Intervention de Mathilde Panot

Séance en hémicycle du samedi 17 avril 2021 à 9h00
Lutte contre le dérèglement climatique — Article 67

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaMathilde Panot :

De nombreuses victimes des crimes d'écocide attendaient que la France franchisse le pas important que vient d'évoquer Mme Zitouni. Or, au lieu de ce grand pas, vous faites quelque chose d'extrêmement dangereux. Tout d'abord, vous avez déjà enterré la demande de la Convention citoyenne pour le climat, puisque l'écocide sera une sorte de délit généralisé, et non pas un crime. Ensuite, vous créez un dispositif totalement inapplicable et dangereux, qui suscitera des débats juridiques infinis, en excluant d'abord la négligence et l'imprudence, et en créant une double intentionnalité qui suppose que l'infraction soit commise, premièrement, de façon délibérée et, deuxièmement, avec la conscience du dommage causé à l'environnement. Les termes « manifestement délibérée », employés à l'article 68, seront une protection forte pour les pollueurs.

Pour vous, les atteintes durables à la santé, à la flore, à la faune ou à la qualité de l'air, du sol ou de l'eau sont celles « susceptibles de durer au moins dix ans », mais est-ce que Lubrizol ou l'Erika ont eu des effets sur dix ans ? Avec le délit d'écocide, tel que vous êtes en train de le définir, les nombreuses victimes du chlordécone n'obtiendront pas réparation.

En outre, vous faites en sorte que, si nous parvenons un jour à ce que le crime d'écocide soit reconnu au niveau international, ce pour quoi nous militons, il reste, dans notre pays, un simple délit inscrit dans la loi à ce titre. La France s'honorerait de ne pas attendre que tout arrive d'en haut et que le changement juridique intervienne au niveau international pour avancer sur cette question.

Madame la ministre, vous avez dit en commission qu'il n'y avait pas de petits et de grands écocides. Nous avons répondu, dans une tribune signée par plusieurs présidents d'association et cosignée par de nombreux députés, que s'il n'y avait pas de grands et de petits écocides, il y avait, en revanche, de grands et de petits pas pour la justice environnementale et sociale. Or, il s'agit ici d'un petit pas, qui est très dangereux. Nous nous opposerons donc à l'article 68, et nous demandons que la France agisse vraiment pour que soit défini un véritable crime d'écocide et qu'il y ait enfin une justice pour les victimes de ces crimes.

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