La séance est ouverte.
La séance est ouverte à neuf heures.
Suite de la discussion d'un projet de loi
Hier soir, l'Assemblée a poursuivi la discussion des articles du projet de loi, s'arrêtant à l'amendement n° 5037 portant article additionnel après l'article 63.
L'alternative à l'instauration d'une taxe sur les engrais azotés sous forme de culture de légumineuses ayant été évoquée, hier soir, avec l'article 62 par le Gouvernement qui a indiqué qu'elle serait intégrée dans la politique agricole commune (PAC) avec les eco-schemes, je retire ces deux amendements, tout en réitérant mon intérêt pour ce genre de culture.
M. Mounir Mahjoubi applaudit.
La parole est à M. François-Michel Lambert, pour soutenir l'amendement n° 3453 .
Cet amendement de cohérence avec la stratégie nationale de lutte contre la déforestation importée, adoptée le 14 novembre 2018, vise à mettre fin aux importations concernées le 1er janvier 2030.
La parole est à Mme Célia de Lavergne, rapporteure de la commission spéciale pour le titre V, pour donner l'avis de la commission.
Nous partageons votre préoccupation sur ce sujet depuis longtemps et je pense donc que cette précision n'est pas nécessaire. Avis défavorable.
La parole est à Mme la secrétaire d'État chargée de la biodiversité, pour donner l'avis du Gouvernement.
Même avis. Il ne s'agit pas en effet de codifier chaque détail de cette stratégie. Je confirme que l'horizon de 2030 est bien inscrit partout dans les documents de suivi de ladite stratégie. Demande de retrait.
L'amendement n° 3453 n'est pas adopté.
La parole est à M. François-Michel Lambert, pour soutenir l'amendement n° 3465 .
Alors que ce texte de loi comporte beaucoup d'éléments superflus qui n'auront d'autre effet que déclaratif, je regrette d'autant plus qu'il soit considéré superflu, par la commission comme par le Gouvernement, d'inscrire la date du 1er janvier 2030 pour marquer très clairement la position de notre pays. Mais je m'appuierai au moins sur ce que vous venez de déclarer.
Quant à cet amendement, il propose d'ajouter aux composants de la déforestation importée le bois d'énergie, car on ne peut pas faire endosser à d'autres nos propres turpitudes ! Nous sommes en train de formuler un engagement fort par rapport à l'évolution du climat, mais est-ce cohérent avec le fait d'aller importer plusieurs centaines de milliers de tonnes par an de bois énergie, et pas de l'autre côté de la frontière mais au-delà des océans ? Ne faisons-nous pas porter à d'autres nos propres responsabilités, qui plus est en les montrant du doigt parce que ces pays pratiqueraient une déforestation insupportable ? Il est absolument nécessaire d'agir en la matière.
Je rappelle d'ailleurs que 500 scientifiques, il y a à peine un mois, ont alerté sur l'urgence de passer à autre chose que de brûler du bois pour essayer tant bien que mal de produire de l'électricité, et surtout pour chauffer les pattes des petits oiseaux – c'est, pour eux, une sorte de terrasse chauffée ! Soyons cohérents.
Je vous remercie, monsieur le député, d'avoir évoqué ce sujet, mais je rappelle qu'il est déjà intégré dans la stratégie nationale pour la lutte contre la déforestation importée qui porte sur les importations agricoles – soja, huile de palme, bœuf coproduit, cacao et hévéa –, ainsi que sur le bois et ses produits dérivés.
De plus, des actions sont déjà engagées, notamment dans le cadre de l'Union européenne avec le règlement bois et le plan d'action FLEGT – le programme pour l'application des réglementations forestières, la gouvernance et les échanges commerciaux –, qui vise à élaborer des accords de partenariat volontaires bilatéraux avec les pays tiers producteurs. C'est donc une demande de retrait.
Le règlement bois européen nous amène en effet à renforcer les contrôles en la matière. La mise en œuvre de ce cadre réglementaire est déterminée par la stratégie susmentionnée et sera déclinée au niveau européen. Le commerce de bois énergie est surtout concerné ici dans son volet durable : il n'est évidemment pas question d'en exclure toute importation. Le Gouvernement s'attelle vraiment à promouvoir des importations de bois provenant de forêts gérées durablement. À défaut d'un retrait, l'avis serait défavorable.
L'amendement n° 3465 n'est pas adopté.
La parole est à M. André Chassaigne, pour soutenir l'amendement n° 4103 .
Selon une vieille expression auvergnate, on n'achète pas un âne dans un sac : cet article vise à lutter contre la déforestation importée, mais, en l'occurrence, encore faut-il qu'il puisse être mis en œuvre oncrètement. Or cela implique que cette volonté, désormais inscrite dans le marbre de la loi, soit prise en compte dans les accords commerciaux et dans les accords de libre-échange signés par notre pays et qu'évoluent en ce sens ceux déjà en cours, de façon que les affirmations d'aujourd'hui deviennent les réalités de demain et ne soient pas seulement des effets de tribune.
Vous savez comme moi, monsieur Chassaigne que, selon l'article 52 de la Constitution, seul le Président de la République négocie les traités et qu'on ne peut donc inscrire dans la loi un critère de retrait ou de non-ratification d'un traité. Avis défavorable.
Je compléterai la réponse de Mme la rapporteure en précisant que cette initiative législative de la Commission européenne, dont nous attendons impatiemment l'aboutissement pour le deuxième trimestre de 2021, sera comme il se doit la plus ambitieuse possible en prévoyant des mesures qui s'imposeront à tous les produits importés par l'ensemble des pays de l'Union européenne et concernera donc tous les accords. La question ne sera plus traitée seulement au cas par cas, ce qui rendra l'approche plus ambitieuse encore que celle que vous proposez ici, monsieur Chassaigne. Le Gouvernement restera évidemment très vigilant en la matière.
Nous soutenons évidemment cet amendement du groupe communiste. Il me donne l'occasion de rappeler que notre groupe avait déposé dix amendements posant la question du libre-échange et qu'ils ont tous été déclarés irrecevables…
Mais on comprend pourquoi quand on voit à quel point votre gouvernement et le Président de la République sont les champions du grand déménagement du monde. En voici le décompte depuis le début du quinquennat : février 2019, entrée en vigueur du JEFTA, l'accord de libre-échange entre l'Union européenne et le Japon ; juillet 2019, ratification du CETA, l'accord économique et commercial global avec le Canada ; novembre 2019, entrée en vigueur de l'accord avec Singapour ; août 2020, entrée en en vigueur de l'accord avec le Vietnam – en pleine crise du coronavirus, il fallait oser ! ; mars 2021 : validation par l'Union européenne d'un accord de libre-échange avec le Mexique, le premier du genre avec un pays d'Amérique latine où est inclus un chapitre sur la protection des investissements, autrement dit l'institutionnalisation de la suprématie des entreprises transnationales sur les décisions démocratiques des États ; fin 2020, annonce d'un accord commercial d'investissement Chine-Union européenne ; Mercosur, enfin, lequel accélérerait la déforestation de 5 % les six premières années selon la commission d'évaluation et de 25 % selon la Fondation Nicolas Hulot. Sur ce dernier traité, vous affichez votre opposition pour le moment, mais vous poursuivez les discussions…
Vous savez bien, pourtant, que ces accords de libre-échange sont complètement archaïques, climaticides et terrifiants sur le plan social et démocratique. Je regrette que l'irrecevabilité de nos amendements nous ait empêchés d'avoir des échanges sur le sujet dans le cadre d'un texte dit « climat et résilience ».
Je vais évoquer quatre grandes révolutions qui ont touché le monde depuis de nombreux siècles.
Mouvements divers.
Car j'en retiens quatre : la révolution cosmologique de Copernic, par laquelle la terre n'est plus le centre de l'univers ; la révolution évolutionniste avec la découverte de la descendance animale de l'homme, fruit de l'évolution des espèces, par Darwin ; la révolution sociale, l'homme étant aussi le produit du corps social dans lequel il évolue, comme l'a vu Karl Marx, bien évidemment ; la révolution psychologique, révélation du pouvoir de l'inconscient sur le mois conscient, avec l'idée que l'homme n'est pas maître en sa demeure – révolution que nous devons à Freud… Et, depuis trois semaines, le Gouvernement enclenche une cinquième révolution : c'est la révolution de la patate chaude !
Sourires.
La révolution de la patate chaude, cela consiste à renvoyer à dans quelques années des décisions que l'on affiche ; à renvoyer aux collectivités locales lorsque les conséquences de certaines décisions peuvent être un peu embêtantes à assumer ; à renvoyer au « consommacteur », comme on dit, sous prétexte qu'il disposerait de toutes les possibilités de décider par lui-même, par exemple à partir d'un affichage.
Et la révolution de la patate chaude, cela consiste aussi à renvoyer à des directives européennes, mais de façon variable. Je rappelle depuis des semaines, y compris en commission spéciale, que l'on prend des décisions alors que des directives européennes vont sortir dans quelques mois, voire dans un an ou deux, s'agissant notamment de l'étiquetage et de tout ce qui concerne la taxe carbone, et qu'il faudra bien les transposer ; à quoi l'on me répond : « Il s'agit d'anticiper pour être un exemple, d'être la lumière qui éclaire le chemin pour l'Union européenne ! » Pourtant, vous venez d'objecter à mon amendement qu'un texte européen à venir devrait régler le problème… Non seulement vous avez créé la cinquième révolution, celle de la patate chaude, mais, en plus elle est à géométrie variable.
L'amendement n° 4103 n'est pas adopté.
L'article 63 bis est adopté.
Je suis encore dans l'émotion de cette révolution de la patate chaude, dont j'essaie de saisir toute la portée systémique…
Sourires.
Je voudrais à ce moment du débat rappeler trois points. Premièrement, si l'on avait adopté, dans la loi pour l'équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole et alimentaire (ÉGALIM), des mesures contre la déforestation importée, comme les socialistes le proposaient, on n'en serait pas à prévoir de nouveaux délais ou à rédiger de nouveaux rapports.
Deuxièmement, je note qu'au moins quatre points, de l'article 63 bis à l'article 64 ter , disent à peu près la même chose, qui plus est de façon confuse et peu articulée. La première recommandation que je ferai dans la navette parlementaire sera de réécrire le texte à ce niveau pour que l'on sache clairement de quoi on parle. Entre matières premières agricoles et forestières, entre droit européen et droit français, l'enchaînement de ces articles pose, à ce stade, un problème de lisibilité.
Enfin, il est proposé de faire référence à ce que les socialistes ont apporté dans la LOPDSI, la loi d'orientation et de programmation relative à la politique de développement et de solidarité internationale, relecture complète de la doctrine de la France en matière d'aide publique au développement dans ses rapports internationaux sur la forêt et sur les sols : elle fait droit aux communautés rurales et paysannes, aux questions de sécurité alimentaire, de puits carbone et de souveraineté alimentaire. Cela pourrait fonder les décisions que nous prenons à ce stade.
Avec l'amendement qui vient, je propose d'ajouter à ce chapitre une disposition sur le devoir de vigilance, le seul à même de permettre, en Amazonie notamment, d'apporter un secours aux défenseurs des droits, à tous ceux qui risquent leur vie pour défendre les droits de l'environnement et les droits humains dans cette région du monde, l'Amazonie étant, aujourd'hui, le territoire qui compte le plus de victimes parmi les héros de la démocratie et de la défense de l'environnement.
Puis-je considérer que l'amendement n° 4753 a été défendu, mon cher collègue ?
L'amendement n° 4753 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
Cet amendement prévoit un échange des données concernant les importations de matières premières à risque entre les agents de la direction des douanes et ceux du ministère chargé de l'environnement.
Vous proposez, par une rédaction plus exigeante, une obligation de transmission des données, alors que l'article s'inscrit dans une logique de coopération. Les échanges que nous avons eus avec les différents agents, que ce soit ceux des douanes ou ceux du ministère de l'environnement, l'ont bien montré : c'est cette logique de coopération qui va permettre de mettre en place le mécanisme et de progresser en matière de lutte contre la déforestation importée. Demande de retrait ; à défaut, avis défavorable.
J'entends votre appel à la vigilance concernant la transmission de ces données, mais fixer une liste de matières premières aurait un effet limitatif. Laissons la liberté aux services douaniers, qui peuvent s'appuyer sur les données satellitaires, de signaler et de placer sous surveillance tout produit lorsqu'ils estiment que c'est nécessaire.
L'amendement n° 5039 est retiré.
L'amendement n° 64 est adopté.
Je profiterai de mon intervention pour revenir sur l'amendement qui vient d'être présenté par Mme Tuffnell et sur l'article 64. Il faut tout de même se rendre compte que l'échange de données est, en l'état actuel des choses, complètement utopique au regard des moyens dont disposent les administrations concernées.
Permettez-moi simplement de vous lire un passage de l'une des dernières publications du laboratoire d'idées indépendant Intérêt général : « Face à l'afflux de marchandises importées, à la réduction massive de ses effectifs (5 000 emplois perdus en trente ans sur un effectif total ramené aujourd'hui à 17 000 agents), la Douane n'est plus en mesure d'effectuer les contrôles des marchandises pénétrant sur le territoire. Environ 0,5 % des importations le sont en réalité. »
Vous pouvez donc voter tous les dispositifs que vous voulez et prévoir tous les transferts d'informations que vous souhaitez mais, sans augmentation des moyens de l'État, tout ce que ce que vous êtes en train d'inscrire dans la loi n'aura aucune portée effective. C'est d'autant plus vrai que le ministère de la transition écologique – nous en avons déjà parlé plusieurs fois, madame Pompili – fait face à une baisse très importante de ses effectifs ; c'est même le ministère qui a perdu le plus d'ETP – équivalents temps plein travaillés. Cette réduction des effectifs s'accompagne d'une baisse de l'expertise, laquelle est pourtant absolument nécessaire. Je tenais quand même à le souligner.
Madame Pompili, peut-être avez-vous lu l'article de Reporterre consacré à la détresse et à la souffrance très forte des agents du ministère de la transition écologique ? Pour mener à bien la bifurcation écologique et sociale, nous avons impérativement besoin de femmes et d'hommes ayant les moyens de mettre à disposition leur savoir-faire au service de ce changement de société.
Je tenais simplement à faire un parallèle entre la discussion que nous avons eue cette nuit au sujet des agriculteurs et le présent article 64 bis , qui fixe un objectif non contraignant pour que l'État n'achète plus de produits ayant contribué à la déforestation importée. Je note que l'objectif qui a été fixé pour les agriculteurs est certes non contraignant mais, si ces derniers ne sont pas capables de s'y conformer d'ici à deux ans, ils subiront des pénalités. En revanche, dès lors qu'il s'agit de l'État, on fixe un objectif non contraignant sans savoir s'il devra être atteint dans un an, cinq ans ou même quinze ans. C'est deux poids, deux mesures : quand il s'agit des agriculteurs, on leur tape dessus et on essaie de récolter de l'argent ; quand il s'agit de l'État, on se donne bonne conscience en se fixant des objectifs, mais il n'y aura pas de conséquence s'ils ne sont pas respectés.
