Il est toujours satisfaisant de voir un texte arriver à son terme après avoir été autant amélioré par rapport à sa version initiale. Le Parlement a œuvré avec force pour faire avancer beaucoup de choses, dont la programmation. Grâce au Sénat, celle-ci est devenue plus concrète, contrairement au vœu pieux inscrit dans la version de l'Assemblée nationale. Cette amélioration démontre les faiblesses d'un exécutif qui croit tout maîtriser et fait trop souvent abstraction des professionnels du secteur concerné, un exécutif qui entend sans écouter et qui consulte sans prendre en compte. Heureusement, le Parlement, lui, est plus à l'écoute des organisations de solidarité internationale qui ont interpellé les parlementaires ; leurs inquiétudes ont été entendues et nos débats y ont fait écho.
Ces inquiétudes, quelles étaient-elles ? Que l'État fasse une loi de programmation sans rien programmer du tout et qu'il propose des cibles à atteindre désincarnées sans prendre en compte les problèmes financiers qui en découleraient. Côté programmation, les choses ont été améliorées par le Sénat, mais la commission mixte paritaire a rétrogradé : pour les députés communistes et pour l'ensemble des députés du groupe GDR, non seulement il fallait aller jusqu'à 2025, mais aussi maintenir une projection en chiffres absolus. La commission mixte paritaire n'aurait pas dû revenir sur cette avancée. Alors qu'on a pris bien soin d'inscrire des chiffres précis dans la loi programmation militaire, tout se limite ici à de vagues cibles en pourcentage au-delà de 2022. Pourtant, et nous l'avons vu cette année, si le PIB chute à dépense constante, les pourcentages gonflent, c'est mathématique. Cet artifice est injuste, il n'aide pas ceux qui meurent de faim, pas ceux qui ont besoin d'aide sanitaire ou éducative. Cela constitue la première ligne rouge que nous avions définie dès la commission et qui nous empêchera de voter pour ce texte. Même s'il faut saluer le fait que la programmation de la mission "Aide publique au développement " aille maintenant jusqu'en 2025 et que la cible des 0,7 % soit fixée à cette échéance, ce n'est pas suffisant du tout.
Deuxième ligne rouge : la taxe sur les transactions financières. Le Sénat avait renforcé cette taxe pour financer l'aide publique au développement, la part de ses recettes allouée au fonds de solidarité pour le développement étant relevée à 60 %, avec un seuil de près de 1 milliard d'euros. Mais cette disposition n'a pas été maintenue, et c'est fort dommage car l'idée de faire profiter la solidarité internationale de la hausse continue des recettes de la taxe sur les transactions financières, instrument créé à cette fin, était la bonne. Avec ce retour au statu quo, c'est à nouveau le budget général qui bénéficiera de cette croissance, ce que nous regrettons.
Troisième ligne rouge : l'intention de la France derrière la notion d'aide publique au développement. Jean-Yves Le Drian n'est pas revenu sur ses propos indiquant que « l'aide publique au développement est un outil de puissance au service de la France ». Cette vision est totalement opposée à la nôtre. Je le redis ici : les députés communistes voient l'aide publique au développement comme une péréquation mondiale permettant de réduire les inégalités, et non comme un moyen d'avancer ses pions pour rendre certains États plus dépendants encore à notre égard.
Le quatrième sujet, c'est bien évidemment la valeur juridique du cadre de partenariat global, le CPG, qui n'est toujours pas à la hauteur. L'asymétrie entre les douze articles et le droit mou que constitue ce rapport annexé n'est pas souhaitable. Quel est son objectif réel s'il n'est là que pour afficher de belles ambitions ?
Cinquième sujet : l'article concernant le 1 % transport permet aux autorités organisatrices de transports de mener des projets de coopération internationale. Je regrette profondément que depuis février, rien n'ait été fait par l'exécutif pour permettre aux collectivités qui ont mis en place le transport en commun gratuit d'appliquer ce dispositif. Comme je l'ai déjà dit, si le 1 % transport ne peut être utilisé dans le cadre du versement transport, les autorités appliquant la gratuité des transports en commun seront empêchées de recourir à ce beau dispositif. On nous avait promis que le ministère des affaires étrangères et celui des transports travailleraient ensemble sur ce sujet : que s'est-il passé ? Ni le Gouvernement ni la commission ne l'ont évoqué dans leurs interventions.
Voilà cinq éléments qui empêcheront les députés communistes de voter pour ce texte. Il a évidemment le mérite de prévoir un grand nombre de mesures positives,…