La séance est ouverte.
La séance est ouverte à quinze heures.
Monsieur le Premier ministre, la semaine dernière, répondant à votre courrier, je vous avais indiqué que la réussite de notre politique de lutte contre le covid reposait sur trois exigences : l'anticipation, la concertation, la transparence. Au vu des éléments scientifiques, il est crucial d'accélérer la vaccination des Français. Compte tenu de l'urgence, l'imposer à certains publics peut-être une solution, mais elle doit s'accompagner de pédagogie. Le Président de la République a fait un autre choix : celui de décider seul, une fois encore.
De plus, il a choisi de mêler dans son intervention la problématique sanitaire et sa précampagne électorale.
Protestations sur plusieurs bancs du groupe LaREM.
C'est, je le crois, une faute, car dans la crise, il vous revenait de rassembler et non de diviser. Vous n'avez pas su ni mobiliser, ni inciter ; vous avez créé de la défiance et désormais vous devez agir par la contrainte.
Notre préoccupation concerne désormais les conditions de mise en œuvre de ces annonces. Les soignants et tous ceux qui sont en contact avec les personnes fragiles qui ne seront pas vaccinés au 15 septembre seront-ils mis à pied, en congé sans solde ? Souvenons-nous de leur engagement sans faille depuis mars 2020. Comment nous assurer du bon fonctionnement des hôpitaux et des EHPAD alors que nous manquons déjà de personnel ?
Depuis hier, des entrepreneurs et des salariés me disent leurs craintes et leurs questionnements : comment les restaurateurs vont-ils faire ? Les centres commerciaux, les lieux de culture et de tourisme ? Les employeurs auront-ils accès aux données de vaccination de leurs salariés ? Devront-ils leur interdire de venir au travail sans passe sanitaire ? Avez-vous pensé aux désordres que cela pourrait causer dans ces entreprises ? Nous apprenons que des ministres recevront cet après-midi les représentants des secteurs concernés : pourquoi ne pas les avoir associés à ces décisions ?
Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM.
Monsieur le président Bertrand Pancher, pardonnez-moi de vous le dire, mais la formulation de votre question m'étonne un peu…
Oui, elle m'étonne, et à double titre. Sur le fond, d'abord : la France, l'Europe, le monde sont malheureusement confrontés à une résurgence de la crise sanitaire du fait du variant delta, que nous constatons toutes et tous et qu'il est précisément de notre devoir d'anticiper. La vitesse de propagation de ce variant est fulgurante dans un certain nombre de départements, et nous voyons ce qui se passe dans d'autres pays, certains très proches. Comme toujours, il était donc de la responsabilité des pouvoirs publics d'agir. Vous nous demandez pourquoi nous agissons : nous agissons parce que la situation le commande.
Vous m'interrogez ensuite – second motif de mon étonnement – sur la méthode, accusant le Président de la République, qui a pris ses responsabilités – c'est bien le moins –, d'agir seul. Je voudrais dire devant cette assemblée qu'au contraire, le Gouvernement a conduit dans la période récente des concertations extrêmement approfondies,…
…y compris avec votre groupe – je vous remercie, au reste, de la réponse écrite que vous avez bien voulu nous adresser –, avec les partenaires sociaux, les associations d'élus, les secteurs professionnels.
Bien sûr, tout le monde n'a pas été d'accord, et c'est heureux en démocratie. Quoi qu'il en soit, s'agissant du passe sanitaire, sujet de votre question sur lequel nous reviendrons, je constate, à l'inverse de ce que vous prétendez, que les retours qui me sont faits et, au-delà, l'état de l'opinion publique par rapport à cet impératif de vaccination…
…rappelé par le Président de la République, montrent plutôt une adhésion et un consensus.
Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM.
Il en va de même pour la vaccination obligatoire des soignants et assimilés, décision que nous ne regrettons pas. Certains nous reprochent de ne pas l'avoir prise assez tôt, d'autres nous disent qu'il ne fallait pas la prendre. Il faut à mon sens que les choses mûrissent et évoluent. Nous avons très longtemps privilégié l'incitation – et nous continuons de le faire – parce que nous avons toujours cru dans le sens des responsabilités de nos concitoyens. Nous allons d'ailleurs accorder un délai, ce qu'a rappelé le Président de la République lors de son intervention hier soir. Cependant, nous devons, à un moment donné, prendre nos responsabilités pour que nous retrouvions tous non pas des contraintes supplémentaires mais, au contraire, de la sécurité et de la liberté !
Applaudissements sur les bancs des groupes LaREM, Dem et Agir ens.
Monsieur le Premier ministre, le groupe UDI-I a toujours eu à cœur de formuler nombre de propositions constructives pour anticiper la stratégie vaccinale et la gestion de cette terrible épidémie. En décembre 2020 déjà, nous suggérions d'anticiper les modalités de mise en place d'un passeport sanitaire sur la base du modèle israélien, synonyme de liberté retrouvée pour les personnes vaccinées – à l'époque sous vos critiques et quolibets.
Vous nous parliez de discrimination, maintenant vous y venez : mieux vaut tard que jamais. Dès le mois de mai, nous vous demandions d'autoriser la vaccination sur les lieux de vacances : vous l'avez fait, certes, mais seulement début juillet.
Soyons clairs, monsieur le Premier ministre : nous soutenons les mesures annoncées hier par le Président de la République…
…mais nous regrettons le retard accumulé. Quand je vois sur les réseaux sociaux, à quelques jours de la commémoration de la rafle du Vél' d'Hiv', des comparaisons immondes entre le passe sanitaire et la Shoah, je suis révolté. L'étoile jaune était un passeport pour la mort ; le passe sanitaire est un passeport pour la vie.
Applaudissements sur les bancs des groupes UDI-I, LaREM, Dem, Agir ens et LT.
Nous voulons aujourd'hui appeler votre attention sur deux points essentiels, en espérant que cette fois, nos alertes seront entendues. Premier point : la vaccination du personnel soignant – nous la demandions depuis des semaines, elle est indispensable, elle existe maintenant, mais l'école aussi doit être protégée : quelle logique y a-t-il à inciter à la vaccination des enfants et à ne pas obliger le personnel enseignant, qui les encadre, à le faire ?
M. Jean-Christophe Lagarde applaudit.
Deuxièmement, bon nombre des 1,5 million de Français vivant hors de l'Union européenne sont vaccinés avec les mêmes vaccins que nous mais n'ont toujours pas le droit au passe sanitaire européen. Qu'ils doivent se soumettre à des tests PCR pour rentrer, soit, mais ils devront systématiquement se faire tester pour aller au restaurant, au cinéma, au théâtre et ailleurs : c'est totalement absurde ! Depuis le 1er juin, j'ai alerté le ministère de la santé à deux reprises sur cette rupture d'égalité devant la loi, sans obtenir de réponse. Monsieur le Premier ministre, comment comptez-vous corriger cette injustice ?
Applaudissements sur les bancs du groupe UDI-I.
Avant toute chose, nous nous félicitons de recevoir le soutien du groupe UDI-I à l'Assemblée nationale en faveur de l'ensemble des mesures qu'a annoncées le Président de la République et qu'il nous revient désormais de mettre en place pour la protection des Français.
Vous avez raison de souligner que le passe sanitaire est un passe pour la liberté. Au fond, j'ai envie de dire aux Français que s'ils sont vaccinés, leur vie ne changera pas puisque ce passe sanitaire nous permettra, si la situation sanitaire devait se dégrader, de ne plus confiner le pays. En tout cas, c'est ce que nous souhaitons tous, et nous nous donnons tous les moyens, à un stade précoce de départ épidémique, d'une nouvelle vague potentielle, pour préserver l'ensemble des activités économiques, culturelles, sportives, sociales et éducatives pendant les semaines et les mois à venir.
On peut ne pas être d'accord avec la vaccination, et on peut avoir peur. Nous sommes aussi là pour lever les craintes et les professionnels de santé sont engagés à nos côtés pour expliquer pourquoi le vaccin protège, pourquoi il est un outil de prévention et pourquoi il ne sera jamais – j'insiste : jamais – une punition ni une sanction, bien au contraire.
Mais l'outrance n'est pas acceptable. Vous avez raison de souligner qu'un certain nombre de personnes se livrent à des outrances absolument scandaleuses sur les réseaux sociaux et ailleurs, et je m'associe à votre condamnation.
Je répondrai rapidement et concrètement à vos deux questions. Pourquoi vacciner à l'hôpital et pas à l'école ? Les enfants, il est vrai, peuvent être contaminés au coronavirus, mais ils ne déclarent pas de formes graves ; leur vie n'est pas en danger lorsqu'ils sont contaminés.
En revanche, ils peuvent transmettre le virus. C'est pourquoi nous avons établi un protocole sanitaire et nous enjoignons les familles à faire vacciner leurs ados de douze à dix-sept ans – mais pas plus tôt, faute d'autorisation scientifique. Au contraire, à l'hôpital et dans les EHPAD, les gens sont très fragiles et il arrive que l'immunité liée à la vaccination ne les protège pas totalement ou pas suffisamment : c'est la grande différence.
À votre deuxième question je répondrai ceci : d'ici à la promulgation de la loi que vous aurez bientôt l'occasion de voter, nous aurons résolu le problème et tous les Français de l'étranger – ainsi que les touristes étrangers – justifiant qu'ils ont été vaccinés selon un schéma vaccinal complet pourront, lorsqu'ils reviennent sur le territoire national, bénéficier d'une équivalence et circuler comme les autres citoyens.
Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes LaREM, Agir ens et UDI-I.
Ma question, à laquelle j'associe Xavier Paluszkiewicz, concerne la lutte contre l'évasion et la fraude fiscales : ce sont des combats de tous les temps, de tous les instants. Le 6 novembre 2017, monsieur le ministre de l'économie, vous exprimiez votre point de vue au sujet de l'évasion fiscale en affirmant qu'il s'agit d'une attaque inacceptable non pas contre le seul Trésor public mais contre la démocratie et contre le consentement à l'impôt. Comme la vaccination contre la covid, payer ses impôts, c'est accepter notre contrat social, c'est accepter de faire société. Les passagers clandestins de la vaccination et de l'impôt minent notre capacité à vivre ensemble et à défendre un projet commun pour la France.
L'adoption, au printemps 2019, de la taxe française sur les services numériques visant à ce que les grandes entreprises du secteur numérique paient des impôts en France a été un marqueur fort de notre politique, en attendant que les négociations internationales à l'OCDE (Organisation de coopération et de développement économiques) aboutissent. La France voulait montrer le chemin ; nous ne voulions pas nous résigner à l'inactivité et à la passivité.
Notre persévérance a payé – celle de la France, la vôtre, monsieur le ministre, celle du Président de la République et celle de notre concitoyen Pascal Saint-Amans, chargé des politiques fiscales à l'OCDE, que je tiens à saluer ici. Nous y sommes donc : un accord historique a été conclu ce week-end au G20 Finances de Venise, où 132 États se sont mis d'accord sur une nouvelle architecture fiscale internationale autour de deux piliers, dont celui de la taxation minimale des multinationales à hauteur de 15 %.
En parallèle, l'Union européenne préparait son projet de taxe numérique pour financer le plan de relance européen. Or, suite à la venue de Janet Yellen hier à Bruxelles, les Européens ont décidé de geler les travaux sur cette taxe numérique européenne.
Monsieur le ministre, pouvez-vous nous expliquer ici les dessous et le sens de cette décision européenne ? La diplomatie n'a rien de simple, comme nous le rappelle Jérémie Gallon dans son essai, Henry Kissinger, l'Européen, qui invite l'Europe à ne plus penser la politique étrangère en silos, en séparant la diplomatie de l'économie et du commerce. Cet événement ne fait que confirmer son raisonnement.
Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM et sur plusieurs bancs du groupe Agir ens.
La parole est à M. le ministre de l'économie, des finances et de la relance.
Samedi dernier, en Italie, les vingt États les plus riches de la planète se sont enfin mis d'accord pour mettre en place une nouvelle architecture fiscale pour le XXI
…de quatre années de diplomatie et de négociations acharnées, souvent contre vents et marées, contre beaucoup de nos partenaires. C'est une victoire,…
…une victoire pour la France, pour les Français et pour cette majorité et le Président de la République,
Applaudissements sur les bancs des groupes LaREM, Dem et Agir ens
qui ont soutenu le projet sans faille depuis le premier jour.
C'est une victoire de la justice contre cette injustice selon laquelle les géants du numérique échappaient à l'impôt,…
…là où les PME françaises et européennes devaient, elles, payer leur juste part d'impôts. Avec cet accord, tous les géants du numérique, sans exception, paieront enfin leurs impôts. C'est une victoire de l'efficacité contre cette évasion fiscale qui permettait à des multinationales de faire des profits en France, en Allemagne, en Italie, en Belgique ou ailleurs et de délocaliser leurs profits dans des paradis fiscaux ou dans des pays qui pratiquent l'optimisation fiscale, pour payer moins d'impôts que ce qu'ils devaient.
Grâce à cet accord, nous mettons fin à l'évasion et à l'optimisation fiscales.
Les multinationales paieront l'impôt qu'elles doivent au Trésor public français.
Le taux reste, vous l'avez indiqué, à déterminer. Le Président de la République et moi-même avons été très clairs : 15 % est un minimum mais si nous pouvons obtenir plus, nous aurons plus. Mais je veux vous le dire avec force et gravité : nous avons enfin, à force de détermination, inventé le système fiscal dont nous avions besoin pour le XXI
Ce système doit beaucoup à la France, à vous et au Président de la République.
Applaudissements sur les bancs des groupes LaREM et Agir ens.
La campagne vaccinale engagée par le Gouvernement depuis plusieurs mois a donné lieu à des retards, des ratés et des atermoiements. Tout ceci a empêché que la population française soit largement vaccinée et nous oblige désormais à prendre des décisions face à une situation largement créée par les erreurs gouvernementales.
L'éducation nationale est de très loin le premier employeur public en France. Au moment où le Gouvernement s'interroge sur l'obligation vaccinale, il est donc de mon devoir de vous interroger, monsieur le ministre de l'éducation, sur votre politique en matière de santé du personnel. En effet, le secteur public devrait montrer l'exemple, et vous encore davantage, puisque vous êtes directement responsable d'un million de fonctionnaires. Or les remontées du terrain sont très inquiétantes. Aucune donnée n'est disponible sur le taux de vaccination des enseignants et, plus grave encore, en creusant la question, il apparaît que vous n'avez rien fait pour informer les enseignants et les inciter, sur une base volontaire, à se faire vacciner, au moyen d'actions ciblées.
Exclamations sur plusieurs bancs du groupe LaREM.
Pourquoi êtes-vous resté inerte sur une question aussi stratégique ? Pourtant, déjà bien avant le covid, nous vous avions fortement alerté quant à la nécessité de recruter des médecins dans l'éducation nationale et de mener une véritable politique publique de santé au sein de votre ministère. Le comble est que vous n'ayez aucun outil de pilotage en la matière et que votre ministère soit totalement incapable de fournir des données pourtant indispensables à la prise de décisions éclairées.
Que comptez-vous faire pour remédier à cette situation et enfin montrer l'exemple, avant même de dire que c'est aux élèves de se vacciner ?
Applaudissements sur les bancs du groupe LR. – M. Éric Coquerel applaudit également.
La parole est à M. le ministre de l'éducation nationale, de la jeunesse et des sports.
Je vous répondrai très calmement, car vous cherchez une polémique là où il ne faut pas en chercher.
Pour ce qui est de votre appréciation générale de la politique vaccinale, je laisserai le ministre de la santé vous répéter ce qu'il a déjà dit largement. Ensuite, pour ce qui concerne les professeurs, il existe évidemment, depuis le début, une politique de suivi au quotidien de ce sujet,…
…politique qui a, du reste, commencé avant les vaccins – nous avons par exemple distribué 130 millions de masques, à quoi s'ajoutent les tests et autotests. S'il n'y avait pas déjà eu cette politique consistant à « tester, alerter, protéger », nous n'aurions pas pu, vous le savez, être le seul pays membre de l'OCDE capable d'ouvrir ses écoles pendant toute l'année.
Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes LaREM et Dem.
Qui plus est, selon les études de Santé publique France, les professeurs sont une catégorie moins contaminée que la moyenne de la population.
Vous cherchez donc une polémique là où il y a eu une réussite.
Nous suivons la question des vaccinations. Comme vous le savez, dès que cela a été possible, et en restant cohérents avec la politique de vaccination consistant à privilégier les plus vulnérables, nous avons ouvert des couloirs prioritaires, notamment pour les professeurs de plus de 55 ans. Contrairement à ce que vous venez de dire, il y a eu, notamment au mois de juin, des campagnes visant tant les élèves que les professeurs pour les inciter à se faire vacciner. Il y a également une incitation à la vaccination pendant l'été – c'est le sens de tous les messages que nous diffusons.
M. Jean-Christophe Lagarde s'exclame.
Le travail mené par la ministre de la fonction publique en direction de l'ensemble du secteur public, avec l'installation de barnums dans différents lieux publics, par exemple, fait évidemment partie de cette stratégie. À la rentrée, nous continuerons, comme l'a dit hier le Président de la République, de pouvoir intervenir en établissement.
Il y a donc évidemment une politique de vaccination rationnelle, logique et, surtout, calme et à l'abri de toutes les polémiques qui visent à instrumentaliser une crise sanitaire en termes politiciens. Il est regrettable que vous le fassiez. Quant à nous, nous recherchons l'efficacité et la sérénité.
Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM et sur quelques bancs des groupes Dem, UDI-I et Agir ens.
Dans ce cas, pourquoi êtes-vous incapable de nous dire quel est le taux de vaccination des enseignants ? La question est aussi simple que cela, mais vous n'y répondez pas parce que vous n'avez aucun outil de pilotage !
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LR.
Il fallait oser ! Oser dire à la télévision, hier soir, à 20 heures, sans crier gare, que dans moins de deux semaines, nous ne pourrions aller nulle part sans être vaccinés ! Le conseil de défense est votre salle de jeux, où vous jonglez avec la vie des Français. Vous prolongez l'état d'urgence sanitaire jusqu'à décembre, vous parlez aux Français comme à des enfants. Cet été, Jacques a dit : pas de vaccin, pas de train. Jacques a dit : pas de vaccin, pas de café. Pas de vaccin, pas de commerces. Cet été, si vous êtes vaccinés, mais pas vos enfants, ils vous attendront devant le restaurant. Après la police du vêtement, Macron invente la police sanitaire ! Cet été, votre passe sanitaire sera contrôlé par des policiers non vaccinés et vous demandez aux patrons de café de s'improviser videurs – mais, rassurez-vous, Macron nous l'avait promis : le vaccin ne sera pas obligatoire. Bienvenue en Absurdie !
Monsieur le Premier ministre, ne nous caricaturez pas : nous croyons à la science. Le vaccin est une des solutions pour lutter contre l'épidémie, mais l'Organisation mondiale de la santé (OMS) elle-même nous dit qu'il faut convaincre plutôt que contraindre. Or avec vous, pour le vaccin comme pour le reste, c'est à la matraque !
Protestations sur les bancs du groupe LaREM.
Vous avez laissé des soignants travailler en sacs poubelles, vous les avez gazés quand ils réclamaient plus de moyens, et maintenant, vous les stigmatisez pour qu'ils se fassent vacciner. Et le pompon : les pauvres sont les plus exposées au covid, ceux qui en meurent le plus, ceux qui ont le moins d'accès à la vaccination. Alors, en toute logique, vous déremboursez le test PCR.
Monsieur le Premier ministre, tout le monde n'appartient pas à La République en marche. Le virus ne vérifie pas le portefeuille des personnes avant de les contaminer !
Exclamations sur les bancs du groupe LaREM.
Les plus pauvres auront, en prime, une mise à mort sociale, avec la réforme de l'assurance chômage et la réforme des retraites. Par contre, jackpot pour Big Pharma, pour qui la fête continue !
Nous vous avions pourtant prévenu : avec 800 millions d'euros d'économies pour l'hôpital public, des fermetures de lits, le manque de personnel soignant, où sont les moyens pour les soignants ? Où sont les purificateurs d'air ? En quoi le fait de briser nos libertés aide-t-il à lutter contre l'épidémie ?
Applaudissements sur les bancs du groupe FI.
Madame la députée, il existe un dicton selon lequel l'opposition peut enflammer l'enthousiasme, mais ne convertit jamais. En comparant le score de 18 % obtenu par le président de votre groupe lors de l'élection présidentielle et les 6 % d'intentions de vote que lui attribuent aujourd'hui les sondages,…
Protestations sur les bancs du groupe FI.
…et en considérant votre ligne politique,…
…celle de l'opposition systématique
Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes LaREM et Dem
et de l'absence du courage nécessaire pour accompagner le Gouvernement et les Français dans la prise de décision pour protéger la population, je me dis qu'il n'est jamais trop tard pour changer d'avis – mais encore faudrait-il que vous ayez un avis !
Vives exclamations sur les bancs du groupe FI.
Rappelez-vous votre score aux régionales dans le Nord ! Et en Île-de-France !
Mes chers collègues, je vous en prie ! Monsieur Corbière, veuillez ajuster votre masque !
En l'occurrence, le Premier ministre vous a proposé plusieurs fois de rejoindre autour de la table l'ensemble des groupes politiques pour discuter de vos propositions et pour nous aider à sortir de la crise sanitaire, mais vous avez pratiqué la politique de la chaise vide.
Vous avez été consultés par écrit, et vous attendez de savoir ce que nous allons dire pour mieux pouvoir nous contester.
Exclamations sur les bancs du groupe FI.
Voilà maintenant quatre ans que vous avez inventé un nouveau concept dans cet hémicycle : celui du vote automatique. Nous proposons le confinement pour sauver les Français : c'est non. L'état d'urgence : c'est non. On sort de l'état d'urgence sanitaire : c'est non.
Vous nous parlez de moyens pour l'hôpital, mais quand vous aviez l'occasion de voter 9 milliards d'euros de salaire de plus par an pour les soignants, c'était non.
Vous avez eu l'occasion de voter 19 milliards d'euros d'investissements pour les hôpitaux avec le Ségur : encore non. On vous a proposé d'étendre les mesures du Ségur au médico-social : re-non !
Applaudissements sur les bancs des groupes LaREM, Dem, UDI-I et Agir ens.
Madame la députée, chacun est libre mais, à l'heure du bilan de vos mandats parlementaires, je regarderai avec attention, ne serait-ce que dans le seul champ du social, l'ensemble des votes négatifs et je les communiquerai aux Français.
Honnêtement, nous n'avons pas à rougir !
On peut s'opposer intelligemment et d'une manière constructive. L'heure est grave pour la population, et les Français attendent de nous que nous soyons à la hauteur.
Un peu d'unité nationale ne nuit jamais dans un tel contexte !
Applaudissements sur les bancs des groupes LaREM, Dem, UDI-I et Agir ens. – Vives exclamations sur les bancs du groupe FI.
Chers collègues, retrouvez votre calme, je vous prie. Je vous rappelle qu'ici, les questions sont libres, et les réponses aussi.
Mêmes mouvements.
Mesures annoncées par le Président de la République
Monsieur le Premier ministre, je tiens, au nom du groupe Agir ensemble, à saluer le discours de fermeté et de clarté que le Président de la République a tenu hier soir devant les Françaises et les Français.
Applaudissements sur les bancs des groupes Agir ens et LaREM.
Alors que notre pays s'apprête hélas à affronter une quatrième vague de covid-19, il faut prendre des mesures courageuses si nous voulons éviter de nouveaux confinements et couvre-feux généralisés.
Il faut encore accélérer la vaccination, notamment de celles et ceux qui ont pour vocation première de nous protéger.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe LaREM.
Il faut étendre le passe sanitaire, non pas pour enquiquiner les Françaises et les Français, mais pour les protéger.
Le passe sanitaire, ce n'est pas seulement le vaccin : ce sont aussi les tests, car il faut encore mieux isoler les personnes qui peuvent être contagieuses, notamment celles qui rentrent de pays où le virus circule beaucoup.
Il faudra une loi pour transcrire ces mesures. Nous attendons aujourd'hui des clarifications quant au calendrier et, surtout, pour savoir comment les Françaises et les Français pourront organiser leurs vacances.
Pour ce qui concerne, enfin, le volet politique, je veux également saluer la volonté du Président de la République de continuer la réforme des retraites, mais de se donner le temps d'une nouvelle concertation pour qu'elle puisse être votée après la crise sanitaire. Je tiens également à saluer le pacte intergénérationnel, qui prévoit d'une part un revenu garanti pour les jeunes et, de l'autre, une réforme de l'autonomie. Pouvez-vous nous donner des précisions sur le calendrier de mise en œuvre de ces mesures attendues par les Françaises et les Français ? La majorité est derrière vous !
Applaudissements sur les bancs des groupes Agir ens, LaREM et UDI-I.
Monsieur le président Becht, je vous remercie vivement de vos appréciations, qui me semblent bien exposer les enjeux qui sont devant nous, ainsi que la gravité de la situation que nous connaissons et les moyens que nous nous donnons collectivement pour y faire face.
Notre premier impératif est simple : vacciner, vacciner et encore vacciner !
Applaudissements sur les bancs des groupes LaREM, Agir ens et UDI-I.
Bien entendu, mesdames et messieurs les députés, l'incitation à la vaccination reste le cœur de notre politique.
Et elle porte ses fruits puisque dans la seule soirée d'hier, à la suite de l'intervention du Président de la République, 926 000 de nos concitoyens ont pris volontairement rendez-vous sur Doctolib pour se faire vacciner ,
Applaudissements sur les bancs des groupes LaREM, Dem, Agir ens et UDI-I
soit cinq fois plus que lundi dernier et deux fois plus que lors du dernier record – qui, de mémoire, remontait au 11 mai 2021. Nous devrions toutes et tous nous en réjouir.
Il faut agir vite, comme vous l'avez dit, monsieur le président Becht, notamment pour ce qui concerne le passe sanitaire qui, je le dis clairement, est une incitation forte à se faire vacciner – nous sommes cohérents. Nous agirons par décret lorsque l'habilitation législative que vous nous aurez donnée nous le permet : dès le 23 juillet, pour tous les secteurs déjà couverts par le passe sanitaire, nous abaisserons le seuil de fréquentation de 1 000 à 50 et, d'ici là, nous discutons évidemment avec les secteurs professionnels concernés, pour étendre le périmètre du passe vaccinal.
Bien sûr, là aussi, nous allons discuter avec les professionnels pour donner dès cette semaine toutes les précisions aux Françaises et aux Français.
Pour cela, il nous faut une loi, et il est heureux que le législateur, représentant de la souveraineté nationale, se saisisse de ces questions.
Vous aurez donc, en toute transparence et en toute responsabilité, l'occasion de dire ce que vous voulez, ce que vous pensez de la vaccination, de la vaccination obligatoire, du passe sanitaire et de tous les sujets qui concourent à l'efficacité et à l'acceptabilité d'une politique vaccinale dans un pays comme le nôtre.
Le Président de la République a pris ses responsabilités en convoquant le Parlement en session extraordinaire, et nous espérons bien que, dans les derniers jours de juillet, si l'Assemblée et le Sénat en décident ainsi, cette nouvelle loi sera votée pour que nous puissions le mettre en vigueur et donner toutes les précisions nécessaires à nos concitoyens.
Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM, Agir ens et UDI-I.
Mesures annoncées par le Président de la République
Monsieur le Premier ministre, le Président de la République a annoncé hier soir des mesures nouvelles sur la vaccination et le passe sanitaire. Se faire vacciner contre le covid est, bien sûr, une responsabilité individuelle, pour se protéger et pour protéger les autres. C'est aussi notre responsabilité collective que de tout faire pour retrouver nos libertés et pour sauver des vies. Ces mesures sont donc nécessaires,…
…et elles devront être mises en œuvre avec respect et, surtout, avec les moyens humains et logistiques suffisants, alors que les soignants sont épuisés et que les remplacements à l'hôpital et dans les cabinets médicaux sont de plus en plus compliqués.
Mais – parce qu'il y a un « mais » – le président Macron a également annoncé vouloir passer en force pour la réforme de l'assurance chômage et la réforme des retraites, malgré les oppositions et les mises en garde unanimes et répétées des syndicats de salariés.
À vouloir mêler enjeux sanitaires et campagne électorale, il a donc pris le risque de fragiliser une cohésion nationale pourtant indispensable si l'on veut réussir la vaccination d'un maximum de nos concitoyens. Monsieur le Premier ministre, après l'année et demie que nous venons de vivre, notre pays a besoin d'apaisement, pas de tensions et crispations supplémentaires : c'est pourtant la voie que vous avez choisie.
La campagne présidentielle qui s'ouvre n'autorise pas à tout mélanger : la priorité de l'été est sanitaire, et elle seule doit mobiliser nos énergies.
M. Hubert Wulfranc applaudit.
Au-delà des annonces d'hier soir, quels moyens avez-vous prévu de déployer pour faciliter une vaccination de masse cet été ?
Applaudissements sur les bancs des groupes SOC et GDR.
Merci, monsieur le député : j'ai suffisamment critiqué l'absence de cohésion nationale et d'unité lorsque la situation était grave pour ne pas souligner le consensus lorsqu'il semble se dégager – sous réserve, bien sûr, du légitime débat parlementaire qui aura lieu, et auquel vous prendrez toute votre part. Le groupe Socialistes et apparentés s'est dit favorable, sous conditions, à la vaccination obligatoire des soignants et à l'extension du passe sanitaire pour éviter un nouveau confinement, et a adressé ses propositions au Premier ministre. Ce consensus est pour les Français le signe fort d'un moment particulier dans l'histoire de la pandémie.
Vous vous inquiétez légitimement de la capacité de nos équipes soignantes à tenir dans la durée et à vacciner massivement les Français cet été. Sachez qu'en Mayenne, territoire en avance sur la moyenne nationale, plus de 70 % des adultes ont reçu au moins une injection, et je peux vous confirmer que les huit centres de vaccination, qui réalisent 18 000 injections quotidiennes, resteront bien ouverts. J'ai également signé un arrêté qui élargit encore la liste des personnes habilitées à vacciner. Ainsi, non seulement les centres de vaccination resteront ouverts, mais nous allons déployer encore plus d'ingéniosité pour aller chercher les plus éloignés de la vaccination, à travers ce que l'on appelle les démarches « aller-vers ».
Enfin, le Président de la République n'a pas parlé hier soir que de la crise sanitaire – et c'est tout à fait normal : il a parlé de la France de demain, de la France de 2030, des raisons pour lesquelles il faut investir dans l'innovation et la recherche, mais aussi continuer de faire de la France un pays attractif, elle qui, pour la deuxième année consécutive, est le plus attractif d'Europe pour l'implantation d'entreprises. Cela nécessite aussi de renforcer notre modèle social : le « quoi qu'il en coûte » a été, et est toujours, une mesure sociale sans précédent dans notre pays. Elle permet aux Français de voir leurs commerces et leurs restaurants rouvrir après des mois de confinement ; le chômage partiel leur a permis de ne pas perdre leur emploi ni du pouvoir d'achat.
Il est donc normal de conforter notre modèle, de poursuivre les réformes non pas contre mais avec le débat parlementaire : c'est le cas de la réforme des retraites, si l'amélioration de la situation sanitaire le permet. Quant à la réforme de l'assurance chômage, son essence comme le fonctionnement qu'elle prévoit sont totalement démocratiques. Le Président de la République a souhaité – à raison – qu'elle s'applique à compter du 1er octobre, car l'INSEE et tous les instituts compétents en matière d'emploi nous disent que les conditions sont réunies pour ce faire.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe LaREM.
J'associe à ma question mon collègue Jean-François Parigi, qui vient d'être élu président du conseil départemental de Seine-et-Marne. Parce que l'horreur s'est déroulée dans mon département, je tiens à vous interroger, monsieur le Premier ministre, sur le meurtre du jeune Théo à Claye-Souilly.
Je souhaite que le nom de Théo résonne dans cet hémicycle, pour sa mémoire, pour ses parents. Il avait la vie devant lui, il venait de réussir son baccalauréat, il était la belle jeunesse de France qui choisit de travailler. Il était habité par les promesses de l'aube quand il a croisé la route d'un barbare qui, pour une poignée d'euros, l'a poignardé sans vergogne.