Je souhaite poser une question à Mme la ministre de la transition écologique et à Mme la secrétaire d'État. Sachant que les députés ont voté par deux fois l'exclusion de l'huile de palme de la liste des biocarburants, ma question sera très simple : l'article 64 bis s'appliquera-t-il à la bioraffinerie du groupe Total de la Mède ?
M. Dominique Potier applaudit.
La parole est à M. François-Michel Lambert, pour soutenir l'amendement n° 3511 .
Pour être clair, la centrale biomasse de Gardanne, c'est 800 000 tonnes – quasiment toutes importées – de bois brûlé chaque année, avec un rendement énergétique de 35 %. Sur environ trois trains par jour qui acheminent du bois, cela signifie donc que le premier permet effectivement à produire de l'énergie, quand les deux autres servent à chauffer les petits oiseaux.
Madame la ministre, vous avez effacé 10 millions d'euros de pénalités qu'une entreprise aurait dû payer pour non-respect de ses engagements contractuels en matière de fourniture de kilowattheures. Concernant les subventions, je rappelle que François de Rugy, alors ministre, avait annoncé ici-même un prix de rachat très élevé – que nous payons tous –, 120 euros le mégawatt.
Mon amendement vise à interdire les subventions pour les centrales électriques qui importent du bois énergie. Pour de tels rendements, ce n'est pas acceptable. C'est même bien pire que les terrasses chauffées, que nous avons supprimées. Voilà l'enjeu. Devons-nous financer les milliardaires qui possèdent les centrales – en effaçant 10 millions de pénalités – et les subventionner, en fixant un prix de rachat trois fois supérieur au prix de base du mégawatt et, dans le même temps, dire à nos concitoyens et aux restaurateurs que nous interdisons les terrasses chauffées ? Nous ne voulons pas l'un sans l'autre : il faut les deux. C'est le sens de mon amendement qui fait l'objet d'une demande de scrutin public.
Il est des combats tout à fait louables. Néanmoins, l'objectif des articles 64 et 64 bis est de donner l'esprit global de la stratégie. Nous n'allons pas décliner dans la loi, objectif par objectif, tout ce que contient la stratégie, sinon nous pourrions y passer un long moment. Même si je respecte votre combat, je vais vous demander le retrait de l'amendement ; à défaut, avis défavorable.
Effectivement, il n'est pas question de décliner l'ensemble des objectifs de chaque stratégie dans le projet de loi. Sinon, au-delà de la stratégie nationale de lutte contre la déforestation importée (SNDI), nous aurions pu le faire pour la stratégie « aires protégées » et pour la stratégie nationale pour la biodiversité (SNB). En outre, il existe un cadre : la programmation pluriannuelle de l'énergie (PPE) prévoit d'arrêter le soutien à la production d'électricité à partir de biomasse pour valoriser, de manière prioritaire, la production de chaleur. De plus, la directive européenne « RED II » – r enewable e nergy d irective –, qui vient d'être transposée, contient des exigences de durabilité. Je le redis : il ne s'agit pas de tout bloquer et de s'interdire toute éventualité, mais simplement de vérifier que les matières premières importées sont bien issues d'une filière durable. Cet enjeu s'accompagne également d'une aide publique au développement, nous y reviendrons. Avis défavorable.
Madame la rapporteure, ce n'est pas mon combat : le climat, c'est notre combat. Madame la ministre, pour le bois, c'est 1,5 milliard d'euros – plus que pour la rénovation de Notre-Dame de Paris –, que nous allons donner, pour 35 % de rendement énergétique. Je ne sais plus ce que je dois expliquer à mes concitoyens, qui payent si cher l'électricité pour remplir les poches d'un milliardaire tchèque.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 65
Nombre de suffrages exprimés 61
Majorité absolue 31
Pour l'adoption 14
Contre 47
L'amendement n° 3511 n'est pas adopté.
Puisque nous avons la chance d'avoir deux membres du Gouvernement au banc ce matin, je réitère ma question sur l'application de l'article 64 bis et sur l'importation d'huile de palme – dont l'exploitation contribue à la déforestation en Indonésie, en Malaisie et ailleurs – concernant la raffinerie de la Mède.
Mme Delphine Batho applaudit.
Dans notre pays, il y a des lois, il y a des règles. Comme toutes les autres usines, celle de la Mède respectera les règles de la SNDI, et notamment l'obligation de s'approvisionner en huile certifiée ne contribuant pas à la déforestation. En outre, je vous rappelle que la raffinerie de la Mède n'est toujours pas en service, puisque des procédures judiciaires sont en cours. Quoi qu'il en soit, je peux vous le confirmer : nous faisons en sorte que les lois, lorsque nous les mettons en œuvre, soient respectées.
L'amendement n° 4760 n'est pas adopté.
L'article 64 bis est adopté.
L'amendement n° 315 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
La parole est à Mme la rapporteure, pour soutenir l'amendement n° 5363 .
Nous avons créé un mécanisme d'alerte pour les entreprises à partir des données mentionnées à l'article 64. Je propose de l'étendre aux acheteurs publics.
Cet amendement s'inscrit tout à fait dans l'esprit de la SNDI. Nous avons publié un guide de conseils et de bonnes pratiques destiné aux 130 000 acteurs de la commande publique, en vue d'une politique d'achat « zéro déforestation ». Potentiellement, avec l'achat public, nous visons 10 % du PIB français : c'est donc un levier considérable. En plus des entreprises qui prennent toute leur part à cette stratégie, l'achat public « zéro déforestation » a donc tout intérêt à s'étendre. Avis très favorable.
Vous parlez des acheteurs publics et des marchés publics en général. De ce point de vue, l'amendement est très pertinent. En revanche, nous devrions mener une réflexion plus globale sur le code des marchés publics. Comme vous le savez, il est compliqué d'inclure dans les marchés publics ce qu'on pourrait appeler une préférence nationale, même si je n'aime pas trop ce terme. Concrètement, il est difficile de demander l'utilisation de bois venant du nord-est de la France – pour des raisons géographiques, vous le connaissez bien, madame la secrétaire d'État – ou le recours à du bois local. Cela aurait plusieurs intérêts : faire travailler les acteurs économiques du territoire et réduire le bilan carbone. Le code des marchés publics devrait donc préciser que nous pouvons privilégier le local et la courte distance.
Le deuxième point important, c'est la sous-traitance. Aujourd'hui, dans le cadre des marchés publics, on ne tient pas compte du bilan carbone des sous-traitants. Les entreprises françaises qui remportent des marchés publics ont beau remplir tous les critères en matière d'environnement et de bilan carbone, ce ne sont pas elles qui font les travaux mais leurs sous-traitants, qui peuvent venir d'une région éloignée, voire de l'étranger. Un projet de loi « climat et résilience » devrait inclure dans le calcul le bilan carbone des sous-traitants. N'ayant pu défendre, sur ce thème, un amendement que j'avais déposé au début du texte, je tiens à interpeller le Gouvernement.
L'amendement n° 5363 est adopté.
L'amendement n° 4767 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
La parole est à M. François-Michel Lambert, pour soutenir l'amendement n° 3538 qui fera l'objet d'un scrutin public.
J'ai entendu tout à l'heure la rapporteure et le Gouvernement expliquer que ce n'était pas à l'article précédent qu'il fallait exprimer les inquiétudes quant à la consommation irrationnelle de l'énergie. L'article 64 ter , lui, ne vise que la production d'un rapport ; pourquoi ne pas ajouter que celui-ci « sera complété d'un volet sur les modalités à mettre en œuvre pour stopper au plus tard le 1er janvier 2025 toute importation de bois énergie à destination des centrales électriques situées sur le territoire national » ? Je rappelle que 500 scientifiques du monde entier ont récemment alerté les dirigeants sur l'urgence absolue de cesser les subventions aux grands projets de centrales à bois énergie. Ils disent clairement que « [les] arbres ont plus de valeur vivants que morts » et brûlés.
Vous proposez en réalité un nouveau rapport, car le sujet que vous évoquez n'est pas le même que celui de l'article 64 ter . Il me semble que nous pouvons suivre la question dans le cadre des prérogatives parlementaires plutôt que de demander un rapport au Gouvernement. Avis défavorable.
Vous connaissez le cadre : la durabilité des projets est étroitement contrôlée. Vous proposez d'interdire toute importation de bois énergie en France, mais pensez aux territoires qui n'en disposent pas, par exemple à ceux d'outre-mer qui, plutôt que de recourir aux énergies fossiles, peuvent envisager de se fournir en bois énergie issu des filières durables. Tout nous incite donc à donner un avis défavorable à votre amendement.
Sourires.
Même le contenu d'un rapport ne saurait donc être débattu ! Même dans le cadre d'un rapport, on ne peut évoquer la centrale biomasse de Gardanne qui prévoit de brûler 800 000 tonnes de bois par an. Tout le bois disponible de la frontière espagnole à la frontière italienne sera capté au profit d'une seule centrale qui a un rendement énergétique de 35 % seulement tout en bénéficiant de 1,5 milliard d'euros d'aides publiques ! Collègues députés, sachez que jusqu'à Lyon, tout le bois sera réservé au fonctionnement de la centrale, il n'en restera plus de disponible. Comment expliquerez-vous à votre petit opérateur local que lui n'aura pas de subventions, uniquement des contraintes ? Madame la ministre, madame la secrétaire d'État, dans quelques semaines ou quelques mois, vous serez à Marseille pour le congrès de l'Union internationale pour la conservation de la nature (UICN) ; il faudra expliquer aux opérateurs pourquoi on leur demande des efforts alors qu'on leur pique le bois – prélevé, qui plus est, dans des conditions non respectueuses des équilibres de biodiversité ! Voilà l'enjeu.
Quant à l'outre-mer, tout ce que je demande, c'est d'étudier la question dans un rapport, et celui-ci peut tout à fait proposer d'exclure certains territoires.
De grâce, essayons d'avancer sur ce sujet. Cela fait plus de huit ans que nous alertons les pouvoirs publics sur le devenir de la centrale de Gardanne. Il est temps de nous hisser à la hauteur des enjeux, non pas ceux des milliardaires successifs qui ont possédé la centrale, mais ceux de notre avenir, de notre climat, de notre biodiversité !
La parole est à M. Julien Aubert, qui fait feu de tout bois sur ce sujet…
Aristote était le disciple de Platon, mais il avait les pieds sur terre ; c'est ce qui avait fait la différence.
En matière d'importation du bois, tout ce qui est excessif est insignifiant. Oui, un cas particulier pose problème ; mais en conclure qu'il faut rédiger un rapport disant qu'en 2025, on ne pourra plus importer de bois d'aucun pays, c'est aller trop loin. C'est dans la mesure qu'on trouve l'équilibre. L'idée n'est pas d'interdire l'importation du bois, mais de ne pas dépasser un certain volume. Voilà pourquoi je ne voterai pas l'amendement de M. Lambert, dont je regrette la formulation.
Mon groupe votera bien sûr l'amendement de M. Lambert. Une loi consacrée au climat ne peut pas passer à côté d'un tel sujet. Pour dix arbres brûlés à Gardanne, sept partent en fumée pour rien et seulement trois se transformant réellement en énergie. Si nous ne faisons rien, d'ici à 2050, les prélèvements en bois augmenteront de 60 % et les forêts, peu à peu, ne pourront plus jouer le rôle de puits de carbone ; en parallèle, on continuera à faire venir les importations de très loin. La question du coût du bois-énergie, pas uniquement comme coproduit – nous sommes d'accord sur ce point –, mais comme produit industriel en soi, pose des problèmes évidents. Si nous continuons sur cette voie, nous allons nous en mordre les doigts.
Je soutiens avec détermination ce complément au rapport que demande François-Michel Lambert. Ce n'est en rien disproportionné, monsieur Aubert ! En quoi serait-il gênant d'ajouter ces informations ? Il est incroyable que l'on importe du bois pour faire de la cogénération !
Importer du bois pour faire de l'électricité me semble insensé. Cette question doit être étudiée et il faut évidemment l'inclure dans ce rapport. Je ne doute pas que l'Assemblée, dans sa sagesse, adoptera cet amendement.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 70
Nombre de suffrages exprimés 68
Majorité absolue 35
Pour l'adoption 23
Contre 45
L'amendement n° 3538 n'est pas adopté.
L'article 64 ter, amendé, est adopté.
Cette intervention générale sur l'article nous permettra de ne pas détailler la défense de nos amendements.
Avant d'aborder cet article, je tiens à dire que la réponse faite à Julien Dive sur la raffinerie de la Mède me laisse pour le moins circonspect. La France va se donner bonne conscience en utilisant de l'huile de palme qui ne participe pas à la déforestation ; mais l'huile de palme qui le fait ira vers d'autres pays, vers d'autres utilisateurs. On n'aura rien changé à l'écosystème mondial, rien réglé au problème de l'huile de palme : on aura fait que ménager sa bonne conscience. Nous courons à notre perte !
Pour ce qui est de l'article 65, le groupe Socialistes et apparentés estime que la France accuse un retard démocratique en matière de débat parlementaire et de dialogue avec le Gouvernement sur la question de la PAC et du plan stratégique national (PSN). Ce retard n'a pas d'équivalent dans les autres pays ; il est grand temps de débattre du PSN, qui conditionne l'avenir de notre agriculture.
Dans les amendements que nous avons déposés à l'article, nous défendons les idées que nous promouvons depuis des années : consolidation des associations d'organisations de producteurs, renforcement de l'OMC, combat pour un plan protéines végétales – au-delà de ce que contient le plan de relance –, formulation, par un comité de suivi, de recommandations destinées à devenir des objectifs du PSN. Pour résumer, nous défendons les combats socialistes en faveur de la régulation, de la certification, de la défense des producteurs et d'une échelle de prix qui ne ruine pas les efforts de la PAC.
L'article 65 cherche à rendre les objectifs du PSN, qui découlent de la PAC, compatibles avec les stratégies nationales environnementales. Pour ce faire, il faut que la PAC soutienne les élevages extensifs, qui préservent les prairies, stimulent l'emploi et développent l'autonomie alimentaire des animaux, plutôt qu'une agriculture industrielle intensive, polluante et destructrice d'emplois. Quelles que soient les pressions des lobbys, en particulier de la Fédération nationale des syndicats d'exploitants agricoles (FNSEA), il est plus que jamais nécessaire que la PAC accompagne et incite économiquement notre agriculture à emprunter une orientation plus écologique et sociale.
Je suis saisi d'une série amendements, n° 5762 , 6444 , 6909 , 5781 , 5358 , 678 , 3094 , 6910 , 2566 et 681 , pouvant être soumis à une discussion commune.
Les amendements n° 6444 et 6909 sont identiques, de même que les amendements n° 678 , 3094 et 6910 .
L'amendement n° 5762 de M. Dominique Potier est défendu, de même que les amendements n° 6444 de Mme Sandrine Le Feur et 6909 de M. Loïc Prud'homme.
