Intervention de Pascal Brindeau

Séance en hémicycle du jeudi 15 avril 2021 à 15h00
Protection des jeunes mineurs contre les crimes sexuels — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaPascal Brindeau :

Avant 15 ans, c'est non. Monsieur le ministre, vous nous avez dit que nos débats d'aujourd'hui ne devaient pas complexifier les apports d'un texte qui a fait l'objet d'un travail important au cours de la navette parlementaire et qui opère des avancées incontestables et historiques – comme vous les avez vous-même qualifiées – dans la lutte contre les violences sexuelles faites aux mineurs.

Si nous ne devions retenir qu'une de ces avancées, ce serait le fait qu'en droit pénal, il ne saurait désormais être question de consentement avant l'âge de 15 ans dans une relation sexuelle entre un majeur et un mineur.

Vous avez rappelé, comme beaucoup de nos collègues, la qualité des travaux parlementaires qui ont été conduits par des députés issus de presque tous les bancs de cette assemblée. Saluons à cet égard le travail accompli par notre rapporteure, Alexandra Louis, par Isabelle Santiago, par Annick Billon, sénatrice à l'origine de la proposition de loi qui sert aujourd'hui de véhicule législatif, et par bien d'autres parlementaires qui se sont depuis longtemps investis sur ces questions de protection des mineurs, des enfants, des adolescents, des personnes vulnérables qui peuvent être victimes de prédateurs sexuels.

Nous légiférons bien sûr dans un contexte marqué par différentes affaires, par la libération de la parole de plusieurs victimes – à propos de faits parfois anciens – et par le travail de nombreuses associations de protection de l'enfance. Cela démontre que notre société a évolué et qu'elle considère désormais ces actes comme parfaitement inacceptables et odieux – si tant est qu'elle les ait jamais considérés comme acceptables.

Hier, sans doute, les choses ne se disaient pas, ou se disaient moins, entraînant une forme d'omerta sociétale à propos d'actes qui sont non seulement criminels, mais marquent à vie, surtout lorsque la victime les a subis jeune, voire très jeune.

Le texte a été enrichi puisqu'il traite notamment – autre avancée majeure – de la question de l'inceste, qui ne figurait pas dans la proposition de loi initiale. Il introduit la notion de prescription glissante, sur laquelle je reviendrai, et prévoit un renforcement de l'arsenal législatif pénal pour mieux lutter contre la prostitution dont sont victimes certains mineurs et contre la cyberpédocriminalité.

Vous avez rappelé, monsieur le garde des sceaux, qu'il fallait trouver les garanties d'une proportionnalité, notamment pour assurer la conformité de ce texte à notre droit constitutionnel. Cela signifie que s'agissant de certains sujets, nous sommes sur une ligne de crête.

J'en viens à l'introduction des notions d'écart d'âge et de prescription glissante. Nous partageons collectivement les objectifs poursuivis à travers ces deux mesures, c'est-à-dire assurer une proportionnalité, ne pas s'ériger en censeurs de la sexualité adolescente et permettre à des personnes qui, aujourd'hui, ne peuvent parfois être entendues qu'en qualité de témoin de moralité, mais jamais en tant que victimes, de voir condamner l'auteur des actes qu'elles ont subis.

Malgré tout, la condition d'écart d'âge ouvre une brèche dans le principe absolu selon lequel avant 15 ans, c'est non. Elle doit encore être débattue, non pas ici au travers d'amendements, mais dans le cadre d'une réflexion collective, pour savoir comment elle pourra être appliquée par les magistrats. De même, nous ne savons pas encore quelles seront les modalités d'application concrète de l'allongement du délai de prescription – que certains jugeront peut-être excessif.

En tout état de cause, les députés du groupe UDI et indépendants s'associeront à cette proposition de loi.

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