Intervention de André Chassaigne

Réunion du mercredi 23 février 2022 à 14h30
Commission des affaires européennes

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaAndré Chassaigne :

Le rapport Oxfam le confirme : les inégalités n'ont jamais été aussi élevées. En France, les cinq milliardaires les plus riches possèdent autant que 40 % des Français les plus pauvres. Pendant la crise sanitaire, les grandes entreprises ont profité de milliards d'aides publiques, sans payer davantage d'impôts. Avec la liberté de circulation des capitaux, ces entreprises contraignent les États à se livrer à une coûteuse concurrence fiscale. Ironiquement, l'Union européenne est la zone du monde où la concurrence fiscale est la plus forte ! Vous avez parlé de l'Irlande, où l'impôt sur les sociétés n'est que de 12,5 % et Apple n'a payé qu'un impôt sur les sociétés de 0,05 %. La liste européenne des paradis fiscaux (Irlande, Luxembourg) n'est assortie d'aucune sanction et les paradis fiscaux européens en sont exclus.

J'en viens à la réforme de la fiscalité internationale des entreprises. C'est à cause des États membres de l'Union européenne que le taux minimal d'impôt sur les sociétés a été réduit à 15 %, alors que la secrétaire d'État américaine au Trésor avait proposé un taux de 21 %. Vous avez parlé d'un plan « extrêmement volontariste », je ne crois pas que cette expression soit adéquate. Avec un taux de 21 %, la France aurait récupéré 26 milliards d'euros ; avec le taux retenu de 15 %, la France ne récupérerait que 4,3 milliards d'euros. Un taux d'imposition de 70 % – on n'en est pas là ! – couvrirait même presque 40 % du budget annuel de NextGenerationEU.

Il y a aussi un paradoxe, que je ne suis pas sûr de bien comprendre : en raison du seuil de rentabilité de 10 %, certaines des très grandes entreprises comme Amazon semblent être exclues du nouveau régime fiscal à cause du manque de segmentation de leurs activités.

En outre, l'accord de l'OCDE entraînerait une redistribution, mais uniquement entre les pays riches : le premier pilier profite aux pays ayant un grand nombre de consommateurs, et le deuxième pilier profite aux pays ayant beaucoup de sièges sociaux. Les pays en développement seraient donc exclus.

Cette réforme présente finalement de nombreuses difficultés. N'est-elle pas l'expression de la grande hypocrisie de nos États libéraux ? Selon vous, la réforme a-t-elle une chance d'être votée en Europe ainsi qu'aux États-Unis ?

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