Ces deux derniers amendements font l'objet d'un sous-amendement n° 7481 .
La parole est à M. François-Michel Lambert, pour le soutenir.
Après l'épisode récent de gelée noire, que le ministre de l'agriculture a qualifié de catastrophe agronomique et qui s'est traduit par des pertes colossales, jamais vues, dans le secteur de la vigne et de l'arboriculture…
…ainsi que du maraîchage, en effet, et des céréales, nous ne pouvons pas ignorer que, en dehors de cet hémicycle bien chauffé, des agriculteurs sont au désespoir. Le minimum serait de compléter le projet de loi en mentionnant la nécessité de travailler à la résilience de notre agriculture face au dérèglement climatique.
Il vise à inclure la stratégie nationale pour les aires protégées dans l'énumération de documents, stratégies et plans avec lesquels le futur PSN réformant la PAC doit être compatible.
Cette longue série d'amendements en discussion commune me permet de rappeler l'esprit dans lequel a été rédigé cet article qui rend le PSN – la déclinaison française de la PAC – compatible avec quatre grandes stratégies : la stratégie nationale bas-carbone (SNBC), la stratégie nationale pour la biodiversité, le plan national de prévention des risques pour la santé liés à l'environnement et, enfin, l'objectif de lutte contre la déforestation importée. C'est un équilibre qui permet de couvrir l'ensemble des champs des grands enjeux que nous avons devant nous en termes de dérèglement climatique.
Ces amendements proposent de rendre compatible le PSN, qui est la déclinaison française de la PAC, avec de nombreux autres plans ou stratégies. Certains de ces plans, notamment le plan ambition bio 2022, sont en renouvellement avant même que se mette en place le PSN, d'autres sont d'une certaine manière liés aux quatre grandes stratégies que j'ai indiquées. L'avis est défavorable pour des questions d'équilibre – car nous pourrions énumérer sans fin tous les plans et stratégies qui existent : les quatre grandes stratégies me semblent répondre à l'ensemble des enjeux.
Comme Mme la rapporteure l'a signalé, il n'est pas possible d'inclure des références à des stratégies qui ne sont pas déclinées en droit, y compris au regard de la réglementation européenne. Par ailleurs, les PSN seront observés au niveau européen sous l'angle de leur contribution aux objectifs. Avis défavorable.
Dans un souci de transparence démocratique et d'efficacité, il serait souhaitable que la représentation nationale puisse se prononcer sur les plans d'action. Nous avons proposé un comité de suivi du PSN composé de parlementaires. Je n'étais pas élue sous la précédente législature et je ne sais pas comment se sont déroulés les échanges lors de la précédente PAC, mais il me semble que les parlementaires n'y sont pas suffisamment associés. Il y a bien quelques réunions ponctuelles, mais la PAC est un enjeu extrêmement important ; aussi devrions-nous pouvoir nous exprimer davantage sur cette question.
L'amendement n° 5762 n'est pas adopté.
Le sous-amendement n° 7481 n'est pas adopté.
Sur l'article 65, je suis saisi par le groupe La République en marche d'une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
La parole est à M. Dominique Potier, pour soutenir l'amendement n° 3414 .
Mme Taurine a tout à fait raison. Le Bundestag se prononce sur le PSN et délibère avant chaque négociation européenne. Nous avons en France, dans notre lien à l'Europe, un retard démocratique qu'il faudra combler.
Dans les propositions liées au PSN, on ne peut pas viser le seul carbone en ignorant les autres compartiments, et le plan ambition bio aurait dû être étoffé à cet égard : c'est ce que nous proposons.
Enfin, je regrette beaucoup que la vingtaine de mesures défendues avec une grande intelligence par Guillaume Garot dans sa proposition de loi sur le gaspillage alimentaire, adoptées à l'unanimité en commission des affaires économiques, aient été jugées irrecevables. Elles représentent en effet l'une des clés d'une alimentation de qualité à coût constant.
Sur le premier point, des amendements permettront d'ouvrir le débat ; sur le second, nous l'avons déjà eu en commission. Avis défavorable.
L'amendement n° 3414 , repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.
L'amendement n° 3448 de Mme Célia de Lavergne, rapporteure, est rédactionnel.
L'amendement n° 3448 , accepté par le Gouvernement, est adopté.
L'amendement n° 6031 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 68
Nombre de suffrages exprimés 63
Majorité absolue 32
Pour l'adoption 63
Contre 0
L'article 65 , amendé, est adopté.
L'amendement n° 3457 de Mme Yolaine de Courson, portant article additionnel après l'article 65, est défendu.
L'amendement n° 3457 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
Ces deux amendements – dont le second, le n° 5041, est de repli – concernent une obligation d'implantation de haies bocagères. Après une discussion avec le Gouvernement je les retire, car des dispositions spécifiques, incluant des écoconditionnalités, seront prises dans la nouvelle politique agricole commune. Je rappelle l'intérêt d'inciter nos agriculteurs à replanter des haies. Il existe une forme de blocage psychologique sur les haies bocagères alors qu'elles ont un nombre d'aménités très important et sont tout à fait compatibles avec l'exercice du métier d'agriculteur.
Nous sommes très attachés à cet article – en tout cas au commerce équitable –, dont la rédaction mériterait d'être précisée. Nous avons ainsi déposé des amendements pour défendre l'authenticité et la sincérité du commerce équitable en vue d'éviter la prolifération d'allégations des entreprises sur les labels. Il faut des systèmes de contrôle externe des labels pour s'assurer de la conformité des pratiques des entreprises au regard du référentiel du label considéré. Nous souhaitons en outre que les parlementaires puissent participer de manière pérenne à la plateforme nationale d'actions globales pour la responsabilité sociétale des entreprises, dite plateforme RSE, car elle aura aussi pour vocation de certifier les labels RSE privés.
Sur l'article 66, je suis saisi par le groupe La République en marche d'une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
Je suis saisi de trois amendements, n° 5042 , 6649 et 4725 , qui peuvent être discutés ensemble.
La parole est à Mme Frédérique Tuffnell, pour soutenir les amendements n
Le premier de ces deux amendements de Marguerite Deprez-Audebert vise à ajouter l'adjectif « durable » à la notion de commerce équitable. Cela permettrait aux consommateurs de savoir qu'ils font un acte responsable sur le plan social mais agissent aussi en faveur de l'environnement.
L'amendement n° 6649 est défendu.
La parole est à M. Pierre Venteau, pour soutenir l'amendement n° 4725 .
Il s'agit de s'assurer que la question de la rémunération des producteurs est bien prise en compte dans la labellisation « commerce équitable ».
Le label « commerce équitable » a pris de l'ampleur et est connu sous ce nom : nous avons donc tout intérêt à le conforter. Ce que nous inscrivons dans la loi, c'est la notion de durabilité associée au commerce équitable ; cela satisfait l'amendement n° 6649 , la reconnaissance publique du label apportant une garantie de fiabilité à la notion même de « commerce équitable ».
Monsieur Venteau, c'est précisément l'objectif du commerce équitable que de rémunérer correctement les producteurs. Votre amendement est donc également satisfait.
Je rebondis sur les précédents amendements de M. Turquois, qu'il a malheureusement retirés. Les haies sont en effet très importantes dans les exploitations agricoles, nous l'avons vu à plusieurs reprises, notamment sur le sujet des néonicotinoïdes. Si nous voulons réduire les pesticides dans les exploitations agricoles, cela passera forcément par le fait de retrouver un équilibre écologique dans les exploitations et par l'implantation d'arbres et de haies. Ces amendements étaient donc très bienvenus.
Le présent amendement vise à assurer que les labels de commerce équitable soient associés à des systèmes de garantie. C'est une demande de la Convention citoyenne pour le climat.
Pour rebondir sur les propos de M. Turquois et de Mme Le Feur, la replantation des haies est une responsabilité collective. C'est le moyen aussi pour les communes de préserver leurs chemins ruraux. Certaines ont pris cette responsabilité à bras-le-corps, comme, depuis quelques années, la commune où j'étais maire. Cela doit être un engagement partagé par les agriculteurs et les municipalités, de manière à recréer des barrières ainsi que des lieux de préservation de la faune et de la flore, du petit gibier. C'est aussi le moyen d'accompagner nos agriculteurs dans une transition. Le débat sur le PSN doit être un levier pour permettre à nos agriculteurs d'être éligibles aux éco-régimes.
Je voulais moi aussi dire quelques mots à propos des haies. Un consensus peut se dégager sur ce sujet, car tout le monde est pour les haies ! En Bretagne, nous en avons, monsieur Le Fur, c'est même ce qui fait la particularité de notre paysage. Le bocage breton, comme le bocage normand, sont magnifiques et constituent un atout incroyable.
Tout à l'heure, il a été question de la filière bois. Or les haies permettent aussi d'entretenir une filière bois durable de proximité. Dans mon territoire, entre mes deux circonscriptions, le potentiel des haies pour produire du bois de chauffage est énorme : uniquement grâce à leur entretien, sans aucune coupe – tous les arbres sont laissés debout –, elles permettent de produire 18 000 tonnes de bois.
Il faut donc à tout prix que nous lancions un grand plan sur la question de la reconquête des haies. Des projets ont déjà été annoncés par le Gouvernement mais nous devons passer la démultipliée et aller encore plus loin.
Comme évoqué tout à l'heure, il semble important de créer un dispositif pérenne pour que les parlementaires puissent prendre pleinement leur place au sein de la plateforme RSE, qui mène depuis longtemps des travaux très importants. Si nous ne l'amendions pas, le dispositif actuel ne permettrait pas aux parlementaires de continuer à y prendre part. Je vous invite donc vraiment à voter l'amendement.
L'amendement n° 6446 de Mme Sandrine Le Feur est défendu.
Quel est l'avis de la commission ?
Vous avez raison : il est important que nous confortions la plateforme nationale d'actions globales pour la responsabilité sociétale des entreprises dans sa mission de reconnaissance publique du label de commerce équitable, et il faut que celle-ci comprenne parmi ses membres un député et un sénateur.
Deux rédactions différentes sont proposées : monsieur Potier, votre amendement n° 4859 fera l'objet d'un avis défavorable et je retiendrai la rédaction des amendements n° 5980 et 6446 , auxquels je donnerai donc un avis favorable.
Sourires.
L'amendement n° 4859 est retiré.
En effet, la plateforme RSE, qui est désormais chargée de mettre en œuvre la reconnaissance des labels de commerce équitable, doit intégrer les parlementaires en son sein. Le dispositif proposé nous semble très pertinent et s'inscrit pleinement dans les recommandations du rapport de mission sur les labels RSE, rédigé par Jean-Paul Chapron, Coralie Dubost et Fella Imalhayene et remis à Olivia Grégoire en novembre dernier. Avis favorable aux amendements n° 5980 et 6446 plutôt qu'au 4859, pour des raisons rédactionnelles.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 67
Nombre de suffrages exprimés 65
Majorité absolue 33
Pour l'adoption 65
Contre 0
L'article 66, amendé, est adopté.
Les amendements n° 3830 de M. Gérard Leseul et 4687 de M. Matthieu Orphelin, portant article additionnel après l'article 66 et pouvant être soumis à une discussion commune, sont défendus.
Je suis saisi de trois amendements, n° 4878 , 3671 et 3672 , pouvant être soumis à une discussion commune.
L'amendement n° 4878 de M. Dominique Potier est défendu.
La parole est à Mme Anne-France Brunet, pour soutenir les amendements n° 3671 et 3672 , qui peuvent faire l'objet d'une présentation groupée.
L'amendement n° 3671 est issu des travaux de la Convention citoyenne pour le climat de la troisième circonscription de Loire-Atlantique, que j'ai organisée localement en parallèle de la convention nationale. Il vise à accroître l'information des consommateurs en affichant les principales caractéristiques des labels sur les lieux d'achat, car le public les connaît très mal. Il s'agit aussi de les valoriser et d'encourager l'achat de produits de qualité. C'est un amendement de bon sens : j'attends qu'il fasse l'objet d'un avis favorable du Gouvernement et qu'il soit adopté.
Quant à l'amendement n° 3672 , il propose que « l'action des pouvoirs publics encourage l'information des consommateurs, notamment par des actions de sensibilisation et de communication ».
Ces amendements visent à mieux faire connaître les signes officiels de qualité. Monsieur Potier, vous proposez qu'un panneau d'affichage le fasse à l'entrée ou à la sortie des caisses. Or il me semble que le consommateur, quand il entre dans un magasin, passe rapidement devant le panneau et ne le lit pas ; ensuite, quand il est à la caisse, il a déjà effectué ses achats. Cela ne me semble donc pas très judicieux et je vous demanderai de retirer votre amendement.
Madame Brunet, vous dites que les informations « doivent être visibles ou accessibles par le consommateur au moment de l'acte d'achat ». Mais je ne vois pas comment de tels panneaux d'affichage pourraient être installés un peu partout dans les rayons. Il faudrait retravailler le dispositif, peut-être dans le cadre de la navette. À ce stade, la rédaction que vous proposez ne me paraît pas adéquate.
Plus généralement, il me semble que chacun des SIQO – signes d'identification de l'origine et de la qualité – fait l'objet d'une démarche spécifique de communication et qu'ils sont déjà bien établis, par exemple Label rouge ou AB – Agriculture biologique. Ce sont des labels privés qui relèvent d'une démarche volontaire, et il ne me semble pas non plus nécessaire d'organiser la promotion de chacun d'entre eux. Avis défavorable.
Nous partageons évidemment votre souci de mieux communiquer et d'informer les consommateurs sur les principaux labels et signes de qualité. Mais les raisons qui viennent d'être exposées par Mme la rapporteure – le degré d'attention à l'entrée du magasin et le fait qu'à la sortie, les produits aient déjà été choisis – font que votre proposition n'aurait pas nécessairement l'effet escompté.
Je retiens cependant que nous devons porter notre attention sur ce sujet. La communication autour des SIQO fait déjà partie des missions de l'INAO – Institut national de l'origine et de la qualité – et de l'Agence française pour le développement et la promotion de l'agriculture biologique, dite Agence bio ; la Commission européenne participe également à diffuser l'information sur ces différents labels et signes de qualité. Je vous renvoie par ailleurs à l'amendement n° 7234 de M. Thiébaut, qui nous proposera un peu plus tard – après l'article 66 bis – de rendre obligatoire une information sur la saisonnalité des fruits et légumes, ce qui nous semble judicieux.
J'avais déjà déposé cet amendement en commission ; on m'avait alors rétorqué qu'il n'était pas pertinent d'installer le dispositif à la sortie des caisses. J'ai donc proposé qu'il le soit au niveau de la surface d'achat, afin que les consommateurs en aient connaissance. Cela correspond à une demande très forte de nos concitoyens qui veulent connaître ce qui se cache derrière un label, car la méconnaissance est très forte dans ce domaine. Afficher quelque part dans le magasin les principales caractéristiques des labels me semble donc être une mesure de bon sens, que nous devons soutenir.
L'amendement n° 4878 est retiré.