La presse indique que l'auteur des faits serait un étranger en situation régulière jusqu'au 20 juillet, un Sénégalais défavorablement connu des services de police, apparemment mentionné dans le fichier de traitement d'antécédents judiciaires (TAJ). Que sait-on de lui ? Avait-il un casier judiciaire ? Où l'instruction de son dossier de renouvellement de titre de séjour en était-elle ?
Plus largement, que comptez-vous faire pour mettre réellement un terme à l'ensauvagement du monde ? Nul ici ne peut prétendre que, lui aux affaires, il n'y aurait plus d'affaire Théo. Mais une politique pénale doit marcher sur ses deux jambes : l'une policière, l'autre judiciaire. Afin de mettre un terme à ce fléau, à quand une politique de tolérance zéro et des incarcérations dès le premier acte violent si la justice en décide ainsi ?
Applaudissements sur les bancs du groupe LR. – MM. Meyer Habib et Philippe Vigier applaudissent également.
À quand une grande politique immobilière pour construire les 15 000 places de prison promises, dont seules 2 000 ont été créées ?
Monsieur le Premier ministre, assez de marches blanches ! Pour que chaque semaine n'égrène pas le glas du régalien qui se délite, il nous faut des actes : si Théo est mort pour rien, qu'il ne soit pas en plus victime de notre indifférence et de notre inaction.
Applaudissements sur les bancs des groupes LR et UDI-I.
Vous le dites très justement : aucun pouvoir ne peut prétendre qu'il n'y aura plus de crimes comme celui qui endeuille non seulement votre circonscription mais plus largement, notre pays tout entier. Comme vous, je voudrais d'abord avoir une pensée émue pour cette famille, dont nous avons peine à mesurer le chagrin : un gosse de 18 ans à peine ne peut pas mourir dans ces conditions. Je pense aussi au jeune homme blessé, auquel je présente tous mes vœux de prompt rétablissement.
Cela étant dit, depuis que je suis garde des sceaux, j'ai instauré, sous l'impulsion du Premier ministre, une politique budgétaire comme nous n'en avions jamais connu depuis plus d'un quart de siècle, et qui nous a permis de traiter la délinquance qui était jusqu'alors négligée : c'est la réforme de la justice de proximité. Lorsque je me déplace dans les juridictions, les magistrats de terrain me disent combien ils se félicitent de cette politique. J'ai d'ailleurs publié tout récemment un rapport sur notre action, et je le tiens à votre entière disposition.
Je ne pourrai pas commenter davantage cette affaire : dès lors que le suspect a été interpellé et la justice saisie, il m'est interdit de faire un certain nombre de remarques.
Enfin, je veux rendre hommage ici au membre de l'administration pénitentiaire et au policier qui, bien que n'étant pas en service à ce moment-là, sont courageusement intervenus, aux côtés d'un commerçant, pour que l'auteur des faits soit interpellé.
Applaudissements sur les bancs des groupes LaREM, LR, Dem, SOC, Agir ens et UDI-I, ainsi que sur quelques bancs du groupe GDR.
J'ai pris l'initiative d'inviter cet agent de l'administration pénitentiaire demain, aux cérémonies du 14 juillet, et je tiens à lui rendre hommage devant la représentation nationale.
Ces questions, monsieur le député, doivent faire consensus : comme vous l'avez dit à juste titre, malheureusement, personne ne peut espérer la rémission des crimes. Mais nous continuons de lutter : c'est une préoccupation constante, tant pour moi, garde des sceaux, que pour le Premier ministre.
Applaudissements sur les bancs des groupes LaREM, Dem, Agir ens et UDI-I.
Hier, le Président de la République s'est adressé aux Français pour annoncer de nouvelles mesures de lutte contre l'épidémie de covid-19 et pour rappeler l'objectif primordial que nous devons atteindre : la vaccination de nos concitoyens. Il a également dressé les perspectives de la relance, plaçant le travail en son cœur.
Dès 2017, nous avons fait du travail un axe essentiel de notre action en investissant dans la formation, notamment celle des chômeurs de longue durée, en baissant les cotisations sociales salariales, mais aussi en augmentant et en élargissant la prime d'activité. Toutes ces mesures ont été prises pour que le travail paie, et qu'il paie mieux.
Le travail, nous l'avons soutenu comme jamais auparavant, en particulier dans les derniers mois de la crise sanitaire, avec l'instauration de mesures de soutien aux entreprises et d'un dispositif d'activité partielle qui auront permis d'accompagner plusieurs millions de salariés et de sauver des milliers d'emplois. Peu de pays ont fait autant pour l'emploi durant la crise.
La mobilisation en faveur du travail, c'est aussi vers notre jeunesse qu'il a fallu la diriger. Il y a un an, le Gouvernement a lancé le plan « 1 jeune, 1 solution », qui a déjà permis à 2 millions de jeunes de trouver une solution concrète – emploi, formation, contrat d'apprentissage – adaptée à leurs besoins : 1,8 million de jeunes de moins de 26 ans ont trouvé un CDI ou un CDD de plus de trois mois, 350 000 jeunes sont entrés en formation et 526 000 contrats d'apprentissage ont été signés en 2020, soit 42 % de plus qu'en 2019. Jamais un gouvernement n'avait autant agi pour la jeunesse !
Madame la ministre du travail, pouvez-vous nous préciser les mesures annoncées hier par le Président de la République pour poursuivre la dynamique de transformation du pays, notamment s'agissant de la création d'un revenu d'engagement pour les jeunes ?
Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM. – M. Jean-Louis Bourlanges applaudit aussi.
La parole est à Mme la ministre du travail, de l'emploi et de l'insertion.
Vous l'avez rappelé, depuis le début du quinquennat, le travail est au cœur du projet du Président de la République et de l'action du Gouvernement. Face à une crise exceptionnelle, nous avons répondu présent pour protéger les emplois et soutenir le redémarrage de l'économie. La reprise est là et les embauches sont au plus haut depuis quinze ans, avec 785 000 déclarations d'embauche au mois de mai, dont près de la moitié en CDI.
Ces résultats encourageants nous invitent à poursuivre notre action, et c'est pourquoi dans son intervention d'hier, le Président de la République a abordé plusieurs chantiers à venir.
Tout d'abord, le Gouvernement est pleinement mobilisé pour répondre aux tensions de recrutements. Avec l'appui de Pôle emploi et en lien avec les principaux secteurs concernés, nous avons lancé des plans d'action qui seront déclinés territoire par territoire. Pour nous inscrire à nouveau dans une trajectoire de plein emploi, nous souhaitons renforcer l'accompagnement des demandeurs d'emploi de longue durée : dans la continuité du plan d'investissement dans les compétences, nous allons donc engager à la rentrée un nouvel effort massif de formation et de requalification en faveur de nos concitoyens durablement privés d'emploi.
Valoriser le travail, c'est aussi et surtout continuer à investir pour notre jeunesse : en un an, le plan « 1 jeune, 1 solution » a permis à plus de 2 millions de jeunes de trouver une réponse adaptée à leur situation. Mais nous devons aller encore plus loin pour lever tous les freins auxquels les jeunes font face au moment de construire leur avenir : c'est tout le sens du revenu d'engagement annoncé par le Président de la République. Il concernera les jeunes qui n'ont pas d'emploi et ne suivent pas de formation.
Comme vous le voyez, madame la députée, nous consacrons toute notre énergie à faire du travail une réalité pour le plus grand nombre de Français.
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LaREM.
Dans l'Allier, où je suis élu, se trouve la forêt de Tronçais, plus belle chênaie d'Europe. Ma question concerne la pénurie de bois que connaît en ce moment le pays du fait des exportations vers la Chine…
…qui capte nos richesses et la plus-value économique qu'elles pourraient engendrer pour la France.
Un chêne français sur trois part en Chine sans avoir subi aucune transformation sur le territoire. Dans le même temps, les scieries françaises sont empêchées de tourner à plein régime faute de bois, alors que la relance est là et que les commandes affluent. Si ce problème d'approvisionnement touche déjà 90 % des scieries de chêne, il s'étendra bientôt au résineux, pilier du bois de construction et de la palette. La situation va encore s'aggraver avec la décision prise par la Russie de bloquer ses exportations de grumes et de sciages à partir du 1er juillet 2021, alors que 70 % des bois russes partaient jusqu'alors en Chine, laquelle a interdit la récolte de chênes sur son territoire durant quatre-vingt-dix-neuf ans, et plafonné la récolte de résineux.
C'est une fuite des ressources forestières et un gâchis économique pour la France, mais aussi un gâchis écologique, car le chêne est une véritable pompe à carbone, à quoi s'ajoutent les émissions liées au transport des grumes jusqu'en Chine.
De plus, le Gouvernement prévoit la suppression de près de 500 postes au sein de l'Office national des forêts (ONF) dans le cadre du contrat État-ONF 2021-2025. Or ce n'est pas en affaiblissant l'ONF qu'on réglera ces questions. Les communes forestières sont elles aussi inquiètes de la dégradation à venir du maillage territorial.
La filière bois a besoin du soutien de l'État. Quelles décisions fortes comptez-vous prendre pour répondre à la situation et enrayer rapidement l'export massif et incontrôlé du bois français, tout en maintenant la capacité de gestion et d'action de l'ONF ?
Applaudissements sur les bancs des groupes GDR et SOC.
Votre question est double : tout d'abord, elle illustre la responsabilité majeure de l'ONF en matière de gestion des forêts publiques mais également s'agissant de la politique forestière et de la vision que nous défendons au niveau national.
Avec la reprise de l'activité, nous constatons en effet de fortes tensions sur les matières premières, causant d'importantes hausses des prix. C'est dans ce cadre que le sujet que vous évoquez est devenu prioritaire, notamment s'agissant de l'approvisionnement de nos scieries.
Dans le cadre de l'examen du projet de loi portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets, le Gouvernement a fait adopter un amendement visant à créer une obligation de qualification pour les opérateurs qui commercialisent ces grumes : c'est un premier pas.
Il s'agit de nous donner des leviers pour agir, ce travail ayant été engagé ici même, au sein du groupe d'études « Forêt, bois, nouveaux usages et industrie du bois », dont je salue le coprésident, Rémy Rebeyrotte. Il nous faut trouver des réponses, par exemple dans le taux de contractualisation, qui a considérablement augmenté au cours des dernières années.
Face au développement des exportations de grumes de chêne en dehors de l'Union européenne, l'État et les communes forestières ont décidé dès 2018 que l'accès aux ventes publiques de l'ONF nécessiterait dorénavant l'engagement d'assurer la première transformation sur notre sol. La forêt publique représente en France 50 % du volume des chênes : cette mesure est donc extrêmement forte. Même si une récente décision du Conseil d'État va nous conduire à revoir les modalités de ce dispositif, le principe n'en est pas remis en cause.
Par conséquent, l'ONF se trouve pleinement engagé en la matière. Il nous est indispensable ; le Gouvernement le soutient, comme il soutient tous ceux qui y travaillent. Il fait face au défi structurel du changement climatique, mais aussi à une dette de 450 millions d'euros, sur laquelle vous avez appelé notre attention : certaines décisions devaient être prises en vue de sa pérennité. C'est ce que nous faisons avec de nouveaux crédits, avec une subvention d'équilibre, avec le plan de relance ; nous veillerons à ce que les communes forestières comme tous les opérateurs y soient pleinement associés.
Hier, le Président de la République a choisi d'incarner l'ordre plutôt que la liberté. Ce qu'il a annoncé a l'aspect et le goût de la vaccination obligatoire, mais on ne l'appelle pas ainsi : mettons qu'il s'agisse d'une vaccination facultativement obligatoire. Monsieur le Premier ministre, vous parliez d'en rester à l'incitation : sans doute avez-vous retenu la leçon d'Al Capone, qui disait que l'on obtient bien plus avec un mot aimable et une arme à feu qu'avec seulement un mot aimable.
M. Alexis Corbière rit.
Concernant la vaccination des soignants, nous sommes d'accord ; je voudrais toutefois revenir sur la volte-face que vous avez opérée entre juin et juillet avec l'extension précipitée du passe sanitaire. Il y a un mois, on répétait aux Français : « L'épidémie est terminée, elle est derrière nous, vivez ! » Désormais, on leur signifie tout le contraire. Plutôt que l'ordre, je crains fort que tout cela ne suscite le chaos ! Comment s'organiser ? Je pense aux Français résidant dans des pays où il n'y a pas de vaccin homologué par la France : comment feront-ils pour rentrer ? Je pense aux restaurateurs qui devront faire la police en plein pic touristique ; à votre distinction subtile entre supermarchés et grands centres, qui nous rappelle celle entre commerces essentiels et non essentiels ; aux adolescents mineurs,…
…qui, ne pouvant se faire vacciner que depuis juin, auraient bien du mal à se trouver à jour en juillet. Enfin, je pense à ces centaines de milliers de personnes qui avaient planifié leurs vacances en fonction de vos annonces du mois de juin et vont chercher en catastrophe à se faire vacciner sur leur lieu de séjour. Monsieur le ministre de la santé, quelle logistique prévoyez-vous ?
Applaudissements sur les bancs du groupe LR.
Monsieur Aubert, je crains de percevoir dans votre question le regret de nous voir prendre de l'avance sur l'épidémie : vous auriez tant aimé pouvoir, dans quelques semaines, nous reprocher notre retard !
Applaudissements sur les bancs des groupes LaREM et Dem.
Cela fait un an et demi et neuf textes relatifs à l'urgence sanitaire que vous prenez le micro pour nous dire qu'il est bien tard ; à présent, vous trouvez qu'il est bien tôt !
Mme Bérengère Poletti proteste.
Voulez-vous qu'on vous rappelle tout ce que vous avez déclamé à ce micro, vous ?
Quand vous estimerez le bon moment venu, faites-nous donc signe. D'ailleurs, si vous pouviez nous indiquer quel moment aurait été idéal pour l'apparition des variants en France et en Europe, je vous en saurais gré, car aucun scientifique n'a été capable de le prévoir !
Exclamations sur les bancs du groupe LR.
Nous devons réagir.
Par ailleurs, auriez-vous la courtoisie de m'envoyer le texte de l'avant-projet de loi, dont vous connaissez manifestement les moindres recoins, à en juger par vos critiques ? Je vais vous faire une confidence : moi qui en suis l'un des rédacteurs, je ne l'ai pas encore achevé. Mettez donc vos critiques de côté pendant sept à dix jours – elles ne changeront pas d'ici là, de toute façon –, le temps de nous laisser travailler ; participez à la concertation, comme l'a fait votre groupe ! J'entends que vous êtes favorable à la vaccination obligatoire des soignants,…
…ainsi qu'à l'extension du passe sanitaire, encore que cela dépende de son périmètre. Les débats parlementaires promettent donc d'être passionnants, d'autant qu'en dernier lieu, nous avons le même objectif : protéger les Français, protéger le pays, éviter un nouveau confinement. C'est là une base de discussion qui devrait nous permettre de nous entendre.
Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM. – M. Erwan Balanant applaudit également.
Je constate que vos excellents résultats sanitaires n'entament pas votre modestie, monsieur le ministre.
Sourires.
Reste que les Français désireux de profiter de leurs vacances ont le choix entre la perspective de se faire touiller le nez chaque jour lors d'un test PCR et celle de devoir trouver un centre de vaccination !
Je ne crains pas l'obligation, mais les discriminations que pourraient entraîner vos mesures précipitées en créant une catégorie de Français de seconde zone. Vous n'assumez pas le caractère obligatoire de la vaccination, mais vous n'avez pas non plus réfléchi au fait que le rapport entre son coût et ses avantages n'est pas le même pour un octogénaire et pour un étudiant.
Il est plus que probable que ces discriminations vont s'installer : comment comptez-vous lutter contre elles ?
Applaudissements sur quelques bancs du groupe LR.
Monsieur le député, je sais qu'au fond, au-delà des propos de tribune, vous avez compris le raisonnement qui est le nôtre et que reflétera le projet de loi à venir. Il s'agit de ne plus confiner le pays, même en cas de forte vague épidémique ayant un impact sanitaire. La question qui se pose, et à laquelle vous aurez à répondre par votre vote, n'est pas celle de l'existence du passe sanitaire, mais du choix entre ce passe et le confinement. Pour ma part, je choisis le passe sanitaire, et je continuerai à encourager les Français à se faire vacciner.
Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM, ainsi que sur quelques bancs du groupe Dem.
Nous verrons dans quelques jours quel sera votre choix !
Ma question s'adresse à Jacqueline Gourault, ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales ; j'y associe ma collègue Blandine Brocard, comme moi députée de la métropole de Lyon.
Le projet de loi en discussion au Sénat et que nous devrions bientôt examiner répond à de nombreuses attentes des élus locaux. J'aimerais néanmoins appeler votre attention sur un sujet qui mérite des avancées, voire des ajustements : j'en veux pour preuve le fonctionnement de la métropole lyonnaise. Celle-ci constitue une grande réussite : additionnant les compétences et les budgets de la défunte communauté urbaine de Lyon et du département du Rhône sur le territoire lyonnais, elle a permis de gagner en efficacité, en agilité. Cependant, le manque de démocratie y est devenu évident. N'étant pas un établissement public de coopération intercommunale (EPCI), la métropole a perdu cet esprit de mise en commun des moyens au service de l'intérêt général.
Ainsi, jusqu'aux dernières élections, le conseil de la métropole de Lyon était un lieu d'information, d'échange, de compromis ; les cinquante-neuf communes de la métropole y trouvaient leur compte. Il s'est changé en un théâtre d'affrontements, en une assemblée susceptible d'agir à l'encontre de l'intérêt de certaines communes, en un moyen pour les plus grandes communes, majoritaires, de capter les possibilités d'investissement au détriment des communes de petite ou moyenne taille. Plus d'un an après les élections, les tensions y sont fortes, très fortes. Que faire lorsqu'un exécutif légitimement élu adopte une politique opposée à l'intérêt des habitants et donc à celui d'élus non moins légitimes ? La métropole lyonnaise a besoin d'apaisement : à l'occasion de l'examen du projet de loi relatif à la différenciation, la décentralisation, la déconcentration et portant diverses mesures de simplification de l'action publique locale, dit 4D, pourrions-nous imaginer des outils et des mécanismes permettant une information anticipée, loyale, une exigence de transparence, plutôt qu'un passage en force ? L'accroissement du pouvoir octroyé à une collectivité nécessite des contre-pouvoirs accrus !
Applaudissements sur quelques bancs des groupes Dem et LaREM. – M. Thibault Bazin s'exclame.
La parole est à Mme la ministre déléguée chargée de la ville.
Monsieur Bazin, cessez de prétendre que quelques secondes de parole ont été rognées à M. Aubert. C'est inexact ! Vous dites n'importe quoi ! Vous polémiquez, comme à votre habitude.
Madame la ministre déléguée, vous avez la parole.
La métropole de Lyon est une collectivité à statut particulier au sens de l'article 72 de la Constitution : à ce titre, sa gouvernance obéit à des règles distinctes de celles des EPCI à fiscalité propre, dont chaque commune membre est représentée au sein de l'organe délibérant. L'article 72 dispose en effet que « ces collectivités s'administrent librement par des conseils élus », c'est-à-dire sur une base essentiellement démographique, respectant le principe d'égalité devant le suffrage. Il est impossible de garantir à chaque commune un siège au sein du conseil de la métropole tout en respectant la représentativité démographique : le nombre de participants serait trop élevé pour que l'instance puisse fonctionner correctement.
Toutefois, conscient qu'il est important que les maires se trouvent pleinement associés aux décisions prises par les métropoles, le législateur a prévu une conférence métropolitaine réunissant régulièrement ceux de toutes les communes concernées. Le projet de loi « 4D », promu par Jacqueline Gourault et actuellement examiné par le Sénat, a intégré avec le soutien du Gouvernement un amendement visant à doter cette conférence d'un pouvoir de saisine du conseil de la métropole, pouvant s'exercer au sujet de toute affaire relevant de la compétence de cette dernière. Ainsi, sous réserve du vote de l'Assemblée, cette faculté concernera l'ensemble des compétences de la métropole, le conseil de la métropole restant néanmoins maître de son ordre du jour et le cas échéant de ses délibérations répondant à cette saisine. Cette mesure contribuera à associer plus étroitement les maires aux projets métropolitains ; elle s'inscrit en outre dans la logique de différenciation que nous favorisons afin de trouver des solutions propres à chaque territoire.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe Dem.
Monsieur le Premier ministre, à en juger par l'allocution, hier soir, du Président de la République, la France s'achemine lentement mais sûrement vers une vaccination que vous ne qualifiez pas d'obligatoire, mais qui ne l'en sera pas moins – ne serait-ce que pour pouvoir partir en vacances, aller au restaurant ou au cinéma. Après avoir tout rouvert et rendu leur liberté aux Français, vous la leur reprenez abruptement.
Comme mes collègues du groupe Les Républicains, je suis favorable à la vaccination et à la protection de nos concitoyens ; seulement, vous contraignez où nous voulons convaincre, vous inquiétez où nous souhaitons rassurer. Afin de restaurer la confiance des Français dans l'exécutif, rassurez-nous, convainquez-nous par des éléments simples et clairs : qu'en est-il des effets indésirables des vaccins ? Qu'en est-il de la santé des vaccinés, de la protection de leurs données personnelles ? Faites œuvre de pédagogie ! Il revient à chacun de prendre position selon ses convictions et sa conscience : qu'attendez-vous donc, monsieur le Premier ministre, pour convaincre les Français d'aller se faire vacciner, au lieu de les y contraindre ?
Au-delà du Gouvernement et de la majorité, un certain nombre de parlementaires appartenant aux oppositions exercent leur sens des responsabilités en appelant les Français à se faire vacciner, plutôt que d'essayer de leur faire peur au sujet des effets indésirables. Surtout, des dizaines, des centaines de milliers de soignants, de pompiers, d'agents des collectivités territoriales, de maires, d'élus départementaux et régionaux se mobilisent quotidiennement pour les inciter à la vaccination, pour les accueillir même sans rendez-vous, pour simplifier les choses : être vacciné ne demande plus que dix ou quinze minutes.
Monsieur Vatin, si vous vous êtes rendu dans un centre de vaccination de votre circonscription, vous aurez vu les gens en sortir avec le sourire, soulagés d'être désormais protégés contre le covid. Nous répétons à l'envi les chiffres essentiels : la vaccination réduit de 95 % le risque de développer une forme grave de la maladie et divise par douze le risque de la transmettre. Vous m'accorderez que c'est beaucoup ! Le vaccin est extrêmement bien toléré ; ses effets indésirables, passagers, ne concernent d'ailleurs pas la majorité des patients, tant s'en faut. Il est accessible à partir de l'âge de douze ans. Aujourd'hui, 3 milliards de personnes à travers le monde ont reçu au moins une injection. En serions-nous encore, dans cet hémicycle, à agiter de telles questions alors que 10 000 à 20 000 Français se connectent chaque minute en vue de prendre rendez-vous pour se faire vacciner ?
Bientôt, la population adulte de ce pays sera vaccinée aux trois quarts. Notre travail et le vôtre consistent donc à aller chercher ceux qui n'ont pas encore reçu d'injection, ceux qui attendaient, ceux qui pensaient que ce n'était pas la peine de le faire, puisque tout le monde est déjà vacciné autour d'eux. Il importe de s'adresser à eux ; il importe de convaincre, d'apaiser la colère de ceux qui, pour de mauvaises raisons, refusent le principe même du vaccin. C'est cela, notre tâche collective !
Applaudissements sur quelques bancs des groupes LaREM et Dem.
Sachant que seulement 25 millions de personnes ont reçu deux injections, il devrait vous être difficile de vous prévaloir de l'assentiment des Français !
Monsieur le député, les chiffres sont têtus : au rythme actuel, nous atteindrons bientôt 75 % d'adultes vaccinés ! En Mayenne, plus de 70 % ont reçu au moins une injection ! Cela fonctionne ; le tout est de ne pas prendre son temps, d'aller vite, car il est urgent d'en finir avec le covid.
Mêmes mouvements.
Avant de lui donner la parole, je suis heureux de souhaiter la bienvenue à M. Christophe Leclercq, devenu député de la sixième circonscription du Pas-de-Calais le 7 juillet, en remplacement de Mme Brigitte Bourguignon.
Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM, ainsi que sur divers autres bancs.
Plus de 380 000 enfants en situation de handicap sont scolarisés en milieu ordinaire. La semaine dernière, le comité interministériel du handicap se réunissait pour la cinquième fois depuis le début du quinquennat : cette réunion a permis de souligner les avancées historiques réalisées en matière d'accompagnement de ces enfants.
Parmi ces avancées majeures, je tiens à souligner l'augmentation du nombre des accompagnants d'élèves en situation de handicap (AESH) qui interviennent chaque jour auprès de 220 000 élèves, un effectif en augmentation de 46 % depuis 2017. Je salue aussi le projet de modernisation et de transformation des établissements et services d'aide par le travail (ESAT), qui permet de garantir à chaque personne en situation de handicap la possibilité de s'engager dans un parcours professionnel.
Je suis convaincu que pour assurer un bon accompagnement, il faut l'adapter au handicap de l'enfant. Or sur ce point, certaines difficultés demeurent. Vous en conviendrez, un enfant présentant des troubles du spectre autistique n'a pas les mêmes besoins qu'un enfant présentant des troubles dyslexiques, par exemple. Il est donc essentiel que le socle de formation initiale et de développement des compétences des AESH comprenne des modules permettant l'adaptation la plus fine possible à l'accompagnement de chaque enfant. Il me semble par ailleurs nécessaire de renforcer la relation de confiance entre l'enfant – qui est le premier concerné –, ses parents, les enseignants, l'AESH et les professionnels de santé qui l'accompagnent. Le fait de faciliter le dialogue avec les AESH par des échanges plus fréquents, notamment avec les parents, permettra un meilleur suivi du projet et de l'évolution de l'enfant.
J'aimerais donc savoir, madame la secrétaire d'État chargée des personnes handicapées, ce que vous entendez faire pour améliorer l'accompagnement des enfants présentant un handicap et pour améliorer leur parcours de vie.
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LaREM.
La parole est à Mme la secrétaire d'État chargée des personnes handicapées.
Permettez-moi de vous féliciter, monsieur Leclercq, pour votre élection. Pour avoir eu le plaisir de dialoguer avec vous récemment, je connais votre engagement et votre expertise sur les sujets qui touchent à l'accompagnement des enfants handicapés.
Vous avez raison : tout passe par l'école. C'est la raison pour laquelle nous défendons, avec le ministre Jean-Michel Blanquer, un grand service public de l'école inclusive. Le nombre d'AESH a augmenté de 27 % depuis le début de l'année 2017, comme vous l'avez évoqué. Tous sont sous contrat avec l'éducation nationale, au cœur du dialogue social, car ils font partie de la communauté éducative.
Vous avez également souligné que les parents sont experts du mode de fonctionnement de leur enfant ; nous avancerons tous plus vite en les intégrant au dialogue de façon continue. L'expertise parentale est au cœur de nos préoccupations. Désormais, les parents rencontrent les AESH chaque année au début du mois de septembre. C'est nouveau, et c'est ainsi que l'on crée l'école de la confiance et que l'on avance plus vite.
En ce qui concerne la coopération avec le monde médico-social, nous créons 2 000 places en service d'éducation spéciale et de soins à domicile (SESSAD) en 2021. Le but est d'améliorer le parcours de l'enfant en s'appuyant sur l'expertise et le regard croisé des rééducateurs, des éducateurs, des psychologues, des ergothérapeutes et de tous les intervenants médico-sociaux dans l'école. Vous l'avez dit : c'est un parcours que nous devons construire. Il passera par un accès aux centres de loisirs, l'enfant y étant accompagné autant que de besoin – c'est l'inconditionnalité de l'accompagnement –, mais s'appuiera aussi sur les communautés 360 que nous bâtissons avec les départements, avec les associations gestionnaires, avec l'éducation nationale et avec tous les acteurs de droit commun.
Cela a été rappelé lors du comité interministériel du handicap : dans la société inclusive que nous construisons sous l'égide du Premier ministre et de l'ensemble du Gouvernement en privilégiant la formation et la coopération, c'est à l'environnement, et non pas à l'enfant, de s'adapter. Je sais pouvoir compter sur votre expertise, monsieur le député. Vous m'avez fait des propositions : je les étudierai puis reviendrai devant vous.
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LaREM.
Depuis hier soir, l'oligarchie est rassurée : elle a son candidat. Quand Emmanuel Macron est arrivé au pouvoir en 2017, les 500 familles les plus riches de France possédaient 570 milliards d'euros. À la fin du mandat, ce patrimoine aura doublé ; il atteint aujourd'hui 1 000 milliards d'euros.
Quand Emmanuel Macron est arrivé au pouvoir en 2017, il y avait 9 millions de pauvres en France ; il y en aura bientôt 12 millions. Le président des riches, qui a supprimé l'impôt de solidarité sur la fortune (ISF), qui a mis fin à la progressivité de l'impôt sur les produits financiers et qui se bat contre la transparence fiscale est aussi celui qui a retiré 5 malheureux euros d'aide personnalisée au logement (APL), refusé le RSA aux jeunes de moins de 25 ans …
Protestations sur plusieurs bancs du groupe LaREM
…et refusé la déconjugalisation de l'allocation aux adultes handicapés (AAH).
Hier soir, lors de son premier discours de candidat à la présidentielle – aligné sur les exigences de la Commission européenne –, le cap a été fixé : faire rembourser la dette aux Français en les faisant travailler plus longtemps. Pour justifier la réforme de l'assurance chômage, il déclare : « en France, on doit toujours bien mieux gagner sa vie en travaillant qu'en restant chez soi ».
Parlait-il des riches rentiers qui restent chez eux ? Non, bien sûr ! Nombre de Français travaillent et ne parviennent pas à boucler leurs fins de mois. Allez-vous donc augmenter les salaires ? Non, bien sûr !
M. Hubert Wulfranc applaudit.
D'ailleurs, votre objectif n'est pas de lutter contre le chômage. Tout le monde sait qu'il n'y a aucune corrélation entre le niveau de l'indemnisation du chômage et le niveau du chômage lui-même.
Applaudissements sur les bancs du groupe FI.
Vous voulez seulement faire des économies en tapant sur ceux qui sont privés d'emploi et en réduisant leur indemnisation.
La réforme de l'assurance chômage doit être abandonnée !
Mêmes mouvements.
Plutôt que de rendre la vie plus dure à des millions de femmes et d'hommes en difficulté, allez donc récupérer les milliards que vous avez catapultés sans aucune contrepartie aux entreprises privées et que l'on retrouve désormais dans les poches des actionnaires après qu'elles ont fermé des usines et détruit des emplois !
Mêmes mouvements.
La parole est à Mme la ministre du travail, de l'emploi et de l'insertion.
Comme l'a annoncé le Président de la République, un nouveau texte sera en effet présenté dans les prochaines semaines au Conseil d'État pour permettre l'entrée en vigueur de l'intégralité de la réforme de l'assurance chômage à partir du 1er octobre prochain. Vous pouvez le constater comme moi, monsieur le député : l'activité économique rebondit, les embauches sont dynamiques..
Exclamations sur les bancs du groupe FI
Elles le sont même plus qu'en 2019. C'est donc maintenant qu'il nous faut faire évoluer les comportements sur le marché du travail pour lutter contre la précarité.
Lorsque vous défendez le système actuel, avez-vous bien à l'esprit que l'on recourt dix fois plus aux contrats courts en France qu'en Allemagne, et six fois plus qu'au Danemark ?
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LaREM. – Protestations sur les bancs du groupe FI.
Je ne sais pas si c'est ce système que vous voulez défendre, mais ce n'est pas notre modèle !
Le bonus-malus, qui est en vigueur depuis le 1er juillet dernier, vise justement à encourager les entreprises à proposer des contrats plus longs. Vous parlez de milliards ; ce sont justement 40 milliards d'euros que nous avons mobilisés pour protéger les emplois des Français au travers de l'activité partielle.
Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes LaREM et Dem.
Nous avons prolongé les droits de tous les demandeurs d'emploi pendant huit mois et nous protégeons également tous les travailleurs précaires jusqu'à la fin du mois d'août.
Ce sont 600 000 personnes qui ont ainsi bénéficié de l'aide exceptionnelle que nous avons mise en place. Notre objectif, monsieur le député, est de permettre aux demandeurs d'emploi de retrouver du travail !
Applaudissements sur quelques bancs du groupe LaREM.
