Je suis très heureuse d'évoquer, aux côtés de ma corapporteure Michèle Peyron, un sujet qui me tient profondément à cœur : la protection de l'enfance. Tout d'abord, je vous remercie, monsieur le secrétaire d'État, de présenter ce projet de loi si attendu. Ces dernières années, Gouvernement et Parlement se sont saisis des sujets relatifs à ce domaine. Parmi les différents travaux, je veux citer le rapport de la riche mission d'information présidée par Alain Ramadier, dont j'étais membre. Présenté par Perrine Goulet, il formulait des propositions qui ont déjà permis d'enrichir ce texte lors de son examen en commission.
Je remercie les éducateurs, les assistants familiaux, les cadres de l'aide sociale à l'enfance et les juges, et je leur exprime toute mon admiration. J'ai rencontré des personnes engagées, passionnées par leur travail, qui s'interrogent, cherchent et inventent des solutions.
Je m'adresse enfin directement à ceux qui sont au cœur de ce texte – à vous, chers enfants. En tant que mère et qu'ancienne enseignante en réseau d'éducation prioritaire (REP), c'est avec humilité que j'ai voulu prendre ma part, en tant que rapporteure, pour réparer les inégalités de destin. Tout au long de nos travaux, j'ai ainsi été guidée par deux boussoles : l'intérêt supérieur de l'enfant et la nécessité d'adopter une démarche pragmatique, dans un domaine où nous ne pouvons avancer qu'avec l'ensemble des partenaires, en conciliant toujours souci de l'égalité dans le territoire et respect de la compétence décentralisée.
Sans céder à la tentation de la surenchère, il faut aussi légiférer pour déverrouiller une situation bloquée, offrir aux acteurs de nouvelles possibilités d'agir. En commission, nous avons adopté des articles importants du projet de loi initial pour faire avancer la cause des enfants au quotidien, qu'il s'agisse de les confier à leurs proches en priorité – article 1er ; de surmonter des blocages liés aux questions d'autorité parentale – article 2 ; de définir un cadre concernant les lieux susceptibles d'héberger les enfants protégés – article 3 ; d'assurer un meilleur contrôle des antécédents judiciaires des professionnels – article 4 – ou une véritable stratégie des établissements et des services de l'aide sociale à l'enfance en matière de prévention des violences – article 5 ; ou de créer un référentiel national d'évaluation des situations de risque pour la protection de l'enfance – article 6.
Je suis fière des progrès accomplis pendant l'examen en commission. Ainsi, nous avons prévu que l'enfant sera systématiquement entendu lorsqu'un accueil institutionnel sera envisagé. Le recours exceptionnel à l'hôtel ne pourra pas excéder deux mois et sera subordonné à l'existence de garanties d'encadrement suffisantes, lesquelles seront définies par voie réglementaire. Un référent indépendant, interlocuteur en matière de maltraitance, sera également institué.
Nous avons aussi collectivement œuvré pour améliorer l'organisation de la justice autour de ces mineurs. Le Gouvernement a avancé deux grands principes : le recours à la collégialité quand elle est justifiée, à l'article 7, et la meilleure information du juge dans des moments aussi cruciaux que la modification du lieu de placement, à l'article 8. La commission a précisé les modalités du recours à la collégialité et renforcé les obligations d'information du juge.
Prendre soin de ceux, surtout de celles, qui s'occupent de ces enfants au quotidien permet de faire avancer leur cause. Ainsi, le texte revalorise le statut et la rémunération des assistantes familiales. Je leur adresse une pensée solennelle depuis cette tribune. Nous connaissons non seulement l'importance mais aussi les difficultés des tâches qu'elles assument au quotidien, vingt-quatre heures sur vingt-quatre. Ce beau métier mérite d'être davantage valorisé et connu.
Deux articles du projet de loi initial concernent les mineurs non accompagnés. Ils visent à mieux soutenir les départements dans leur évaluation et à assurer la prise en charge par la protection de l'enfance. En commission, à mon initiative et à celle de plusieurs parlementaires, nous avons adopté un article 14 bis très important à mes yeux. Il vise à interdire que la minorité soit réévaluée par certains départements, dans lesquels les enfants sont orientés après avoir été reconnus mineurs dans un autre département. De nombreuses associations dénoncent ces pratiques délétères pour des jeunes qui ont déjà tant enduré.
Je souhaite que ce projet de loi constitue une nouvelle étape de la construction d'une protection de l'enfance qui, pour se perfectionner, doit évoluer sur les plans législatif et réglementaire. Ce texte, après celui de 2016, trace un chemin : il nous appartiendra collectivement – État, parlementaires, départements, professionnels de terrain – de nous assurer qu'il soit suivi.