Les amendements identiques n° 733 de Mme Laurence Trastour-Isnart, 2116 de M. Mohamed Laqhila, 3517 de M. Stéphane Testé et 4408 de M. Dominique Potier sont défendus.
Avis défavorable. Les acteurs du commerce équitable sont très engagés et la filière est en pleine croissance – de 22 % en 2018 ; c'est donc un label qui se porte bien et je félicite d'ailleurs ceux qui s'y engagent. Mais il me semble que l'argent public sera mieux employé s'il sert à accompagner les démarches visant à encourager une juste rémunération des producteurs, car celle-ci constitue un enjeu essentiel, plutôt que pour financer le plan d'action proposé.
J'ajouterai que nous partageons la volonté d'améliorer la concertation afin d'optimiser les outils dont nous disposons pour favoriser le commerce équitable. Je répète que nous allons lancer dans les semaines qui viennent une large concertation sur ces sujets, dans un cadre interministériel qui doit être renforcé autour des ministères de l'économie, de la transition écologique et de l'agriculture. Les parlementaires qui le souhaitent y seront bien évidemment associés.
Sour ires.
Nous avions défini en commission la notion de label agricole et agroalimentaire, pour que les signes de qualité fasse bien l'objet d'une reconnaissance publique. Les labels relèvent d'une démarche privée mais nous devons garantir aux consommateurs qu'ils respectent une certaine manière de faire ; de même, les allégations relatives à la nutrition ou à la santé sont encadrées par le code de la consommation.
L'amendement vise à préciser que les labels identifient des produits « issus d'une démarche collective de qualité ». Cependant, M. Venteau a déposé un sous-amendement visant à supprimer la mention « de qualité » ; j'y serai favorable mais le laisserai le présenter.
La parole est à M. Pierre Venteau, pour soutenir le sous-amendement n° 7436 .
Il vise à préciser que les labels sont des « démarches collectives » et non nécessairement des « démarches collectives de qualité ».
Il est cohérent avec l'amendement n° 7235 du groupe La République en marche, qui souligne que les labels ne se limitent pas seulement aux critères de qualité mais aussi aux conditions de production ou à la juste rémunération des producteurs.
Certains produits labellisés ne se limitent pas aux critères de qualité pour tenir aussi compte des conditions de production ou de la juste rémunération des producteurs. Il s'agit donc d'éviter de défavoriser des démarches vertueuses en les excluant.
Avis très favorable à ce sous-amendement du député Venteau : nous devons effectivement accompagner, favoriser et reconnaître le sens de ces démarches collectives.
Le sous-amendement n° 7436 , accepté par le Gouvernement, est adopté.
L'amendement n° 5443 , sous-amendé, accepté par le Gouvernement, est adopté.
L'amendement n° 3449 de Mme Célia de Lavergne, rapporteure, est rédactionnel.
L'amendement n° 3449 , accepté par le Gouvernement, est adopté.
Proposé par ma collègue Barbara Bessot Ballot, il vise à inclure dans le code de la ruralité l'éventail des objectifs poursuivis en matière de qualité et d'origine des produits agricoles et alimentaires.
J'émets un avis favorable pour l'amendement n° 7235 de M. Ventoux : certains labels garantissent une qualité mais tiennent aussi compte de la rémunération du producteur ou d'objectifs de moyens qui permettent de garantir que le produit possède telle ou telle caractéristique.
La labellisation correspond à une démarche volontaire qui va devenir aussi collective grâce à la mesure que nous venons d'adopter. Cette adoption satisfait les amendements identiques et l'amendement n° 6447 , qui proposent que les labels s'adressent nécessairement à plusieurs entreprises. Nous sommes même allés plus loin puisque nous avons prévu que d'autres types de structures, telles que les associations, pourraient aussi prendre part à ces labels. Je demande donc le retrait de ces quatre amendements. À défaut, j'émettrai un avis défavorable.
Il paraît en effet pertinent de n'exclure aucun critère – qualité, respect de l'environnement, juste rémunération du producteur – et même de les valoriser tous. Je m'en remets à la sagesse de votre assemblée concernant l'amendement n° 7235 . Pour les mêmes raisons que celles exprimées par Mme la rapporteure, je demande le retrait des quatre autres ; à défaut, j'émettrai un avis défavorable.
L'amendement n° 7235 est adopté ; e n conséquence, les amendements n°
Sur les amendements n° 7234 et 4099 , je suis saisi respectivement par le groupe La République en marche et par le groupe de la Gauche démocrate et républicaine d'une demande de scrutin public.
Les scrutins sont annoncés dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
L'amendement n° 6448 de Mme Sandrine Le Feur est défendu.
L'amendement n° 6448 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
L'article 66 bis, amendé, est adopté.
Je suis fier de présenter cet amendement au nom du groupe LaREM car je m'intéresse à ce sujet depuis les débats sur la loi ÉGALIM. Il s'agit de rendre obligatoire une information sur la saisonnalité des fruits et légumes dans les magasins de plus de 400 mètres carrés qui commercialisent des denrées alimentaires. Cette limite de surface est prévue pour ne pas trop alourdir les contraintes qui pèsent sur les petits commerces.
Il est en effet important d'informer les consommateurs sur la saisonnalité des produits. Rappelons que le bilan carbone d'une tomate produite hors saison, c'est-à-dire en serre, est treize fois supérieur à celui d'une tomate de saison. Sachant qu'un quart de nos émissions de gaz à effet de serre sont dues à notre alimentation, ces deux amendements peuvent avoir un impact assez important sur le choix des consommateurs et donc, in fine , se traduire par une baisse de l'empreinte carbone de notre alimentation.
Contrairement au précédent, cet amendement ne propose pas de limiter l'obligation d'information sur la saisonnalité des produits aux seuls commerces de denrées alimentaires de plus de 400 mètres carrés : il tend à la généraliser à tous les commerces.
Il existe 90 000 commerces de détail alimentaires de moins de 400 mètres carrés en France contre 15 000 commerces d'une surface supérieure. L'amendement précédent exclut donc beaucoup de petits commerces de centres-villes. Comme il va sans doute être adopté et faire tomber le mien, je voudrais proposer de le sous-amender pour élargir son application. Nous n'avons plus le temps de différencier les petits et les grands commerces, il faut que tous les consommateurs soient au courant de la saisonnalité des produits qu'ils achètent.
Alors que nous arrivons au terme des nombreux débats que nous avons eus depuis hier sur la saisonnalité des produits, j'indique qu'elle fait désormais partie des critères de sélection de la commande publique pour les achats des cantines.
Ces deux amendements défendent la même idée mais prévoient un périmètre d'application différent. J'émets un avis favorable sur l'amendement n° 7234 qui se focalise sur les magasins de vente au détail de plus de 400 mètres carrés, créant en quelque sorte une première étape dans la mise en place de cette information essentielle du consommateur. Monsieur Rupin, j'émets un avis défavorable sur votre amendement dont le champ d'application est très large. Je vous propose d'y retravailler avec vous dans le cadre de la navette parlementaire, afin de prévoir un dispositif plus adapté aux plus petits magasins.
L'information sur la saisonnalité semble à la fois pertinente et correspondre à une vraie attente des consommateurs – vous l'avez d'ailleurs très largement relayée, quels que soient les bancs sur lesquels vous siégez. Les distributeurs pourront s'appuyer sur les informations mises à leur disposition par les interprofessions et le ministère de l'agriculture pour appliquer cette disposition.
Il semble toutefois préférable d'en limiter le champ aux magasins de plus de 400 mètres carrés, afin de ne pas imposer aux petits commerçants une contrainte qui, à ce stade, peut sembler excessive. C'est pourquoi je demande le retrait de l'amendement n° 5906 au profit de l'amendement n° 7234 . Précisons que rien n'empêchera les petits commerçants qui le souhaiteraient d'appliquer immédiatement cette disposition. L'outil existera et les informations seront mises à disposition. Je suis persuadée qu'ils partagent tous cette ambition.
L'amendement de notre collègue Thiébaut a du sens et fait écho à la loi Garot relative à la lutte contre le gaspillage alimentaire, qui concerne les magasins de plus de 400 mètres carrés. Au groupe Les Républicains, nous avions déposé plusieurs amendements pour demander l'abaissement à 200 mètres carrés du seuil prévu dans la loi Garot.
La mesure prévue par l'amendement n° 7234 pourrait aussi s'appliquer aux magasins de plus de 200 mètres carrés : dans beaucoup de villes, ce sont les grandes enseignes ayant pignon sur rue qui créent des commerces ; elles ont parfaitement les moyens d'afficher la saisonnalité des produits, information essentielle pour l'éducation alimentaire. Comme notre collègue Rupin, je pense que nous pourrions modifier l'amendement n° 7234 en ce sens.
Nous avons été nombreux à présenter des amendements des écoles et du Parlement des enfants. Pour ma part, je dois dire que je suis assez fier de l'école Françoise Bosser de Riec-sur-Bélon : cette mesure va tout à fait dans le sens de leur amendement. En réalité, ce sont ces enfants les plus forts car ils vont réussir à faire passer cet amendement. Je suis très fier d'eux.
En plein accord avec Mme la secrétaire d'État, je trouve que l'amendement de M. Thiébaut est excellent. En revanche, je pense que la réduction de la surface des magasins aurait des répercussions relativement négatives sur certains petits commerçants et épiciers. Ceux-ci n'auraient pas forcément les moyens et le temps d'afficher toutes ces caractéristiques. Il faut éduquer les gens en matière de la saisonnalité sans créer des normes trop contraignantes pour nos petits commerçants. Si l'on peut envisager de réduire un peu le seuil des 400 mètres carrés, il ne faut pas pour autant le supprimer. La mesure serait trop contraignante pour les épiceries et commerces de nos petits villages, dont la surface peut varier entre 50 et 100 mètres carrés.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 77
Nombre de suffrages exprimés 76
Majorité absolue 39
Pour l'adoption 76
Contre 0
La parole est à M. André Chassaigne, pour soutenir l'amendement n° 4099 .
D'emblée, je vous signale que cet amendement ne nous concerne pas, ni vous ni moi. Le samedi matin, nous allons tous dans notre cuisine où nous enfilons un tablier avant de nous mettre à confectionner des plats à base de produits frais, en ayant quelques épices à portée de main. Nous avons aussi un livre de cuisine, mais nous nous éloignons des recettes car nous faisons de la création artistique. Surtout, nous faisons savoir à nos voisins que le député est aux fourneaux.
Sourires.
Ce n'est toutefois pas le cas de tout le monde. Certains ouvrent leur congélateur d'où ils sortent les plats tout prêts qu'ils ont achetés au supermarché – ce qui ne nous arrive jamais, bien évidemment.
Et ce qu'on lit presque chaque fois sur l'emballage, c'est : « fabriqué en France », ou alors : « transformé en France », « élaboré en France », et, souvent, on trouve même, à côté, une petite carte de France et un drapeau tricolore. Or c'est une tromperie tolérée par les textes, si bien que quand on assemble des produits qui proviennent d'Asie, d'Amérique du Sud ou d'ailleurs, on a le droit de spécifier : « élaboré en France », « transformé en France », « fabriqué en France » avec, à côté, le drapeau tricolore. Ce n'est pas acceptable.
D'où mon amendement qui vise à soumettre l'utilisation de ces indications à la présence dans le produit concerné d'une part minimum d'ingrédients d'origine française, ici fixée à 90 %. Bien sûr, vous allez sans doute donner un avis défavorable avec force arguments. Aussi, je termine ici ma présentation et je reprendrai la parole après avoir entendu vos avis.
Applaudissements sur les bancs des groupes FI et SOC.
Votre amendement vise à considérer comme trompeuse l'utilisation des mentions « élaboré en France » ou « transformé en France » dès lors que l'ingrédient de base n'est pas produit à 90 % en France. Sachez que grâce à la proposition de loi de Mme Bessot Ballot relative à la transparence de l'information sur les produits agricoles et alimentaires, il doit être désormais fait mention de l'origine de l'ingrédient principal.
D'autre part, si nous pouvons déplorer parfois que des ingrédients provenant de l'étranger soient transformés en France, élaborés en France, nous devons plutôt encourager que sanctionner l'industrie agroalimentaire française, qui crée des emplois français et produit de la valeur française. Nous avons besoin de conforter en effet notre industrie agroalimentaire. Or votre amendement est de nature à la pénaliser.
Je tiens, pour finir, à vous rassurer : l'article L. 121-2 du code de la consommation prévoit le cas où une entreprise utiliserait de manière frauduleuse les mentions « transformé en France » ou « élaboré en France ». Avis défavorable.
Nous partageons ce souci de vérifier quelle est la part étrangère des approvisionnements, de renforcer toujours davantage les contrôles, lesquels sont déjà largement réalisés par les agents de la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF). Ces agents vérifient en effet, sur l'étiquetage des produits alimentaires, non seulement la mention mais également tout signe qui pourrait faire référence à une production française par l'apposition d'un drapeau ou d'un liseré tricolores ou d'une quelconque allégation.
Au-delà de l'objectif tout à fait légitime ici poursuivi, nous savons que les délits de tromperie et de pratique commerciale trompeuse sont prévus par le code de la consommation. Ils s'appliquent à l'origine du produit. Les règles relatives à l'origine d'un produit sont par ailleurs fixées par le code des douanes de l'Union (CDU), sans que les États membres puissent y déroger. Enfin, l'amendement ne serait malheureusement, je le crains, pas conforme au droit européen, en particulier à la directive du 11 mai 2005 relative aux pratiques commerciales déloyales des entreprises vis-à-vis des consommateurs dans le marché intérieur, laquelle harmonise les législations nationales des États membres et ne permet pas à ces derniers d'introduire dans le droit national des dispositions divergentes.
Il conviendrait donc plutôt de renforcer les contrôles pour lesquels nous disposons des outils nécessaires. Avis défavorable.
Bien sûr que nous allons voter l'amendement du président Chassaigne ! Le repas français typique tel que défini au tournant des années 2000, c'est le foie gras en entrée, la blanquette de veau en plat principal et la tarte Tatin en dessert. Imaginez, monsieur le rapporteur général, vous qui, comme moi, aimez le Gers, que ce foie gras soit « élaboré en France » avec des ingrédients venant d'ailleurs que du Gers, ce ne serait pas acceptable, ce ne serait pas supportable. Nous devons nous montrer à la hauteur des enjeux et préserver notre patrimoine, nos agriculteurs, nos territoires. Il faut voter cet amendement, je le répète, car je ne me vois pas manger du foie gras « élaboré en France » alors qu'il provient d'un canard ou d'une oie des pays de l'Est.
Madame la secrétaire d'État, hier, à votre place au banc du Gouvernement siégeait le ministre de l'agriculture et de l'alimentation, qui nous a rappelé son combat pour que nous parvenions à produire de la viande et à valoriser le travail des agriculteurs. Nous avons ici l'occasion, en votant cet amendement, de l'aider, d'aider nos agriculteurs. Souvenons-nous de cette terrible affaire des lasagnes à la viande de cheval, sans le Sud-Ouest de la France ! Il ne faudrait pas que ça recommence. Nous avons l'occasion d'aider nos agriculteurs, je l'ai dit, mais aussi de montrer à nos concitoyens notre volonté de changement, de faire en sorte que les émissions de gaz à effet de serre diminuent – seul objectif du projet de loi, comme l'a rappelé notre collègue Millienne.