C'est le sens de l'investissement exceptionnel que nous conduisons depuis le début du quinquennat.
Ainsi, 15 milliards d'euros ont été consacrés au plan d'investissement dans les compétences, que le Président de la République a annoncé hier vouloir amplifier pour permettre aux demandeurs d'emploi de longue durée de retrouver un travail.
L'ambition du Gouvernement est donc inchangée : accompagner le redémarrage de notre économie et lutter contre la précarité du travail.
Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM.
Je me fais le porte-voix du Nord-Est parisien – habitants excédés, riverains en insécurité et consommateurs fragilisés : voilà la réalité de quartiers qui ne peuvent compter que sur la détermination de leurs élus locaux, que je tiens ici à saluer particulièrement. Monsieur le ministre de la santé, nous sommes inquiets car la situation est extrêmement grave et empire tous les jours. Voilà maintenant deux ans que le plan Crack a été conclu, et c'est globalement un échec – vous le savez. La seule approche proposée concrètement est sécuritaire, mais elle ne l'est qu'en théorie. En effet, au-delà du fait qu'elle nie la complexité des problématiques d'addiction et de polyaddiction, cette approche ne déploie aucun moyen pour assurer la sécurité des riverains et des consommateurs. Vous le savez : contrairement à ce qu'affirme le préfet de police de Paris dans la presse, il faut des moyens pour assurer la sécurité de ces quartiers et pour accompagner les consommateurs, qui se trouvent dans des situations de très grande vulnérabilité et de misère totale. Évidemment, il faut aussi lutter contre les trafics et pour cela, il faut aussi des moyens pour mener les enquêtes dédiées et réduire l'approvisionnement.
La Ville de Paris vous l'a dit, les élus du conseil de Paris dans leur diversité politique – aussi bien des membres du MODEM que M. Bournazel, avec qui j'ai pu échanger – l'ont dit en séance jeudi dernier, et je vous le répète : Paris peut mettre à disposition ce qui est nécessaire pour une prise en charge médico-sociale globale des toxicomanes mais pour cela, nous avons besoin de vous. Je m'adresse à vous aujourd'hui en votre qualité de ministre des solidarités et de la santé : vous devez nous proposer des solutions politiques répondant aussi bien aux questions de sécurité qu'à celles de santé publique. Je connais vos convictions en matière de santé publique, monsieur Véran,…
…et j'en appelle aussi à vous en tant que professionnel de santé : nous ne pouvons pas continuer ainsi. Je vous alerte solennellement devant la représentation nationale : s'il devait survenir un drame, comme la situation le laisse présager dans ces quartiers, c'est votre responsabilité et celle de ce gouvernement qui serait engagée. Nos habitants méritent mieux que votre obstination délétère.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe SOC. – M. Jean-Paul Dufrègne applaudit également.
Je pourrais, madame la députée, reprendre une grande partie de votre question à mon propre compte. Mais vous ne pouvez pas dire ce que vous affirmez à la fin de votre intervention et prétendre que, si la situation dérape, ce sera forcément la responsabilité du Gouvernement.
Je crois qu'il y a une maire à Paris, des conseillers municipaux et des élus d'arrondissement.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe LaREM. – M. David Habib proteste.
Quand ça ne va pas, c'est forcément la faute du Gouvernement mais quand ça va bien, c'est grâce aux élus locaux ! Ça va deux minutes !
La responsabilité est partagée, madame la députée, et je vais vous expliquer pourquoi. D'abord, le crack est sans doute la drogue la plus addictive, la plus terrible, et celle qui provoque les pires troubles du comportement.
Son potentiel d'addiction atteint quasiment 100 % dès la première bouffée. C'est donc un véritable fléau contre lequel il faut lutter. Cela passe bien sûr par le volet sécuritaire, que vous avez évoqué. Marlène Schiappa et Gérald Darmanin travaillent beaucoup sur ces questions, mettant en place des évacuations et organisant des plans structurés qui ont permis d'obtenir des résultats.
S'y ajoute le volet sanitaire, qui est l'objet de votre question. Je crois profondément à la politique de réduction des risques,…
…qui consiste à accompagner les personnes qui sont les plus éloignées des dispositifs de soins, notamment médico-sociaux, pour les y ramener. J'imagine que vous savez, madame la députée, que l'État a pris des engagements, dont certains ont été partagés – et respectés – par la mairie de Paris ; ils permettent de déployer des lits de soins de suite, de réadaptation et des lits médico-sociaux, afin de réintégrer dans le parcours de soins des personnes qui en sont très éloignées.
Mais les comptes n'y sont pas encore. J'ai eu une discussion très intéressante avec Emmanuel Grégoire, premier adjoint à la mairie de Paris, sur les mesures de réduction des risques, notamment la possibilité que des sites soient dédiés à la consommation et à l'accompagnement thérapeutique des consommateurs. Je lui ai dit que de tels sites étaient autorisés par l'état actuel du droit ; nous devrons d'ailleurs intégrer une disposition législative au prochain projet de loi de financement de la sécurité sociale, afin de les pérenniser.
Mais votre travail, madame la députée, et celui de la maire de Paris, consiste à mener la consultation et la concertation avec les citoyens parisiens…
Exclamations sur les bancs du groupe SOC.
Si, car la clé du succès, lors de l'installation de tels dispositifs, c'est d'abord le consensus. Une telle démarche a été lancée à Strasbourg : je suis sûr qu'à Paris, en vous donnant un peu de mal, vous y arriverez – et vous nous trouverez à vos côtés.
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LaREM et sur quelques bancs du groupe Dem.
Depuis le 1er juillet, la France exerce la présidence du Conseil de sécurité des Nations unies. Cette présidence a un parfum de reprise car, pour la première fois depuis la crise, l'ensemble des parties prenantes se retrouvent en présentiel. Ce retour à la normale devrait permettre de renouer avec le lien humain, essentiel à l'exercice d'une diplomatie efficace.
Sur la préservation de l'espace humanitaire – sujet à l'ordre du jour de la prochaine réunion du Conseil –, la question du multilatéralisme sera cruciale. Dans les pays en guerre, la société civile est exsangue et les besoins humanitaires sont immenses. C'est le cas par exemple en Syrie, où l'on estime que les besoins humanitaires et médicaux ont augmenté de 20 % l'année dernière. Dans ce contexte, on ne peut que déplorer l'insécurité grandissante qui entoure l'action humanitaire. Rappelons-nous qu'il y a un an, six jeunes Français membres de l'association Acted perdaient la vie à Niamey, au Niger.
Le 17 décembre, à l'occasion de la conférence nationale humanitaire, le Président de la République a donc présenté plusieurs pistes de travail visant la protection du droit humanitaire. La mise en œuvre d'une réponse forte suppose une action concertée et multilatérale pour défendre ce droit et condamner plus fermement les agresseurs des travailleurs qui s'engagent. Dans la perspective des réunions prévues cette semaine, monsieur le secrétaire d'État chargé des affaires européennes, pouvez-vous nous indiquer comment vous abordez les négociations ? Peut-on espérer des avancées décisives de la prochaine réunion du Conseil ?
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LaREM.
La parole est à M. le secrétaire d'État chargé des affaires européennes.
Puisque vous rappelez le drame d'août 2020, je rends à mon tour hommage, comme l'avait alors fait le Premier ministre, à nos compatriotes qui ont été assassinés dans le cadre de leurs activités humanitaires au Niger.
Vous l'avez dit : depuis le 1er juillet, la France préside le Conseil de sécurité des Nations unies qui se réunit à nouveau en présentiel. Jean-Yves Le Drian se rend d'ailleurs en ce moment même aux États-Unis, à Washington puis à New York, où il assurera cette présidence, qui sera consacrée à deux priorités.
Première priorité : la question libyenne, si importante. La stabilité du pays à laquelle nous consacrons nos efforts est essentielle pour la sécurité de l'environnement régional – le Sahel où nos forces sont engagées ; le Maghreb ; la Méditerranée ; l'Europe et la France puisque les menaces sécuritaires et migratoires, en grande partie, sont directement liées à la situation libyenne. Nous devons utiliser la présidence du Conseil pour maintenir la pression afin de progresser sur deux points : le respect du processus électoral et du calendrier des élections qui doivent se tenir à la fin du mois de décembre ; l'application de l'accord de cessez-le-feu d'octobre 2020.
La deuxième priorité de la présidence du Conseil de sécurité est précisément la préservation de l'espace humanitaire. Partout les crises ont accentué la pression sur les travailleurs humanitaires. À l'occasion de son déplacement, Jean-Yves Le Drian présidera une réunion ministérielle dont les travaux porteront sur deux thèmes principaux : chercher les voies et moyens du respect effectif du droit international humanitaire ; renforcer surtout la capacité d'action des travailleurs humanitaires par la formation et par la recherche de solutions pratiques pour l'acheminement de l'aide humanitaire. Ce sont les deux idées que Jean-Yves Le Drian défendra à l'occasion de la réunion physique du Conseil de sécurité.
Applaudissements sur certains bancs du groupe LaREM.
La décision de relancer un programme de grand éolien industriel menace nos paysages. Votre projet met à mal de nombreux sites naturels et touristiques, détruit des espaces préservés et défigure des paysages magnifiques. Pourtant, d'autres énergies renouvelables, mieux acceptées par la population, peuvent être envisagées dans les territoires de moyenne montagne, tels que le bois-énergie, les centrales villageoises photovoltaïques, ou le biogaz par méthanisation.
Que penser par exemple du projet du groupe Total sur les cimes de la très belle forêt ancienne de Taillard dans le parc naturel régional du Pilat, dans le département de la Loire ? Dans ce château d'eau naturel, allons-nous laisser anéantir les sources, saccager de larges panoramas et bétonner le sous-sol pour implanter un alignement d'éoliennes ? À quoi bon maintenir un parc naturel régional si l'État accepte que soit détruit ce que les politiques publiques ont valorisé et préservé durant des décennies, alors que l'engagement a été pris d'augmenter les surfaces d'aires protégées ?
Nos concitoyens n'acceptent plus l'artificialisation et le mitage du territoire par l'éolien industriel. Ils réclament un moratoire urgent. Allez-vous écouter les Français ?
En effet, l'éolien a fait l'objet de nombreuses réflexions ces derniers mois. Il s'agit d'un axe structurant de notre stratégie énergétique afin d'atteindre l'objectif de 40 % d'électricité d'origine renouvelable en 2030.
Les installations éoliennes sont non polluantes puisque 93 % du poids d'une éolienne terrestre est totalement recyclable ; un récent arrêté ministériel a durci l'obligation de recyclage. Elles sont une source d'énergie adaptée à notre climat : la France dispose de la deuxième ressource en vent d'Europe.
Y a-t-il trop d'éoliennes ? La France en compte cinq fois moins que l'Allemagne. Les Français sont-ils vraiment si déçus et si frileux à l'égard de l'éolien ? Un sondage de l'IRSN – Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire – montre que 92 % des Français y sont favorables : on peut parler d'une véritable adhésion à cette énergie.
La transition écologique repose sur trois piliers : il faut décarboner ; il faut équilibrer ; il faut économiser et aller vers une sobriété énergétique. Nos efforts en la matière obligent à mettre en service de nouvelles installations. Je vous rejoins sur la nécessaire concertation – c'est une évidence –, qui doit être menée avec les élus et les acteurs du territoire.
Tous les projets éoliens sont soumis à une réglementation stricte qui impose des autorisations environnementales ainsi que des analyses de l'impact paysager. Les documents d'urbanisme organisent leur développement. Afin de renforcer la planification, nous avons demandé aux préfets de région d'élaborer une cartographie des zones favorables au développement de l'éolien, je le redis, dans la plus grande concertation.
Mme Stella Dupont applaudit.
J'entends vos propos, madame la secrétaire d'État, mais le parc naturel régional du Pilat n'est sans doute pas le meilleur endroit. Ne trouvez-vous pas choquant que les habitants qui ont intenté un recours, comme la loi les y autorise, fassent l'objet de pressions de la part de promoteurs éoliens, en l'occurrence le groupe Total ? Celui-ci les a assignés devant le tribunal de Saint-Étienne en leur demandant la modique somme de 893 000 euros.
J'ai rencontré ces personnes, qui étaient sous le choc. Elles m'ont confié leur intention de vendre leur maison si la justice donnait raison au groupe Total. C'est le pot de terre contre le pot de fer.
La hausse considérable et continue des prix des matériaux subie par les entreprises du bâtiment devient exponentielle et est aggravée par un allongement tout aussi important des délais de livraison. Ce double phénomène affecte gravement l'activité du bâtiment, poids lourd de l'économie français sur lequel l'État s'appuie tant dans le plan France relance que pour la transition écologique et énergétique.
Les 410 000 entreprises, 1 155 000 salariés et 386 000 artisans du secteur sont à la peine. Ils supportent des hausses de prix parfaitement incompatibles avec leurs marges financières et impossibles à répercuter sur leurs clients – publics, privés et particuliers. Pourtant ils se voient appliquer des pénalités de retard. C'est impensable et intenable : plus le chantier avance, plus les entreprises perdent d'argent ; faute de matériaux, elles doivent recourir au chômage partiel. Cette situation pourrait entraîner à brève échéance des défaillances en chaîne, entravant ainsi le rebond économique tant attendu.
L'État peut-il envisager un mécanisme obligatoire de révision des prix permettant de revaloriser les contrats déjà signés ? À défaut, peut-il étudier l'instauration d'un crédit d'impôt correspondant au poste matériaux des entreprises et autoriser la neutralisation des pénalités de retard pour tous les marchés, publics et privés ? Enfin, peut-on donner une priorité aux professionnels en matière d'approvisionnement ? Sinon, les entreprises contraintes de placer leurs salariés en activité partielle, faute de matériaux, peuvent-elles espérer un reste à charge zéro ?
Applaudissements sur les bancs du groupe Dem.
L'approvisionnement et le coût des matières premières sont au cœur de nos priorités depuis plusieurs semaines puisque la reprise mondiale a fait naître des tensions dans ce domaine. Nous avons, de manière systématique, appelé les plus grands donneurs d'ordre à éviter de « surstocker » les matières premières afin de ne pas contribuer à la pénurie. Nous avons également enjoint les acheteurs publics de l'État de ne pas appliquer les pénalités de retard et d'accorder des délais à chaque fois que cela était nécessaire et possible. Nous invitons les collectivités locales à faire de même quand elles le peuvent, et quand elles le souhaitent, dans le respect de la libre administration. Jeudi, Bruno Le Maire et moi réunirons à nouveau l'ensemble des acteurs économiques de la filière afin d'examiner de nouvelles mesures éventuelles, à l'instar de l'exécution de clauses de révision des contrats que vous avez évoquée. Nous savons néanmoins qu'une telle solution ne résoudra pas tous les problèmes.
Au-delà des difficultés conjoncturelles, nous travaillons, dans le cadre du plan de relance, à sécuriser nos approvisionnements – c'est aussi l'une des dimensions de la souveraineté économique et industrielle que nous devons reconquérir. Nous sommes mobilisés : Bruno Le Maire, Alain Griset et moi avons demandé qu'une médiation soit lancée afin de mieux coordonner les actions en faveur du secteur. Nous devons trouver les moyens d'accompagner les donneurs d'ordre ainsi que celles et ceux qui interviennent ensuite sur les chantiers afin d'éviter la paralysie de l'activité économique. Les décisions prises à l'issue de la réunion de jeudi seront rendues publiques.
C'est d'autant plus important que la reprise est là, et bien là. La prévision de croissance s'établit à 5 % – le Président de la République l'a annoncé hier. Selon la Commission européenne, l'OCDE, l'INSEE ou encore la Banque de France, nous pouvons atteindre une croissance de 6 % et j'aurai l'occasion, jeudi matin lors du débat d'orientation des finances publiques de préciser les conséquences positives qu'aurait la réévaluation à 6 % de la croissance sur les finances publiques. Pour atteindre cet objectif, nous avons deux impératifs : le premier, nous le savons, c'est la vaccination et la sortie de l'épidémie ; le second, c'est que toute l'économie fonctionne. Nous allons nous y atteler avec vous.
Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM.
Avant de lui donner la parole, j'adresse toutes nos félicitations et nos vœux de succès à M. Gabriel Serville qui vient d'être élu président de l'Assemblée de Guyane.
Applaudissements sur tous les bancs.
Pour ma dernière prise de parole après neuf belles années passées sur les bancs de notre assemblée, je souhaite exprimer un regret et un espoir.
Tout d'abord, permettez que j'exprime mon profond regret quant à la faiblesse de réaction de notre République face à la situation catastrophique que connaît Haïti depuis maintenant deux ans, malgré mes nombreuses alertes en tant que président du groupe d'amitié France-Haïti. En effet, l'assassinat, le 7 juillet, du président Jovenel Moïse a déstabilisé encore davantage cette nation de 12 millions d'habitants, déjà en proie à une immense pauvreté et à une insécurité extrême. Je crains le pire si la communauté internationale continue de fermer les yeux sur cet état de fait. Il est donc urgent d'entendre et de comprendre les appels lancés par ce peuple digne mais qui souffre de ne pas être compris par la communauté internationale.
Mon espoir quant à lui concerne la Guyane, qui vient de m'élire à la tête de sa collectivité unique et qui connaît toujours une situation préoccupante. C'est bien simple, la collectivité territoriale dispose pour administrer une région grande comme le Portugal et dont la population croît de 3 % par an d'un budget tristement insuffisant, qui ne nous permet pas de répondre aux nombreux défis à relever. La faute incombe en partie à un sous-financement chronique qui ne prend pas en considération la croissance démographique.
Monsieur le ministre des outre-mer, malgré nos nombreuses mais toujours saines oppositions, je veux pouvoir compter sur une coopération active pour sortir notre territoire de l'ornière dans laquelle il est plongé, car, je le sais, nous partageons l'ambition commune de hisser la Guyane au rang de carrefour mondial d'excellence.
Monsieur le ministre, chers collègues de tous les bancs, particulièrement mes amis de la Gauche démocrate et républicaine, je veux vous remercier sincèrement pour la franchise de nos échanges et les soutiens que vous m'avez souvent témoignés. Je sais pouvoir compter sur vous dans l'exercice de mes nouvelles fonctions, en attendant je vous dis tchembé rèd pa moli, bon courage et à bientôt !
Vifs applaudissements sur les bancs des groupes GDR et SOC.
Au nom du Gouvernement, permettez-moi à mon tour de vous adresser nos félicitations les plus républicaines pour votre élection à la tête de cette collectivité importante par ses compétences issues de la fusion d'un département et d'une région, qui participe très directement au bien-être de la population guyanaise. Je forme le vœu que nous parvenions à trouver une voie pour travailler ensemble. Je suis certain que nous le pouvons car il n'y a qu'une famille : celle de la puissance publique qui permet de rendre le service public à nos concitoyens.
Plusieurs chantiers sont devant nous : le premier, vous ne l'avez pas cité, mais je me permets de l'évoquer, concerne la gestion de la crise sanitaire. Sachez, monsieur le député, qu'après autorisation du Premier ministre, la restriction des déplacements entre la Guyane et l'Hexagone aux seuls motifs impérieux sera levée pour les personnes vaccinées dès cette semaine – c'était une demande importante formulée par le territoire. La vaccination reste évidemment un chantier de taille en Guyane, nous y reviendrons.
Le deuxième chantier porte sur les questions financières tant pour le bloc communal que pour la collectivité territoriale de Guyane. Des sommes importantes – 30 millions d'euros – ont été provisionnées ; elles vous seront notifiées dans les jours qui viennent, et visent à financer des plans spécifiques, notamment en matière de défense incendie, ainsi qu'à restructurer certaines dettes. D'autres sommes sont à venir : le travail entrepris avec votre prédécesseur, le président Rodolphe Alexandre, sera poursuivi afin de préparer la prochaine loi de finances. Le Gouvernement présentera un montant dans le projet de loi de finances et la discussion parlementaire permettra certainement de l'enrichir. Il est indispensable d'accompagner la collectivité territoriale de Guyane grâce à des crédits tant en fonctionnement qu'en investissement.
D'autres dossiers sont sur la table : l'environnement et le régalien qui relèvent évidemment de l'État mais sur lesquels les compétences locales sont parfois utiles. Autant de sujets sur lesquels, monsieur le président, monsieur le député, je serai heureux de vous retrouver sur le territoire guyanais pour avancer tous ensemble au service de nos concitoyens.
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LaREM.
Demain, 14 juillet, la fête nationale nous donnera l'occasion de renforcer la cohésion nationale en rendant un hommage appuyé à celles et ceux qui défendent chaque jour nos idéaux et nos valeurs républicaines, en France comme à l'étranger. À Paris, ils seront plus de 4 400 à défiler avec, dans leurs rangs, des membres de la sécurité civile sur les moyens de laquelle je souhaite appeler votre attention.
Les hélicoptères jaune et rouge, couramment appelés Dragon, assurent des opérations de secours et de reconnaissance aérienne – accidents de voiture, sauvetages en forêt, lutte contre les incendies ou encore transferts interhospitaliers durant la crise sanitaire. Plus de 19 000 opérations ont été ainsi effectuées l'année dernière. Pourtant ces missions essentielles de secours d'urgence sont menacées en raison du manque d'investissement et de vision de l'État ces dernières années. L'immobilisation d'un tiers des 34 appareils met en question l'efficacité de la maintenance. Le reste de la flotte étant surexploité, tous les territoires ne peuvent être couverts. Par ailleurs, la volonté de médicaliser les vingt-trois bases de la sécurité civile relève plus de l'incantation que d'une véritable stratégie.
Résultat : depuis le 9 juillet, l'Île-de-France ne bénéficie plus d'aucun des deux appareils qui couvraient jusqu'alors son territoire. Cette carence est incompréhensible s'agissant d'une région de cette taille, d'autant que l'appareil détaché en Seine-et-Marne intervenait déjà dans les départements limitrophes de la région Centre-Val-de-Loire. L'État propose de louer un appareil privé pour remplir ces nécessaires missions mais celui-ci ne sera ni médicalisé, ni en mesure d'intervenir de nuit.
Monsieur le Premier ministre, pouvez-vous nous apporter des précisions sur cette défaillance de l'État ? Quelles solutions concrètes envisagez-vous pour que les Franciliens ne soient pas abandonnés ?
Tout au long de l'année, les membres de la sécurité civile œuvrent dans l'urgence pour sauver des vies, y compris dans des situations exceptionnelles, et je veux ici saluer leur travail remarquable. Le ministère de l'intérieur est engagé dans le secours à la personne et dans l'aide médicale d'urgence et avec Gérald Darmanin, nous menons une politique volontariste en la matière.
Nous avons déployé des moyens importants pour soutenir durablement la sécurité civile. Elle bénéficiera de 37,5 millions d'euros de crédits au titre du plan de relance. Pour le secteur aérien, 1,6 million seront consacrés à l'acquisition d'hélicoptères Airbus H145 D3 et 33,7 millions de crédits seront dédiés à l'entretien de la flotte et des aéronefs. Par ailleurs, 2,2 millions d'euros ont été votés en faveur du financement du système d'alerte aux populations. Les crédits du plan de relance vont aussi contribuer à l'achat de véhicules électriques dans le cadre du verdissement du parc automobile ainsi qu'à des travaux d'entretien et d'isolation thermique des bases d'hélicoptères et des centres de déminage. En 2021, l'effort budgétaire total en faveur de la sécurité civile représentera 40 millions d'euros, soit une augmentation de près de 8 % par rapport à 2020.
À la veille du 14 juillet, soyez donc assurée, madame la députée, que le ministère de l'intérieur est pleinement mobilisé pour accompagner les forces de sécurité civile dans l'ensemble de leurs actions. Je tiens à les remercier tout particulièrement pour leur contribution toujours plus forte aux efforts de l'État dans la campagne de vaccination et la lutte contre la pandémie.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe LaREM.
Depuis 2017, l'émancipation par l'emploi et la lutte contre les inégalités sont au centre de nos politiques et c'est une fierté qui résonne dans le cœur de tous les députés de la majorité présidentielle. Ces priorités ont d'ailleurs été réaffirmées hier soir même par le Président de la République lors de son allocution. Dans certains territoires, toutefois, les situations sont plus complexes que prévu et nous avons la responsabilité d'apporter des réponses fortes et adaptées.
Quand j'ai eu le plaisir d'apprendre que l'agglomération Grand Paris Sud avait été labellisée « cité de l'emploi », j'ai immédiatement pensé aux citoyennes et citoyens éloignés de l'emploi, comme ceux de la commune de Grigny où le taux de chômage atteint près de 40 % chez les 15-25 ans, fait incompréhensible quand on sait qu'il existe près de 200 000 emplois non pourvus dans le numérique et que nous bénéficions de formations et de filières d'excellence made in France, comme la Grande École du numérique (GEN).
Par votre intermédiaire, madame la ministre déléguée chargée de la ville, j'invite l'ensemble du Gouvernement à installer dans chaque quartier prioritaire de la politique de la ville (QPV) une école du numérique
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LaREM
pour permettre aux personnes les plus éloignées de l'emploi de se dessiner, ensemble, un avenir ambitieux car, comme le disait Peter Drucker, « la meilleure façon de prédire l'avenir, c'est de le créer », et de le créer ensemble.
Comme vous, nous avons constaté que certains dispositifs dédiés à l'emploi entraient en concurrence les uns avec les autres et étaient devenus si complexes qu'ils ne répondaient plus à leur objectif initial d'accompagner les citoyens. Avec les cités de l'emploi, vous apportez une solution innovante, audacieuse, une nouvelle méthode de travail. Pourriez-vous nous rappeler la stratégie qui les guide et préciser les moyens qui sont déployés afin de ne laisser personne au bord du chemin ?
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LaREM.
La lutte contre les inégalités est au cœur de notre projet politique depuis quatre ans, et pour avoir siégé à vos côtés pendant plus de trois ans, je sais à quel point elle imprègne l'action de la majorité présidentielle au sein de cette assemblée. Pour lutter contre les inégalités, il nous faut mener une action déterminée en faveur de nos territoires et c'est la raison pour laquelle le Premier ministre a annoncé pour les quartiers où la vie est plus difficile qu'ailleurs des mesures à hauteur de 3,3 milliards d'euros, dont 1,1 milliard au titre du plan de relance. Nous pouvons être satisfaits du résultat : 870 millions sont programmés pour les quartiers prioritaires.
Nous assumons notre volonté de nous inscrire dans une trajectoire de plein emploi, le Président de la République l'a encore réaffirmée hier soir. Nous agissons résolument en ce sens, notamment à travers le plan « 1 jeune, 1 solution ». Mais nous savons aussi qu'il existe un fossé entre les solutions nationales et leur application à des jeunes particulièrement touchés par le chômage dans les quartiers prioritaires. Il nous faut donc repenser nos méthodes pour faire en sorte que collectivités, acteurs économiques, acteurs du tissu associatif, agents du service de l'emploi travaillent tous ensemble à des projets de territoire. Les mesures que nous prenons pourront ainsi avoir un impact direct sur la vie de nos concitoyens, particulièrement ceux qui sont les plus éloignés de l'emploi.
C'est cet esprit qui préside au déploiement des cités de l'emploi à chacune desquelles nous consacrons 100 000 euros. Oui, monsieur le député, la relance passera par nos territoires, elle passera aussi par les quartiers prioritaires.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe LaREM.
Fermeture de bureaux de poste, de trésoreries, de brigades de gendarmerie, de guichets SNCF, de cabinets médicaux, manque de transports : vous misez tout sur le tout numérique alors que bon nombre de Français ne disposent toujours pas d'un accès à un débit internet correct, sans oublier nos anciens qui ne sont pas équipés ou familiarisés avec les techniques informatiques. Les doléances de nos concitoyens sont nombreuses et leur colère est légitime.
Les engagements d'Emmanuel Macron ne sont pas tenus. Cette année encore, nous déplorons des fermetures de classes dans les écoles et collèges ainsi que des suppressions de postes de professeurs alors que les élèves ont été pénalisés par plusieurs confinements. Dans ma circonscription, dans les Ardennes, vous fermez même des classes en réseau d'éducation prioritaire (REP). Plus personne ne croit aux promesses que vous nous faites ici la main sur le cœur. Vous instaurez une logique purement comptable au lieu de viser les objectifs attendus du service public. Nous devons accepter qu'un service public soit déficitaire.
Chacun doit pouvoir bénéficier d'un ensemble de politiques nécessaires à la vie de tous les jours. C'est indispensable pour un développement harmonieux des territoires, pour leur attractivité et pour donner à tous les mêmes chances et des conditions de vie acceptables. Ce désengagement de l'État n'est pas tolérable car il importe que la solidarité nationale s'intensifie dans les territoires qui souffrent. Dans ma circonscription de Charleville-Givet, le taux de chômage est très nettement supérieur au taux national : 17 % contre 9,2 %. Quant au taux de pauvreté, il atteint 19,4 % – autrement dit près d'un Ardennais sur cinq vit sous le seuil de pauvreté. La confiance de nos compatriotes à l'égard des élus dépend aussi d'une présence forte de l'État dans nos petites villes et nos campagnes.
Monsieur le Premier ministre, allez-vous enfin entendre l'inquiétude et la souffrance de nos concitoyens ?
Applaudissements sur quelques bancs du groupe LR.
La parole est à M. le ministre de l'éducation nationale, de la jeunesse et des sports.
La présence des services publics en milieu rural nous mobilise pleinement. C'est notre gouvernement qui aura fait le plus, tous services publics confondus, face à la réalité de la démographie rurale qu'en tant qu'élu des Ardennes, vous connaissez bien. Aucun des gouvernements précédents – vous en avez soutenu certains qui ont fait beaucoup moins pour le monde rural –…
…n'aura créé autant de postes que le nôtre.
Dans les Ardennes, il y aura 636 élèves de moins à la rentrée prochaine, et c'est ce problème qu'il faut évidemment prendre à bras-le-corps en créant de l'attractivité. Vous avez dit que le réseau d'éducation prioritaire était sacrifié : il y a en moyenne16,5 élèves par classe qui en relèvent dans le second degré. Le taux d'encadrement, autrement dit le nombre d'élèves par enseignant, est parmi les plus favorables de France avec 6,68, ce qui place votre département parmi les tout premiers au niveau national. Que ce soit à l'école primaire ou dans le second degré, la plupart des classes comptent moins de vingt élèves. Et contrairement à ce que vous avez dit, nous avons mené dans ce département une politique de dédoublement des classes en REP +, qui se poursuivra à la rentrée prochaine en grande section.
Le vrai sujet, c'est la stratégie démographique de rebond en milieu rural, qui doit tous nous unir. Nous la menons au niveau départemental avec les maires afin que les villages deviennent attractifs au moment où nous observons un mouvement d'installation d'urbains en milieu rural. Cette attractivité passe, en effet, par la qualité de l'école. Nous nous sommes engagés à l'assurer comme le montre le taux d'encadrement qui n'a jamais été aussi bon dans votre département comme d'ailleurs dans tous les départements de France.
Je laisse aux habitants des Ardennes le soin de le constater par eux-mêmes. Je vous dis simplement qu'à Revin et à Fumay, classés en zone d'éducation prioritaire, des postes sont supprimés. Vous pourrez le vérifier très facilement, monsieur le ministre.
L'accord au rabais passé hier en commission mixte paritaire sur le projet de loi « climat » entre la droite sénatoriale et la majorité parlementaire est une mauvaise nouvelle. Ce projet de loi, nous étions nombreux à considérer qu'il n'était pas à la hauteur des enjeux. Même s'il faut être de mauvaise foi pour ne pas admettre qu'il comportait des avancées inédites, avec un tiers du plan de relance consacré à un verdissement de l'économie, nous étions bien conscients du fait qu'il y avait un effet lampadaire et que nous n'étions pas du tout au rendez-vous de l'histoire.
L'histoire se rappelle à nous, et d'abord par la science. Nous pouvons nous étonner que ce projet de loi aboutisse à un accord hâtif et par le bas alors même qu'il y a quinze jours, des fuites précédant la publication du rapport du Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat (GIEC) laissaient entendre qu'au-delà d'1,5 degré de hausse de la température, le réchauffement aurait des conséquences irréversibles pour notre planète, alors même que le Haut Conseil pour le climat (HCC), le 29 juin, mettait en garde la France afin qu'elle accélère le rythme des ajustements pour éviter une catastrophe climatique, alors même que le Conseil d'État, le 1er juillet, a rendu une décision enjoignant au Gouvernement de prendre des mesures nécessaires pour répondre à la demande de la commune de Grande-Synthe. Nous sommes sourds à ces appels, nous sommes aveugles à l'embrasement du monde – je pense au dôme de chaleur au-dessus de l'Amérique du Nord.
