Le problème, c'est la fausse indépendance, lot commun des travailleurs employés par les plateformes. De façon parfaitement concordante, d'ailleurs, partout en Europe et même pour partie aux États-Unis, toutes les cours de justice saisies adoptent la même position : elles reconnaissent le caractère factice de cette indépendance, constatent le lien de subordination, et requalifient les contrats de travail – parfois, dans certains pays, en masse.
Ce que vous proposez, c'est, comme l'écrit de façon très nette Mme la rapporteure, de « réduire le faisceau d'indices susceptibles de révéler l'existence d'un lien de subordination » ; vous rendez ainsi plus difficile la requalification par le juge.
Instaurer une présomption de salariat ne revient pas à considérer automatiquement tous les employés des plateformes comme des salariés : ils doivent toujours mener une démarche positive, devant un tribunal. Si quelqu'un veut continuer à jouir d'une indépendance fictive et renoncer à faire valoir son droit, il en a la possibilité ! Mais aujourd'hui le rapport de force est tellement faussé que la présomption de salariat et l'inversion de la charge de la preuve permettraient de rétablir un équilibre. Vraisemblablement, beaucoup de ces travailleurs décideraient de mieux protéger leurs droits et leur activité professionnelle, afin de pouvoir vivre dignement – ce que ne propose pas du tout votre texte.
Quand le lien de subordination aura été rompu par quelques améliorations, il n'y aura plus rien à négocier ! Vous aurez créé, de fait, un tiers statut qui apparaît déjà dans les modalités du dialogue social, qui n'existe nulle part, qui n'est qu'une invention de cette ordonnance.