Je suis très déçu par votre réponse, madame la rapporteure : l'argument selon lequel il faut protéger nos industries agroalimentaires ne tient pas. Il n'a d'ailleurs jamais été utilisé quand nous avons discuté des problèmes dont il est ici question. La transparence n'est pas un coup que l'on porte aux industries agroalimentaires. J'y insiste tranquillement : votre argument n'est pas acceptable.
Vos arguments, madame la secrétaire d'État, sont un peu différents et, d'ailleurs, je les attendais : ils s'appuient notamment sur la réglementation européenne. Or les précisions que vous avez données ne sont pas tout à fait actualisées – j'ai récemment rédigé un rapport d'information, avec notre collègue Catherine Osson, sur la sécurité alimentaire dans l'Union européenne.
Certes, le règlement n° 1169/2011 du Parlement européen et du Conseil prévoit l'identification obligatoire du pays d'origine ou du lieu de provenance des denrées alimentaires autres que certaines catégories de viandes, dans les cas où l'« omission [de cette indication] serait susceptible d'induire en erreur les consommateurs ». De plus, la Cour de justice de l'Union européenne a clairement indiqué que cette harmonisation ne s'opposait pas à ce que les États membres adoptent « des mesures prévoyant des mentions obligatoires complémentaires d'origine ou de provenance si celles-ci respectent les conditions énumérées » dans le règlement précité.
Il faut également compter avec une avancée récente, applicable depuis le 1er avril 2020 : on doit afficher l'ingrédient primaire d'un produit. La définition en a été publiée par la Commission européenne dès 2018 : il s'agit de l'ingrédient représentant plus de 50 % de la denrée alimentaire transformée, ou l'ingrédient caractéristique de la denrée en question, c'est-à-dire habituellement associé par le consommateur à la dénomination du produit. Si je vous dis cela, c'est parce que j'ai la certitude qu'il n'y a pas de blocage du point de vue de la réglementation européenne.
J'ai mentionné tout à l'heure les quatre grandes révolutions de l'histoire de l'humanité, y ajoutant la cinquième que vous avez lancée depuis trois semaines : celle de la patate chaude. Et en effet vous ne voulez pas prendre vos responsabilités en donnant un avis favorable à cet amendement qui non seulement ne porte pas un coup à l'économie générale du projet de loi mais qui est un amendement de bon sens, souhaité depuis longtemps par les « consommacteurs », comme vous dites, et par de nombreux députés. Vous bottez encore une fois en touche en soutenant que cela pourrait gêner l'industrie agroalimentaire et en affirmant que la disposition que je défends s'oppose à des directives européennes alors que vous-mêmes, depuis trois semaines, nous dites qu'il faut anticiper, qu'il faut que la France soit la lumière de l'Union européenne en menant la politique la plus vertueuse.
Nous approuvons totalement les propos de M. Chassaigne et voterons donc son amendement. Pour ce qui est de la DGCCRF, il serait souhaitable de lui donner les moyens d'agir correctement et pour cela qu'elle dispose de suffisamment d'effectifs.
L'amendement du président Chassaigne présente un réel intérêt. On se doit, en effet, d'informer le consommateur et, surtout, de ne pas lui mentir. Néanmoins, le taux minimum de 90 % de produits agricoles d'origine française prévu par notre collègue est peut-être légèrement excessif et pourrait donc être revu à la baisse.
Ensuite, pour ce qui est des contrôles, il faut, comme vient de le souligner notre collègue Taurine, donner les moyens aux services impliqués de faire leur travail. Je prendrai un exemple simple, celui du démarchage téléphonique : on se rend compte que la DGCCRF n'a pas les moyens de remplir sa mission de contrôle et de sanction de ceux qui trompent nos concitoyens. En effet, depuis des années, ses effectifs sont en constante diminution. Pour peu qu'on veuille mener une politique ambitieuse de contrôle pour valoriser la fabrication française, il faut donner les moyens à l'administration de faire son travail.
Par ailleurs, madame la secrétaire d'État, j'aimerais avoir votre avis, avoir des éclaircissements sur l'étiquetage obligatoire de l'origine du lait concernant Lactalis – nous ne connaissons pas les tenants et les aboutissants de cette affaire. Vous savez que Lactalis a formé un recours et que le Conseil d'État a annulé le décret rendant obligatoire l'indication par étiquetage de l'origine géographique « UE » ou « non UE » du lait des produits laitiers vendus en France. Or l'ingrédient principal d'un produit laitier étant, par définition, le lait, si on n'est pas capable de savoir d'où il provient, c'est un vrai problème. Le Conseil d'État a tranché en suivant le jugement de la Cour de justice de l'Union européenne (CJUE).
Hier, notre collègue Le Feur rappelait que les pays européens prenaient la France comme exemple pour l'imiter demain. Eh bien, ici, nous pourrions être en avance, décider que l'étiquetage de l'origine d'un produit est obligatoire, la CJUE n'ayant pas à contredire le droit français.
Je ne reviendrai pas sur Lactalis, sujet que je souhaitais aborder mais M. Naegelen l'a fait et je l'en remercie.
Je suis d'accord avec votre amendement, monsieur le président Chassaigne, mais il faut tenir compte de la réalité des moyens que l'État donne aux agents pour vérifier l'effectivité de ce que nous votons. Or si nous disposons d'un arsenal juridique costaud pour essayer de contrôler les contrevenants, les agents de la DGCCRF, et je rejoins notre collègue Taurine, ne sont pas assez nombreux. On ajoute donc une couche de difficultés à celles qu'ils rencontrent déjà. D'une certaine manière, nous mettons la charrue avant les bœufs. Renforçons d'abord les effectifs de la DGCCRF et donc leurs capacités de contrôle. Mais si nous votons des mesures qu'on n'a pas les moyens d'appliquer, honnêtement, je ne vois pas comment faire – et pourtant, je le répète, je suis d'accord avec vous.
Je ne souhaite pas qu'on confonde la mention « origine France garantie » avec les mentions « transformé en France », « élaboré en France ». Le label « origine France garantie » est un combat qui nous rassemble tous. Le ministre de l'agriculture et de l'alimentation a évoqué le décret relatif à l'indication de l'origine du lait et des viandes, qui est en train d'être modifié. Voilà qui me donne l'occasion de corriger ce que j'ai dit tout à l'heure : je voulais en fait mentionner la proposition de loi de notre collègue Besson-Moreau que nous n'avons pas encore examinée et dont l'article 4 prévoit la mention de l'origine de l'ingrédient principal. Nous entendons donc donner au consommateur l'information nécessaire pour qu'il achète son produit en pleine connaissance de cause.
Vous souhaitez que nous considérions comme trompeuse l'appellation « transformé en France » dès lors que 90 % des ingrédients d'un produit ne sont pas français quand bien même ils sont transformés en France.
Je m'inscris en faux contre cette affirmation. Par exemple, 90 % des ingrédients qui composent le chocolat Valrhona, produit dans la Drôme, ne sont pas français, vous l'imaginez bien. Pourtant, il s'agit d'une très belle industrie drômoise. De la même façon, 20 % des composants des avions Airbus, qui sont une fierté industrielle française et européenne, sont américains. Le seuil de 90 % que vous proposez me semble donc inacceptable.
Surtout, il me semble important, par souci d'honnêteté intellectuelle, de ne pas confondre les deux débats : quand nous appuierons sur le bouton pour le vote par scrutin public, nous ne nous prononcerons pas sur l'origine France, mais sur la définition du label « transformé en France » et sur la fixation d'un seuil de 90 %, qui exclut bien des emplois français.
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LaREM.
J'ai une proposition. Vous avez déjà, à deux reprises, demandé une suspension de séance pour vous prononcer sur des amendements que j'avais défendus. Dans le premier cas, vous avez déposé un sous-amendement qui a permis d'intégrer la notion de zone de revitalisation rurale dans les objectifs de lutte contre l'artificialisation des sols, ce dont je me réjouis. Dans le second cas, la suspension de séance vous a conduits à écarter mon amendement, mais un autre, qui était assez proche, a été adopté.
Jamais deux sans trois : je vous propose de discuter entre vous – puisque c'est ainsi que vous procédez –, au cours d'une suspension de séance, pour proposer un sous-amendement. J'admets avoir peut-être, comme cela a été souligné par plusieurs intervenants, tapé un peu fort en proposant un seuil de 90 %.
Ce n'est pas du bricolage, puisque je m'appuie sur le seuil de 50 % retenu à l'échelle européenne. Si vous sous-amendiez mon amendement en ce sens, madame la secrétaire d'État, nous franchirions une première étape.
Quant à l'argument selon lequel nous n'aurions pas les moyens de contrôler une telle mesure, il n'est pas acceptable ! La DGCCRF et les services des douanes ont certes subi des baisses d'effectifs – je l'ai d'ailleurs signalé dans le rapport sur la sécurité alimentaire dans l'Union européenne que Catherine Osson et moi-même avons présenté au nom de la commission des affaires européennes –, mais si nous partons du principe qu'ils n'auront pas les moyens d'effectuer les contrôles, autant faire nos valises et rentrer chez nous mettre nos tabliers pour préparer le déjeuner !
Mme Bénédicte Taurine applaudit.
M. Gérard Leseul applaudit.
J'ai l'impression d'un deux poids, deux mesures. Dans le secteur du meuble, que je connais mieux que celui de l'agroalimentaire, les fabricants de canapés devront préciser l'origine et l'épaisseur du cuir, au point de devoir presque indiquer le prénom de la vache dont ils ont utilisé le cuir, sous peine de devoir, en cas de contrôle, payer une amende à la moindre indication manquante. À l'inverse, quand il s'agit du secteur agroalimentaire, dont le lobby est beaucoup plus puissant que la petite Union nationale des industries de l'ameublement français, on laisse, en quelque sorte, la porte ouverte à toutes les pratiques. L'exemple de Lactalis que Bruno Millienne et moi-même avons évoqué le montre d'ailleurs clairement : on laisse les acteurs de l'agroalimentaire faire ce qu'ils veulent, sans toujours exiger d'eux un étiquetage offrant les informations nécessaires, alors qu'à l'inverse, on tape dur sur les autres secteurs, en profitant du fait qu'ils sont moins importants.
Même si je comprends la préoccupation exprimée par notre collègue Chassaigne, les limites, et même la dangerosité, de cet amendement me paraissent évidentes. Je suis élu d'une circonscription du Bas-Rhin, dans laquelle les artisans fabriquent des produits à partir de matières premières – notamment de la viande – venues d'Allemagne, de l'autre côté de la frontière. Si votre amendement était adopté, ces professionnels, qui fabriquent par exemple des plats préparés, seraient pénalisés, puisque leurs produits seraient considérés comme n'étant pas transformés en France !
Une telle mesure serait en outre totalement aberrante au plan environnemental : pour conserver la mention « fabriqué en France », ils devraient importer du porc de Bretagne, produit à plus de 1 000 kilomètres de chez eux – même si je n'ai rien contre votre région, cher président. J'estime donc qu'il faut faire preuve de bon sens et ne pas adopter cet amendement, même si je comprends l'intérêt qu'il revêt aux yeux du président Chassaigne.
La parole est à M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général de la commission spéciale.
Nous traitons ici de deux questions distinctes : l'origine du produit de base et le lieu de transformation de ce produit. Il n'y a aucune raison de mélanger les deux ! Nous pouvons être fiers, de façon générale, de la transformation des produits fabriqués en France. Le « made in France » est un label très important, qui doit être dissocié de l'origine des ingrédients de base. Informer le consommateur sur le lieu de fabrication et de transformation du produit est important. Il n'y a aucune raison de reculer sur ce point.
Vient ensuite, vous avez raison, la question complémentaire de l'origine de l'ingrédient de base. Je répondrai ici à notre collègue des Bouches-du-Rhône, François-Michel Lambert, qui a évoqué le foie gras. Vous le savez, il est absolument obligatoire de faire apparaître l'origine de l'ingrédient de base de très nombreux produits, comme la viande ou la volaille. S'agissant de l'exemple que vous avez cité, les fabricants sont en outre tenus, depuis l'année dernière, de préciser la provenance de l'ingrédient principal, en l'occurrence le canard – car ce n'est effectivement pas la même chose selon qu'il a été élevé dans le Gers ou en Bulgarie, par exemple. Les filières, dont celle du foie gras, se sont d'ailleurs organisées pour fournir ces informations. Ainsi, dans l'exemple que vous avez choisi, tous les garde-fous nécessaires à l'information du consommateur sont heureusement prévus.
Je rappelle enfin que nous avons créé, en adoptant l'article 1er , le futur éco-score, qui intégrera l'incidence environnementale du produit et tiendra compte du trajet qu'il aura effectué avant d'être vendu aux consommateurs français.
Même si la langue d'oc a perdu contre la langue d'oïl, et puisque nous avons adopté jeudi dernier un texte relatif à la protection des langues régionales, je rappelle que l'anglais ne constitue toujours pas une langue régionale, malgré la conquête de la Gascogne il y a quelques siècles. Je préfère donc parler de « fabriqué en France » plutôt que de « made in France ».
Prenons l'exemple de la garbure gersoise : ce plat, que le rapporteur général connaît bien et que j'adore, peut compter de nombreux ingrédients produits à l'étranger tout en bénéficiant d'une mention « élaboré en France ». Ce n'est pas acceptable. Voilà pourquoi il convient d'adopter cet amendement, au besoin en le sous-amendant. Comme le président Chassaigne, je demande que vous preniez les dispositions nécessaires, à la faveur d'une suspension de séance, pour aller de l'avant.
Puisque le groupe majoritaire ne compte visiblement pas le faire, je demande une suspension de séance, même si je crains qu'elle soit décomptée du peu de temps de parole qui me reste.
Je vous informe que M. Potier a déposé à l'instant un sous-amendement, que nous sommes en mesure d'examiner dès maintenant.
Dans ce cas, je retire ma demande et conserve les quelques minutes qui nous restent – cela peut toujours servir !
La parole est à M. Dominique Potier, pour soutenir le sous-amendement n° 7488 .
Il vise à ramener le taux proposé par M. Chassaigne de 90 % à 50 %, pour tenir compte des débats qui viennent de se dérouler.
MM. André Chassaigne, François-Michel Lambert, Julien Aubert et Christophe Naegelen applaudissent.
Défavorable, car le sujet nécessite une réflexion bien plus fine et aboutie.