Vous en êtes restés à de la communication sur un projet de loi d'autosatisfaction. Rien n'y a fait. Vous n'avez pas entendu, dans cet accord conclu à droite, les appels que nous avons, à gauche, dans toute notre diversité, lancés en faveur de mesures systémiques, de mesures de justice. La discussion de ce projet de loi s'achève et nous n'avons ni plus de justice, ni moins de carbone. Elle se conclut donc par un échec.
Alors que les conséquences de la sécheresse se font ressentir dans plusieurs régions du monde et y ressuscitent le spectre des famines, ma question est simple : monsieur le Premier ministre, quel est le coût humain de votre inaction ?
Applaudissements sur les bancs du groupe SOC. – Mme Émilie Cariou applaudit également.
Toujours trop, trop vite, ou pas assez : je crois que c'est l'histoire de notre engagement à vous et à moi pour la protection de l'environnement et de la planète. C'est un exercice que vous connaissez aussi bien que moi. Jamais, il n'y a eu autant de prise en considération de ces enjeux, nous l'avons brillamment montré ces derniers mois en travaillant sur ce projet de loi. Et votre assemblée s'est fait ainsi l'écho d'une prise de conscience approfondie de l'opinion publique. Il faut le souligner et même le saluer.
D'ailleurs, Mme la ministre Barbara Pompili s'associe à moi pour féliciter les membres de la commission mixte paritaire qui sont parvenus, très tard dans la nuit, à un accord, démontrant une intelligence collective au service de solutions concrètes.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe LaREM. – M. Sylvain Waserman applaudit également.
Plusieurs grandes mesures structurantes ont ainsi été réintégrées, telles que le menu végétarien hebdomadaire, l'interdiction progressive de location de passoires thermiques, le calendrier de déploiement des zones à faibles émissions (ZFE). Des dispositions émanant du Sénat ont été conservées, telles que le certificat vert en faveur du biogaz ou l'augmentation du plafond du forfait mobilité durable. Le Parlement a su dépasser ses clivages pour réussir cette impérative transition énergétique.
L'étude d'impact de ce projet de loi confirme qu'il permettra, de manière directe, d'atteindre la cible de réduction de 40 % des émissions de gaz à effet de serre d'ici à l'horizon 2030 : une part non négligeable de notre objectif sera ainsi tenue. L'étude d'impact souligne également les incidences indirectes liées à l'effet catalyseur des mesures réglementaires et des dispositifs préexistants sur la réduction de ces émissions.
Ce projet de loi vient compléter le plan de relance, les mesures d'ordre réglementaire et l'action de la France au niveau européen – avec notamment le mécanisme d'inclusion carbone. Nous menons ainsi, dans la plus grande détermination, une action cohérente et concrète.
Mme Stella Dupont applaudit.
Projet de loi « climat et résilience »
Dans le prolongement de la question de mon collègue Dominique Potier, je souhaite également évoquer les résultats de la commission mixte paritaire sur le projet de loi « climat et résilience ». Au terme d'une très longue réunion, députés et sénateurs se sont mis d'accord sur un texte qui a encore perdu de l'ambition, au nom d'accords politiques qui, finalement, vous arrangent bien.
Dès l'origine, le texte proposé par le Gouvernement s'est révélé très en deçà des conclusions et des attentes de la Convention citoyenne pour le climat. D'ailleurs, il ne remettait nullement en cause notre modèle de développement économique et se situait déjà dans ce que le Président de la République appelle « l'écologie de la production ».
Pourtant, partout dans le monde, la biodiversité recule. Le dérèglement climatique entraîne des conséquences parfois très contrastées : récemment, la gelée noire a frappé les productions agricoles de nos régions ; une vague de chaleur sans précédent a littéralement embrasé un village du Canada ; une autre arrive sur l'Espagne et le Maroc avec des températures attendues de 50 degrés – températures que les experts du GIEC prévoient pour 2050, c'est-à-dire demain. Enfin, un troisième fléau menace la planète : l'épuisement des ressources naturelles et la pénurie d'eau.
Cependant, nous assistons manifestement à deux trajectoires contradictoires : d'un côté, des épisodes climatiques de plus en plus violents et fréquents et, de l'autre, une ambition politique en recul permanent. L'accord obtenu hier en commission mixte paritaire en est la preuve : le texte qui en résulte ne laissera que des regrets à ceux qui y avaient cru, au premier rang desquels les membres de la Convention citoyenne pour le climat.
M. Dominique Potier applaudit.
Ils avaient donné au texte initial une note de 2,5 sur 10 ; à votre avis, combien auriez-vous aujourd'hui au contrôle continu ?
Applaudissements sur les bancs du groupe LT. – MM. Dominique Potier et Gérard Leseul applaudissent également.
Le changement est à l'œuvre, c'est une évidence.
Il se joue au niveau climatique, mais également sur le plan de l'érosion de la biodiversité ; ces enjeux sont très liés et je vous remercie de l'avoir souligné.
La feuille de route arrêtée par le Président de la République fixe des objectifs clairs : une France résiliente face au changement climatique, qui atteint la neutralité carbone et se montre respectueuse de son patrimoine naturel. Elle s'appuie sur la programmation pluriannuelle de l'énergie (PPE) et la loi « énergie et climat » qui ont gravé dans le marbre ses ambitions : la neutralité carbone à l'horizon 2050, un objectif de réduction de 20 % de la consommation d'énergie finale à l'horizon 2030, une part de 33 % des énergies renouvelables dans le mix énergétique d'ici à 2030 et une diminution de la part du nucléaire pour atteindre 50 % de la production d'électricité en 2035. La feuille de route en matière énergétique est donc claire.
Le projet de loi « climat et résilience », sur lequel la commission mixte paritaire vient de parvenir à un accord, fixe également des objectifs très forts en matière de transports, de logement, d'artificialisation des sols ou encore en faveur de modes de consommation et de production plus sobres et soutenables.
L'année 2021, vous l'avez souligné, sera l'année de la biodiversité. Cela nous permettra d'adopter une nouvelle stratégie nationale, en conformité avec les objectifs climatiques. Il n'a jamais été aussi urgent d'agir, mais nous devons le faire dans un souci de cohérence : cohérence entre les différentes politiques publiques – nous y travaillons chaque jour au niveau interministériel afin de décloisonner les enjeux –, cohérence entre les objectifs et les moyens, que nous développons encore grâce à ce projet de loi, et cohérence entre les politiques nationales et internationales, notamment lors de grands événements comme la COP15 biodiversité ou la COP26 qui se tiendront prochainement.
Suspension et reprise de la séance
La séance, suspendue à seize heures cinquante, est reprise à dix-sept heures cinq, sous la présidence de M. David Habib.
L'ordre du jour appelle la discussion, sur le rapport de la commission mixte paritaire, du projet de loi de programmation relatif au développement solidaire et à la lutte contre les inégalités mondiales (n° 4279).
La parole est à M. Hervé Berville, rapporteur de la commission mixte paritaire.
J'ai le plaisir de m'exprimer cet après-midi, quelques jours après que la commission mixte paritaire (CMP) s'est réunie pour examiner le projet de loi de programmation relatif au développement solidaire et à la lutte contre les inégalités mondiales. Avant toute chose, je tiens à saluer l'état d'esprit constructif qui a animé nos débats depuis le début. Il s'est concrétisé en mars par l'adoption du texte à l'unanimité en première lecture à l'Assemblée nationale avant d'être confirmé par le compromis trouvé à l'issue des travaux de la CMP, rendu possible par l'ouverture d'esprit dont ont fait preuve nos deux collègues rapporteurs pour le Sénat, Hugues Saury et Rachid Temal, ainsi que les présidents des commissions chargées des affaires étrangères dans chacune des deux chambres, Jean-Louis Bourlanges et Christian Cambon.
Avec ce texte, nous nous donnons les moyens de notre ambition, qui consiste à prendre toute notre part dans la réponse aux défis communs, dans le combat contre la pauvreté et les inégalités, et dans la réduction des fractures qui divisent nos sociétés. Plus de cinquante ans après la résolution adoptée par l'Assemblée générale des Nations unies en 1970, qui incitait les pays les plus riches à consacrer 0,7 % de leur revenu national brut (RNB) à la solidarité internationale, la France va enfin tenir son engagement.
Au-delà d'une intensification sans précédent de notre effort budgétaire, qui fera d'ailleurs de la France le seul pays au monde à augmenter aussi massivement l'aide publique au développement (APD) alors que certains reculent ou stagnent,…
Il a raison !
…cet engagement à atteindre le ratio de 0,7 % constitue d'abord un cap. Il traduit une ambition qui nous anime tous et que, malgré nos différences et nos nuances, nous n'avons jamais cessé de défendre collectivement, surtout dans le contexte sanitaire, économique et politique si particulier que nous connaissons. Je tiens d'ailleurs à remercier tous les membres de cette assemblée – les députés de la majorité, que je ne nommerai pas tous car ils sont nombreux, mais aussi ceux des oppositions, notamment Dominique Potier, Jean-Paul Lecoq, Bérengère Poletti ou encore Michel Herbillon –, qui ont su défendre ce texte malgré les difficultés auxquelles nous sommes confrontés.
Pour être au rendez-vous de l'histoire, il ne suffisait pas de fixer un cap : nous nous devions également d'engager avec méthode les transformations nécessaires pour que notre politique de développement réponde aux nouvelles réalités. Le présent projet de loi comporte, à cet égard, de nombreuses avancées.
Pour la première fois, nous nous dotons d'un cadre stratégique de partenariat global qui permettra de muscler le pilotage politique, de clarifier la chaîne de commandement et de renforcer le rôle de nos ambassadeurs sur le terrain. De manière tout aussi inédite, nous établissons une véritable programmation budgétaire, ambitieuse et réaliste, qui nous permettra de cibler d'abord les pays les plus pauvres, notamment au Sahel, et d'investir massivement dans des secteurs prioritaires tels que l'éducation, la santé, l'adaptation au changement climatique et l'égalité entre les femmes et les hommes.
Au-delà de ces moyens nouveaux, c'est toute la société que nous voulons embarquer dans ce juste combat. Le texte marque, à ce titre, une étape inédite dans la reconnaissance et le soutien aux acteurs de la société civile, aux collectivités territoriales, aux membres des diasporas, aux fondations, aux entreprises et aux acteurs du monde de la recherche, qui doivent prendre leur part à cette belle politique et ont toute leur place pour faire valoir leur expertise et leur savoir-faire en la matière.
Nous franchissons également un pas décisif dans la lutte contre la corruption, à travers la création d'un mécanisme de restitution des recettes issues des biens mal acquis. C'est là une avancée attendue depuis plus de quinze ans par tous les militants de cette cause – notamment l'ONG Transparency International, que je salue. Dans le respect d'une triple exigence de transparence, de redevabilité et d'association de la société civile, les populations spoliées verront enfin cet argent leur revenir pour améliorer leur condition.
Il nous sera toutefois impossible de respecter tous ces engagements sans garantir l'effectivité de notre action : le seul principe qui doit nous guider est celui qui consiste à trouver les solutions et les partenariats les plus efficaces possible pour faire face aux enjeux communs et préparer les défis de demain, à Bangalore comme dans les Côtes-d'Armor, aux Comores comme au Salvador. La création d'une commission indépendante d'évaluation constitue en ce sens une avancée majeure, car elle permettra d'évaluer de manière rigoureuse l'incidence réelle et concrète de nos actions. Vous le savez, il existait un point de divergence entre les deux chambres quant à la composition et à la nature de cette commission. Nous avons toutefois su trouver un compromis et emprunter une ligne de crête pour créer un objet innovant, qui deviendra la pierre angulaire de la modernisation de cette politique.
Ce texte est aussi le reflet de notre vision du monde et des valeurs que nous défendons collectivement et qui guident notre action sur le plan international. L'Assemblée peut être fière d'avoir renforcé la place des combats universels que sont la défense des droits humains – notamment ceux des enfants –, l'éducation des jeunes filles ou encore la préservation de la biodiversité. C'est autour de ces valeurs que nous avons su nous réunir. Le compromis trouvé par la CMP ne renie aucune d'entre elles, bien au contraire.
Le projet de loi prend largement en considération l'important travail effectué par chaque chambre et par chaque parlementaire, dans leur diversité. Je ne peux donc que vous inviter à l'adopter, en ayant une pensée pour la présidente Marielle de Sarnez et pour tous les militants de cette belle cause qui ont su militer, s'investir et continuer à nous pousser pour rendre la politique d'aide au développement plus efficace, plus transparente et plus citoyenne.
Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM.
La parole est à M. le secrétaire d'État chargé du tourisme, des Français de l'étranger et de la francophonie.
C'est un moment assez fort pour chacun d'entre nous, me semble-t-il, que l'achèvement du processus législatif concernant ce texte. Victor Hugo écrivait : « La fraternité n'est qu'une idée humaine, la solidarité est une idée universelle. » Cette phrase, je le crois, résume assez bien la philosophie qui anime notre action en matière de développement solidaire. Elle inspire en tout cas le texte qui nous réunit de nouveau aujourd'hui.
Il y a quatre mois, ce projet de loi de programmation était adopté à l'unanimité par l'Assemblée nationale, qui envoyait ainsi un signal fort de soutien à l'ensemble des acteurs français du développement ainsi qu'un très beau message de confiance et de solidarité à nos partenaires du Sud.
Après le vote du Sénat en mai dernier, la commission mixte paritaire s'est réunie, aboutissant à un accord entre les deux assemblées. Le Gouvernement s'en réjouit. Le texte équilibré issu de cette CMP recueille son plein assentiment.
Tout comme Hervé Berville, permettez-moi à mon tour de rendre hommage à l'action de tous ceux qui ont rendu possible ce résultat, à commencer, bien sûr, par Jean-Yves Le Drian qui, depuis trois ans, n'a pas ménagé ses efforts. Pour l'avoir vu à l'œuvre, je peux vous dire que, tel Sisyphe parfois, il n'a jamais renoncé. C'est ainsi qu'il a pu obtenir plusieurs arbitrages favorables qui font honneur à notre politique de développement et de solidarité internationale. Il a fait preuve de la plus grande opiniâtreté pour que ce projet de loi voie le jour puis pour que le processus législatif soit lancé et se poursuive jusqu'à son terme. Hélas, il ne peut être parmi nous aujourd'hui. Il s'est envolé vers les États-Unis car, vous le savez, en ce mois de juillet, la France préside le Conseil de sécurité des Nations unies, où différents dossiers internationaux doivent être traités dans les toutes prochaines heures. Il m'a chargé de vous présenter ses excuses.
J'ai aussi une pensée pour la regrettée Marielle de Sarnez qui a lancé ce processus commun et avec laquelle le dialogue a toujours été constant, constructif et fructueux. Je me souviens encore de cette réunion, dans le bureau de Jean-Yves Le Drian, en présence de certains de vos collègues, au cours de laquelle nous avions eu l'idée du conseil local du développement. Les initiatives de ce type ont également été le fruit de discussions régulières.
De même, monsieur Bourlanges, vous avez toujours défendu l'idée d'un projet de loi ambitieux. J'ai pu le mesurer lors des débats en commission des affaires étrangères. En tant que président de la commission, vous avez toujours souhaité que les discussions durent le temps nécessaire, que tous les amendements et arguments soient examinés de façon précise et détaillée afin que le texte s'en trouve renforcé. Je vous remercie pour cet état d'esprit bienveillant.
J'adresse évidemment un salut particulier à Hervé Berville qui, après avoir pavé la voie avec son rapport, a fait en sorte que les recommandations formulées figurent dans le projet de loi. J'associe à ces remerciements Bérengère Poletti et Rodrigue Kokouendo qui, en tant que corapporteurs de la mission d'information, ont contribué à alimenter la réflexion sur ce thème.
Je tiens enfin à remercier les députés issus de tous les groupes qui, en intervenant au cours des débats, ont contribué à enrichir le projet de loi examiné. Je crois en effet me souvenir que les amendements adoptés étaient issus de tous les bancs.
Le consensus qui s'est dessiné sur ce projet de loi fait honneur à notre démocratie et démontre notre capacité collective à nous rassembler sur l'essentiel au-delà de nos différences. Nous avons su regarder en face, ensemble, les bouleversements du monde. À travers ce texte, nous redonnons un sens concret aux valeurs qui nous sont chères : la solidarité, le progrès, l'humanité et la dignité.
Le nouvel élan que nous donnons à notre politique de développement solidaire ne se résume pas à des mots que l'on alignerait. C'est le réel qui change. Le forum Génération Égalité, qui s'est achevé à Paris il y a deux semaines, en est une illustration, comme vous avez pu le constater.
Ce projet de loi, ambitieux d'un point de vue quantitatif, reflète aussi une politique de développement solidaire qui se met au service d'une géopolitique des valeurs. Nous pensons en effet que nos partenaires du Sud méritent une autre voie que la dépendance voire la sujétion. Si, comme nous le voyons bien, différents modèles de développement coexistent, celui dont nous faisons la promotion respecte infiniment nos partenaires.
J'observe avec satisfaction que le texte adopté par la commission mixte paritaire confirme et renforce les objectifs du projet de loi. Permettez-moi de revenir sur quelques-unes de ses avancées.
J'évoquerai tout d'abord l'article 1er , fondamental car relatif aux moyens attribués à l'aide publique au développement. Au-delà de la réaffirmation de l'engagement du Président de la République de consacrer 0,55 % de la richesse nationale à notre aide publique au développement en 2022, vous êtes parvenus à fixer une trajectoire et des moyens jusqu'en 2025, avec des cibles intermédiaires en pourcentage du RNB pour les années 2023 et 2024.
Ensuite, nous partageons votre volonté de concentrer notre aide sur les pays les plus vulnérables, en particulier sur les dix-neuf pays prioritaires. Nous saluons également la flexibilité introduite par le texte de la CMP, qui permet de concilier l'atteinte des cibles de concentration pour la composante bilatérale de l'APD, la part de dons et l'aide programmable par pays destinée aux dix-neuf pays prioritaires, avec les autres objectifs de notre politique de développement, notamment les conférences à venir de reconstitution des fonds multilatéraux, pour lesquelles notre pays est évidemment très attendu.
Je retiens également parmi les avancées issues de vos travaux – je pense en particulier à ceux des députés Laurent Saint-Martin et Jean-Luc Warsmann – la création d'un dispositif de restitution des produits de cession des biens mal acquis, moyen très concret de lutter contre les ravages de la corruption, qui permet aux populations concernées de bénéficier des richesses dont elles ont été spoliées.
Je salue également le fait que vous ayez renforcé le pilotage par l'État de notre politique de développement. Celle-ci dispose désormais d'une chaîne de commandement claire, du plus haut niveau, avec le conseil présidentiel du développement, jusqu'à celui de nos pays partenaires, avec le conseil local du développement, en passant par celui de nos opérateurs.
S'agissant de la commission d'évaluation, évoquée tout à l'heure par Hervé Berville, je salue la solution équilibrée retenue par la CMP qui permettra à cette instance d'être réellement indépendante. Elle garantit en effet que les membres de cette commission ne reçoivent pas d'instructions, ne subissent pas de pressions et disposent d'un mandat dont la durée est suffisamment longue pour leur permettre de travailler sereinement. Nous aurons besoin très rapidement d'une telle commission, si essentielle pour renforcer notre capacité à rendre compte de façon transparente de notre politique de développement.
Je retiens aussi que la CMP a trouvé un accord sur le nouveau dispositif d'attractivité des organisations internationales en France. Il est vrai que l'enjeu est aussi de placer notre pays au centre du combat pour le développement et pour les biens publics mondiaux. Influence et attractivité vont de pair dans un contexte où, on le voit, la géopolitique n'est jamais bien loin des dossiers relatifs à la diplomatie des biens communs.
S'agissant de ces questions liées aux privilèges et à l'immunité, le Parlement se prononcera trois fois, d'abord sur l'habilitation, puis sur la ratification de l'ordonnance et enfin sur l'autorisation de ratification de l'accord de siège. Les prérogatives du Parlement sont absolument respectées.
Le projet de loi inclut en annexe le cadre de partenariat global qui était une recommandation d'Hervé Berville dans son rapport remis il y a près de trois ans, et qui servira de véritable livre blanc de la politique de développement française. Ce document, que vous avez considérablement enrichi par vos amendements et qui propose également un cadre de résultats, marque un effort de transparence et de pédagogie inédit. J'insiste sur ce dernier point car si, dans cet hémicycle, nous sommes tous convaincus de l'importance de cet élan en matière de politique de développement et de solidarité internationale, nous devons faire en sorte que nos concitoyens le soient aussi.
Le débat parlementaire a montré que nous partagions un même objectif : doter la France de moyens renforcés et d'une méthode refondée pour tirer toutes les leçons de la crise pandémique, pour défendre les biens publics mondiaux et pour créer des partenariats de solidarité avec les pays les plus vulnérables. L'adoption par l'Assemblée du texte issu de la commission mixte paritaire constituera une étape historique pour la politique de développement de la France. Soyez-en remerciés.
Applaudissements sur les bancs des groupes LaREM et Dem.
La parole est à M. Jean-Louis Bourlanges, vice-président de la commission mixte paritaire.
Je veux louer, à mon tour, le travail des parlementaires, du rapporteur mais aussi de la commission mixte paritaire qui s'est conclue par un accord. Avec nos collègues du Sénat, nous sommes parvenus, me semble-t-il, à un excellent résultat.
Comme cela a été dit, je crois que nous avons permis des avancées sur plusieurs points. Tout d'abord, du point de vue de l'engagement global, nous, députés, avons précisé la rédaction du texte tandis que nos collègues du Sénat l'ont enrichi de chiffres. Cette union a constitué un heureux mariage. La qualité du projet de loi qui vous est proposé est supérieure à celle de chacun des deux textes initiaux.
Deuxièmement – et c'était important pour nous –, nous avons très nettement souligné nos trois priorités: les dons plutôt que les prêts, le bilatéral plutôt que le multilatéral, et la concentration géographique.
Enfin, comme le rapporteur vient de le dire, s'agissant de la commission d'évaluation, deux logiques s'opposaient. Nous voulions instaurer un comité d'évaluation composé de professionnels capables de réaliser un travail technique – le rapporteur y tenait beaucoup – tandis que nos collègues du Sénat étaient très attachés à la présence de parlementaires au sein de cet outil de contrôle, ce qui est tout aussi légitime. Le compromis imaginé – la création d'un comité composé de deux collèges – me semble très heureux : il permettra aux experts de travailler en toute indépendance et avec efficacité tout en assurant une activité de contrôle par le Parlement.
Pour toutes ces raisons, j'estime que la commission mixte paritaire, qui s'est déroulée dans une atmosphère excellente, a abouti à un résultat très satisfaisant. Je remercie donc tous les collègues qui y ont participé.
Applaudissements sur les bancs des groupes Dem et LaREM.
Les pays les plus pauvres ont un accès retardé au vaccin. À l'heure où je parle, seuls 1 % des Africains ont été vaccinés contre 40 % des Européens et 50 % des Américains. Covax, le programme de l'OMS, l'Organisation mondiale de la santé, chargé de fournir en doses les pays en développement, n'a expédié que 100 millions de doses dans le monde alors que 500 millions étaient pourtant promises dès juillet. Selon le rapport sur la sécurité alimentaire publié hier, 118 millions de personnes supplémentaires ont été confrontées à la faim en 2020 par rapport à 2019, du fait de la crise sanitaire.
Dans ce contexte, nous devons redoubler d'efforts de solidarité à l'égard des populations les plus vulnérables. Je rappelle avec force qu'aucun pays, la France pas plus que les autres, ne pourra se développer s'il ne prend pas en considération le besoin de tous les peuples de s'épanouir dans le respect d'une seule planète – car nous n'en avons qu'une. Si nous ne nous engageons pas dans ce mouvement, nous nous condamnons tous à des affrontements fratricides et sans issue.
En 1970, les pays riches s'étaient engagés à consacrer 0,7 % de leur produit intérieur brut à l'aide au développement ; le compte n'y est toujours pas. Si l'aide au développement a augmenté, elle ne représente, par exemple, que 1 % des plans de relance pour lutter contre le covid-19, ce qui est insuffisant pour juguler la pandémie au niveau mondial.
Néanmoins l'objectif visé en matière de part d'aide publique au développement est en hausse, à 0,55 % de notre revenu national brut pour l'année 2022. Nous avons utilement complété l'article 1er du projet de loi en faisant réapparaître les normes internationales dans nos politiques.
Reste que des questions de fond se posent toujours. Nous avons été nombreux à exprimer notre regret que cette loi de programmation ne s'étende que jusqu'en 2022 alors que nous sommes déjà en 2021. La rédaction finale prévoit que la France s'efforcera d'atteindre en 2025 une part de 0,7 % du PIB consacrée à l'aide publique au développement. Nous regrettons que cette formulation n'ait pas de valeur contraignante et aurions préféré qu'il soit simplement précisé que la France lui consacre 0,7 % de son PIB en 2025, conformément à l'engagement du Président de la République.
Si nous saluons le calendrier indicatif des cibles intermédiaires permettant d'atteindre cet objectif, il aurait été plus judicieux de raisonner en volume et non en pourcentage de RNB, car ce pourcentage est déjà dépassé cette année, en raison de la diminution du revenu national dû à la crise. En outre, cette hausse est en partie en trompe-l'œil car certaines données, telles que la prise en charge des migrants dans notre pays, sont incluses dans le calcul.
Le groupe Libertés et territoires a beaucoup insisté lors des débats sur la nécessité de privilégier les dons par rapport aux prêts et de cibler l'aide vers les pays qui en ont le plus besoin.
La rédaction définitive du projet de loi constitue une avancée en la matière puisque les dons devront représenter 70 % du montant total de l'aide publique au développement – hors allégements de dette et prêts aux institutions financières –, ce qui va insuffler une évolution positive au modèle français d'aide au développement qui tend encore à concevoir l'aide comme un investissement à rentabiliser alors qu'elle devrait avoir pour seule vocation d'aider les populations. Toutefois, ce montant reste inférieur à notre demande et à la moyenne des pays donateurs de l'OCDE l'Organisation de coopération et de développement économiques – qui se situe autour de 85 %, je le rappelle. Le texte prévoit aussi que 25 % de l'aide-pays programmable seront ciblés sur les pays prioritaires en 2025 : ce recentrage vers les pays qui en ont le plus besoin est crucial à nos yeux, mais il aurait dû être plus important parce que la France a créé sa propre liste de pays prioritaires, distincte de celle de l'OCDE – de toute façon, nous ne disposons toujours pas de moyens permettant de contrôler réellement les montants affectés à ces priorités.
Le groupe Libertés et territoires votera ce texte en se félicitant du consensus trouvé à l'Assemblée nationale et au Sénat. Si nous aurions souhaité qu'il aille plus loin, il constitue néanmoins une avancée indéniable pour les populations qui en ont besoin. Je renouvelle évidemment ma satisfaction quant à la qualité du travail effectué grâce au rapporteur et au président de la commission des affaires étrangères, et je souligne le grand esprit d'ouverture du Gouvernement qui a accepté plusieurs avancées du Parlement : je pense à nos amendements visant à renforcer l'accessibilité des produits de santé issus de la recherche publique ou encore à instaurer une obligation de vigilance à l'égard des acteurs du développement. Je tiens à saluer les nombreuses ONG qui nous ont tous aidés dans la préparation de ce texte et qui œuvrent chaque jour pour tenter d'améliorer le sort de nombreuses populations à travers le monde. Le contexte particulier que nous vivons nécessite un effort de solidarité décuplé et nous devons faire tout ce qui est possible pour que la crise ne vienne pas balayer les progrès réalisés par des décennies d'efforts en matière de développement humain, de protection de l'environnement, d'accès à l'éducation ou encore d'égalité entre les femmes et les hommes.
M. le vice-président de la commission mixte paritaire et M. le secrétaire d'État applaudissent.
Enfin, je dis bien enfin, nous arrivons au terme d'un processus législatif qui aurait dû être entamé dès 2018… C'est peu dire que ce texte était très attendu puisqu'il devait résoudre les contradictions de notre aide publique au développement en l'adossant à des principes forts et à une progression chiffrée. On aurait pu croire que le retard pris allait permettre au moins de prendre en considération la nouvelle donne planétaire créée par la pandémie du covid-19. Il n'en est rien et les bras nous en tombent.
Vous connaissez, chers collègues, mes critiques à l'encontre de ce projet de loi que je considère insuffisant au regard de la marche que nous devons gravir et que la crise actuelle a rendu encore plus haute. Malgré les minces progrès des arbitrages rendus par la commission mixte paritaire, l'ensemble du texte reste à mon sens trop timide. Si un échéancier couvre certes la période 2022-2025, les engagements financiers manquent de fermeté et ne portent avec certitude que jusqu'à l'année prochaine, ce qui est tout de même particulièrement dommageable pour une loi que l'on dit de programmation… Je regrette aussi que la trajectoire vers le 0,7 % du revenu national brut reste soumise à une clause de revoyure alors que nous aurions pu émettre un signal fort en inscrivant dans le marbre une exigence sur laquelle, je le rappelle, la France s'est engagée à la tribune de l'ONU en… 1970 ! Aucune remise en question non plus de certains mécanismes pernicieux qui érodent la qualité et les conditions de délivrance de notre aide publique au développement : je pense notamment au fameux contrat de désendettement et de développement.
Je voudrais revenir aussi sur certaines hypocrisies de notre politique en matière de développement et de solidarité. Ainsi, le texte se donne pour objectif « l'éradication de la pauvreté dans toutes ses dimensions, la lutte contre l'insécurité alimentaire et la malnutrition, la protection de la planète, la promotion des droits humains » alors que, trop souvent dans cet hémicycle, ce que nous écrivons d'une main, nous le raturons de l'autre. Je regrette, ce qu'a fort justement souligné notre brillant collègue Jean-Paul Lecoq en première lecture, que ce texte de loi prolonge le récit néolibéral d'une croissance fondée sur le productivisme et sur les industries extractives. Alors que la crise climatique nous contraint à revoir de fond en comble notre modèle de développement, que les catastrophes se suivent et que leur rythme s'accélère, il est incompréhensible que ce texte, qui va constituer le fil rouge de notre solidarité internationale, fasse de la richesse et de ses indicateurs un de ses angles morts. J'aurais souhaité, par exemple, qu'il s'émancipe du produit intérieur brut au profit d'autres mesures telles que l'indice de développement humain. Ce n'est pas un point mineur car on ne peut pas faire l'économie d'une réflexion élargie sur le modèle de développement que nous voulons construire et encourager à travers le monde.
De même, il est incohérent de se prévaloir dans ce texte du droit international et du droit humanitaire au vu de certains choix de notre diplomatie : nous n'avons pas soutenu les Kurdes, je le rappelle, nous avons abandonné les Palestiniens à leur sort en ne cessant de renvoyer dos à dos Israéliens et Palestiniens, nous continuons à vendre des armes à des États peu fréquentables, et en même temps – sans doute la magie du « en même temps » –, nous continuons à entendre de la part du Président de la République et du Gouvernement des discours et des textes relativement creux mais qui indiquent un sens, celui de la paix. Ce double discours nous est particulièrement insupportable. Il faut de la cohérence entre les objectifs affichés et la réalité de la politique menée. Même problème de cohérence en matière de choix dans la crise sanitaire puisque notre pays ne finance que 15 % de ce que l'on attend de lui dans le cadre du mécanisme international d'accès aux vaccins des pays les plus pauvres.
Mes chers collègues, sans cohérence de nos politiques, sans réelle ambition chiffrée et adossée à des principes qui irriguent l'ensemble de notre action, nous nous condamnons à faire de notre aide publique au développement un simple sparadrap. Voilà pourquoi, sur ce texte, nous nous abstiendrons.
Applaudissements sur les bancs du groupe FI.
