16450).
Services financiers
- Décision du Conseil relative à la position à prendre, au nom de l'Union européenne, au sein du Centre international pour le règlement des différends relatifs aux investissements (CIRDI) ( COM(2022) 38 final - E 16461).
La Commission a également pris acte de la levée tacite de la réserve parlementaire, du fait du calendrier des travaux du Conseil, pour les textes suivants :
Politique étrangère et de sécurité commune(PESC)
- Décision d'exécution du Conseil mettant en œuvre la décision (PESC) 2015/1333 concernant des mesures restrictives en raison de la situation en Libye ( 5902/22 ADD1 LIMITE- E 16437).
- Règlement d'exécution du Conseil mettant en œuvre l'article 21, paragraphe 5, du règlement (UE) 2016/44 concernant des mesures restrictives en raison de la situation en Libye ( 5904/22 LIMITE- E 16438).
- Décision d'exécution du Conseil mettant en œuvre la décision (PESC) 2015/1333 concernant des mesures restrictives en raison de la situation en Libye ( 5902/22 LIMITE- E 16438).
- Règlement d'exécution du Conseil mettant en œuvre l'article 21, paragraphe 5, du règlement (UE) 2016/44 concernant des mesures restrictives en raison de la situation en Libye ( 5904/22 ADD 1 LIMITE- E 16439).
- Décision d'exécution et règlement d'exécution du Conseil concernant des mesures restrictives en raison de la situation en Libye ( 5905/22 LIMITE- E 16440).
- Décision d'exécution du Conseil mettant en œuvre la décision 2013/255/PESC concernant des mesures restrictives à l'encontre de la Syrie ( 10411/21 LIMITE- E 16473).
- Règlement d'exécution du Conseil mettant en œuvre le règlement (UE) n° 36/2012 concernant des mesures restrictives en raison de la situation en Syrie ( 10413/21 LIMITE- E 16474).
- Décision d'exécution et règlement d'exécution du Conseil concernant des mesures restrictives en raison de la situation en Syrie - retrait de la liste ( 10416/21 LIMITE- E 16475).
- Décision du Conseil modifiant la décision 2012/642/PESC concernant des mesures restrictives en raison de la situation en Biélorussie ( 5976/22 LIMITE- E 16476).
- Règlement d'exécution du Conseil mettant en œuvre l'article 8 bis du règlement (CE) n° 765/2006 concernant des mesures restrictives en raison de la situation en Biélorussie ( 5978/22 LIMITE- E 16477).
- Décision et règlement d'exécution du Conseil concernant des mesures restrictives en raison de la situation en Biélorussie ( 5979/22 LIMITE- E 16478).
- Décision d'exécution du Conseil mettant en œuvre la décision 2013/255/PESC concernant des mesures restrictives à l'encontre de la Syrie ( 6111/22 LIMITE- E 16479).
- Règlement d'exécution du Conseil mettant en œuvre le règlement (UE) n° 36/2012 concernant des mesures restrictives en raison de la situation en Syrie ( 6113/22 LIMITE- E 16480).
- Décision d'exécution et règlement d'exécution du Conseil concernant des mesures restrictives à l'encontre de la Syrie ( 6114/22 LIMITE- E 16481).
Sur le rapport de la Présidente Sabine Thillaye, la Commission a déclaré conforme au principe de subsidiarité les textes suivants transmis à l'Assemblée nationale en application de l'article 88-6 de la Constitution :
Budget de l'Union européenne
- Proposition de Directive du Conseil relative à la mise en place d'un niveau minimum d'imposition mondial pour les groupes multinationaux dans l'Union ( COM(2021) 823 final- E 16458).
Concurrence
- Règlement du Parlement européen et du Conseil modifiant le règlement (UE) n° 1025/2012 en ce qui concerne les décisions des organisations européennes de normalisation relatives aux normes européennes et aux publications en matière de normalisation européenne ( COM(2022) 32 final - E 16432).
Environnement dont santé environnementale
- Directive du Parlement européen et du Conseil concernant des règles communes pour les marchés intérieurs des gaz naturel et renouvelable et de l'hydrogène ( COM(2021) 803 final - E 16457).
Fiscalité
- Directive du Conseil établissant des règles pour empêcher l'utilisation abusive d'entités écrans à des fins fiscales et modifiant la directive 2011/16/UE ( COM(2021) 565 final - E 16456).
- Directive du Conseil modifiant la directive 2006/112/CE en ce qui concerne la prolongation de la période d'application du mécanisme d'autoliquidation facultatif aux livraisons de certains biens et prestations de certains services présentant un risque de fraude et du mécanisme de réaction rapide contre la fraude à la TVA ( COM(2022) 39 final – E 16468).
Politique économique, budgétaire et monétaire
- Décision du Parlement européen et du Conseil portant attribution d'une assistance macrofinancière à l'Ukraine ( COM(2022) 37 final - E 16467).
Transports, politique spatiale
- Règlement du Parlement européen et du Conseil modifiant le règlement (UE) 2016/399 concernant un code de l'Union relatif au régime de franchissement des frontières par les personnes ( COM(2021) 891 final - E 16459).
La séance est levée à 16 heures 45.
Membres présents ou excusés
Présents. - M. André Chassaigne, Mme Marguerite Deprez-Audebert, Mme Frédérique Dumas, Mme Valérie Gomez-Bassac, Mme Marietta Karamanli, Mme Nicole Le Peih, M. Thierry Michels, M. Adrien Morenas, M. Xavier Paluszkiewicz, Mme Liliana Tanguy, Mme Sabine Thillaye
Excusés. - M. Philippe Benassaya, M. Vincent Bru
Assistait également à la réunion. - M. Julien Aubert