Si nous n'introduisions pas cette disposition dans le texte, un produit minoritairement fabriqué en France pourrait bénéficier de l'appellation « élaboré en France » ou « transformé en France ». Il me semble donc que nous ne pouvons pas faire autrement que d'adopter cet amendement qui, ainsi sous-amendé, devient parfaitement acceptable. Faisons confiance à la navette parlementaire et au Sénat pour, éventuellement, en évaluer les incidences. Ne perdons pas de temps : le changement, c'est maintenant – pour faire plaisir à nos collègues socialistes et communistes !
Nous sommes favorables à ce sous-amendement.
S'agissant des garde-fous que vous évoquiez, monsieur le rapporteur général, je rappelle que le mode d'élevage des animaux transformés n'est jamais indiqué. Le consommateur n'est donc pas totalement éclairé. C'est particulièrement vrai dans le cas du foie gras.
Je comprends bien l'intérêt de la mesure que vous défendez, mais je vous mets en garde : quelles seront les conséquences de cet amendement, même sous-amendé, sur les indications géographiques protégées (IGP), qui s'appliquent aux produits transformés en France ? Je crains que nous soyons en passe, si nous adoptions cet amendement, de mettre à mal tout le dispositif.
J'insiste sur la question des produits frontaliers, dont je discutais avec Antoine Herth, lui aussi député du Bas-Rhin : les artisans alsaciens, particulièrement dans le domaine agroalimentaire, verraient une part importante de leurs produits perdre la mention « fabriqué en France » si l'amendement était adopté, alors qu'ils s'approvisionnent à quelques kilomètres de chez eux.
Sincèrement, si j'entends l'intérêt qu'une telle disposition pourrait présenter, j'estime que nous devrions, sur cette question, nous poser et réfléchir à ce que nous faisons. Je vous alerte sur ce point : les premières victimes de cette mesure seront les petits artisans du secteur agroalimentaire. De grâce, faisons preuve de bon sens et prenons le temps de la réflexion !
Je manque sans doute de bon sens, mais je sais ce que sont les IGP et les appellations d'origine contrôlée (AOC). Vous ne pouvez pas nous renvoyer à ces labels, qui sont soumis à des cahiers des cahiers très précis : cela n'a rien à voir !
Applaudissements sur les bancs du groupe FI.
Trouver des arguments de ce genre pour permettre à l'apparatchik de service de donner des ordres à ses troupes afin qu'elles ne votent pas pour l'amendement relève de la tromperie, alors que nous devrions être réunis ici pour discuter sérieusement !
Exclamations sur plusieurs bancs du groupe LaREM.
Monsieur le rapporteur général, vous avez plusieurs fois sauté sur votre chaise comme un cabri en disant « Étude d'impact ! Étude d'impact ! Étude d'impact ! » Dans ce cas, je vous demande de nous fournir toutes celles qui ont été menées pour les amendements déposés par des députés de la majorité, notamment du groupe La République en marche, car le travail parlementaire ne saurait être à géométrie variable ! Vous savez très bien que les amendements sont rarement accompagnés d'une étude d'impact : ce n'est pas un argument.
J'ajoute que la navette parlementaire fera son œuvre et que la sagesse du Sénat permet quelquefois de revenir sur les mesures que nous prenons ici, parce que les rapporteurs sont en contact et que les sénateurs ont le temps d'étudier les dispositions adoptées en première lecture pour, en définitive, décider ou non de les retenir. En adoptant cet amendement, nous leur adresserions un signal clair.
Je tiens à souligner que c'est la première fois que j'entends les arguments avancés aujourd'hui par les uns et les autres. Nous avons pourtant débattu de cette question à plusieurs reprises, notamment depuis l'adoption de la loi Hamon relative à la consommation, qui a fait l'objet d'un large consensus dans l'hémicycle. Je regrette d'ailleurs que Thierry Benoit, qui est très fortement impliqué dans ce domaine, ne soit pas présent.
Au cours de ces longs échanges, le point de blocage qui nous était opposé concernait, jusqu'à présent, le niveau européen – la secrétaire d'État en a d'ailleurs dit quelques mots. Je veux bien admettre que la mesure que je propose puisse demander vérification, mais je crois avoir prouvé que son adoption est désormais possible, au vu des dispositions prises dernièrement par l'Union européenne et d'un jugement récent de la Cour de justice de l'Union européenne.
Donc s'il vous plaît n'allez pas inventer je ne sais quel argument pour ne pas voter le sous-amendement et l'amendement. Arrêtez de jouer avec ce que je ne crains pas d'appeler une forme de tromperie. Je sais ce que sont les AOC et les IGP, c'est un dossier que je suis depuis très longtemps.
Je sais aussi que ces amendements n'ont pas fait l'objet d'une étude d'impact et que cela pose un problème, mais si cet argument devait justifier le rejet de tous les amendements qui sont dans ce cas, cela remettrait en cause tout notre travail parlementaire.
Applaudissements sur les bancs du groupe FI.
J'estime que les propos tenus ce matin par le rapporteur général sont gravissimes.
Applaudissements sur les bancs du groupe FI. – M. François-Michel Lambert applaudit également.
Sans aller jusqu'à faire un rappel au règlement, j'aimerais tout de même apporter une réponse. Moi aussi je suis parlementaire et quand je vote sur un amendement, je fais attention.
Je vous rappelle que l'indication géographique protégée, d'après la définition que j'ai consultée, est un signe d'identification qui désigne des produits dont la qualité ou la réputation sont liées au lieu de production, de transformation ou d'élaboration, mais dont les ingrédients ne proviennent pas nécessairement de cette aire géographique.
Parlementaire, comme vous, je me renseigne avant de voter quoi que ce soit.
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LaREM.
L'IGP, signe d'identification européen, et l'étiquetage que proposent nos collègues Chassaigne et Potier sont deux choses totalement différentes. Le sous-amendement de M. Potier, qui fixe un seuil à 50 %, va dans le bon sens. Nous créerions ainsi un label franco-français – contrairement à l'IGP qui est européenne – assurant que 50 % de la matière première qui compose les produits commercialisés dans nos magasins vient de notre territoire. Ce n'est que du bon sens.
Dernièrement, lors de l'examen de nombreux textes, nous avons fait confiance au Sénat et à la navette parlementaire. D'ailleurs, heureusement que la proposition de loi sur la sécurité globale, que l'Assemblée a adoptée définitivement avant-hier, avait été améliorée par le Sénat. C'est parce que les rapporteurs de chaque chambre ont réellement travaillé ensemble que notre assemblée a pu voter le même texte que le Sénat. Nous pourrions très bien procéder ainsi s'agissant de cet amendement.
Le rapporteur général a parlé de « bricolage » à propos de cette proposition. Au-delà du fait que Mr. Bricolage est une très belle entreprise française, ce n'est pas du tout le cas. M. Chassaigne a simplement déposé un amendement qui relève du bon sens. Il a reconnu lui-même qu'il s'était montré un peu excessif en fixant le seuil à 90 % : nous pouvons être un peu plus réalistes et ramener ce seuil à 50 %, comme le propose le sous-amendement de M. Potier.
Très honnêtement, je ne comprends pas ce qui nous empêcherait de voter cet amendement et d'attendre la navette pour que le travail sur cette disposition se poursuive.
De toute façon, c'est l'Assemblée qui aura le dernier mot. Par conséquent, s'il ne peut pas être retravaillé demain dans un sens qui vous convient, vous aurez toujours la possibilité de le supprimer en deuxième lecture. Laissez-lui donc une chance, laissez les deux chambres travailler ensemble pour aboutir à une mesure concrète qui protège les agriculteurs français et l'origine de nos produits.
Je tiens vraiment à m'excuser auprès des députés de la majorité : malheureusement je ne suis pas membre du groupe La République en marche. Cela explique peut-être en grande partie pourquoi vous rejetez certains amendements, y compris ceux auxquels, au fond, vous-mêmes êtes favorables mais que, pour des raisons de petite politique, vous ne voulez pas inscrire dans le marbre.
Protestations sur les bancs du groupe LaREM.
Monsieur le président Chassaigne, je crois qu'il est temps de dépassionner les débats. Vous avez traité certains collègues d'« apparatchiks », ce qui n'est pas respectueux.
Personne ne vous a agressé. Jusqu'à présent, les débats se sont très bien passés. Les insultes…
Depuis le début de l'examen de ce projet de loi, nous avons accepté environ 150 amendements de l'opposition. Vous ne pouvez donc pas nous accuser d'avoir accepté uniquement des amendements de la majorité. Ce n'est pas vrai, cela ne résiste pas à l'épreuve des faits. Vous vous renseignerez.
Le chiffre que je viens de vous donner correspond au nombre d'amendements acceptés en commission comme en séance.
Sur le fond, nous vous avons expliqué que ce n'était pas sérieux de passer d'un seuil de 90 % à 50 %. Ce nouveau chiffre est arbitraire : pourquoi pas 40 ou 60 % par exemple ?
Applaudissements sur quelques bancs du groupe LaREM.
Avant de donner la parole à M. François-Michel Lambert, je rappelle que le mot « apparatchik » fait partie du débat public et n'est aucunement une insulte. Les députés ont tout de même le droit de s'exprimer dans cette enceinte.
Monsieur le rapporteur général, 50 %, ce n'est pas n'importe quel seuil. Il permet de s'assurer qu'au moins la moitié des produits qui composent la garbure gersoise proviennent de France – pas même forcément du Gers !
Je constate que la majorité, avec tout le respect que je lui dois, est prête à accepter que les Français soient trompés lorsqu'ils achèteront des produits qui ne contiendront même pas 50 % de matières premières originaires de France alors qu'ils afficheront la mention « élaboré en France », « transformé en France » ou, pour reprendre une expression que vous avez employée et que je réfute, « made in France ».
Je précise à l'attention de M. le rapporteur général que le chiffre de 50 % fait référence à une définition publiée par la Commission européenne dès 2018, citée dans le rapport d'information sur la sécurité alimentaire de l'Union européenne : « Il s'agit de l'ingrédient représentant plus de 50 % de la denrée alimentaire transformée, ou l'ingrédient caractéristique de la denrée en question […]. Il peut ainsi exister plusieurs ingrédients primaires dans un même produit […]. Le pourcentage proposé s'appuie donc sur une définition européenne et, pour moi, une définition européenne, ce n'est pas « du bricolage ».
Applaudissements sur les bancs du groupe FI.
Le sous-amendement n° 7488 n'est pas adopté.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 76
Nombre de suffrages exprimés 66
Majorité absolue 34
Pour l'adoption 16
Contre 50
L'amendement n° 4099 n'est pas adopté.
L'amendement n° 4 9 47 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
L'amendement n° 6067 , accepté par la commission et le Gouvernement, est adopté.
Les amendements n° 6295 de Mme Frédérique Tuffnell et 437 de M. Loïc Dombreval, pouvant être soumis à une discussion commune, sont défendus.
L'amendement n° 6647 , ayant reçu un avis défavorable de la commission et du Gouvernement, est retiré.
La parole est à M. Dominique Potier, pour soutenir l'amendement n° 4403 .
Par cet amendement très technique et précis, nous proposons une révision du label AB – agriculture biologique – et de la mention HVE 3 – haute valeur environnementale niveau 3. Le premier date de 1985. Le second, expérimenté dès 2008, dans la dynamique du Grenelle de l'environnement, a été remis en avant à l'occasion des États généraux de l'alimentation en 2017 puis intégré à la loi ÉGALIM.
En raison de leur date de conception, ces deux certifications ne prennent pas en considération les critères du carbone et du climat, qui sont au cœur de ce projet de loi. Alors que nous multiplions les allégations, je crois, madame la rapporteure – vous qui connaissez parfaitement ces questions – que la prise en considération de ces ceux critères constituerait un réel progrès. En effet, des marchandises labellisées AB sont aujourd'hui produites ou transportées dans des conditions qui vont à l'opposé de l'objectif carbone tandis que certains produits HVE ne respectent pas ce critère.
Par ailleurs il serait souhaitable que nous réfléchissions à une prise en considération du critère social grâce à l'introduction d'une clause de partage de la valeur ajoutée ou de respect des droits humains dans le cadre de cette labellisation. Ce serait une manière de moderniser ces certifications qui défendraient ainsi une vision holistique de l'environnement incluant l'objectif carbone et intégreraient – au moins de façon minimale –, la dimension sociale.
Je sais que de telles réformes sont en cours au ministère de l'agriculture et de l'alimentation, s'agissant en tout cas de l'adaptation de la mention HVE, et que l'Agence bio réfléchit à cette question concernant le label AB français, le plus renommé auprès des producteurs.
Cette perspective est donc tout à fait réaliste. L'inscription d'une telle mesure dans la loi serait parfaitement cohérente avec la ligne suivie par ce texte. Elle apporterait une simplification tout en permettant de donner des signaux clairs et de renforcer le contrat qui lie la société à l'agriculture, les consommateurs aux producteurs. Je suis sûr que l'idée d'un rapport remis par un comité scientifique sur des questions qui sont déjà à l'étude recueillera l'approbation de tous nos collègues.
M. Gérard Leseul applaudit.
Je connais et respecte votre combat sur ces dossiers. Un audit à propos de la mention HVE, actuellement en cours au ministère de l'agriculture et de l'alimentation, doit nous permettre de renforcer et d'améliorer cette certification qui fait d'ailleurs l'objet de certaines attaques.
Cependant la création d'un comité scientifique ad hoc ne me semble pas la solution la plus adaptée. Je propose que nous réfléchissions à la manière d'avancer sur ces questions une fois que le ministre de l'agriculture et de l'alimentation, actuellement sur le terrain,…
…nous aura communiqué les conclusions de l'audit. Demande de retrait ou avis défavorable.
Arrêtons-nous un instant sur cet amendement très détaillé.
Tout d'abord, et même s'il n'est pas nécessaire que je développe ici cet aspect, le bilan de la réforme du commerce équitable sera évidemment fait.
J'en arrive à la certification environnementale des exploitations agricoles, qui vise à valoriser les nouvelles pratiques agroécologiques. Nous sommes tous évidemment attachés à mettre en œuvre les moyens nécessaires à la poursuite du développement de ce dispositif encore relativement récent – il a moins de dix ans – qui contribue à la nécessaire transition.
D'autre part, vous proposez, par votre amendement, d'introduire de nouveaux critères environnementaux. Comme l'a dit Mme la rapporteure, une étude de l'évaluation des impacts environnementaux des exploitations certifiées HVE est en cours. Ses résultats, connus dans moins d'un an, permettront d'alimenter la réflexion sur le sujet et nourriront en particulier les travaux qui seront menés au sein de la Commission nationale de certification environnementale concernant les évolutions du référentiel HVE, notamment à travers l'ajout de nouvelles thématiques comme le bilan carbone.
Enfin la production biologique est encadrée par une réglementation européenne qui vient d'être modifiée – les nouvelles règles entreront en vigueur le 1er janvier 2022 – et ne fera donc pas immédiatement l'objet de nouveaux changements.
Cette nouvelle réglementation, qui s'impose à tous les producteurs – y compris ceux qui bénéficient du label –, comporte des avancées majeures, notamment en matière de bien-être animal – une question qui mérite notre vigilance, que nous aurions pu aborder plus longuement tout à l'heure à l'occasion des amendements de Mme Tuffnell et de M. Dombreval –, et de diversité génétique végétale, sujet auquel vous êtes, je le sais, également attentif.