Il est toujours satisfaisant de voir un texte arriver à son terme après avoir été autant amélioré par rapport à sa version initiale. Le Parlement a œuvré avec force pour faire avancer beaucoup de choses, dont la programmation. Grâce au Sénat, celle-ci est devenue plus concrète, contrairement au vœu pieux inscrit dans la version de l'Assemblée nationale. Cette amélioration démontre les faiblesses d'un exécutif qui croit tout maîtriser et fait trop souvent abstraction des professionnels du secteur concerné, un exécutif qui entend sans écouter et qui consulte sans prendre en compte. Heureusement, le Parlement, lui, est plus à l'écoute des organisations de solidarité internationale qui ont interpellé les parlementaires ; leurs inquiétudes ont été entendues et nos débats y ont fait écho.
Ces inquiétudes, quelles étaient-elles ? Que l'État fasse une loi de programmation sans rien programmer du tout et qu'il propose des cibles à atteindre désincarnées sans prendre en compte les problèmes financiers qui en découleraient. Côté programmation, les choses ont été améliorées par le Sénat, mais la commission mixte paritaire a rétrogradé : pour les députés communistes et pour l'ensemble des députés du groupe GDR, non seulement il fallait aller jusqu'à 2025, mais aussi maintenir une projection en chiffres absolus. La commission mixte paritaire n'aurait pas dû revenir sur cette avancée. Alors qu'on a pris bien soin d'inscrire des chiffres précis dans la loi programmation militaire, tout se limite ici à de vagues cibles en pourcentage au-delà de 2022. Pourtant, et nous l'avons vu cette année, si le PIB chute à dépense constante, les pourcentages gonflent, c'est mathématique. Cet artifice est injuste, il n'aide pas ceux qui meurent de faim, pas ceux qui ont besoin d'aide sanitaire ou éducative. Cela constitue la première ligne rouge que nous avions définie dès la commission et qui nous empêchera de voter pour ce texte. Même s'il faut saluer le fait que la programmation de la mission "Aide publique au développement " aille maintenant jusqu'en 2025 et que la cible des 0,7 % soit fixée à cette échéance, ce n'est pas suffisant du tout.
Deuxième ligne rouge : la taxe sur les transactions financières. Le Sénat avait renforcé cette taxe pour financer l'aide publique au développement, la part de ses recettes allouée au fonds de solidarité pour le développement étant relevée à 60 %, avec un seuil de près de 1 milliard d'euros. Mais cette disposition n'a pas été maintenue, et c'est fort dommage car l'idée de faire profiter la solidarité internationale de la hausse continue des recettes de la taxe sur les transactions financières, instrument créé à cette fin, était la bonne. Avec ce retour au statu quo, c'est à nouveau le budget général qui bénéficiera de cette croissance, ce que nous regrettons.
Troisième ligne rouge : l'intention de la France derrière la notion d'aide publique au développement. Jean-Yves Le Drian n'est pas revenu sur ses propos indiquant que « l'aide publique au développement est un outil de puissance au service de la France ». Cette vision est totalement opposée à la nôtre. Je le redis ici : les députés communistes voient l'aide publique au développement comme une péréquation mondiale permettant de réduire les inégalités, et non comme un moyen d'avancer ses pions pour rendre certains États plus dépendants encore à notre égard.
Le quatrième sujet, c'est bien évidemment la valeur juridique du cadre de partenariat global, le CPG, qui n'est toujours pas à la hauteur. L'asymétrie entre les douze articles et le droit mou que constitue ce rapport annexé n'est pas souhaitable. Quel est son objectif réel s'il n'est là que pour afficher de belles ambitions ?
Cinquième sujet : l'article concernant le 1 % transport permet aux autorités organisatrices de transports de mener des projets de coopération internationale. Je regrette profondément que depuis février, rien n'ait été fait par l'exécutif pour permettre aux collectivités qui ont mis en place le transport en commun gratuit d'appliquer ce dispositif. Comme je l'ai déjà dit, si le 1 % transport ne peut être utilisé dans le cadre du versement transport, les autorités appliquant la gratuité des transports en commun seront empêchées de recourir à ce beau dispositif. On nous avait promis que le ministère des affaires étrangères et celui des transports travailleraient ensemble sur ce sujet : que s'est-il passé ? Ni le Gouvernement ni la commission ne l'ont évoqué dans leurs interventions.
Voilà cinq éléments qui empêcheront les députés communistes de voter pour ce texte. Il a évidemment le mérite de prévoir un grand nombre de mesures positives,…
…notamment les cibles concernant le partage entre les aides multilatérales et les aides bilatérales, ou encore celles concernant le don et le prêt, toutes dispositions importantes pour mieux objectiver les ambitions affichées, mais, vous l'aurez compris, malgré les améliorations apportées par le Sénat et maintenues en partie par la CMP, notre groupe maintiendra son choix de l'abstention.
Applaudissements sur les bancs du groupe GDR.
C'est un plaisir de m'exprimer cet après-midi devant vous, dans le prolongement du succès de la commission mixte paritaire sur le projet de loi de programmation relatif au développement solidaire et à la lutte contre les inégalités mondiales. Je tiens à saluer l'état d'esprit constructif de l'ensemble des participants aux travaux de la CMP, notamment les sénateurs Richard Yung, Hugues Saury et Rachid Temal, et bien évidemment notre rapporteur Hervé Berville. J'ai une pensée particulière et émue pour la présidente Marielle de Sarnez, qui nous a quittés avant l'examen de ce projet de loi mais dont l'engagement était connu de tous. Enfin, je veux saluer le travail des présidents de commission des deux chambres, à commencer par vous, cher Jean-Louis Bourlanges, qui avez mené nos débats d'une main de maître.
Lors du vote solennel du 2 mars dernier, j'avais déclaré que la représentation nationale et les acteurs du développement savaient parler d'une seule voix lorsqu'il s'agissait de lutter contre les inégalités mondiales ; désormais, grâce à cette adoption, c'est l'ensemble du Parlement français et notre pays tout entier qui marquent leur unité pour aider les pays les plus vulnérables en ces temps de crise. Car oui, nous sommes à la croisée des chemins : face à la pandémie de covid-19, face à la montée de la pauvreté, face aux dérèglements climatiques et à l'usage croissant de la violence, certains ont choisi le repli sur soi, mais pas la France qui, au contraire, a décidé d'être au rendez-vous de la solidarité et d'augmenter son aide publique au développement. Par cette loi, la France réaffirme que le développement doit être pleinement employé au service d'un monde qui reste à construire, un monde où la science, la paix et la prospérité conduiront au bonheur de tous.
Le groupe La République en marche se réjouit de la version adoptée par la CMP en ce qu'elle marque un tournant historique dans la politique de développement française.
Les principales dispositions du projet de loi telles que votées par notre assemblée ont été conservées, en particulier le cap d'une APD fixée à hauteur de 0,7 % du RNB. Ce faisant, nous respecterons non seulement les engagements du Président de la République, mais également ceux pris par la France devant l'Assemblée générale des Nations unies il y a un demi-siècle.
Cette loi fait l'honneur de notre législature et de chacune et chacun d'entre vous. Elle fait plus particulièrement l'honneur de plusieurs de nos collègues : Jacques Maire et sa volonté d'associer l'ensemble des acteurs locaux à notre stratégie de développement solidaire ; Jean-Paul Lecoq, pour son engagement – que je partage – en faveur de la préservation de l'espace humanitaire ; Aina Kuric et Laurence Dumont, pour leurs efforts constants en faveur des enfants sans identité ;…
C'est vrai !
…Sira Sylla et son souhait d'associer pleinement les diasporas ; Mireille Clapot, pour son engagement en faveur des droits des filles et des femmes ; Bérengère Poletti et Rodrigue Kokouendo, pour leurs propositions d'amélioration de la gouvernance de l'APD ; mais aussi Valérie Thomas pour son souci d'intégrer pleinement les objectifs de développement durable, les ODD, à notre politique nationale. En bref, ce texte fait l'honneur de toutes celles et tous ceux qui ont contribué à l'enrichir au cours de la navette parlementaire – je ne peux tous les citer.
Cette loi, nous l'avons conçue ensemble et adoptée de façon unanime ; je suis fier que ce consensus ait traversé les différents bancs. La France est bel et bien au rendez-vous des défis du développement. Elle fait évidemment aussi l'honneur du ministre de l'Europe et des affaires étrangères qui l'a défendue avec ferveur, tout comme vous, monsieur le secrétaire d'État. Je tenais à vous remercier, ainsi que l'ensemble de votre équipe ministérielle.
Cette loi vient graver dans le marbre ce qui était déjà en train d'être écrit dans l'histoire. En 2018, le Président de la République annonçait une augmentation de la contribution française au Partenariat mondial pour l'éducation. En 2019, notre pays a choisi de consacrer 1,5 milliard d'euros au Fonds vert pour le climat tandis qu'une hausse de 15 % des contributions mondiales en faveur du Fonds mondial de lutte contre le sida, la tuberculose et le paludisme était obtenue sous l'impulsion de la France.
Une fois de plus, la France montre qu'elle ne détourne jamais le regard des femmes et des hommes qui ont le plus besoin de son soutien. Cette constance, elle l'affirme en fixant à 70 % la part que devront représenter les dons au sein de notre APD sur la période 2022-2025. Avec cette ambition, notre pays démontre aux yeux de tous qu'un État peut être résolument altruiste et solidaire dans un monde bien assez vaste et bien assez riche pour tous.
Ce monde est aujourd'hui plus connecté que jamais, et cette interconnexion appelle à la fraternité universelle. À l'heure même où je vous parle, ma voix peut être entendue par des millions de personnes par-delà les continents. À ceux qui écoutent, je tiens à dire qu'aussi longtemps que la solidarité perdurera, l'espoir persistera.
En guise de conclusion, je dirai que cette loi traduit la décision inébranlable du peuple français de rechercher dans des voies nouvelles les remèdes de la crise qui accable le monde. Le texte qui vous est soumis parle de liberté, seule garantie d'une approche démocratique et efficace du développement. Il parle aussi d'égalité, condition sine qua non du développement durable et de la bonne gouvernance. Enfin, il parle de fraternité, car ce n'est que dans la solidarité des peuples que naîtra la sympathie des âmes, germe de cet immense avenir où commencera, pour le genre humain, la vie universelle qu'on appellera le développement mondial.
Pour toutes ces raisons, j'en appelle à vous, mes chers collègues, afin de réitérer une ultime fois le vote unanime qui a honoré notre assemblée en première lecture.
Applaudissements sur les bancs des groupes LaREM et Dem.
Enfin ! C'est le mot qui vient à l'esprit de la plupart d'entre nous en cette après-midi de juillet qui nous réunit pour adopter les conclusions de la CMP sur le projet de loi de programmation relatif au développement solidaire et à la lutte contre les inégalités mondiales. Ce texte a connu bien des péripéties depuis son annonce par le Président de la République en début de quinquennat – je n'y reviendrai pas. Ne boudons pas notre plaisir de le voir enfin soumis à notre adoption définitive.
Mes collègues Bérengère Poletti et Michel Herbillon, qui se sont particulièrement impliqués dans ce texte au nom du groupe Les Républicains, regrettent de ne pouvoir être présents cette après-midi. C'est un honneur pour moi d'intervenir en leurs noms, d'autant plus que je suis personnellement engagé en faveur du développement solidaire dans l'association Humanité Madagascar que j'ai fondée et que je préside.
Je tiens tout d'abord à remercier le rapporteur Hervé Berville pour son travail et son écoute attentive et constructive ; cela nous a permis de parvenir à un texte qui convient à la très grande majorité d'entre nous. Le message que l'Assemblée nationale et le Sénat envoient par ce large consensus est important pour les nombreux acteurs du développement, mais aussi pour nos concitoyens.
Certaines parties du texte nous paraissent plutôt verbeuses et redondantes. C'est notamment le cas du cadre de partenariat global annexé, qui constitue un affichage – sans doute nécessaire – de bons sentiments visant à couvrir l'intégralité du champ très large de l'APD. Il n'en demeure pas moins que le texte comporte des avancées significatives et attendues. La France dispose enfin d'une programmation claire, transparente et efficace en matière d'APD.
Le groupe Les Républicains avait défini un certain nombre de points qui lui paraissaient prioritaires. Ainsi, nous nous félicitons de la clarification de la trajectoire budgétaire proposée par le texte – nouveau tableau, consultation et vote du Parlement, objectif de 0,7 % du RNB en 2025, répartition entre bilatéral et multilatéral, pays prioritaires –, de la reconnaissance formelle du rôle des associations et des ONG dans l'APD, ainsi que d'une définition plus adaptée du rôle de l'AFD, l'Agence française de développement.
Nous soulignons également les efforts fournis afin d'améliorer la représentativité des parlementaires, dans leur pluralité politique, au sein des différentes instances de l'APD – conseil d'administration de l'AFD, conseil d'administration d'Expertise France et commission d'évaluation. Une réforme du règlement de l'Assemblée nationale n'étant pas à l'ordre du jour, il était important que ces précisions soient inscrites dans la loi.
L'article 9 sur la commission d'évaluation de l'APD constitue pour les députés Les Républicains un des aspects les plus novateurs et importants. Comme l'a rappelé en CMP notre collègue Bérengère Poletti, le fait d'aller aider à l'extérieur du pays n'est pas forcément évident et compris par nos concitoyens. Les instruments d'évaluation peuvent aider à cette compréhension et rendre notre APD plus lisible et transparente. Les sommes engagées étant considérables – c'est l'honneur de notre pays –, l'évaluation transparente et indépendante des politiques menées est donc essentielle.
L'indépendance du collège des experts qui composeront la commission sera garantie. Les députés Les Républicains, soucieux de l'indépendance de cette commission, avaient contesté à la fois qu'elle soit présidée par le Premier président de la Cour des comptes – nous avons cependant accepté que le secrétariat soit assuré par la Cour –, mais aussi le fait que des parlementaires en fassent partie. La nouvelle rédaction de compromis de l'article 9 nous a permis d'avancer, chaque assemblée faisant des concessions salutaires ; nous nous en félicitons.
Au-delà de l'examen du texte, il convient de nous rappeler qu'un quart de la population mondiale doit encore compter sur la solidarité internationale. Je le constate sur le terrain lors de mes missions à Madagascar. Cette réalité se rappelle à nous de manière particulièrement vive en ces temps de pandémie mondiale. Un chiffre simple parle de lui-même : à peine 1 % des Africains ont été vaccinés, contre près de 50 % des Américains et 40 % des Européens. La vaccination contre la covid-19 offre un miroir saisissant des disparités économiques, sociales et sanitaires mondiales et met en lumière les difficultés de la mise en œuvre de la solidarité mondiale malgré une volonté affichée de la plupart des grands dirigeants.
Covax, instrument de cette solidarité mondiale, n'a permis d'expédier jusqu'à présent que 95 millions de doses dans le monde, au lieu des 500 millions prévues au 1er juillet. Ces difficultés ne doivent pas nous empêcher de poursuivre nos efforts et confortent au contraire la nécessité d'une aide efficace de la France aux pays les plus pauvres.
Les Français sont généreux, les dizaines d'actions menées localement dans les territoires le démontrent au quotidien. Les collectivités, quel que soit leur niveau, s'investissent ; les associations se démènent ; les ONG innovent. C'est à nous de les y aider en leur offrant un cadre clair et transparent, avec des objectifs précis ; le texte que nous allons adopter dans quelques instants doit le permettre. Le groupe Les Républicains salue ces avancées et votera en faveur de ce projet de loi.
Applaudissements sur les bancs du groupe LR et sur plusieurs bancs du groupe LaREM.
Au nom des députés du groupe Mouvement démocrate (MODEM) et démocrates apparentés, je tiens à apporter un soutien franc et massif au projet de loi. Même s'il n'est pas très médiatisé, il constitue selon moi l'un des textes les plus marquants de notre mandat, et pas seulement parce qu'il est né à l'initiative de Marielle de Sarnez, pour laquelle nous avons tous une pensée affectueuse.
Marquant, il l'est à trois titres. Il constitue tout d'abord une avancée déterminante dans l'APD, domaine essentiel pour notre pays qui est au cœur de notre tradition diplomatique, de notre politique internationale et de la place de la France dans le monde. Nous disposerons enfin d'une stratégie claire et de priorités fonctionnelles et géographiques. Nous pourrons enfin aligner nos actions avec ces priorités en disposant d'un réel dispositif d'évaluation.
Au début de mon mandat, j'ai rencontré les jeunes ambassadeurs de l'association One – peut-être est-ce le cas de nombre d'entre vous. Ils me disaient l'importance d'un texte pluriannuel, mais aussi celle de respecter la promesse d'atteindre 0,55 % du RNB consacré à l'APD qui avait été faite à l'époque par le candidat Macron. Leur rêve était même qu'au cours de la prochaine campagne présidentielle, on parle des 0,7 % inscrits dans les ODD. Ayant fait l'objet d'une résolution de l'Assemblée générale des Nations unies en 1970, cette part du RNB consacrée à l'APD était devenue un véritable étendard pour tous ceux qui croyaient en un monde plus solidaire et plus juste. Les jeunes ambassadeurs de l'association One en rêvaient, cette loi nous offre la possibilité de faire de ce combat mené depuis plus de cinquante ans une réalité ; voilà ce que nous déciderons dans quelques instants.
Deuxième raison pour laquelle notre texte est marquant : il fait une place inédite à la société civile. Les ONG – et, derrière elles, l'engagement citoyen de femmes et d'hommes qui mènent des missions humanitaires et qui donnent de leur temps et de leur énergie pour une cause – trouvent enfin leur juste place. Nous réaffirmons le rôle de la société civile en tant qu'actrice des politiques de développement. Les ONG ont une liberté, un engagement, une agilité qui permet de décupler l'efficacité de nos politiques publiques et de nos politiques d'aide au développement. Ce texte consacre leur rôle en matière de développement solidaire.
Enfin, ce texte est marquant parce qu'il illustre parfaitement ce que j'appelle la valeur ajoutée parlementaire. De quoi s'agit-il ? De la différence qui existe entre le texte qui entre au Parlement et celui qui en ressort. Finalement, peu importe que les amendements soient issus de la majorité ou de l'opposition, de l'Assemblée nationale ou du Sénat, du Gouvernement ou du rapporteur. La différence entre le texte qui entre et le texte qui sort, c'est bien la valeur ajoutée parlementaire.
En la matière, prenez les 0,7 % ou, pour citer des exemples qui me tiennent à cœur, les droits de l'enfant – inscrits dans le texte grâce à des amendements élaborés en lien avec l'UNICEF (Fonds des Nations unies pour l'enfance) et avec le Groupe Enfance –, ou la question de la mobilité de la jeunesse pour laquelle mon collègue Bruno Fuchs s'est beaucoup engagé : ces éléments – comme beaucoup d'autres qui ont été défendus sur tous les bancs de l'hémicycle – ne figuraient pas dans le texte initial. Ils constituent une illustration parfaite de l'enrichissement des textes au fil des amendements et de la discussion parlementaire.
Ce texte transpartisan et fort démontre une idée que je défends en tant que vice-président de l'Assemblée nationale, celle de la valeur ajoutée parlementaire. Contrairement à ce que certains voudraient faire croire par médias interposés et bien loin des caricatures dans lesquelles on voudrait nous enfermer, notre Parlement joue son rôle. Il le joue d'autant mieux que face à aux sujets complexes que nous abordons, nous sommes capables de dépasser les clivages et de réunir une large majorité.
Enfin, ce qui a permis cette valeur ajoutée parlementaire, c'est que le ministre Le Drian et vous-même, monsieur le secrétaire d'État, nous avez écoutés et entendus ; vous avez pris en considération et fait vôtres nombre des propositions de députés de tous les bancs. Et je crois, je l'affirme avec sincérité et avec une certaine solennité, que la façon dont vous avez piloté ce projet de loi est à l'honneur du Gouvernement, de la République, parce que vous avez permis au débat parlementaire de prendre toute son ampleur et parce que, par là même, vous avez mis en avant cette valeur ajoutée parlementaire qui nous tient profondément à cœur. C'est pour cette raison, chers collègues, que je vous propose d'avoir le courage de voter le texte à l'unanimité : ce n'est pas le texte d'un camp ou d'un banc, mais bien un de ces textes qui font la grandeur de notre Parlement et de notre pays.
Applaudissements sur les bancs des groupes Dem et LaREM.
Je m'exprimerai dans un esprit de concorde car, après tout, nous sommes la veille de la fête nationale qui, on l'oublie souvent, est la célébration de la fête de la Fédération.
Ça me plaît, ça !
Je commencerai par conséquent à rendre hommage au dialogue que nous avons eu avec le ministre Le Drian, avec vous, Jean-Baptiste Lemoyne, avec un rapporteur qui n'a pas négligé sa peine pour écouter, entendre les uns et les autres et trouver avec eux des solutions. Je tiens également, bien sûr, à rendre hommage à l'esprit insufflé à ce texte – qui s'est tellement fait attendre – par Marielle de Sarnez : je me rappelle une réunion préalable à laquelle assistaient Clémentine Autain et Jean-Paul Lecoq. Il y avait longtemps que l'opposition ne s'était pas sentie autant considérée. Mme de Sarnez est partie et, Jean-Louis Bourlanges, vous avez maintenu cet état d'esprit en présidant la commission des affaires étrangères. En tant que parlementaire, c'est peut-être l'expérience la plus heureuse que j'aurai vécue depuis le début de ce mandat en ce qui concerne le respect, la considération portés aux uns et aux autres. Pour tout cela, je voulais vous remercier.
Cela s'est révélé plutôt fécond puisque – nous n'y sommes pas habitués – douze amendements significatifs, dont les députés du groupe Socialistes et apparentés sont fiers, ont été considérés comme apportant une valeur ajoutée – pour reprendre vos mots, cher Sylvain Waserman. J'ai ainsi noté qu'on prenait en compte la cible 8.7 des objectifs de développement durable, contre le travail des enfants, qui touche 152 millions d'entre eux, mais aussi le concept de One Health – une seule santé – qui faisait terriblement défaut alors qu'il anime les politiques non seulement de l'Organisation des Nations unies pour l'alimentation et l'agriculture, du monde vétérinaire, mais aussi de l'OMS en matière de prévention et de lutte contre les pandémies.
Je mentionnerai en outre : la cause que nous avons défendue, avec Jean-Paul Lecoq, sur le commerce équitable ; l'attachement à un traitement des déchets qui n'implique pas deux poids et deux mesures entre nos pays et les pays récepteurs ; la question des minerais de sang, les directives européennes restant à appliquer, notamment chez nous ; la prise en compte de la responsabilité sociale des entreprises (RSE) dans les marchés liés à l'APD, ce qui est bien la moindre des choses pour les marchés locaux mais également pour nos industriels, et je pense à quelques-uns d'entre eux à cet instant ; les perspectives méditerranéennes de coopération de la jeunesse en matière culturelle ; enfin, et je rends hommage à l'insistance de Laurence Dumont, l'inscription dans le texte du droit civil sur l'enregistrement des naissances comme le premier des droits.
Ce combat a été l'un des trois menés par le groupe Socialistes et apparentés. Alors que cette législature nous a laissé si peu d'espace d'expression, nous avons eu le bonheur, avec les services compétents de l'AFD, de procéder à la réécriture de toute la partie du texte concernant le foncier. Certains pensaient que nous n'y parviendrions pas ; or nous avons bel et bien récrit cette partie, en cohérence avec nos aspirations et notre diagnostic concernant la France, l'Europe et le monde. Il s'agit là d'une réelle coconstruction avec un organisme gouvernemental. Vous avez eu l'humilité de reconnaître que la nouvelle version était meilleure que la précédente – parce que des personnes de bonne volonté se sont parlé.
La question du droit civil – comment exister comme personne – et celle du droit foncier – comment partager la terre – devaient être ainsi traitées. Selon l'ONU, l'accaparement des terres est une cause plus grande de misère et de violence que les guerres.
Redevenir l'espace républicain au sein duquel on fabrique des principes universels qui passent les murailles était un vrai bonheur.
Ensuite, nous avons rappelé le devoir d'alerte, lié au devoir de vigilance, mais aussi le droit. Nous avons en outre insisté sur la cohérence : ce qu'on fait dans le domaine de la charité, de l'humanitaire ou du développement, on le défait parfois par des politiques commerciales et des traités particulièrement léonins. Nous sommes par ailleurs revenus sur le partage, sur une planète aux ressources finies, qui passe par une révolution de nos modes de vie, étape qui n'est pas à considérer comme un naufrage mais comme une épopée humaniste.
La fête du 14 juillet est non seulement celle de la Fédération, mais aussi celle de la prise de la Bastille. Et, pour terminer, je tiens à vous faire part de deux inquiétudes énormes – il s'agit plus d'alertes que de récriminations, car nous voterons le texte.
Nous venons de signer un accord au rabais, un accord honteux, en CMP, hier, sur le climat, alors même qu'au-delà de la pandémie, les famines liées aux sécheresses s'aggravent dans plusieurs régions du monde – je pense à Madagascar. Était-ce le moment, au terme de l'examen de ce projet de loi sur le climat, de démissionner, de se contenter de petits compromis pour aboutir à un petit calendrier politicien ? En effet, après les rapports du Haut Conseil pour le climat (HCC), du Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat (GIEC) et les études de toutes les autorités scientifiques sur le climat, publiés dès la fin du mois de juin et au début du mois de juillet, il fallait muscler ce texte.
Seconde inquiétude, seconde alerte : la France, depuis 2017, assume le devoir de vigilance vis-à-vis des multinationales, loi passe muraille des droits de l'homme et de l'environnement au bout du monde. Elle est menacée par une directive qui dénaturerait l'esprit de la loi française.
C'est un combat que nous devons mener aux côtés du Président de la République. C'est le sens de la proposition de résolution que 124 de nos collègues ont déposée il y a trois jours auprès de la commission des affaires européennes.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe LaREM, ainsi que sur les bancs de la commission. – M. Jean-Paul Lecoq applaudit également.
Prix Nobel de littérature de 1988, l'Égyptien Naguib Mahfouz, écrit dans son roman Impasse des deux palais que « la patience [était] la clé de la délivrance ». C'est un peu le sentiment que nous éprouvons à la lecture des conclusions de la commission mixte paritaire portant sur le projet de loi de programmation relative au développement solidaire et à la lutte contre les inégalités mondiales – texte tant attendu. Il vient en effet relayer la loi du 7 juillet 2014 d'orientation et de programmation relative à la politique de développement et de solidarité internationale, et témoigne de l'attention portée par le Gouvernement et par le Parlement à ce sujet.
À la fois méconnue de la majorité de nos compatriotes mais également source de certains fantasmes auprès de nos partenaires, notre politique d'aide publique au développement n'en constitue pas moins une dimension importante de notre action internationale. Il devenait donc urgent pour le Parlement de légiférer sur cette nouvelle programmation.
Si l'on peut regretter l'aridité du dispositif législatif, compensée néanmoins par l'exhaustivité du cadre de partenariat global, on ne peut que se réjouir de certaines avancées. Nous pensons en particulier à l'article 2 qui renforce l'information du Parlement, notamment sur la programmation budgétaire prévue à l'article 1er , et la cohérence des politiques publiques susceptibles d'avoir un impact sur l'atteinte des objectifs de développement durable dans les pays partenaires. Nous songeons également à l'article 6 qui promeut les dispositifs de volontariat à l'international, y compris dans le cadre de volontariats dits réciproques, ou encore à l'article 7, qui filialise l'opérateur Expertise France à l'Agence française de développement.
Avec ce texte, la France ambitionne de se doter de moyens pour lutter plus efficacement contre les inégalités mondiales et de protéger les biens publics mondiaux. La révision des objectifs et des modalités d'intervention de la politique française de développement international est d'autant plus indispensable dans le contexte de crise mondiale provoquée par la pandémie de covid-19. Ainsi, le projet de loi prévoit une trajectoire à la hausse des crédits alloués à l'APD, conformément à l'engagement du Président de la République de les porter à 0,5 % du RNB en 2022. Au cours de l'examen du texte, nous avons même fixé l'objectif à 0,7 % du RNB. C'était déjà une belle avancée, mais la CMP est allée encore plus loin en visant les objectifs intermédiaires de 0,61 % pour 2023 et 0,66 % pour 2024.
Conformément à son ADN, le groupe Agir ensemble a amendé le texte de manière constructive en y intégrant notamment les indicateurs des objectifs du développement durable dans le respect des engagements internationaux de la France, en soutenant une meilleure implication des collectivités territoriales dans l'action extérieure du pays. Notre groupe a également souhaité le renouvellement et le renforcement de l'alliance entre l'AFD et la Caisse des dépôts et consignations, afin d'accroître les capacités et la visibilité de notre politique d'aide publique au développement.
En effet, dans la continuité du discours prononcé par le Président de la République à Ouagadougou en novembre 2017, il s'agissait pour nous de prolonger la séquence législative de dimension internationale, inaugurée à l'automne dernier avec le projet de loi relatif à la restitution de biens culturels à la République du Bénin et à la République du Sénégal, et avec la fin du franc CFA, séquence qui ouvre un nouveau cycle dans les relations entre la France et le continent africain.
Car c'est bien d'un changement de paradigme qu'il s'agit. S'il nous faut désormais lutter autrement contre le terrorisme djihadiste par des interventions militaires courtes, nous devons également coopérer autrement. Aux discours pessimistes ou fatalistes portant sur le développement économique africain, il nous incombe de considérer cette nouvelle programmation dans un cadre partenarial à même de s'adapter aux nouvelles contraintes induites par la rapidité, et parfois la déformation, de la circulation de l'information.
Nous appelons ainsi tous les acteurs de l'APD, des bailleurs de fonds aux ONG en passant par les ministères et les centres d'études, à recentrer l'aide sur le développement durable, à l'orienter essentiellement vers les dix-huit pays prioritaires, à prendre en compte effectivement les priorités des États et des populations concernés en les associant réellement à l'instruction et à la conduite des projets.
Enfin, alors, que notre pays présidera le Conseil européen à partir du 1er janvier 2022, une meilleure coordination des moyens et des objectifs doit être recherchée à l'échelle mondiale afin que l'aide trouve le chemin d'une ambition réaliste et raisonnable, et gagne ainsi en crédibilité.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe LaREM, ainsi que sur le banc de la commission.
La pandémie de covid-19 a bouleversé l'aide publique au développement et a montré la nécessité d'une refonte de la gouvernance de notre politique de développement solidaire. Plus que jamais, la crise sanitaire, économique et sociale liée à la pandémie produit des effets considérables sur les progrès réalisés en matière de développement – je pense en particulier à l'enjeu de la vaccination dans les pays en sous-développement, que de nombreux collègues ont rappelé.
Le présent texte propose par conséquent une rénovation des méthodes d'action de la politique de développement, sous la forme d'un partenariat renouvelé avec les pays partenaires et avec tous les acteurs du développement concernés en France, en particulier les organisations de la société civile et les collectivités territoriales. Vous le savez, l'aide au développement est un domaine où, en fin de compte, on légifère très peu car les moyens importent plus que les termes juridiques.
Je tiens, au nom du groupe UDI et indépendants, à saluer franchement l'accord trouvé en commission mixte paritaire et, à mon tour, j'ai une pensée très forte pour notre regrettée collègue Marielle de Sarnez, que nous aimions tant, qui nous manque tant et qui tenait tant à ce que ce texte soit adopté avant la fin de la législature.
Je reviendrai tout d'abord sur un point important concernant les dispositions budgétaires de ce projet de loi de programmation. Au regard des nombreux débats menés à la fois à l'Assemblée et au Sénat, je ne peux m'empêcher de souligner que notre groupe s'était interrogé à raison sur la légitimité, on l'a rappelé, de la période considérée, 2020-2025, alors que le dispositif devait naturellement être limité à la fin du quinquennat, donc en 2022. Nous attendions ici un engagement plus clair du Gouvernement sur la trajectoire budgétaire entre 2023 et 2025, avec le rappel du respect des engagements pris par la France dans le cadre du programme d'action d'Addis-Abeba.
De fait, l'exercice budgétaire proposé n'était pas plus ambitieux qu'une trajectoire de loi de finances, de nombreux collègues l'ont souligné. Sans vision de long terme en comparaison avec la portée des lois de programmation militaire et de celle de la recherche, le présent texte avait pu sembler à certains égards, en demi-teinte, voire fragile. Nous nous félicitons ainsi de la proposition de revoyure, issue de la CMP, qui fixe la trajectoire financière avant la fin 2022, après consultation et vote du Parlement pour les années 2023, 2024 et 2025.