Nous serons amenés à travailler sur ces questions. Sachant que le plan d'action de l'Union européenne visant à développer l'agriculture biologique, qui vient d'être publié, prévoit un travail autour de la manière d'améliorer la contribution de l'agriculture bio à la durabilité dans son ensemble, je peux vous assurer que le ministère de l'agriculture et de l'alimentation, évidemment très attaché à ces questions, suivra l'évolution de cette réflexion.
Dans la perspective de ces travaux, je demande le retrait de votre amendement et j'émettrai, à défaut, un avis défavorable.
C'est selon moi un très bon amendement, qui permettrait de clarifier nos débats sur l'usage des serres chauffées en agriculture biologique. Je rappelle qu'aux termes de son cahier des charges européen, celle-ci doit être la moins émettrice possible de gaz à effet de serre. Je voterai en faveur de l'amendement.
J'irai dans le même sens que Mme Le Feur, car cet amendement est excellent. Il est urgent de redéfinir les critères d'obtention du label haute valeur environnementale.
L'amendement vise à créer un outil, un levier, qui serait très utile pour cela, en particulier dans le cadre de la nouvelle politique agricole commune.
En effet, dans le cadre de la préparation du rapport d'information sur une agriculture durable pour l'Union européenne, j'ai constaté que, alors que l'ambition de la politique agricole commune se réoriente vers les services environnementaux, les objectifs en la matière – à l'atteinte desquels le versement des aides sera subordonné –, poseront de grandes difficultés. Comment les définir et évaluer les changements des pratiques agricoles ? Imaginez la bureaucratie qu'il faudra – alors qu'il y en a déjà beaucoup – pour identifier, parmi les producteurs, ceux qui ont fait des choix vertueux et doivent être encouragés !
Supposons que l'on veuille tenir compte des impacts concrets des pratiques agricoles en matière d'eau, par exemple. J'ai eu l'occasion de rencontrer certains des responsables des nombreux syndicats d'eau qui maillent nos territoires. Les périmètres de protection qui sont obligatoirement définis autour des points de captage de l'eau et qui sont plus ou moins étendus – ils sont beaucoup plus larges pour les eaux minérales naturelles, comme Volvic, par exemple –, sont soumis à des cahiers des charges. Eh bien, même avec un cahier de charges très strict, il est extrêmement difficile d'évaluer matériellement, concrètement, les évolutions des pratiques et la diminution du recours au pesticide, dans le temps long. C'est une tâche quasi impossible et ce sont les scientifiques qui nous le disent – j'ai notamment échangé sur cette question avec le président-directeur général de l'INRAE, l'Institut national de recherche pour l'agriculture, l'alimentation et l'environnement.
Il faudrait donc faciliter les choses, avec des outils permettant, par exemple, aux exploitations bénéficiant de la certification haute valeur environnementale de bénéficier plus « mécaniquement » des aides correspondant aux objectifs recherchés par l'Union européenne. Actuellement, de tels outils ne sont pas prêts. Il importe donc que nous intervenions, pour qu'ils soient cadrés scientifiquement.
Enfin, l'amendement du groupe Socialistes et apparentés, défendu par M. Potier, vise à inclure, dans les critères de certification, une dimension sociale.
Une telle mesure est défendue à des degrés divers dans les différents pays de l'Union européenne. Disons-le, en France, elle l'est par toutes les organisations syndicales, quoique, ici aussi, à des degrés divers, certaines axant plus fortement leurs demandes sur la protection des employés agricoles. C'est que cette mesure est importante.
J'ai eu l'occasion de visiter, en Pologne, une grande exploitation biologique, qui expédie ses produits en Allemagne. Les travailleurs ukrainiens qu'elle emploie sont payés 80 euros par mois. Il faut faire évoluer la prise en compte de la dimension sociale dans l'Union européenne.
La certification de haute valeur environnementale peut inclure de tels critères et faire l'objet d'une définition scientifique acceptée qui facilitera l'application de la politique agricole commune.
Le bilan de la précédente programmation de la PAC, c'est qu'elle exigeait trop de bureaucratie et qu'il était extrêmement compliqué de contrôler son application dans tous les pays de l'Union européenne. Simplifions les choses ; la haute valeur environnementale peut être un outil de ce travail.
L'amendement n° 4403 n'est pas adopté.
Chers collègues, avant de passer au titre VI du projet de loi et de changer de rapporteur, je vous propose de prendre quelques minutes de pause bien méritées.
Suspension et reprise de la séance
La séance, suspendue à onze heures vingt, est reprise à onze heures trente.
La séance est reprise.
Mes chers collègues, pour répondre aux interrogations de certains d'entre vous, je vous indique que, d'après nos calculs, qui comportent évidemment une grande part d'incertitude, nos débats occuperont évidemment toute la matinée et sans doute aussi tout l'après-midi, de telle sorte que nous devrions pouvoir terminer l'examen du texte un peu avant le dîner. Bien évidemment, cela dépend de vous.
J'indique également que, comme le sait le président Chassaigne, le temps de parole du groupe de la Gauche démocrate et républicaine est épuisé, et que les amendements des députés de ce groupe seront désormais mis aux voix après l'avis de la commission et du gouvernement, à l'exclusion de toute intervention. C'est la règle.
C'est on ne peut plus simple. Chacun connaît le contenu de notre règlement.
Plusieurs orateurs sont inscrits sur l'article 67.
La parole est d'abord à M. Julien Aubert.
Nous voici dans la dernière ligne droite de l'examen de ce texte, avec les dispositions du titre VI, qui ne sont pas des moindres. Je regrette, une fois encore, que des dispositions aussi importantes soient toujours inscrites en fin de texte, alors que l'on sait pertinemment qu'elles sont ainsi vouées à être examinées durant un week-end ou à potron-minet,…
…ce qui n'est pas très honorable et n'encourage ni à la participation ni au débat. Passons !
Les dispositions du titre VI prévoient principalement, d'une part, de renforcer les peines pour des délits déjà existants en matière d'installations classées, d'activités relevant de la loi sur l'eau et de transport de marchandises dangereuses. D'autre part, elles élargissent l'actuel délit de pollution des eaux pour en faire un délit général de pollution des eaux et de l'air. Au surplus, afin de tenter de plaire à la Convention citoyenne pour le climat, il est prévu que ces infractions constituent un écocide lorsqu'elles sont commises en ayant connaissance de leur caractère grave et durable.
Le groupe Les Républicains souhaite exprimer ses plus vives inquiétudes à propos de ces mesures. Rappelons en effet que nous ne partons pas de zéro : la France dispose déjà d'une large palette de sanctions administratives et pénales, qui ont fait sa réputation dans le monde entier, ainsi que d'incriminations spécifiques, comme le terrorisme écologique ou les atteintes à l'environnement en bande organisée, arsenal législatif de protection de l'environnement qui a d'ailleurs principalement été constitué, disons-le en passant, à l'initiative de notre famille politique, avec la Charte de l'environnement de 2005 et la loi de 2008 sur la responsabilité environnementale. Prendre les remarques qui vont suivre comme une marque de désintérêt à l'égard de la protection de l'environnement serait donc nous faire un bien mauvais procès, car nous ne pouvons que nous inquiéter lorsque nous étudions attentivement les dispositions de ce titre VI. Je précise en outre que mes préconisations vaudront aussi défense des amendements qui suivront.
Les rédactions retenues dans le texte laissent planer des incertitudes qui risquent de nuire à nos entreprises et à l'exigence de sécurité juridique, sans pour autant permettre une protection significative de l'environnement. Ainsi, l'article 67 prévoit des sanctions pénales aggravées pour les faits prévus notamment aux articles L. 173-1 et L. 173-2 du code de l'environnement, en cas d'exposition à un risque immédiat d'atteinte grave et durable à la faune, à la flore ou à la qualité de l'eau. Cette notion, qui relèvera de l'appréciation du juge, à l'exception du caractère durable, pour lequel vous fixez un seuil minimal de dix ans, sera source d'insécurité juridique pour de nombreuses entreprises de bonne foi qui, compte tenu de l'environnement juridique très complexe – c'est un euphémisme – dans lequel elles doivent évoluer dans notre pays, peuvent se trouver momentanément et involontairement en situation de non-conformité au regard de certaines prescriptions réglementaires. Il est bien de faire de la France un paradis écologique, mais il serait bon qu'elle ne devienne pas un enfer normatif. Ainsi, une entreprise qui ne ferait que dépasser de manière involontaire un seuil de consommation énergétique pourrait se trouver en situation d'exploitation sans autorisation, pouvant faire l'objet d'une condamnation sur le fondement de cet article.
En plus d'être imprécise, cette initiative législative paraît prématurée et source d'incohérences avec le droit européen, qui est lui-même en pleine évolution. En effet, la Commission européenne vient d'ouvrir une consultation sur ce point.
Pour ce qui est, enfin, du délit d'écocide, il se trouve que ni les membres de la Convention citoyenne, qui ont attribué à cette mesure la note de 2,7 sur 10, ni le Conseil d'État qui « ne peut pas donner un avis favorable à ces différentes dispositions » ne trouvent satisfaction dans l'article qui la contient. Il s'agit d'une mesure mal pensée, impraticable et dangereuse – je suis tenté de dire que ce n'est ni fait ni à faire.
Cette disposition présentant une vraie fragilité, le groupe Les Républicains proposera de supprimer l'article 68, malgré le caractère très novateur du délit criminel, notion juridique qui, jusqu'ici, n'existait pas, mais que vous proposez d'intégrer dans notre code. Cet article est hypocrite et nous proposons de remplacer la formulation proposée par celle de « délit d'atteinte à l'environnement ». En effet, le dispositif proposé ne correspond, pour ce qui concerne l'écocide, ni à une réalité sémantique ni aux vœux de la Convention citoyenne.
Le développement durable doit être la consignation des dimensions environnementale et sociale, mais aussi économique de notre société, et nous prônerons, lors de ces débats, non pas une écologie punitive, mais une écologie pragmatique et humaniste.
Le titre VI prétend être un toilettage du droit pénal environnemental. Cependant, s'il réalise certaines avancées évidentes, elles sont insuffisantes et le groupe Socialistes et apparentés aura l'occasion de s'exprimer à propos du délit d'atteinte volontaire à l'environnement, notamment par la bouche de notre collègue Gérard Leseul, qui évoquera en particulier l'écocide.
Je ferai deux observations. La première est que, derrière le délit intentionnel se trouve aussi le délit de mise en danger en tant que telle, intentionnelle ou non, qui doit être pris en considération dans notre arsenal juridique.
La deuxième, qui est une très forte interrogation, porte sur ce qui me semble être un marqueur de ce titre VI : l'introduction de la procédure de référé adaptée à l'exigence que nous avons désormais de garantir la préservation de l'environnement. Nous avons travaillé, avec Mme Naïma Moutchou, dans le cadre d'une étude menée en concertation avec le ministère de la justice et le ministère de l'environnement sur la nécessité d'adapter les référés. Nous soutiendrons plusieurs amendements à ce propos, et je me permets d'insister sur deux d'entre eux. Je pense d'abord au référé étude d'impact, destiné à prévenir, dans une procédure d'urgence, les effets désastreux d'une opération qui pourrait avoir lieu ou qui serait en cours. J'espère que nous pourrons aboutir sur cette question, car cela représenterait une avancée importante. Nous nous exprimerons ensuite à propos d'un référé liberté, car nous considérons que la Charte de l'environnement répond à cette exigence de liberté, celle de vivre dans un univers sain et un environnement protégé. Ce sera notre combat lors de l'examen du titre VI.
Le titre VI vient renforcer les dispositions prises dans le cadre du projet de loi sur le parquet européen et la justice environnementale spécialisée, texte pour lequel j'étais rapporteure pour avis pour la commission du développement durable et de l'aménagement du territoire.
Les sanctions pénales prévues contre la mise en danger de l'environnement sont ainsi complétées à l'article 67 du projet de loi qui crée, en pratique, une circonstance aggravante de mise en danger de l'environnement, sur le modèle du délit de mise en danger de la vie d'autrui. Il vise ainsi à améliorer la répression des comportements illicites créant un risque d'atteinte à l'environnement, et à renforcer l'effet préventif des dispositions déjà existantes. Désormais, cet article permettra de punir plus fermement, avec une peine maximale de trois ans d'emprisonnement et de 300 000 euros d'amende, les comportements illicites qui exposent la faune, la flore ou la qualité de l'eau à un risque immédiat de dégradation durable. Cette avancée que nous devons saluer vise à permettre la répression de tels comportements.
Mes chers collègues, c'est devant le tribunal des générations à venir que nous aurons à répondre si nous n'agissons pas aujourd'hui pour protéger la biodiversité. Loin des tribunes politiciennes, avec ce texte, nous affirmons et gravons dans le marbre de la loi que la justice des hommes, rendue au nom du peuple dans notre pays, est au service de la biodiversité tout entière. Ce faisant, c'est bien aux générations futures que nous nous adressons. C'est bien à elles qu'il est question de léguer un patrimoine qui, s'il n'a pas de prix, a une immense valeur.
En adoptant cet article et ceux qui suivront, nous faisons un pas important en faveur, certes, de la prévention, mais aussi et surtout de la répression à l'endroit de ceux qui dégradent l'environnement, ce qu'on ne peut plus accepter. C'est un grand pas pour l'homme et pour la biodiversité, mais surtout un pas qui compte et qui comptera.
De nombreuses victimes des crimes d'écocide attendaient que la France franchisse le pas important que vient d'évoquer Mme Zitouni. Or, au lieu de ce grand pas, vous faites quelque chose d'extrêmement dangereux. Tout d'abord, vous avez déjà enterré la demande de la Convention citoyenne pour le climat, puisque l'écocide sera une sorte de délit généralisé, et non pas un crime. Ensuite, vous créez un dispositif totalement inapplicable et dangereux, qui suscitera des débats juridiques infinis, en excluant d'abord la négligence et l'imprudence, et en créant une double intentionnalité qui suppose que l'infraction soit commise, premièrement, de façon délibérée et, deuxièmement, avec la conscience du dommage causé à l'environnement. Les termes « manifestement délibérée », employés à l'article 68, seront une protection forte pour les pollueurs.
Pour vous, les atteintes durables à la santé, à la flore, à la faune ou à la qualité de l'air, du sol ou de l'eau sont celles « susceptibles de durer au moins dix ans », mais est-ce que Lubrizol ou l'Erika ont eu des effets sur dix ans ? Avec le délit d'écocide, tel que vous êtes en train de le définir, les nombreuses victimes du chlordécone n'obtiendront pas réparation.
En outre, vous faites en sorte que, si nous parvenons un jour à ce que le crime d'écocide soit reconnu au niveau international, ce pour quoi nous militons, il reste, dans notre pays, un simple délit inscrit dans la loi à ce titre. La France s'honorerait de ne pas attendre que tout arrive d'en haut et que le changement juridique intervienne au niveau international pour avancer sur cette question.