Compte tenu de son rôle en matière budgétaire, c'est au Parlement qu'il revient de détailler, d'approuver, d'évaluer tout objectif et toute trajectoire de ce type. Les représentants de la nation que nous sommes sont des acteurs de la politique du développement et nous devons en contrôler la bonne exécution. Nous avons d'ailleurs déposé des amendements en ce sens afin de renforcer le contrôle de notre Parlement sur cette question dès 2022.
Nous nous réjouissons donc que le Gouvernement ait clarifié sa position en acceptant de présenter avant la fin de 2022 un tableau actualisé des cibles intermédiaires, en retenant une rédaction fixant les valeurs absolues sur lesquelles nous sommes d'accord pour 2020, 2021 et 2022, ainsi que des pourcentages pour les années suivantes.
Pour mieux évaluer l'impact de l'action de la France et renforcer ainsi la transparence sur l'utilisation des moyens engagés, le projet de loi prévoit la création d'une commission indépendante d'évaluation. Bien que nous ne soyons pas favorables à la multiplication des comités et autres commissions, tâchons que celle-ci soit utile et réellement indépendante. Nous souhaitons à cet égard saluer le compromis concernant la nouvelle rédaction de l'article 9 trouvée en commission mixte paritaire avec le nouveau format de la commission d'évaluation de l'aide publique au développement, composée de deux collèges.
Enfin, si nous souhaitons renforcer notre aide au développement, surtout en cette période de crise, il faut aussi mettre pour condition à cette aide une totale coopération des pays partenaires à la réadmission de leurs ressortissants – je l'avais précisé – lorsque ceux-ci ne sont pas admis en France. Cette coopération se doit d'être effectuée en commun dans un cadre européen. Il peut sembler logique, dans le cadre d'une démarche partenariale avec les pays ayant accès à l'APD, que puisse exister un haut degré de coopération dans la maîtrise de l'immigration et la capacité de certains États à maîtriser leurs frontières, à combattre les réseaux de passeurs ou encore à moderniser leur état civil. En ce sens, l'aide au développement se doit d'être mobilisée dans le cadre d'engagements réciproques avec nos partenaires. Cette idée avait déjà été abordée par Jean-Christophe Lagarde lors du débat sur la politique migratoire de la France et de l'Europe en automne dernier.
Pour conclure, nous avons abordé ce texte avec plaisir, avec bienveillance, et nous nous réjouissons du quasi-consensus qui résulte de la commission mixte paritaire au Sénat. Nous saluons les avancées majeures et le renforcement des objectifs d'efficacité et de redevabilité porté par le projet de loi. Il nous tient à cœur de rappeler cependant que les objectifs et les rappels d'engagement devront bien sûr être suivis d'actes.
M. le rapporteur et M. le vice-président de la commission mixte paritaire applaudissent.
J'appelle maintenant le texte de la commission mixte paritaire.
Conformément à l'article 113, alinéa 3, du règlement, je vais d'abord appeler l'Assemblée à statuer sur l'amendement dont je suis saisi.
La parole est à M. le vice-président de la commission mixte paritaire, pour soutenir l'amendement n° 1 .
Cet amendement divisé en trois parties est le signe que nous avons travaillé en CMP, où nous avons changé certaines choses. En pareil cas, il reste inévitablement quelques scories. Nous vous demandons de les supprimer pour que le texte soit tout à fait conforme à ce qu'a voulu la CMP. L'amendement a été discuté avec mon homologue et ceux de M. le rapporteur Berville, au Sénat. Il existe donc un accord entre nos deux assemblées et il est essentiel que l'amendement soit voté en termes identiques pour que notre affaire aboutisse.
Il s'agit de mesures liées à l'article 9 instituant la commission d'évaluation de l'aide publique au développement. Comme je l'ai dit tout à l'heure et comme l'ont rappelé de nombreux orateurs, la commission d'évaluation est fondée sur des bases un peu différentes de ce dont nous étions convenus les uns et les autres en première lecture.
Nous souhaitons tout d'abord supprimer les mots « autres que son président » à la première phrase de l'alinéa 10 de cet article et, à la troisième phrase du même alinéa, les mots « autre que celui du président ». Dans la rédaction issue de la CMP, le président de la commission d'évaluation sera élu parmi ses membres, il n'est donc pas justifié que la durée du mandat et le régime applicable en cas de vacance de son siège soient distincts de celui qui prévaut pour les autres membres de la commission, ce qui était le cas dans le texte initial. Il s'agit donc en fait d'aligner le mandat du président de la commission sur celui des autres membres.
Ensuite, à l'alinéa 11, nous supprimons les mots « et le représentant des pays partenaires de la politique de développement solidaire ». La CMP a en effet renvoyé à un décret la nomination des experts membres de la commission d'évaluation. Par coordination, il convient donc de supprimer la mention du seul représentant des pays partenaires de la politique de développement solidaire qui fera partie des experts nommés par décret. Il ne s'agit pas d'une banalisation, ce qui serait désobligeant. Nous faisons entrer cet expert dans le droit commun des autres membres.
Ces deux modifications, en trois parties, sont purement formelles et je vous demande instamment de les voter.
Avant de demander l'avis du Gouvernement sur cet amendement, j'indique que sur le projet de loi je suis saisi par le groupe Socialistes et apparentés et le groupe Libertés et territoires d'une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
Quel est l'avis du Gouvernement sur l'amendement ?
Le président Jean-Louis Bourlanges présente cet amendement comme tendant à des modifications formelles. J'estime qu'elles sont assez substantielles mais pour ne pas retarder les débats et parce que nous avons tous saisi la portée de cet amendement, auquel le Gouvernement consent bien volontiers, j'émets un avis favorable.
M. Sylvain Waserman applaudit.
L'amendement n° 1 , modifiant l'article 9, est adopté.
Nous avons achevé l'examen des articles du projet de loi ainsi modifié.
Je mets aux voix le projet de loi compte tenu du texte de la commission mixte paritaire modifié par l'amendement qui vient d'être adopté.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 58
Nombre de suffrages exprimés 51
Majorité absolue 26
Pour l'adoption 51
Contre 0
Le projet de loi, amendé, est adopté à l'unanimité. – Applaudissements sur les bancs des groupes LaREM, Dem et Agir ens.
Parfait !
C'est l'œuvre de Marielle de Sarnez que nous avons réalisée ce soir. Je crois que nous devons tous en être conscients. C'est d'ailleurs le cas.
Applaudissements sur divers bancs.
Vous avez eu raison d'ajouter ces mots.
Mes chers collègues, je vous propose de ne pas suspendre la séance pour que nous examinions immédiatement le texte suivant. Merci à ceux qui ne restent pas de quitter l'hémicycle en silence.
Le Gouvernement maintient ici la ligne qui n'a cessé d'être la sienne depuis 2017. Cette ligne consiste à garantir l'équilibre entre l'efficacité de l'action antiterroriste et la préservation des libertés individuelles, et c'est fort de cette constance que le Gouvernement revient vers vous en deuxième lecture, déterminé à défendre des positions mûrement réfléchies, travaillées, pensées en soutien d'un texte que je crois essentiel pour renforcer l'arsenal législatif en matière de lutte antiterroriste, singulièrement s'agissant du suivi des sortants de prison condamnés pour terrorisme.
Ce sont des considérations d'efficacité opérationnelle, de pragmatisme, de respect de l'équilibre initial, de recherche du plus large consensus qui continuent à nous animer collectivement. Je souhaite à cet égard remercier, au nom du Gouvernement, les membres de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République, mais aussi ceux de la délégation parlementaire au renseignement et de la mission d'information sur la loi sur le renseignement pour la qualité du travail commun menée depuis plusieurs mois avec le Gouvernement. C'est aussi l'occasion de vous exprimer le souhait que ce travail se poursuive, tant il est important, sur ces questions, que nous agissions ensemble en responsabilité.
La mobilisation du Gouvernement contre le terrorisme est constante depuis 2017. À la demande du Président de la République, le Gouvernement a œuvré avec une très grande détermination au renforcement des dispositifs de lutte contre la menace terroriste. Permettez-moi une nouvelle fois de les rappeler brièvement : renforcement des moyens humains, budgétaires, juridiques au profit de l'ensemble des services de renseignement, des forces de sécurité et des magistrats qui mènent un combat sans relâche.
Les moyens humains alloués aux services spécialisés en matière de lutte antiterroriste ont depuis 2017 fait l'objet d'un effort sans précédent. Les budgets d'investissement et de fonctionnement des services ont également fait l'objet d'une forte hausse, à la hauteur de l'enjeu sans précédent. Depuis 2017, nous avons veillé à ce que les services, malgré la sortie de l'état d'urgence, gardent la capacité juridique d'agir efficacement dans le respect de l'État de droit. C'est tout l'objectif de la loi du 30 octobre 2017 renforçant la sécurité intérieure et la lutte contre le terrorisme, dite loi SILT. La direction générale de la sécurité intérieure (DGSI) a été désignée en juin 2018 comme chef de file de la lutte antiterroriste sur tout le territoire national. La loi du 23 mars 2019 de programmation 2018-2022 et de réforme pour la justice a créé le parquet national antiterroriste (PNAT) aux fins de renforcer la force de frappe judiciaire antiterroriste.
Le projet de loi dont nous débattons n'est pas un point de bascule, bien au contraire, il s'inscrit dans cette dynamique dont nous vous avons régulièrement rendu compte. Je veux à cette occasion saluer nos services de renseignement, de nos policiers, de nos gendarmes qui chaque jour font un travail exceptionnel pour identifier les menaces, suivre les individus dangereux et mettre en échec leurs projets meurtriers.
Depuis 2017, le territoire national a ainsi été touché par quatorze attentats terroristes islamistes aboutis : trois en 2017, trois en 2018, un en 2019, six en 2020, un en 2021. Ces attentats ont causé vingt-cinq morts et quatre-vingt-trois blessés, et c'est bien évidemment en pensant à eux que je me tiens devant vous aujourd'hui. Dans le même temps, depuis 2017, trente-six attentats ont été déjoués par nos services, dont trois encore en 2021.
La loi SILT a permis à ces services de continuer à disposer, après la fin de l'état d'urgence, d'un cadre législatif efficace et adapté à leur action. L'autorité administrative – préfets ou ministre de l'intérieur selon les cas – s'est vu reconnaître des compétences nouvelles strictement proportionnées à l'état de la menace, toujours sous le contrôle du juge et dans le seul but de prévenir des actes de terrorisme.
Il s'agit notamment de la possibilité de mettre en place des périmètres de protection pour assurer la sécurité d'un lieu ou d'un événement, de procéder à la fermeture des lieux de culte dans lesquels se tiennent ou circulent des idéologies, propos ou théories qui incitent ou font l'apologie d'actes de terrorisme, d'édicter à l'encontre d'individus présentant un niveau de menace caractérisée pour la sécurité et l'ordre public les mesures individuelles de contrôle administratif et de surveillance (MICAS) depuis le 1er novembre 2017, enfin de solliciter du juge judiciaire l'autorisation de procéder à une visite domiciliaire d'un lieu fréquenté par de tels individus et à des saisies. Le Parlement a été informé sans délai de la mise en œuvre de chacune de ces mesures, conformément aux exigences fixées par le législateur en 2017. Il a également été rendu destinataire chaque année d'un rapport d'évaluation sur la mise en œuvre de la loi.
De la même manière, le Gouvernement a fait un usage raisonné de la technique dite de l'algorithme. Ainsi, depuis 2015, trois traitements automatisés ont été autorisés par le Premier ministre après avis favorable de la Commission nationale de contrôle des techniques de renseignement (CNCTR). La délégation parlementaire au renseignement a été rendue destinataire d'éléments au niveau confidentiel défense qui décrivent la nature de l'apport opérationnel de ces traitements automatisés et elle a été invitée à venir en mars dernier visiter les locaux et les services dédiés à la DGSI.
S'il n'est pas possible de détailler les résultats obtenus au moyen de ces algorithmes, protégés au titre du secret de la défense nationale, l'étude d'impact qui accompagne le projet de loi relève que cette technique de renseignement a notamment permis de détecter des contacts entre des individus porteurs d'une menace terroriste, d'obtenir des informations sur la localisation d'individus en lien avec cette menace, de mettre à jour les comportements d'individus connus des services de renseignement et nécessitant des investigations plus approfondies, et d'améliorer la connaissance des services de sécurité sur la manière de procéder des individus de la mouvance terroriste.
Les mesures dont le présent projet de loi vous propose aujourd'hui de prolonger l'application constituent donc des outils opérationnels efficaces et véritablement indispensables pour les services spécialisés dans la lutte contre le terrorisme.
Applaudissements sur les bancs des commissions.
Nous ne sortirons vainqueurs de la lutte contre le terrorisme islamiste qui menace et endeuille notre nation qu'à la condition que notre engagement commun soit sans faille. Cet engagement doit se traduire notamment par la capacité d'adapter nos outils techniques et juridiques afin d'appréhender encore plus efficacement la totalité du spectre des menaces terroristes. C'est le sens même des dispositions du projet de loi dont nous débattons à nouveau aujourd'hui, après l'échec de la commission mixte paritaire la semaine dernière.
Ce combat, vous le savez déjà, le Gouvernement s'y est pleinement consacré en accordant une augmentation historique de 8 % au budget du ministère de la justice, en créant, avec le parquet national antiterroriste, une juridiction entièrement dédiée, en accroissant le nombre de quartiers d'évaluation de la radicalisation et, comme vient de le rappeler Mme Schiappa, en créant 10 000 postes de policiers et de gendarmes supplémentaires.
Ces actions et ces efforts sont indispensables pour gagner la lutte contre le terrorisme islamiste et ne plus vivre les drames que nous avons connus encore récemment. Je veux bien sûr avoir une pensée toute particulière pour chacune de leurs victimes, qu'elles soient civiles ou membres des forces de sécurité intérieure. Je souhaite ici leur rendre hommage.
Dans cet engagement qui est le nôtre contre le terrorisme islamiste, je viens porter devant vous l'objectif que s'est fixé avec constance la Chancellerie : réduire drastiquement la menace que représentent les personnes condamnées pour des actes de terrorisme, qui manifestent encore, alors que leurs peines arrivent à terme, des signes de dangerosité.
J'ai déjà eu l'occasion de le dire devant vous : d'ici à la fin de l'année 2023, 162 personnes actuellement détenues pour actes de terrorisme en lien avec la mouvance islamiste auront purgé leur peine. Or certaines d'entre elles présenteront sans doute encore des signes de radicalisation à l'approche de cette échéance.
Je veux saluer avec force et gratitude l'action et l'implication des agents de l'administration pénitentiaire, ainsi que la qualité du travail réalisé dans nos établissements pour endiguer la radicalisation. Malheureusement, tous ces efforts ne sont pas suffisants et, en l'état actuel du droit, ces mêmes détenus se verraient quitter la détention sans suivi ni accompagnement adaptés.
L'article 5 du projet de loi tel qu'adopté en première lecture par votre assemblée proposait précisément de combler cette lacune en créant une nouvelle mesure judiciaire de prévention de la récidive terroriste et de réinsertion, permettant notamment de contraindre la personne condamnée à une série d'obligations que la loi ne pouvait pas lui imposer jusqu'à présent. Ces nouvelles dispositions s'inscrivaient dans une parfaite complémentarité entre l'autorité administrative chargée de la surveillance et du contrôle des individus sortant de détention, et l'autorité judiciaire, qui assurait leur suivi et leur réinsertion au moyen d'obligations et d'interdictions spécifiques.
Enfin, la rédaction des dispositions de l'article 5 tirait toutes les conséquences de la décision du Conseil constitutionnel du 7 août dernier de censurer la proposition de loi instaurant des mesures de sûreté à l'encontre des auteurs d'infractions terroristes à l'issue de leur peine. Tandis que cette proposition de loi s'inscrivait déjà dans notre volonté commune d'apporter une solution à la nouvelle menace des sortants de prison condamnés pour terrorisme – je tiens d'ailleurs à saluer votre engagement sans faille, madame la présidente de la commission des lois, chère Yaël, ainsi que celui du rapporteur, cher Raphaël –, le Conseil constitutionnel était venu rappeler au législateur l'impérieuse nécessité de veiller au caractère adapté, nécessaire et proportionné de mesures restrictives de liberté lorsqu'elles sont imposées à des personnes ayant purgé leur peine.
En première lecture, le Sénat a toutefois souhaité réécrire l'article 5 du projet de loi en mettant en péril les équilibres trouvés avec l'article 3 et les mesures administratives, au risque d'une nouvelle censure constitutionnelle. Ce n'était pas acceptable au regard de l'importance des enjeux dont il est ici question. En effet, le nouveau dispositif proposé par le Sénat crée une mesure judiciaire de sûreté mixte, comprenant non seulement des obligations destinées à la réinsertion similaires à celles prévues par le projet de loi du Gouvernement, mais également des obligations destinées à assurer la surveillance de la personne. Or certaines de ces obligations et interdictions sont similaires ou voisines de celles prévues par les MICAS, comme l'interdiction de paraître dans certains lieux ou de fréquenter certaines personnes.
Une telle superposition de dispositifs de sûreté différents, placés sous la responsabilité d'autorités différentes, susceptibles d'être appliqués à des mêmes fins et aux mêmes personnes et prévoyant des prescriptions similaires ou identiques, crée une complexité qui menace la sécurité juridique de l'ensemble du dispositif et fragilise l'efficacité de l'action de l'État dans sa lutte contre la radicalisation. Par ailleurs, et c'est peut-être encore plus grave, la réécriture du Sénat ne répondait pas complètement aux exigences constitutionnelles rappelées par le Conseil constitutionnel, s'agissant, en particulier, des conditions de renouvellement de la mesure.
C'est à l'aune de ces considérations que le Gouvernement salue le rétablissement par la commission des lois de l'Assemblée nationale de la rédaction de la mesure judiciaire de prévention de la récidive terroriste et de réinsertion afin que le régime applicable aux détenus terroristes ayant purgé leurs peines s'inscrive, de manière cohérente et conformément aux exigences constitutionnelles, dans la législation existante destinée à prévenir les actes de terrorisme et que ce régime puisse enfin entrer en vigueur.
La parole est à M. Raphaël Gauvain, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République.
La commission mixte paritaire a échoué. Convoquée vendredi dernier à l'Assemblée nationale, elle n'a hélas pas abouti à un texte commun, malgré les très nombreux échanges avec nos collègues du Sénat. Je le regrette profondément. Si nos deux assemblées étaient en mesure de s'accorder sur un certain nombre d'articles, pour lesquels les divergences étaient surmontables, un désaccord majeur subsistait quant à l'articulation des mesures prévues par les articles 3 et 5, et relatives à la lutte contre le terrorisme.
Vous l'avez rappelé, madame la ministre déléguée, le point d'achoppement concernait la prise en charge des sortants de prison. Nous étions toutefois d'accord sur le constat et la nécessité, pour le législateur, de prévoir des mesures allant dans ce sens. Il y a aujourd'hui un trou dans la raquette, ces détenus condamnés pour des faits extrêmement graves présentant encore des profils extrêmement préoccupants. Le paradoxe est que, du fait du durcissement des conditions de détention, ces personnes – M. le garde des sceaux a rappelé qu'elles seront 162 à avoir purgé leur peine d'ici à la fin de l'année 2023 – sortiront de prison de manière sèche, c'est-à-dire sans aucune mesure de suivi et d'accompagnement.
Tout comme la proposition de loi que nous avons présenté l'année dernière avec Mme la présidente de la commission, Yaël Braun-Pivet, au nom de la majorité, le projet de loi tend à remédier à ce paradoxe et à fournir des instruments à nos services de sécurité. Nous partageons cet objectif avec le Sénat, mais nous divergeons sur l'architecture des mesures à prendre.
Le Sénat souhaitait instaurer un système de contrôle et de suivi des sortants de prison très largement placé sous la responsabilité du juge judiciaire, celui-ci prenant sa décision après demande préalable des services de renseignement et débat contradictoire. Pour l'Assemblée nationale – je pense exprimer l'opinion des groupes majoritaires et de plusieurs groupes de l'opposition –, la priorité dans le suivi et le contrôle des sortants de prison doit être donnée, comme le fait le projet de loi, aux MICAS et au pouvoir administratif. Rappelons que les mesures individuelles de contrôle administratif et de surveillance permettent à un préfet d'imposer à une personne un pointage quotidien au commissariat, dans la limite de trois fois par semaine, de lui interdire de quitter une commune ou de paraître dans certains lieux. La décision relève du préfet, mais elle est contrôlée par le juge administratif.
Depuis 2017, comme l'ont montré les travaux que nous avons conduits avec Yaël Braun-Pivet et Éric Ciotti, membre de l'opposition, sur la mise en œuvre de la loi SILT, les MICAS ont démontré leur grande efficacité. Elles constituent un outil indispensable pour les services de renseignement dans la lutte contre le terrorisme et nous ne pensons pas qu'il faille bouleverser le système. Il faut au contraire renforcer et pérenniser les MICAS. Celles-ci peuvent actuellement être prises pour une durée maximale d'un an et nous proposons, comme en première lecture, de porter cette durée à deux ans pour les terroristes sortant de prison.
Malgré de très nombreux allers et retours avec nos homologues du Sénat – au total, onze tentatives de rédaction commune –, nous n'avons pas réussi à nous entendre sur un article de compromis tant la philosophie du Sénat se distingue de la nôtre. M. le garde des sceaux l'a dit, la commission des lois a rétabli hier le texte adopté en première lecture par notre assemblée. Quelques aménagements ont été apportés afin de tenir compte de modifications rédactionnelles introduites par le Sénat, mais le projet de loi soumis cet après-midi à votre examen est le texte adopté par l'Assemblée nationale en première lecture.
Applaudissements sur les bancs des commissions.
La parole est à M. Loïc Kervran, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République.
Si nous sommes ici aujourd'hui, moi à cette tribune et vous sur ces bancs, c'est d'abord parce que la CMP s'est conclue sur un échec, comme l'ont indiqué les orateurs précédents. À cet égard, je tiens à préciser qu'avec ma collègue sénatrice Agnès Canayer, nous étions parvenus à un accord sur les articles 7 à 29, portant notamment sur le renseignement. Cet accord reflète l'esprit qui nous avait conduits, en première lecture, à adopter le texte dans un très large consensus, réunissant tous les bancs, des socialistes aux républicains. Il reflète aussi l'esprit des travaux que nous conduisons à la délégation parlementaire au renseignement (DPR), que vous avez loué, madame la ministre déléguée. C'est pourquoi je vais souvent vous proposer de conserver la version du Sénat, enrichie des améliorations apportées au cours de la navette. Il en sera notamment ainsi pour les articles 8 et 19.
Si nous sommes ici aujourd'hui, c'est aussi pour donner aux agents des services de renseignement les moyens d'accomplir leur tâche. Mesurons ensemble le caractère particulier de ce travail : c'est sans doute l'un des rares métiers où l'on ne voit que vos échecs, et qui fait peser sur vous un poids psychologique important étant donné les responsabilités qui vous sont confiées. Nous devons donc donner aux agents les moyens de travailler, comme nous l'avons fait grâce aux lois de finances successives qui ont permis d'accroître les effectifs et d'améliorer le cadre de travail dans de nombreux services de renseignement. Nous le faisons aujourd'hui en prévoyant des moyens juridiques qui permettent de répondre aux évolutions de la menace, de la technologie et du droit, notamment du droit européen.
Si nous sommes ici aujourd'hui, c'est enfin pour protéger les Français tout en préservant les libertés publiques. Cet équilibre est ténu, difficile, mouvant. Il justifie que nous remettions le sujet régulièrement à l'agenda de notre assemblée. Certains peuvent s'en étonner mais, pour ma part, je pense qu'il y va de l'honneur de notre République. Face à un ennemi dont les méthodes évoluent et face à un environnement technologique changeant, il nous faut sans cesse remettre l'ouvrage sur le métier pour mieux protéger les Français.
M. Thomas Gassilloud, rapporteur, applaudit.
J'ai reçu de M. Jean-Luc Mélenchon et des membres du groupe La France insoumise une motion de rejet préalable déposée en application de l'article 91, alinéa 5, du règlement.
La parole est à M. Ugo Bernalicis.
Nous déposons à nouveau une motion de rejet car nous sommes toujours opposés à un texte qui, malgré le désaccord en CMP, n'a guère évolué.
Comme il est de rigueur, je voudrais moi aussi remercier les agents des services de renseignement. Personne ici ne remet en cause ni leur travail ni le dévouement dont ils font preuve dans cette bataille difficile. Je veux d'ailleurs rendre hommage au commissaire de la DGSI de Rennes, qui a mis fin à ses jours, il y a à peine une semaine. N'oublions pas que le poids psychologique dont vous venez de faire état, monsieur le rapporteur, peut entraîner des conséquences tragiques.
Pour entrer dans le vif du sujet, je vais rappeler vos propos, madame la ministre déléguée. Selon vous, il existe tous les éléments de contrôle possibles et imaginables, et les parlementaires ont reçu du Gouvernement et du ministère de l'intérieur toutes les informations nécessaires pour se faire un avis sur les suites à donner notamment aux MICAS contenues dans la loi SILT.
Or je me souviens d'une séance particulièrement houleuse de la commission des lois sur le premier compte rendu annuel de cette loi SILT. Nous en avions d'ailleurs reçu différentes versions, ce qui prouve une certaine forme de mépris pour le Parlement. Il est entendu que ce document se lit très rapidement, qu'il ne contient que très peu d'informations importantes : ce n'est pas là que cela se passe et, d'ailleurs, il n'y a pas eu de deuxième compte rendu annuel.
On a émis l'hypothèse que l'examen du présent texte avait permis de faire un compte rendu circonstancié, argumenté. Il n'y a pas eu de compte rendu de la part du Gouvernement, monsieur le rapporteur.
Vous en avez fait un, mais j'ai le regret de dire qu'il est partial ou partiel…
…parce qu'il n'y a pas de parlementaires insoumis dans la DPR, bien que nous en ayons fait systématiquement la demande. Nous avons même demandé, par voie d'amendements, une modification de la composition de la DPR. Autant dire que je goûte assez peu les beaux discours sur la nécessité de se rassembler tous dans cette lutte. Tous ensemble mais pas tout le monde quand même : il y a ceux qui ont accès aux informations et les autres.
Ceux qui n'y ont pas accès, tout parlementaires qu'ils soient, sont priés de vous croire sur parole : tout cela est absolument génial, les mesures sont indispensables et il convient de les prolonger. Permettez-moi d'en douter. J'en doute d'autant plus après la lecture d'un article du journal Le Monde faisant état d'un rapport confidentiel du Gouvernement remis aux membres de la DPR sur la surveillance numérique. Il y était indiqué que l'utilisation des algorithmes, les boîtes noires, n'avait permis d'atteindre aucun objectif opérationnel. Je l'ai déjà dit et je le redirai autant de fois que nécessaire. Peut-être Le Monde est-il mal informé ? Je ne le crois pas. Personne n'a eu ce rapport, à part les parlementaires de la DPR et, visiblement, certains journalistes du Monde.
D'abord, on nous fait adopter des dispositions sans nous donner accès à des documents indiquant qu'elles sont sans effet opérationnel. Ensuite, on revient nous voir en nous expliquant qu'il faut aller plus loin dans la surveillance pour qu'elles soient efficaces et qu'elles débouchent – peut-être – sur des objectifs opérationnels.
En première lecture, nous avons déjà discuté de ces nouveaux moyens algorithmiques, de l'extension du champ des données recueillies aux URL, c'est-à-dire aux sites internet consultés par un utilisateur. Je vous ai moi-même interrogé sur les réseaux privés virtuels (VPN) permettant de contourner facilement vos futurs algorithmes, dont l'utilisation me semble alors un peu disproportionnée. Nous avons aussi évoqué les portes dérobées chez les fournisseurs d'accès à internet ou chez les fournisseurs de messagerie cryptée.
Vous nous avez répondu que tout cela était confidentiel, que l'Assemblée nationale n'avait pas à être informée de ce que les terroristes faisaient ou pourraient faire à l'avenir. La réponse est un peu limitée. Puisque les mécanismes de surveillance peuvent aussi capter les données de n'importe quel citoyen, j'aimerais connaître le périmètre et les capacités de ces algorithmes. Ça m'intéresse et ça devrait intéresser tous les parlementaires. C'est compliqué de voter sur un texte dont on ne connaît pas l'utilisation, qui permet tous les fantasmes possibles et imaginables, et qui n'apporte pas les garanties que l'on peut attendre dans un État de droit et une démocratie accomplie.
Revenons un instant sur ce qui anime nos ennemis ou au moins une partie d'entre eux, les djihadistes salafistes qui veulent s'en prendre à la République française et à certains autres pays et régimes politiques à travers le monde. Ils mènent une bataille politique contre la République qu'ils exècrent. Ils veulent que nous renoncions à ce qui fait d'elle ce qu'elle est : la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen et nos libertés fondamentales – celles d'aller et venir, d'avoir une vie privée, de s'habiller comme on veut.
Ce n'est donc pas le moment de restreindre toutes ces libertés pour leur faire face, ni même d'y mettre de petits coups de canif, fût-ce au nom de la proportionnalité, en promettant que cela ne concernera que des terroristes islamistes. D'ailleurs, j'espère que nous ne pourchassons pas seulement les terroristes islamistes, à un moment où l'extrême droite manifeste une volonté de s'armer et de passer à l'action. Il serait de bon aloi de surveiller ses membres de très près, de les intercepter et de les arrêter si nécessaire. Quelques affaires récentes ont montré que, fort heureusement, les services de renseignement sont vigilants à leur égard.
Au lieu de chercher à contourner ses principes, nous devrions donc plutôt nous interroger sur la manière de renforcer la République. Osons un parallèle en matière de préservation des libertés. Sur les bancs du Gouvernement, on nous a promis que le passe sanitaire, qui est tout de même un peu intrusif, ne serait jamais réclamé pour entrer dans un restaurant ou une salle de cinéma. Que se passe-t-il deux mois plus tard ? Tout le contraire.
Vous nourrissez cet effet cliquet, cette surenchère permanente de mesures. Vous concédez une intervention du juge des libertés et de la détention par-ci, éventuellement un contrôle a posteriori du juge administratif par-là. Chaque fois, nous repoussons les limites de ce que nous acceptons comme entorse à nos grands principes républicains.
Voilà pourquoi nous continuerons à défendre des motions de rejet sur ces textes que nous rejetons en bloc. Notre rejet des MICAS ne signifie pas que nous sommes contre toute mesure, que nous voulons être désarmés. Nous faisons confiance au système judiciaire, nous le pensons capable de réagir quand il existe des éléments probants – et pas seulement des notes blanches – permettant de suspecter une personne. À cet égard, il serait peut-être temps d'envisager une déconcentration du Parquet national antiterroriste, afin de responsabiliser tous les parquets. La centralisation à Paris atteint assez rapidement ses limites.
Avant d'atteindre le terme du temps qui m'est imparti, je voudrais parler des mesures de sûreté pour les sortants de prison. Il me semble plus que déplacé de revenir à la charge après chaque censure du Conseil constitutionnel, en essayant de repousser quand même les limites de l'acceptable. En outre, ces mesures sont un aveu d'échec : le système pénitentiaire ne parvient pas à préparer efficacement la sortie de prison et nos services de renseignement ne peuvent assurer une surveillance discrète des personnes qui sont toujours dangereuses lors de leur sortie.
Avec ce texte, vous êtes dans l'affichage politique, vous voulez montrer à nos concitoyens que vous surveillez et traquez. Or le renseignement a une caractéristique : quand il est bien fait, on ne le voit pas. Être imperceptible, voilà ce qui fait sa force et ce qui doit continuer à la faire.
Pour toutes ces raisons, chers collègues, nous vous demandons de rejeter ce texte qui n'est ni proportionné ni nécessaire aux objectifs poursuivis.
Dans les explications de vote sur la motion de rejet préalable, la parole est à M. Thomas Gassilloud.
Ce n'est pas une surprise, le groupe Agir ensemble votera contre cette motion de rejet. Il le fera pour trois raisons. Premièrement, ce texte présente un bon équilibre entre l'efficacité de l'action contre le terroriste et la préservation des libertés individuelles. Deuxièmement, il a déjà donné lieu à des échanges nombreux et denses en commission, en séance publique, au Sénat et en CMP. Troisièmement, nous n'avons plus le temps de tergiverser : les MICAS prennent fin le 31 juillet et l'absence de nouvelles mesures ferait peser un risque important sur la sécurité nationale.
Le groupe Mouvement démocrate (MODEM) et démocrates apparentés estime que nous avons affaire à un texte équilibré, qui comporte des mesures proportionnées et qui préserve bien les libertés individuelles. Nous nous opposerons donc nous aussi à la motion de rejet préalable.
La motion de rejet préalable, mise aux voix, n'est pas adoptée.
Selon les chiffres du coordonnateur national du renseignement et de la lutte contre le terrorisme, 500 détenus purgent actuellement une peine de prison pour terrorisme en France, dont une centaine devrait sortir dans les deux prochaines années, et auxquels il faut ajouter 900 prisonniers de droit commun radicalisés. Il est donc nécessaire et justifié de prendre des mesures permettant de prévenir la récidive et de lutter contre cette menace terroriste.
Le projet de loi se compose de deux parties distinctes : l'une visant à pérenniser et à accroître les dispositions de la loi du 30 octobre 2017 renforçant la sécurité intérieure et la lutte contre le terrorisme, dite SILT, et l'autre révisant la loi du 24 juillet 2015 relative au renseignement. Le groupe Liberté et territoires réaffirme son étonnement face au choix du Gouvernement de regrouper ces deux textes sur lesquels il est possible de formuler des positions opposées : c'est non seulement le cas dans notre groupe, mais également au Sénat, comme en témoigne l'échec de la commission mixte paritaire. Pourquoi regrouper deux textes qui n'ont rien à voir entre eux ?
Nous sommes très réservés concernant la pérennisation et l'aggravation de la loi de 2017, alors que peu de données semblent justifier cette nécessité. Il est vrai que nous n'avons pas trop l'habitude des analyses d'impact des textes que nous votons, en particulier ceux relatifs à la sécurité ou à la réforme de la justice. La pérennisation de la loi SILT constitue une normalisation, une intégration dans le droit commun des mesures d'exception de l'état d'urgence. Le groupe Libertés et territoires s'y est toujours opposé.
La commission mixte paritaire s'est soldée par un échec principalement à cause du refus justifié des sénateurs d'accepter l'allongement à vingt-quatre mois de la durée maximale du régime d'exception des MICAS. Nous ne pouvons que suivre le Sénat, que vous auriez dû écouter sur ce point. Porter à deux ans la durée des MICAS donne un pouvoir disproportionné à l'autorité administrative au détriment du juge judiciaire. On ne peut pas dire que le Sénat soit de gauche,…
…mais il s'est opposé à une telle mesure, car il estime que les libertés publiques constituent la colonne vertébrale de nos institutions et de nos engagements.
Pour sa part, le Conseil d'État considère dans son avis que la mesure pose « une difficulté d'ordre constitutionnel sans que son efficacité soit suffisamment établie ». Quant au Conseil constitutionnel, il avait intégré dans son bilan de la constitutionnalité des MICAS le fait que leur durée était limitée à douze mois – il n'était pas prévu qu'elle soit de vingt-quatre comme vous le proposez. Finalement, on a l'impression que tout le monde se fiche des libertés individuelles !
Ainsi, nous ne voyons pas la nécessité de mettre en œuvre cette disposition, d'autant plus que le droit pénal a été aménagé ces dernières années afin de judiciariser plus précocement les personnes susceptibles de passer à l'acte terroriste. Ces dispositions sont déjà en mesure de répondre aux objectifs recherchés par le Gouvernement. Souvent d'ailleurs, les MICAS se recoupent avec des contrôles judiciaires.
En transférant autant de compétences à l'autorité administrative, au détriment de l'autorité judiciaire et de la séparation des pouvoirs, on augmente le risque que ces dispositifs soient utilisés dans un autre contexte, pourquoi pas contre des opposants politiques écologistes, altermondialistes, corses ou basques, d'autant que les voies de recours sont rendues plus difficiles sous le régime de la loi de 2017. Les visites domiciliaires, qui peuvent être utilisées à la place de perquisitions judiciaires, souffrent du même défaut et peuvent faire l'objet de la même contestation. La mesure judiciaire de prévention de la récidive terroriste et de réinsertion reprend les dispositions de la loi du 10 août 2020, à laquelle nous nous étions opposés, et qui avait été censurée par le Conseil constitutionnel.
En revanche, nous accueillons plus favorablement les dispositions relatives au renseignement. Nous saluons le fait que la France poursuive son objectif de se doter d'un encadrement et d'un contrôle des actions de ses services de renseignement, qui, avant la loi de 2015, opéraient en dehors de tout cadre légal. Toutefois, certaines mesures ne nous paraissent pas être suffisamment contrôlées et nous proposerons des amendements pour accroître le rôle de la CNCTR.
En définitive, le projet de loi rassemblant deux textes très différents, les membres de notre groupe se positionneront en fonction de l'équilibre le plus adéquat entre le maintien de la sécurité publique et la préservation des libertés fondamentales. Madame la ministre déléguée, chers collègues, nous devrions arrêter de légiférer en permanence en matière de lutte contre le terrorisme ou de justice. Sur ces sujets, s'il suffisait de faire adopter une énième loi pour régler les problèmes, on s'en serait rendu compte depuis longtemps !
Pour prolonger mes propos en défense de la motion de rejet préalable, je veux traiter des mesures individuelles de contrôle administratif et de surveillance. Je me souviens assez bien de nos débats lorsque nous les avons créées en 2017. Nous avions d'abord examiné un texte visant à la sixième prorogation de l'état d'urgence. Il faut rappeler d'où l'on vient, c'est-à-dire de l'état d'urgence déclaré après les attentats de 2015.
L'état d'urgence trouve son origine dans les années 1960 – et l'on se souvient bien à quoi il a servi à l'époque. Le dispositif a été modifié lors de la précédente législature afin d'être mieux adapté à la lutte que vous poursuivez, et on nous a bien sûr dit : « Ne vous inquiétez pas, l'état d'urgence ne sert que dans un cas d'urgence ! »
On nous a plus tard expliqué qu'on ne pouvait pas le prolonger indéfiniment – sans cela, il ne s'agissait plus d'urgence. On a donc commencé à transférer les mesures concernées dans le droit commun. C'est le cas des fameuses MICAS pour lesquelles des clauses de revoyure ont été prévues afin de rassurer tous les parlementaires qui estimaient que l'on allait tout de même un peu loin en inscrivant des dispositifs qui relevaient de situations extraordinaires dans le droit commun. À l'époque, beaucoup d'entre vous se sont donc dit : « On verra dans deux ans si ces mesures étaient utiles ! » Deux ans plus tard, on nous explique que ça fonctionne, même si on ne nous en fait pas la démonstration formelle, et nous voilà en train d'entériner l'intégration dans notre droit positif de ces mesures individuelles de contrôle administratif et de surveillance de manière définitive.
Pourtant, je défie qui que ce soit parmi nous qui n'appartient pas à la délégation parlementaire au renseignement de se faire un avis sérieux, étayé et concret sur ces MICAS.
Heureusement que quelques-unes, en particulier les visites domiciliaires, font encore l'objet du contrôle du juge des libertés et de la détention qui, malgré son statut, ne dispose lui-même que de peu d'éléments pour se prononcer – il se forge un avis sur les seules notes blanches.
Je me souviens aussi qu'en 2017 nous étions un certain nombre sur nos bancs à vous alerter au sujet du cimentier Lafarge qui était suspecté de collaborer avec Daech, ce dont nous avons aujourd'hui les preuves. Libération vient d'ailleurs de publier un article expliquant que la DGSE – direction générale de la sécurité extérieure – avait averti l'exécutif dès 2014, sous la précédente législature. Nous parlons du même cimentier qui, alors que nous discutions de la loi SILT dans l'hémicycle, était en train, à quelque pas, de rénover la cour d'honneur de l'Assemblée, pour notre déshonneur à tous.
La lutte contre le terrorisme revêt parfois un caractère étrange : on est par exemple beaucoup moins diligent quand il s'agit de surveiller un cimentier qui fait des affaires que lorsqu'il faut surveiller des gens que l'on suspecte d'être éventuellement dangereux. On consacre, à s'occuper de ces derniers, une énergie extrême, allant même, ce qui constitue une sorte d'aboutissement des processus que vous avez mis en place, jusqu'à envoyer des questionnaires dans les universités pour détecter les signaux faibles. On pose aux enseignants, aux présidents d'université ou aux responsables de la sécurité des questions basiques : connaissez-vous quelqu'un qui se laisse pousser la barbe ou qui refuse de serrer la main aux femmes ? Mais, même si une personne ne fait rien de tout cela, est-il ajouté, l'absence de tout signe de radicalisation peut être un signe de radicalisation si la personne pratique l'art de la dissimulation – la taqiya. Comme cela, on est habillé pour l'hiver : tout le monde peut être terroriste.
Regardez ce que vous faites ! Avec ces méthodes, je crois que nous produisons nous-mêmes ceux qui se radicalisent et qui s'éloignent de la République. J'espère qu'aucun d'entre eux ne passera jamais à l'acte, mais il faut nous interroger sur l'ambiance qu'instaure dans le pays ce type de mesures qui répandent le soupçon, ce poison, sur nos compatriotes, en particulier sur ceux qui sont de confession musulmane puisqu'il s'agit de la religion qu'on évoque toujours de prime abord lorsque l'on parle de lutte contre le terrorisme, car beaucoup d'actes terroristes ont été commis ces derniers temps par des djihadistes salafistes.
Avant les MICAS, étions-nous incapables de lutter contre le terrorisme, étions-nous démunis et désarmés, les services de renseignement n'existaient-ils, n'agissaient-ils pas ? Évidemment, ils travaillaient, ils accomplissaient même correctement leur mission puisqu'ils déjouaient des attentats. J'appelle donc à conserver un minimum de raison, et je demande aux collègues de ne pas se laisser embarquer – comme les grenouilles plongées dans l'eau froide qui ne s'échappent pas avant de mourir ébouillantées parce que l'on a fait monter la température progressivement – par le passage d'une mesure à l'autre, comme si tout cela était normal. Non ! À la fin, c'est l'État de droit qui en prend un coup.
Alors que la menace terroriste perdure, le groupe de la Gauche démocrate et républicaine réitère son engagement sans faille pour agir avec fermeté contre le terrorisme dans le respect de la séparation des pouvoirs et de la protection des droits fondamentaux.
Si chacun est pleinement conscient de la réalité du phénomène terroriste et de la nécessité de prévenir les attentats, il est fondamental, plus que jamais dans cette période troublée, de maintenir les équilibres de notre État de droit afin de renforcer et non d'affaiblir l'édifice démocratique dans son entier.
Depuis 2015 et l'instauration de l'état d'urgence, nous n'avons eu de cesse de rappeler notre profond attachement aux principes fondamentaux de notre État de droit, et de mettre en garde contre le risque de pérennisation de l'usage de dispositifs exceptionnels.
Malheureusement, ce projet de loi confirme nos inquiétudes. Il vient à la suite d'une multiplication de lois sécuritaires, dérogatoires au droit commun, votées sans véritable évaluation préalable des dispositifs existants, sans véritable évaluation de leur nécessité ni de leur efficacité.
Ainsi, vous nous demandez de pérenniser en les renforçant les dispositifs de police administrative issus de la loi SILT, eux-mêmes issus de l'état d'urgence. Je rappelle que le groupe GDR s'était fermement opposé à la loi SILT, loi de normalisation de l'état d'urgence, en accord avec l'ensemble des associations de défense des droits de l'homme, de nombreux experts, ainsi que des organisations internationales et autorités administratives indépendantes. Nous avions alors alerté sur les risques et les dérives de la banalisation des mesures d'exception de nature à fragiliser l'État de droit et l'exercice des libertés fondamentales.
Par cohérence, nous nous opposons aujourd'hui à la pérennisation de ces dispositifs d'exception. Nous nous interrogeons toujours sur l'utilité de ces mesures de durcissements de l'arsenal répressif et administratif relatif à la lutte contre le terrorisme, alors même que notre législation en la matière est déjà substantielle.
Nous nous opposons également à la pérennisation et à l'élargissement des mesures expérimentales de la loi sur le renseignement de 2015, qui permet la surveillance automatisée du réseau par des algorithmes. L'extension des facultés conférées aux services de renseignement, la légitimation sans réserve de méthodes d'investigation très intrusives, l'imprécision de la définition des situations justifiant le recours à ces méthodes ainsi que l'insuffisance des mécanismes de contrôle et de recours ne permettent pas de garantir la proportionnalité des mesures d'intrusion dans la sphère privée au regard des buts poursuivis.
En outre, s'agissant de la question sensible de l'accès aux archives publiques, rappelons les termes d'un courrier adressé au Premier ministre, le 15 juin dernier, par la Commission nationale consultative de droits de l'homme : « l'accès aux archives est un droit de valeur constitutionnelle reconnu à tout citoyen sur le fondement de l'article 15 de la Déclaration de droits de l'homme et du citoyen et ce droit doit également être garanti en vertu des principes constitutionnels de libre expression et d'indépendance des chercheurs. Il s'impose au-delà, au nom de la connaissance de l'histoire politique de la France qui exige la vérité sur celle-ci mais aussi parce qu'il est de nature à contribuer à la réconciliation des mémoires, voire peut en être la condition. »
Nous partageons ainsi les préoccupations exprimées par les archivistes, historiens et juristes relativement à l'article 19 de ce projet de loi et demandons après eux sa modification à la suite de la décision du Conseil d'État du 2 juillet dernier. Le Conseil d'État a en effet jugé illégale l'instruction générale interministérielle n° 1300 sur la protection du secret de la défense nationale qui, depuis plusieurs années, bloque l'accès aux archives publiques classées secret défense de plus de cinquante ans. L'annulation de cette procédure de classification doit ainsi être pleinement prise en compte par le projet de loi.
En définitive, aujourd'hui, comme hier, nous considérons que notre État de droit ne peut s'accoutumer aux atteintes aux libertés et droits fondamentaux ni accepter comme un effet collatéral les abus et dérives causés par ces dispositifs dérogatoires.
S'il est indispensable d'agir avec fermeté contre le terrorisme, le respect de la séparation des pouvoirs, le respect des libertés individuelles et leur contrôle ne doivent comporter aucune faille. À l'opposé de cette logique, nous considérons qu'il convient de se donner les moyens humains et matériels d'agir par l'amélioration et le renforcement des services de renseignement, par le renforcement de la coopération entre services, avec nos partenaires européens et internationaux, par le travail de terrain avec une police de proximité au plus près de la population et des observateurs du quotidien présents en nombre, au plus près des publics les plus fragilisés.
M. Bernalicis applaudit.
Depuis 2015 la menace terroriste s'est douloureusement imposée à nous, autant qu'elle a changé de visage et plusieurs textes de loi ont permis d'en tirer les conséquences pour assurer la sécurité de nos concitoyens tout en garantissant leurs libertés fondamentales, qu'il s'agisse de la loi relative au renseignement de 2015 ou de la loi SILT de 2017. Ces dispositifs ont été plusieurs fois évalués et contrôlés par nos collègues de la commission des lois, ce qui a permis d'éclairer la préparation du présent projet de loi.
La réalité nous rappelle malheureusement régulièrement que la menace est forte et nous permet de voir aussi l'abnégation de l'État et de nos services qui déjouent chaque mois des attentats – 36 depuis 2017. Notre arsenal juridique doit leur donner les moyens de le faire dans le respect de nos valeurs fondamentales, d'autant que la menace change continuellement : ce qu'on appelle la menace endogène mute avec un reflux de la menace projetée et une intensification de la menace autonome, très délicate à appréhender. Ce texte vise donc à améliorer les moyens de la lutte antiterroriste et du renseignement, avec le soutien de la majorité dans son ensemble.
Nous avons été proches d'un accord en commission mixte paritaire et nous souhaitons continuer ce travail commun avec le Sénat pour adopter un texte qui doit viser le consensus le plus large. C'est la raison pour laquelle plusieurs modifications apportées par les sénateurs ont été retenues par la commission. En revanche, nous sommes revenus à la version initiale de l'équilibre entre les articles 3 et 5. L'article 3 renforce ainsi des mesures individuelles de contrôle administratif et de surveillance, les MICAS, en permettant de prolonger, à titre dérogatoire et dans des cas très particuliers, jusqu'à une durée totale et maximale de vingt-quatre mois la surveillance des individus sortis de prison et condamnés pour terrorisme, avec des renouvellements n'excédant pas trois mois et soumis à justification. Nous avons souhaité retenir les précisions rédactionnelles du Sénat concernant la justification de domicile et la prise en compte de la vie familiale des personnes concernées.
Concernant le renseignement, la plupart des apports du Sénat ont été conservés, notamment en ce qui concerne les dispositions visant la recherche et développement, le concours des opérateurs téléphoniques, le rôle de la Commission nationale de contrôle des techniques de renseignement ou les informations en matière de cybercriminalité.
Sur l'échange de renseignements entre services, les rapporteurs ont souhaité tirer les conséquences de la décision du Conseil constitutionnel pour revoir l'article 7.
Nous avons donc abouti à un texte robuste, efficace et proportionné, fruit d'un travail approfondi des deux chambres. Il donnera les moyens nécessaires à nos services pour protéger nos concitoyens tout en préservant les droits fondamentaux. Le groupe La République en marche votera en faveur de ce projet de loi.
Après l'échec de la commission mixte paritaire de vendredi dernier, nous sommes réunis en cette veille de 14 juillet pour une nouvelle lecture du projet de loi relatif à la prévention d'actes de terrorisme et au renseignement.
Demain, la ville de Nice commémorera les cinq ans du terrible attentat qui l'a frappée. Demain, sur les Champs-Élysées, des policiers municipaux de la ville de Nice défileront. Parmi eux, certains sont intervenus pour stopper la folie meurtrière du terroriste islamiste de la basilique Notre-Dame de Nice le 29 octobre 2020. C'est aux victimes que vont nos pensées en ces moments où nous légiférons de nouveau pour protéger nos concitoyens.
Depuis les différents attentats qui ont frappé notre pays à intervalles réguliers, tous, collectivement, quels que soient les majorités et les gouvernements, avons tenté de répondre au mieux à ces menaces mouvantes, changeantes et complexes.
Ce projet de loi a deux objectifs principaux : d'une part, protéger nos concitoyens en prolongeant les dispositions de la loi SILT qui, bien qu'imparfaites, ont tout de même le mérite d'exister ; d'autre part, tirer toutes les conséquences de la censure par le Conseil constitutionnel de la loi instaurant des mesures de sûreté à l'encontre des auteurs d'infractions terroristes à l'issue de leur peine, dont Mme la présidente de la commission des lois était à l'origine et que nous avions soutenue.
Les rapporteurs l'ont rappelé hier en commission et cet après-midi encore, de nombreux accords ont pu être trouvés avec nos collègues du Sénat, entre autres sur le volet consacré au renseignement. Il s'avère cependant qu'un désaccord important subsiste sur les mesures prévues par les articles 3 et 5 relatifs à la lutte antiterroriste, dans leur versant administratif et judiciaire. Le désaccord ne porte certes pas sur la nécessité absolue de mettre en œuvre des dispositions spécifiques mais sur la définition de celles-ci. Sur les MICAS, et sur le suivi à la fin de leur peine des personnes condamnées pour certains actes de terrorisme, l'Assemblée nationale et le Sénat n'ont pu trouver un accord satisfaisant. Nous en prenons acte. Hier, la Commission des lois a rétabli la rédaction des articles 3 et 5.
Comme il l'a fait pour quasiment la totalité des textes concernant la lutte contre le terrorisme et le renseignement, le groupe LR a voté votre texte en première lecture. Éric Ciotti, qui était notre porte-parole lors de cette première lecture, a rappelé cette position de notre groupe, tout en craignant que le projet de loi que vous nous proposez à nouveau aujourd'hui soit insuffisant et ne réponde pas complètement aux enjeux qu'il prétend résoudre.
Nous approuvons les dispositions du projet de loi mais, en conscience, nous vous le redisons : le texte n'est pas à la hauteur de la menace.
La sécurité est au cœur des préoccupations de nos concitoyens et il est de notre responsabilité d'agir pour l'assurer. Mais il est aussi nécessaire d'inscrire notre action dans un cadre équilibré et proportionné. C'est précisément ce double impératif qui nous a guidés tout au long de l'élaboration de ce texte.
Cette menace est réelle et nous devons plus que jamais la prendre en compte. Le parquet national antiterroriste et la DGSI estiment que 15 à 20 % de ceux qui vont sortir de prison sont encore dangereux. Sur un total de 250 personnes qui seront bientôt libérées, cinquante sont fortement susceptibles de récidiver. Nous ne pouvons pas baisser la garde face à un tel risque.
Nous avons, je le crois, atteint un juste équilibre entre la préservation de nos libertés et l'indispensable renforcement de la sécurité de nos concitoyens – entre une menace terroriste qui évolue et utilise de nouveaux outils de communication et de cryptage, et les moyens que nous pouvons donner à nos services de renseignement pour assurer l'objectif de détection et de prévention des attaques qui pourraient être menées sur notre territoire.
Nous avons également atteint un équilibre entre la rédemption et la réinsertion des terroristes ayant purgé leur peine, et le nécessaire suivi de ceux qui présentent encore une menace pour notre société.
De nombreux points d'accord ont pu être trouvés avec le Sénat, notamment sur les expérimentations prévues par la loi SILT. Ne l'oublions pas : ces dispositifs ont contribué à déjouer près de trente-six attentats depuis 2017. De plus, leur bonne application par les services de l'État a confirmé leur caractère proportionné. Nous devons donc pérenniser ces dispositions, qui ont fait preuve de leur efficacité, avant leur expiration dans quelques jours.
S'il y a eu des points de convergence avec nos collègues sénateurs, il y a aussi eu des points de divergence sur des mesures importantes. C'est la raison pour laquelle hier, en commission des lois, nous avons soutenu les amendements des rapporteurs visant à rétablir la rédaction adoptée en première lecture par notre assemblée. Le groupe dem est satisfait du rétablissement de la durée de vingt-quatre mois applicable aux MICAS pour les condamnés pour terrorisme qui sortent de prison. Il s'agit d'une mesure forte et nécessaire pour mettre en œuvre un suivi efficace des individus les plus dangereux.
Je rappelle que Blandine Brocard, porte-parole de notre groupe, avait défendu en première lecture un amendement visant à créer une nouvelle catégorie de mesures de sûreté afin de distinguer les situations. Nous avons donc conscience des interrogations juridiques, des inquiétudes constitutionnelles que peut susciter cette disposition. Ne présumons pas néanmoins de l'opposition du juge : endossons notre rôle de législateur, débattons de l'opportunité des mesures que nous adoptons pour protéger nos concitoyens et laissons au Conseil constitutionnel, s'il en est saisi, le soin d'apprécier la sagesse de nos débats et la conformité à la Constitution des dispositions que nous adoptons. Elles sont légitimes, nécessaires et proportionnées.
Nous sommes par ailleurs satisfaits du rétablissement de la mesure judiciaire de prévention de la récidive terroriste et de réinsertion, dans sa rédaction issue de la première lecture à l'Assemblée. La rédaction retenue en commission est un compromis satisfaisant entre l'impératif de prévention du terrorisme et la préservation des libertés.
Enfin, je tiens à dire que le groupe dem a soutenu la disposition, introduite en commission pour prendre en compte la décision récente du Conseil constitutionnel en matière de transmission d'informations entre autorités administratives et services de renseignement. Cette nouvelle disposition permettra de mieux protéger les données personnelles des Français et d'encadrer l'activité du renseignement, sans pour autant l'entraver.
Aussi mes chers collègues, malgré les désaccords survenus lors de la CMP, nous sommes persuadés que nous saurons adopter un texte équilibré, protecteur de nos concitoyens et qui prenne en compte les ajouts pertinents des sénateurs.
Pour ces raisons, le groupe dem n'a pas souhaité déposer d'amendements et votera ce texte tel qu'il est proposé par la commission des lois.
Le projet de loi dont nous discutons ce soir en deuxième lecture est un texte à objets divers de sécurité et de renseignement. D'un côté, il réexamine les dispositions des lois relatives à la sécurité intérieure et à la lutte contre le terrorisme, dont plusieurs avaient été adoptées à titre expérimental et provisoire. D'un autre côté, il vise à actualiser, si j'ose dire, la loi sur le renseignement en prenant en compte les réseaux téléphoniques par satellite et 5G, mais aussi à aller plus loin, au moyen des algorithmes pour l'identification des sites internet. D'un autre côté encore, il reprend le principe d'une mesure judiciaire de prévention de la récidive terroriste et de réinsertion à l'encontre des anciens condamnés pour terrorisme. Parallèlement, il vise à étendre les échanges entre les services de renseignement et les durées de conservation des données par les opérateurs. Enfin, il fixe de nouvelles conditions à la déclassification d'archives prévue par la loi de 2008.
C'est, sauf erreur et comme cela a du reste été rappelé à plusieurs reprises par d'autres collègues, la quinzième loi en dix ans comportant, à titre principal et subsidiaire, des dispositions visant à prévenir et compléter l'arsenal législatif destiné à lutter contre le terrorisme. Certes, le terrorisme a changé, mais il semble que l'extension des mesures nouvelles soit toujours en retard par rapport à celles qui pourraient mieux nous protéger. Disons-le d'emblée : la prévention des actes de terrorisme est un objectif hautement légitime. Reste à savoir si les mesures en discussion le sont et, surtout, si elles seront efficaces. En effet, l'évolution de la menace terroriste se traduit par la commission d'actes commis par des individus seuls se réclamant d'une cause, sans qu'une organisation les ait préparés, et donc difficiles à repérer.
Sur ce projet de loi qui est un vrai patchwork de la sécurité – je fais allusion à cet art ancien consistant à coudre ensemble des chutes de tissus divers pour composer un nouvel ouvrage –, je ferai cinq observations.
La première concerne la rupture que représente ce texte par rapport à la loi de 2017. Son article 1er porte en effet pérennisation des articles 1er à 4 de la loi SILT, ou loi sur la sécurité intérieure et la lutte contre le terrorisme du 31 octobre 2017. Or, si cette loi a autorisé les visites domiciliaires, la définition du périmètre de protection et l'exercice de mesures individuelles de contrôle administratif de surveillance, elle a elle-même généré sa contrepartie en les rendant expérimentales. Comme l'ont dit nos collègues du Sénat, si de telles dispositions peuvent être utiles lorsque l'usage en reste limité, elles n'en sont pas moins dérogatoires et doivent rester exceptionnelles. C'est là l'essence même des limites posées aux libertés individuelles : elles doivent rester dérogatoires et leur usage contrôlé démocratiquement. Aussi ces mesures ne doivent-elles être autorisées qu'au cas par cas et leur prorogation doit-elle rester soumise au vote du Parlement autant de fois que nécessaire.
Ma deuxième observation porte sur la création d'une mesure judiciaire de prévention de la récidive terroriste et de réinsertion. Malgré les précautions prises, le caractère proportionné du dispositif à mettre en œuvre demeure incertain, même dans cette version amoindrie des mesures de sûreté.
J'en viens à ma troisième observation : pour ce qui est de l'extension du domaine du renseignement et de l'utilisation de nouvelles techniques, nos collègues sénateurs ont eu la sagesse de n'autoriser qu'à titre expérimental l'usage des algorithmes pour l'URL, au nom, là encore, de la mesure, de la réversibilité et de l'évaluation. La volonté de la majorité présidentielle n'est pas, sauf erreur de ma part, de maintenir cette garantie.
Ma quatrième observation porte sur la durée de la conservation des données de connexion. J'estime que la voie empruntée par d'autres États européens tout aussi engagés que la France dans la lutte contre le terrorisme et tout aussi soucieux de l'efficacité de leurs services de police et de renseignement mériterait plus d'attention. En tout état de cause, l'affaire, qui paraît réglée, ne l'est pas tant que cela et il sera nécessaire de revenir sur cette question. Il est aujourd'hui impératif qu'une autorité indépendante autorise l'autorité politique à utiliser de telles techniques de collecte de données.
Enfin, ma dernière observation concerne les archives, à propos desquelles l'éminent juriste Guy Braibant écrivait qu'il n'y a pas d'histoire, pas d'administration, pas de république sans archives. La loi de 2008 a réaffirmé le principe fondamental de la libre communication des archives publiques, auquel ne peuvent être opposées que des dérogations, par nature limitées. Le texte qui nous est soumis remet donc en cause le principe de la loi de 2008 en faisant porter sur les lecteurs et les services des archives le fardeau de la preuve de la communicabilité.
Comme je le laissais entendre voilà quelques instants en parlant de patchwork, les éléments divers qui forment ce texte mélangent des chutes intéressantes, mais aussi d'autres, plus sombres. Ce texte qui paraît s'inscrire dans la continuité législative rompt sur des points essentiels avec ce qui faisait l'équilibre des lois de sécurité intérieure. Il y a de la malignité à mélanger ainsi les choses et à rompre avec des principes qui lient sécurité et libertés individuelles. Compte tenu de ces raisons, il appartiendra à chacun des membres de notre groupe Socialistes et apparentés de se positionner sur ce texte.
Depuis plus d'un an, la crise sanitaire envahit l'espace médiatique, mais aussi la vie quotidienne de nos compatriotes. Plusieurs événements dramatiques se sont toutefois chargés de nous rappeler que la menace terroriste était toujours aussi présente. Outre le risque djihadiste, les services de renseignement s'inquiètent également de la montée des autres radicalités – politique, complotiste, survivaliste ou conspirationniste.
Ce projet de loi, il faut le rappeler, n'est pas circonstanciel. Les mesures qu'il nous est proposé d'inscrire dans le droit commun ont été éprouvées et évaluées depuis plusieurs années. La boussole de ce projet de loi, que le groupe Agir ensemble soutient, est de donner à notre administration et à notre institution judiciaire les moyens de protéger nos concitoyens. Notre groupe est d'ailleurs très fier que la partie de ce texte consacrée au renseignement soit portée par l'un de ses membres, Loïc Kervran, dont je crois pouvoir dire que l'expertise est unanimement saluée.
En première lecture à l'Assemblée nationale, le travail a été fructueux : plus de quatre-vingts amendements ont été adoptés en commission et le travail des trois groupes de la majorité a notamment permis de faire adopter un amendement qui permettra l'aggravation des peines encourues en cas de violation des obligations des mesures de sûreté créées par l'article 5 du projet de loi.
Le groupe Agir ensemble se réjouit également de l'introduction, par voie d'amendement à l'Assemblée, de l'article 17 bis , qui permet d'élargir les missions et les prérogatives de la délégation parlementaire au renseignement, créée en 2007 et dont le travail, fondamental pour notre démocratie, doit être encouragé. Je tiens, à propos de cet article, à saluer le travail du Sénat, précisant que les recommandations et observations faites par la DPR au Président de la République et au Premier ministre ne seraient plus transmises, mais présentées au président de chaque assemblée. Le caractère plus solennel qui découle de cette substitution aura, je l'espère, des effets plus que sémantiques.
Nous savons que les points durs de désaccord entre les deux chambres portent principalement sur les articles 3 et 5, à propos des modalités de suivi des personnes condamnées pour des actes de terrorisme et sortant de détention. Nos deux assemblées s'accordent sur l'impérieuse nécessité d'assurer un suivi effectif de ce public : c'est sur la façon de procéder opérationnellement que le bât blesse.
Concernant l'article 3 et la pérennisation des MICAS, ainsi que la possibilité d'allonger leur durée maximale d'un à deux ans, nous avons adopté hier en commission des lois un amendement du rapporteur Raphaël Gauvain tendant à conserver les modifications apportées par le Sénat visant, d'une part, la précision relative à la justification du domicile et, d'autre part, la prise en compte de la vie familiale de la personne concernée dans le cadre de l'interdiction de se trouver en relation directe ou indirecte avec certaines personnes nommément désignées. Néanmoins, le vote de cet amendement a également rétabli la possibilité, supprimée par le Sénat en première lecture, d'étendre la durée maximale de ces MICAS à vingt-quatre mois pour les personnes condamnées à une peine privative de liberté d'une durée supérieure ou égale à cinq ans pour des infractions à caractère terroriste. Les MICAS étant d'une efficacité avérée et pouvant être prises rapidement et sous le contrôle ex post du juge administratif pour les individus radicalisés, il paraît indispensable de pouvoir les prononcer pour vingt-quatre mois.
Le Sénat proposait de limiter la durée de surveillance admirative à un an, tout en renforçant les dispositifs des mesures de sûreté introduites par l'article 5. Or, comme l'a indiqué la présidente de la commission des lois lors de la CMP de vendredi dernier, nous ne pouvons souscrire à la version de l'article 5 proposée par le Sénat, qui implique des mesures de surveillance judiciaire trop contraignantes et plus nombreuses que celles qui ont été votées et censurées en 2020. C'est pourquoi nous avons également adopté en commission des lois un amendement visant à rétablir l'article 5 dans la version de l'Assemblée nationale, c'est-à-dire permettant l'instauration d'une nouvelle mesure de sûreté dont l'objectif est de prévenir la récidive et de garantir la réinsertion des personnes condamnées pour certains actes de terrorisme.
L'équilibre entre la protection de la santé publique et le respect des droits fondamentaux est toujours difficile à trouver. La rédaction portée par le Gouvernement et largement amendée par le Parlement nous semble aujourd'hui satisfaisante. C'est pourquoi le groupe Agir ensemble votera, en responsabilité, le texte qui nous est soumis aujourd'hui.
MM. Raphaël Gauvain et Loïc Kervran, rapporteurs, ainsi que Mme Sophie Mette, applaudissent.
Le groupe UDI-I regrette vivement, lui aussi, que la commission mixte paritaire n'ait pas abouti, d'abord parce qu'en matière de protection de nos concitoyens, nous n'avons plus le temps d'attendre, et ensuite parce que cet échec nous fait de nouveau examiner ce texte dans la précipitation, alors qu'un dialogue constructif devrait avoir lieu sur des sujets aussi primordiaux. C'est d'autant plus dommage que, finalement, nos deux assemblées souscrivent évidemment aux buts que vise ce texte. La CMP aurait d'ailleurs pu aboutir sur l'essentiel des articles, dont ceux qui pérennisent les mesures individuelles de contrôle administratif de la loi SILT, essentielles pour la lutte contre ces cancers que sont le terrorisme, l'islamisme et le djihadisme. Elles sont utilisées à bon escient et demeurent, comme vous le savez, très efficaces. Notre groupe les soutient donc évidemment.
Concernant l'article 5, relatif au suivi des personnes condamnées pour terrorisme à leur sortie de prison, nous en avons déjà validé le principe, dont j'ai cru comprendre qu'il avait cristallisé l'essentiel des désaccords de la CMP. J'espère que la rédaction qui sortira finalement de nos débats sera opérationnelle et ne sera pas censurée par le Conseil constitutionnel.
Nous restons, je dois le dire, quelque peu dubitatifs devant l'ambivalence de l'article 19, qui rend plus accessibles certaines archives publiques, mais restreint considérablement l'accès à certaines autres.
Pour le reste des articles, nous validons la version de l'Assemblée nationale, qui nous semble plus adaptée à l'ampleur du défi que nous avons encore à relever. Notre avis demeure, du reste, le même qu'en première lecture. Ce texte contient des mesures utiles pour la lutte contre le terrorisme. Malheureusement, comme nous l'avons vu, la menace reste présente. Elle est diffuse et grave, et requiert toute notre attention afin que nous puissions lui consacrer tous les moyens nécessaires. Nous pensons d'ailleurs que, comme je le répète depuis sept ou huit ans, il faut arrêter de couper les cheveux en quatre : la déchéance de nationalité, au moins pour les binationaux, l'interdiction de retour sur le territoire national pour les individus qui ont séjourné sur un terrain d'opérations terroristes, voire la détention administrative, sont des mesures qui devraient être enfin réellement étudiées, parce qu'elles sont efficaces.
Pour ce qui est des dispositions relatives au renseignement, nous appelons toujours à une grande vigilance. Au-delà des procédés très techniques, ce sont les intentions qui comptent et il faut donc nous assurer que les dispositifs instaurés font l'objet d'un encadrement strict empêchant tout dévoiement de leur utilisation. Cette remarque est importante, mais nous ne contestons évidemment pas l'objectif consistant à donner à nos services de renseignement les moyens de faire face aux nouvelles menaces et, surtout, à nous doter de dispositifs adaptés à l'évolution technologique.
Comme vous l'avez compris, le groupe UDI-I votera ce texte, même si parfois la majorité est parfois sourde à certains de nos amendements.
À la veille du 14 juillet et dans un hémicycle un peu désert à cause des fêtes de demain, je voudrais avoir, avec votre permission, monsieur le président, une pensée pour les victimes – car je ne pense qu'à elles. Ce n'est pas faire trop que de rappeler la mémoire des victimes de l'attentat qui a visé l'école Ozar Hatorah de Toulouse – Aryeh, Jonathan, Myriam et Gabriel –, les militaires Chennouf et Legouad, de Montauban, les victimes de l'attentat de 2015 contre Charlie hebdo – Charb, Wolinski, Cabu et les autres –, les victimes de l'Hyper Cacher, la policière Clarissa Jean-Philippe, Aurélie Châtelain, et Hervé Cornara, décapité à Saint-Quentin-Fallavier. Je ne pourrai pas énumérer un par un, parce qu'ils sont trop nombreux, ceux qui ont été victimes de l'attentant du Bataclan, mais je pense à eux, aux victimes des terrasses de Paris, et à leurs familles. Je pense aussi aux policiers de Magnanville et, évidemment, en cette veille du 14 juillet, à l'attentat commis sur la Promenade des Anglais, dont je ne pourrai pas non plus énumérer toutes les victimes. Je pense au père Hamel de Saint-Étienne-du-Rouvray. Je pense à l'attentat du Louvre, à l'attentat de la gare Saint-Charles, à Sarah Halimi, tuée, elle aussi, en 2018. Je pense à notre héros, le colonel Beltrame, tué à Trèbes. Je pense à Mireille Knoll et à sa famille. Je pense aux victimes de la préfecture de police de Paris, aux victimes de l'attentat de Colombes, aux victimes de Romans-sur-Isère et de Conflans-Sainte-Honorine. Je pense, comme vous tous, à Samuel Paty et à sa famille.
Je pense bien sûr aux victimes de la cathédrale de Nice, mais aussi à Stéphanie Monfermé, policière à Rambouillet. J'aurais pu citer aussi DJ Selam ou notre compatriote Esther Horgen, et j'en ai sans doute encore oublié. Dans ces moments d'unité, à quelques minutes de notre fête nationale, je ne pense qu'à eux : toutes nos pensées, toutes nos lois, toute notre attention ne doivent être tournées que vers eux.
Avant d'appeler dans le texte de la commission les articles du projet de loi sur lesquels les deux assemblées n'ont pu parvenir à un texte identique, je vous informe, mes chers collègues, que nous sommes en train d'interroger les différents groupes sur la conduite des travaux.
Je suis prêt à ce que nous finissions l'examen du texte lors de cette séance, mais je demande aux différents groupes représentés dans l'hémicycle de me faire connaître leur opinion, directement ou indirectement. Mme la ministre déléguée, qui a été consultée, et Mme la présidente de la commission des lois, ne s'y sont pas opposées, mais je souhaiterais obtenir l'accord global des groupes.
Cette solution suppose néanmoins que la présentation des amendements reste concise.
La parole est à Mme Marietta Karamanli, pour soutenir l'amendement n° 1 . Elle va nous prouver que nous pouvons aller vite.
Sourires.
Je vous informe tout d'abord, monsieur le président, que mon groupe accepte votre proposition.
Par cet amendement, le groupe Socialistes et apparentés souhaite rétablir une disposition adoptée par le Sénat, qui prévoyait, à titre de réserve, la rédaction suivante : « La mise en œuvre de ces vérifications ne peut se fonder que sur des critères excluant toute discrimination de quelque nature que ce soit entre les personnes. »
Comme je l'ai rappelé tout à l'heure, il s'agissait de garantir l'encadrement des pouvoirs des autorités dans le cadre des périmètres de sécurité.
Défavorable, pour deux raisons : tout d'abord, le droit pénal prévoit déjà que les contrôles ne peuvent être discriminatoires. En outre, introduire cette disposition dans la loi laisserait à penser que les contrôles sont, par nature, discriminatoires. Par conséquent, je vous demande de retirer l'amendement ; à défaut, avis défavorable.
L'amendement n° 1 , repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.
L'article 1er bis est adopté.
La parole est à Mme Karine Lebon, pour soutenir l'amendement n° 41 tendant à supprimer l'article.
Le champ d'application de cette mesure est très large, et dépasse l'objectif de prévention et de lutte contre le terrorisme. En outre, la notion de « locaux dépendant du lieu de culte » est floue. Nous proposons donc de supprimer l'article.
Avis défavorable.
Dans le cadre des travaux d'évaluation de la loi SILT menés avec Mme la présidente de la commission et notre collègue Éric Ciotti, nous avions pu constater, au travers des huit décisions qui avaient été prises, que les locaux dépendants des lieux de culte étaient détournés de leur usage pour faire échec aux mesures de fermeture d'un lieu de culte, et accueillaient alors l'exercice du culte. C'est pourquoi nous avions recommandé d'inscrire la notion de « lieux dépendant du lieu de culte » dans la loi – recommandation très largement partagée par le Sénat, d'ailleurs.
Même avis.
L'article est particulièrement flou : on ne sait pas bien ce que sont les lieux dépendants et on ne sait pas comment ils sont circonscrits. Cela risque d'entraîner des contestations devant les juridictions compétentes. Aujourd'hui, le code de la sécurité intérieure permet déjà de dissoudre des associations de fait et d'atteindre l'objectif que vous visez. On voit donc bien que vous vous focalisez là sur l'aspect religieux qui sous-tendrait le passage à l'acte terroriste, alors même que nous savons, après moult analyses, que la religion n'est qu'un des éléments déclencheurs du passage à l'acte, parfois même marginal – je ne citerai pas tous les loups solitaires qui sont passés à l'acte sans que cela ait le moindre lien avec la fréquentation active et régulière d'un lieu de culte où seraient tenus des propos incitant à commettre des actes terroristes. Les velléités terroristes peuvent d'ailleurs être poursuivies au plan judiciaire.
L'amendement n° 41 n'est pas adopté.
L'article 2 est adopté.
La parole est à Mme Marietta Karamanli, pour soutenir l'amendement n° 2 .
Comme nous l'avons déjà rappelé, notre désaccord concernant les MICAS ne concernait pas l'extension de leur durée de douze à vingt-quatre mois, mais bien, comme l'ont d'ailleurs souligné nos collègues sénateurs, le fait que ces mesures restrictives de liberté prises directement par l'autorité administrative échappent, d'une certaine manière, au principe constitutionnel de non-rétroactivité de la loi pénale. Elles apparaissent ainsi comme une nouvelle sanction.
D'autres sujets ont été pointés par les professionnels du droit, et nous regrettons qu'ils figurent dans le texte. C'est pourquoi nous proposons de supprimer les alinéas 6 et 7 de l'article 3.
Je crains que vous n'ayez pas défendu le bon amendement, chère collègue. L'amendement n° 2 visait à remplacer les mots « tient compte » par le terme « respecte » à l'alinéa 5. Quoi qu'il en soit, nous avons déjà eu cette discussion à plusieurs reprises, en première lecture puis à nouveau hier en nouvelle lecture, et l'avis est défavorable.
Même avis.
L'amendement n° 2 n'est pas adopté.
Rappelons que les mesures individuelles de contrôle administratif et de surveillance, qui, d'un point de vue terminologique, ont succédé aux assignations à résidence prévues par l'état d'urgence, sont décidées par le ministre de l'intérieur, après qu'il en a informé le procureur de la République de Paris.
Les critères fixés en matière de MICAS – l'existence de raisons sérieuses de penser que le comportement d'une personne constitue une menace d'une particulière gravité pour la sécurité et l'ordre publics –, qui permettent de justifier des restrictions des libertés importantes, sont peu précis, difficiles à établir et à contrôler. La menace peut n'être ni avérée ni caractérisée, alors que d'importantes restrictions à la liberté d'aller et venir sont décidées.
Or l'article 3 pérennise et renforce ces mesures. Ainsi, la mesure d'assignation à résidence, ou plus exactement d'interdiction de se déplacer en dehors d'un périmètre déterminé qui ne peut être inférieur au territoire de la commune, pourrait être assortie d'une interdiction de paraître dans un ou plusieurs lieux déterminés se trouvant au sein de ce périmètre, dans lesquels se tient un événement qui, par son ampleur ou des circonstances particulières, est exposé à un risque de menace terroriste.
Surtout, la durée totale cumulée des obligations pouvant être ordonnées dans ce cadre sera portée de douze à vingt-quatre mois. À cet égard, rappelons que dans son avis du 21 avril 2021, le Conseil d'État a estimé que l'allongement proposé soulevait « une difficulté d'ordre constitutionnel, sans que son efficacité soit suffisamment établie ». En outre, il a souligné que le Conseil constitutionnel avait intégré dans son bilan de la constitutionnalité des MICAS le fait que leur durée était limitée à douze mois.
Nous souhaitons donc supprimer les alinéas prévoyant que la durée maximale des mesures de surveillance est portée de douze à vingt-quatre mois.
Il vise lui aussi à supprimer les alinéas portant de douze à vingt-quatre mois la durée des MICAS.
Tout d'abord, nous sommes opposés aux MICAS par principe, car nous estimons que ces mesures sont disproportionnées au regard du droit commun et des autres initiatives administratives, même celles contrôlées par le juge des libertés et de la détention.
En outre, comme vient de le rappeler ma collègue Karine Lebon, une décision rendue par le Conseil constitutionnel à l'occasion d'une question prioritaire de constitutionnalité (QPC) a validé la constitutionnalité du dispositif, mais uniquement parce que les mesures n'excédaient pas douze mois. Il était sous-entendu que toute durée supérieure exposerait le dispositif à une censure. Visiblement, vous aimez voir vos textes censurés – c'est votre droit, après tout, à moins que ce ne soit une stratégie délibérée visant à pousser le plus possible le Conseil constitutionnel dans ses retranchements, une loi après l'autre, en espérant que ça finisse par passer ! Cela fonctionne, manifestement, puisque les jurisprudences du Conseil constitutionnel et du Conseil d'État sont de plus en plus permissives s'agissant des exceptions au droit commun. C'est pourquoi, par ces amendements, nous cherchons non à vous inquiéter, mais bien à nous opposer à ces mesures administratives touchant des personnes dont la dangerosité n'est que suspectée, sans qu'aucune preuve concrète ait été apportée. Dans le cas contraire, la situation serait judiciarisée, et les choses seraient beaucoup plus simples.
Je ne veux pas que mon pays, que notre pays, devienne un État permettant à l'exécutif de prendre des mesures aussi disproportionnées et attentatoires aux libertés individuelles.
Mes chers collègues, vous m'avez demandé d'envisager une prolongée, et j'y suis tout à fait favorable, mais cela ne sera pas possible si les présentations des amendements sont aussi longues, surtout s'il s'agit d'amendements identiques ou donnant lieu à une discussion commune – ne serait-ce que par respect pour les agents de l'Assemblée qui ont, eux aussi, besoin d'avoir des certitudes.
Il reste vingt-huit amendements à examiner : je vais essayer de finir le texte, mais si la volonté que nous terminions le texte peu après vingt heures ne se dégage pas, je serai contraint de lever la séance.
L'amendement n° 4 de Mme Marietta Karamanli est défendu.
Quel est l'avis de la commission ?
Défavorable. La prolongation des MICAS jusqu'à vingt-quatre mois concerne uniquement les personnes sortant de prison. Les condamnés pour des faits de terrorisme sont au cœur du dispositif présenté par le Gouvernement, lequel a l'entier soutien de la majorité.
La parole est à Mme Marietta Karamanli, pour soutenir l'amendement n° 7 .
En l'état actuel du texte, la prolongation des mesures jusqu'à vingt-quatre mois doit être motivée par l'existence d'éléments nouveaux et complémentaires. Or, nous ne comprenons pas pourquoi de tels éléments ne justifieraient pas l'engagement de poursuites judiciaires. C'est pourquoi notre amendement propose d'insérer un nouvel alinéa à l'article 3.
Nous avions déjà eu cette discussion en première lecture : à partir du moment où des poursuites sont engagées, les MICAS s'arrêtent d'elles-mêmes. Par conséquent, je demande le retrait de l'amendement ; à défaut, avis défavorable.
L'amendement n° 7 , repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.
L'article 3 est adopté.
Nous en avons déjà discuté hier en commission, mais si nous insistons tant pour supprimer l'article 5, c'est qu'il s'agit selon nous d'une reprise des dispositions de la loi instaurant des mesures de sûreté à l'encontre des auteurs d'infractions terroristes à l'issue de leur peine, censurées par le Conseil constitutionnel dans sa décision du 7 août 2020.
En effet, pour l'essentiel, les motivations de la décision restent pertinentes. Le Conseil constitutionnel indiquait ainsi que, bien que dépourvues de caractère punitif, les mesures visées devaient respecter le principe résultant des articles 2, 4 et 9 de la Déclaration de 1789. Même si le problème est amoindri dans cette version, le caractère proportionné du dispositif demeure incertain.
Le concept de dangerosité irrigue dangereusement – c'est le cas de le dire – le droit administratif et même pénal, conduisant à l'utilisation de moyens disproportionnés contre des gens dont on ne sait pas s'il y a réellement lieu de leur reprocher quelque chose. Cette perspective m'inquiète pour notre pays. En matière pénale, je suis opposé à quelque mesure de sûreté que ce soit. En 2018, dans le cadre de l'examen de la future loi de programmation 2018-2022 et de réforme pour la justice, nous avions déposé un amendement en ce sens ; ne serait-ce que par constance, nous continuerons à nous opposer à ces dispositions.
Avis défavorable. L'article 5, que ces amendements tendent à supprimer, est la deuxième jambe du dispositif voulu par le Gouvernement. Contrairement à ce que vous avancez, celui-ci permet des mesures de suivi par l'intermédiaire des MICAS et des mesures de réinsertion prises par le juge judiciaire.
L'amendement n° 40 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
L'article 5 est adopté.
La parole est à Mme Karine Lebon, pour soutenir l'amendement n° 43 , tendant à supprimer l'article 6.
L'article 6 crée au sein du code de la santé publique un nouvel article L. 3211-12-7 autorisant la communication aux préfets de département, au préfet de police de Paris, ainsi qu'aux services de renseignement du premier et du deuxième cercle, de données consignées dans le fichier HOPSYWEB, relatif aux personnes ayant fait l'objet d'une mesure de soins psychiatriques sans consentement. En d'autres termes, il s'agit d'introduire dans le code de la santé publique, « aux seules fins d'assurer le suivi d'une personne qui représente une menace grave pour la sécurité et l'ordre publics en raison de sa radicalisation à caractère terroriste », une nouvelle dérogation au secret médical.
Cette extension des possibilités que soient communiquées des informations relatives à l'admission d'une personne en soins psychiatriques ne laisse pas d'inquiéter. Ces données sont particulièrement protégées : il conviendrait que leur accès fasse l'objet de limitations strictes. Or cet article permettra au Gouvernement de modifier le décret du 6 mai 2019, qui permet de recouper le fichier HOPSYWEB et le fichier de traitement des signalements pour la prévention de la radicalisation à caractère terroriste (FSPRT), afin d'y prévoir l'information, le cas échéant, des destinataires de ce dernier. Le texte franchit ainsi un degré supplémentaire dans l'interconnexion de ces fichiers, laquelle amalgame folie et terrorisme, comme le remarque le Syndicat de la magistrature. La logique sécuritaire l'emporte sur la logique sanitaire. La lutte antiterroriste semble ici servir de prétexte au fichage et au traçage des personnes atteintes de troubles mentaux, alors qu'aucune corrélation n'a été établie entre ceux-ci et la radicalisation. L'étude d'impact et l'avis du Conseil d'État sont indigents concernant ces dispositions : ils ne rendent aucunement compte du caractère complexe et protéiforme des phénomènes de radicalité violente.
Avis défavorable. Là encore, l'amendement vise à supprimer une composante essentielle du projet de loi. Lors des derniers attentats, les assaillants apparaissaient dans le fichier HOPSYWEB : ils avaient séjourné en hôpital psychiatrique. Pour les services de renseignement, il est donc extrêmement important d'avoir accès à ces informations. En revanche, ce dispositif respecte le secret médical, puisqu'il ne s'étend pas aux données concernant la maladie dont souffre le patient.
Même avis, pour les mêmes raisons.
L'amendement n° 43 n'est pas adopté.
L'article 6 est adopté.
L'article 6 bis est adopté.
La parole est à Mme Marietta Karamanli, pour soutenir l'amendement n° 5 .
Il vise à apporter un complément déjà évoqué en commission : la transmission de renseignements prévue par l'alinéa 8 ne serait possible qu'à la condition « que ces renseignements relèvent des intérêts fondamentaux de la nation ». Cette précision constitue une garantie essentielle et correspond de surcroît aux préconisations du Conseil de l'Europe en matière de droits de l'homme.
Avis défavorable. Comme cela a déjà été évoqué, ces techniques de renseignement ne peuvent être utilisées qu'en cas de menace portant sur les intérêts fondamentaux de la nation.
L'amendement n° 5 , repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.
S'agissant d'autoriser le recours à une technique qui recueille des données potentiellement sensibles, nous regrettons que l'avis de la CNCTR ne soit pas contraignant. S'il est défavorable, le Premier ministre peut passer outre, à condition de le justifier. L'avis de la CNCTR n'a finalement aucun poids, alors qu'il porte sur des techniques susceptibles d'attenter aux libertés, et l'absence de procédure de recours obligatoire en cas d'avis défavorable constitue un péril. Cet amendement vise donc à rappeler que le recueil de renseignements doit être strictement encadré : afin de préserver l'État de droit, le Premier ministre ne devrait pas pouvoir en décider seul, sans avis conforme d'une autre institution.
Même utilisées au nom de la sécurité de l'État, les techniques de renseignement n'ont rien d'anodin : elles sont intrusives, surtout lorsqu'on les emploie à mauvais escient. L'association La Quadrature du net observe ainsi au sujet de l'article 7 que le secret professionnel ne pourra plus être invoqué, que les services sociaux devront transmettre aux services de renseignement, d'eux-mêmes ou sur requête, toute information pouvant concourir à une mission de ces derniers – toutes les finalités du renseignement étant incluses, y compris l'espionnage économique et la surveillance des mouvements sociaux.
Avis défavorable. Premièrement, jamais le Premier ministre n'a dérogé à un avis de la CNCTR. Deuxièmement, il n'est pas question ici des brèches dans la vie privée, de l'emploi des techniques de renseignement, mais de la transmission des informations déjà recueillies.
Même avis, pour être concise.
C'est sans conteste vous qui l'êtes le plus ici, madame la ministre déléguée !
L'amendement n° 44 n'est pas adopté.
L'article 7 est adopté.
Même expérimentale, la mesure prévue par l'article 8 n'est pas assortie de garanties suffisantes. La Cour européenne des droits de l'homme a estimé, dans son arrêt de grande chambre du 4 décembre 2008, que « le simple fait de mémoriser des données relatives à la vie privée d'un individu constitue une ingérence au sens de l'article 8 » de la Convention européenne des droits de l'homme. Nous sommes donc opposés à cette expérimentation ; notre prochain amendement, le n° 8, est d'ailleurs un amendement de repli visant à encadrer plus strictement celle-ci.
J'ajoute que les exemples cités dans l'exposé des motifs, par le rapporteur, par la ministre déléguée, ne sont guère pertinents. S'agissant d'isoler une voix du bruit ambiant, j'avais fait observer que lorsqu'un député du groupe La France insoumise adresse une question au Gouvernement, il le fait généralement au milieu d'un beau vacarme : si vous voulez vous entraîner, vous trouverez donc des séquences intéressantes dans le domaine public, sans besoin d'aller chercher plus loin ! Vous n'assumez pas la véritable finalité de l'article : c'est là une raison supplémentaire de réclamer sa suppression.
Avis défavorable. Il y a là un enjeu d'efficience pour les services concernés, un enjeu de souveraineté pour la France, et l'article prévoit de très nombreux dispositifs d'encadrement.
Même avis. Je me permets d'empiéter quelques instants sur vos débats pour rappeler que l'article 8 vise à faciliter le développement des outils techniques destinés à aider les analystes, qui exploitent des volumes de données souvent considérables. Selon les experts, ce développement suppose une phase d'apprentissage, de tests, dont l'efficacité requiert une base de données réelles. Afin d'éviter tout détournement du dispositif, de nombreuses garanties ont été prévues : elles répondent à vos inquiétudes. Ainsi, les données conservées seront expurgées de tout élément permettant d'identifier les personnes en cause ; seuls les agents exclusivement affectés aux missions de recherche se trouveront en mesure d'y accéder ; enfin, le programme sera placé sous le contrôle a priori et a posteriori de la CNCTR, qui peut demander au Premier ministre de le suspendre ou de l'interrompre – ce qu'il ferait sans hésiter, le cas échéant. C'est pourquoi le Gouvernement estime cette disposition non seulement indispensable, mais sécurisée, car il n'existe aucun risque de détournement des données conservées.
L'amendement n° 8 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
Nous souhaitons que les données n'ayant aucun lien avec une quelconque menace terroriste ne puissent être conservées plus de deux ans.
Avis défavorable. Ces données sont rares ; nous aurons besoin de plusieurs années pour que le dispositif soit efficace et cet article pertinent.
L'amendement n° 45 , repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.
L'article 8 est adopté.
La parole est à Mme Karine Lebon, pour soutenir l'amendement n° 46 , qui tend supprimer l'article 10.
Par cet amendement, nous nous opposons à l'élargissement du recours à l'IMSI-catching. L'IMSI-catcher est un appareil de surveillance utilisé pour intercepter les communications mobiles, accéder aux correspondances, recueillir des données techniques de connexion, pister les terminaux, toutes choses particulièrement attentatoires aux libertés ; le caractère très intrusif de cette technique justifie le fait qu'elle ne soit actuellement autorisée qu'à titre exceptionnel, dans le cadre de procédures judiciaires concernant des infractions graves à la loi pénale. Son extension présente donc un risque important d'atteinte à la vie privée. L'appareil, fonctionnant comme une antenne relais, impose aux terminaux mobiles situés dans son périmètre de se connecter à lui : cette pratique pourrait donner lieu à une surveillance de masse, puisqu'elle conduit à capter des renseignements qui n'ont rien à voir avec une menace terroriste. De plus, le Conseil d'État, dans son avis, ne s'est pas prononcé sur cet article.
Avis défavorable. L'article 10 ne vise en aucun cas à élargir l'utilisation de l'IMSI-catching, mais tend à une mise à jour liée aux évolutions technologiques.
Même avis, pour les mêmes raisons.
L'amendement n° 46 n'est pas adopté.
L'article 10 est adopté.
L'amendement n° 48 de Mme Marie-George Buffet, tendant à supprimer l'article 11, est défendu.
L'amendement n° 48 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
L'article 11 est adopté.
Dans sa décision du 23 juillet 2015, le Conseil constitutionnel admettait l'utilisation des « boîtes noires » au motif que les algorithmes ne permettent pas d'accéder au contenu des échanges ni aux liens consultés. Or c'est précisément ce qui deviendra possible avec l'extension de la portée des « boîtes noires » aux adresses des pages internet, les URL. J'espère donc encore une fois que le Conseil constitutionnel, dans sa grande sagesse, fera œuvre utile.
L'amendement n° 54 de Mme Marie-George Buffet est défendu.
Quel est l'avis de la commission ?
Il est défavorable, pour des raisons déjà longuement exposées en première lecture, en commission puis en séance publique.
L'article 13 est adopté.
L'article 15 est adopté.
Auparavant, l'avis de la CNCTR était consultatif dans le texte et contraignant dans les faits. Désormais, il sera contraignant dans le texte.
L'amendement n° 49 , repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.
L'amendement n° 34 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
Ils sont tous deux inspirés par l'arrêt du 6 octobre 2020 de la Cour de justice de l'Union européenne, sur lequel nous avons eu l'occasion d'établir un rapport précis en commission des affaires européennes. Ils visent à améliorer les garanties, conformément à cette jurisprudence.
Avis défavorable à ces deux amendements. D'abord, la Cour de justice de l'Union européenne prévoit une procédure d'urgence. Ensuite, comme je vous l'ai indiqué, le présent texte renforce le poids de l'avis de la CNCTR : s'il était auparavant contraignant dans les faits, il était simplement consultatif dans la loi. Il sera désormais contraignant et le Premier ministre ne pourra pas mettre une technique en œuvre sans l'accord de la CNCTR, à moins de passer devant le Conseil d'État.
C'est tout à fait exact. Avis défavorable.
L'article 16 est adopté.
Les articles 16 bis et 17 sont successivement adoptés.
L'amendement n° 80 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
L'article 17 bis est adopté.
L'article 17 ter A est adopté.
Les amendements n° 37 de M. Sébastien Jumel et 85 de M. Cédric Villani sont défendus.
Je suis saisi de plusieurs amendements, n° 12 , 39 , 47 , 52 , 11 , 38 et 53 , pouvant être soumis à une discussion commune.
Les amendements n° 12 , 39 , 47 et 52 d'une part sont identiques, de même que les amendements n° 11 , 38 , 53 d'autre part.
La parole est à Mme Marietta Karamanli, pour soutenir l'amendement n° 12 .
Il a suscité de longues discussions et je remercie M. le rapporteur pour l'ouverture dont il fait preuve au cours de ce débat sur les archives. J'espère que les points de vue défendus par les uns et les autres permettront d'avancer. Le compromis que nous avons trouvé lors de la discussion de la loi de 2008 relative aux archives, au cours de laquelle j'étais intervenue, a permis d'ouvrir et de déclassifier un certain nombre d'archives après cinquante ans – selon une volonté qui a été partagée par les sénateurs. Nous attendons que le Gouvernement fasse preuve d'ouverture sur ce sujet à l'avenir.
Ce sujet doit faire l'objet d'une vigilance particulière. Il a suscité une mobilisation exemplaire des personnes concernées, qui ont fait des propositions, et a conduit un certain nombre d'entre nous à déposer ces amendements identiques. Je crois qu'il faudra revenir un jour sur les dispositions de cet article 19 car, même si elles ont évolué, elles ne sont toujours pas satisfaisantes d'après ce que nous ont dit les historiens et les archivistes.
Il vise le même objectif. Je rappelle qu'en première lecture, nous avions alerté le Gouvernement sur le caractère illégal de l'instruction générale interministérielle – IGI – n° 1300. C'est la preuve qu'il faut tenir compte des alertes parlementaires : on ne peut pas travailler sur de tels sujets en allant de sanction du Conseil constitutionnel en sanction du Conseil d'État. Il aurait fallu revoir totalement le dispositif relatif aux archives en fonction de ce nouvel état de fait. Le présent amendement propose, comme celui de Mme Karamanli, de réécrire, l'article 19.
Les amendements identiques n° 11 de Mme Marietta Karamanli, 38 de M. Sébastien Jumel et 53 de Mme Émilie Cariou sont défendus.
Quel est l'avis de la commission ?
J'émets un avis défavorable à ces amendements, en faisant trois observations très rapides. D'abord, il existe jusqu'à maintenant un accord entre le Sénat et l'Assemblée sur l'article 19. Ensuite, cet article est le plus amendé du présent projet de loi. Enfin, les propos des représentants du Gouvernement présents au banc ont permis jusqu'ici à mon sens de lever la plupart des inquiétudes.
Les amendements n° 83 de Mme Paula Forteza, 51 de Mme Émilie Cariou et 73 de Mme Paula Forteza sont défendus.
L'article 19 est adopté.
Je vous remercie tous, chers collègues, d'avoir présenté vos arguments de façon succincte. Dans la mesure où aucun groupe ne souhaite s'exprimer dans le cadre des explications de vote, nous en venons au vote sur l'ensemble, à main levée. En effet, je n'ai pas non plus reçu de demande de scrutin public – qui m'aurait permis de voter !
Je mets aux voix l'ensemble du projet de loi.
Le projet de loi est adopté.
Prochaine séance, jeudi 15 juillet, à neuf heures :
Débat d'orientation des finances publiques.
La séance est levée.
La séance est levée à vingt heures vingt-cinq.
Le directeur des comptes rendus
Serge Ezdra