Madame la ministre, vous avez dit en commission qu'il n'y avait pas de petits et de grands écocides. Nous avons répondu, dans une tribune signée par plusieurs présidents d'association et cosignée par de nombreux députés, que s'il n'y avait pas de grands et de petits écocides, il y avait, en revanche, de grands et de petits pas pour la justice environnementale et sociale. Or, il s'agit ici d'un petit pas, qui est très dangereux. Nous nous opposerons donc à l'article 68, et nous demandons que la France agisse vraiment pour que soit défini un véritable crime d'écocide et qu'il y ait enfin une justice pour les victimes de ces crimes.
Il se fonde sur l'article 100 du règlement, relatif à l'organisation des débats. Je constate que le garde des sceaux est absent, alors que nous examinons un texte qui relève directement de sa compétence. Je le regrette, car je pense que sa présence au banc était nécessaire. S'il n'est pas lui aussi au Sénat, il aurait dû assister à la discussion de dispositifs qui relèvent certes de l'environnement, mais surtout de sa compétence.
En tout cas, monsieur Aubert, le Gouvernement est représenté, et il demande même à s'exprimer.
Nous abordons un titre important, le titre VI, qui vise à améliorer grandement le droit pénal de l'environnement, pour mieux lutter contre la délinquance environnementale.
Nous débattrons de l'écocide à l'article 68 ; pour l'instant, je vais me concentrer sur l'article 67. Il crée une circonstance aggravante de mise en danger de l'environnement, d'une part pour les infractions communes relatives au non-respect des règles applicables aux installations classées pour la protection de l'environnement (ICPE), d'autre part pour les infractions aux règles du transport de marchandises dangereuses.
Ainsi ces infractions sont aggravées lorsque les faits exposent directement la faune, la flore ou la qualité de l'eau à un risque immédiat d'atteinte grave et durable. Sont considérées comme durables les atteintes susceptibles de durer au moins dix ans. Certains d'entre vous l'ont dit, cette nouvelle infraction est définie sur le modèle du délit de mise en danger de la vie d'autrui, prévu par l'article 223-1 du code pénal, afin d'améliorer la répression des comportements illicites qui créent un risque d'atteinte à l'environnement, et de renforcer l'effet préventif de dispositions concernées.
Les infractions aggravées de mise en danger de l'environnement sont punies d'une peine de trois ans d'emprisonnement et de 300 000 euros d'amende, le montant de l'amende pouvant être porté jusqu'au triple de l'avantage tiré de la commission de l'infraction, en raison de l'ampleur du risque qui peut concerner des espaces importants et du caractère potentiellement lucratif de cette prise de risque. Afin de respecter le principe de proportionnalité des peines, le quintuplement du montant de l'amende à l'égard des personnes morales, résultant de l'article 131-38 du code pénal, ne s'appliquera qu'aux amendes exprimées en valeur absolue.
La rédaction de l'article 67 atteint un équilibre entre la répression des atteintes à l'environnement d'une part, et la sécurité juridique nécessaire pour que les entreprises, notamment, disposent d'une visibilité et d'une lisibilité dans le temps, d'autre part. Elle garantit également une meilleure articulation avec la police administrative. Ainsi, adopter cet article reviendrait à donner un signal à tous ceux qui ne respectent pas les règles : même si cela n'aboutit pas à une dégradation effective, mettre en danger l'environnement est une faute grave, qui mérite d'être sanctionnée.
Nous en venons à trois amendements identiques, n° 3169 et suivants, tendant à supprimer l'article 67, sur lesquels je suis saisi par le groupe Les Républicains d'une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
Ces amendements de suppression n° 3169 de M. Marc Le Fur, 5891 de M. Julien Aubert et 6918 de Mme Mathilde Panot sont défendus.
La parole est à M. Erwan Balanant, rapporteur de la commission spéciale pour le titre VI, pour donner l'avis de la commission.
Je répondrai rapidement, parce que la ministre a bien exposé les enjeux de l'article 67. Madame Panot, l'écocide n'y figure pas. Vous avez argumenté sur une notion qui n'apparaîtra qu'à l'article 68.
Je me suis exprimée sur le titre VI puisque nous commençons son examen.
M. Aubert a fait de même, ce qui a abouti à faire de vos interventions une sorte de discussion générale du titre VI, qui présente l'avantage de bien cadrer les débats à venir. Néanmoins, je vous répondrai à mesure de l'examen du texte.
Sur les amendements de suppression, l'avis est bien entendu défavorable.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 60
Nombre de suffrages exprimés 55
Majorité absolue 28
Pour l'adoption 6
Contre 49
Je suis saisi de sept amendements, n° 77 , 3806 , 4692 , 4693 , 711 , 3840 et 7091 , pouvant être soumis à une discussion commune.
Sur les amendements n° 3806 et 4692 , qui sont identiques, je suis saisi par le groupe UDI et indépendants d'une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
L'amendement n° 77 de Mme Delphine Batho est défendu.
La parole est à M. Christophe Naegelen, pour soutenir l'amendement n° 3806 .
Il s'agit de modifier le code pénal et de créer un délit de mise en danger grave et délibérée de l'environnement, inspiré du délit prévu à l'article 223-1 de ce même code.
Sachant que les articles 67, 68 et 69 tendent à modifier le code de l'environnement et le code des transports, et non le code pénal, les dispositions qu'ils contiennent ne s'appliqueraient pas à Wallis-et-Futuna, ni en Nouvelle-Calédonie, ni en Polynésie française. Je défends cet amendement au nom de mes collègues Philippe Dunoyer, Philippe Gomès et Nicole Sanquer, députés de Nouvelle-Calédonie et de Polynésie française, afin d'inviter l'État et les collectivités du Pacifique à travailler ensemble à des dispositifs similaires, afin de renforcer l'arsenal juridique concourant à préserver l'environnement.
Vous le savez, madame la ministre, la biodiversité du Pacifique est particulièrement riche, il faut tout mettre en œuvre pour assurer sa préservation.
Il vise à pallier une imprécision du texte quant à son champ d'application. La définition même du risque comporte une incohérence, puisqu'une durée de dix ans est spécifiée, alors que le dommage n'est pas avéré. De même, la peine encourue est exagérée, puisqu'elle est la même que si l'atteinte s'était concrétisée.
L'amendement tend donc à modifier la rédaction de l'article, afin de créer un véritable délit général de mise en danger de l'environnement, autonome du droit administratif.
L'amendement n° 7091 de Mme Souad Zitouni est défendu.
Quel est l'avis de la commission sur les amendements en discussion commune ?
Monsieur Naegelen, je crois que vous n'avez pas défendu le bon amendement.
L'application du droit est prévue et ne soulève pas de difficultés. Dans une certaine mesure, le texte entrera en vigueur suivant les procédures habituelles, qui sont effectivement spécifiques pour les DOM et les TOM.
Dans les autres amendements de la discussion commune, vous proposez une rédaction plus générale…
Elle est plus ambitieuse, peut-être, on pourrait en discuter. Le champ d'application est certainement plus vaste. La rédaction perd ainsi en précision et tend à devenir moins sécurisante pour les entreprises. Le titre VI a deux enjeux. D'abord, il faut mieux protéger l'environnement. Nous avons tous à l'esprit la nécessité de punir les personnes qui « trichent et polluent ». En même temps, il faut que le droit autorise les acteurs économiques à développer leurs projets, s'ils respectent les règles. À cet égard, certaines des dispositions que vous proposez me semblent quelque peu disproportionnées, notamment les peines encourues, qui sont supérieures à celles prévues pour la mise en danger de la vie d'autrui. On peut en discuter, mais le sujet mérite à tout le moins qu'on y réfléchisse.
Avis défavorable sur l'ensemble des amendements.
Avis défavorable. Les amendements en discussion commune visent tous à créer un délit autonome de mise en danger de l'environnement. Certains tendent également à appliquer le régime procédural de la criminalité organisée pour cette infraction.
La notion de dégradation substantielle de l'environnement nous semble moins précise et adaptée que celle d'atteinte grave et durable. L'article 67 du projet de loi prévoit que sont considérées comme durables des atteintes susceptibles de durer plus de dix ans, afin de garantir la sécurité juridique des dispositions.
Ensuite, il paraît excessif d'appliquer le régime de la criminalité organisée, s'agissant d'un délit pour lequel la procédure serait disproportionnée : celle-ci prévoit notamment des perquisitions dérogatoires et une procédure d'infiltration.
Enfin les amendements identiques qui feront l'objet d'un scrutin public prévoient que les personnes morales reconnues coupables du nouveau délit encourront pour certaines des peines prévues à l'article 131-39 du code pénal, or l'article L. 173-8 du code de l'environnement disposent que les personnes morales encourent déjà ces peines, parmi lesquelles figure notamment l'exclusion des marchés publics. Ce point est satisfait, c'est pourquoi les amendements en question pourraient être retirés.
Monsieur le rapporteur, je n'ai pas votre expertise, et je n'ai pas travaillé autant que vous sur ce sujet. Vous me direz si je me trompe. Si le code des transports et le code de l'environnement ne s'appliquent pas dans les DOM et les TOM, ce n'est pas le cas du code pénal. C'est la raison pour laquelle l'amendement n° 3806 vise ce dernier code afin que les mesures dont nous parlions entrent en vigueur outre-mer. L'étude d'impact précise clairement que les outre-mer sont exclus du dispositif.
Vous faites écho à des amendements que votre groupe avait déposés en commission, défendus en particulier par M. Benoit, qui visaient l'application automatique dans les DOM et les TOM. L'objectif est juste, il faut appliquer ces mesures dans les territoires concernés. L'article 74 de la Constitution définit en effet un statut spécifique raison pour laquelle les textes que nous examinons traitent toujours spécifiquement de ces territoires. En l'occurrence, les dispositions du texte s'y appliqueront.
Les textes n'entrent pas immédiatement en vigueur dans les collectivités d'outre-mer : il faut qu'elles adoptent préalablement des mesures identiques. On peut prendre l'exemple de Wallis-et-Futuna qui a été citée, où le code pénal ne s'applique pas non plus directement. Nous partageons évidemment l'objectif de rendre les dispositions du texte applicables aussi rapidement que possible dans ces territoires. Nous discutons avec les collectivités concernées des moyens de leur assurer le même niveau de protection environnementale qu'en métropole.
Je veux seulement apporter une précision à l'intervention du rapporteur. J'ai effectivement commis un abus de langage : les mesures s'appliquent dans les départements et régions d'outre-mer, mais pas dans les collectivités d'outre-mer que sont Wallis-et-Futuna, la Nouvelle-Calédonie et la Polynésie française, comme cela est précisé à la page 645 de l'étude d'impact. L'amendement n° 3806 de M. Dunoyer, député de Nouvelle-Calédonie, est un amendement d'appel, qui vise à demander au Gouvernement de travailler avec les collectivités concernées, afin que le droit s'y applique également. Leur biodiversité est un trésor, qu'il est nécessaire de protéger. Nous espérons que ce débat aura des suites et que le Gouvernement travaillera en ce sens avec ces collectivités.
L'amendement de notre collègue Dunoyer, député de Nouvelle-Calédonie, était un amendement d'appel invitant le Gouvernement à travailler avec les collectivités de Wallis, Wallis-et-Futuna, la Nouvelle-Calédonie et la Polynésie française, de façon à ce que le droit s'y applique aussi, car la biodiversité dont elles disposent est un véritable trésor, qu'il est nécessaire de protéger. Espérons que le Gouvernement travaille avec ces collectivités pour protéger une telle biodiversité.
J'ai une question plus générale que j'avais posé cinq fois en commission avant que le rapporteur finisse par me répondre – Mme la ministre n'a toujours pas réagi. Les dispositions de l'article 67 et des articles suivants s'appliqueront-elles à une entreprise de droit français, ayant son siège social en France, qui déciderait de fermer tout ou partie de son site, pour produire à l'étranger, hors Union européenne par exemple, puis de réimporter ensuite sa production en France ? Elle bénéficierait des normes environnementales moins contraignantes d'un autre pays, créant une pollution nouvelle qui aurait évidemment un impact car nous vivons tous sur la même planète. Un tel effet d'extraterritorialité est-il possible ?
Si une infraction est commise sur le territoire français, le droit français s'applique. Si une entreprise a son siège social en France et commet une infraction sur un territoire étranger, l'infraction se situant sur le territoire étranger, c'est la justice de ce territoire qui s'appliquera.
Il existe parfois des accords internationaux avec certains pays, permettant de juger une personne en France, alors que le délit s'est produit dans le pays étranger, mais cela n'est pas toujours le cas. Il est logique que le jugement ait lieu dans le pays de l'infraction, cela relève de la souveraineté des pays.
Vous ne répondez pas à ma question, sans doute mal posée, que je reformule. Si, par exemple, une cimenterie située à côté de Marseille, dans ma circonscription, ferme en totalité ou en partie, pour produire de l'autre côté de la Méditerranée dans un pays dont elle respecte les règles, mais qu'elle crée une nouvelle pollution au nord de la Méditerranée, dans les Bouches-du-Rhône, qu'en sera-t-il ?
Non, vous n'avez pas répondu à cette question. Les entreprises sont poussées à la délocalisation, car elles prendront beaucoup moins de risques en s'installant hors de l'Union européenne.
Il me semble, monsieur Lambert, que j'ai répondu clairement sur le principe. M. Aubert a eu raison de relever la complexité des différents accords internationaux en matière de justice.
Votre intervention porte sur la notion de crime d'écocide, car ce que vous décrivez se situe au-delà du simple délit. S'il existe une telle volonté délibérée de polluer massivement, cela nous invite à réfléchir à la notion de crime d'écocide, ce qui ne peut se faire qu'au niveau d'un tribunal pénal international, avec des accords supranationaux et extranationaux.
La réflexion l'écocide ne saurait être uniquement française, c'est la raison pour laquelle la commission spéciale a validé le principe d'un rapport sur l'action diplomatique de la France sur ce point.
Si les dispositions dont nous discutons concernent le territoire national, nous défendons des propositions équivalentes au niveau de l'Union européenne, dans le cadre de la directive sur la justice environnementale, afin d'aboutir à une harmonisation. En outre, les traités bilatéraux et les accords commerciaux permettent de conditionner les échanges, selon nos ambitions en matière environnementale.
Puisque nous ne pouvons pas d'aller à l'encontre de la souveraineté des États, ce qui est normal, il nous revient d'aller le plus loin possible dans notre législation, afin d'être des éclaireurs et de montrer l'exemple pour les autres. C'est ce que nous sommes en train de faire.
L'amendement n° 77 n'est pas adopté.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 70
Nombre de suffrages exprimés 70
Majorité absolue 36
Pour l'adoption 12
Contre 58
L'amendement n° 4693 n'est pas adopté.
L'amendement n° 7111 est retiré.
L'amendement n° 3870 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
J'aurais bien voulu, mais en temps législatif programmé, ce n'est pas possible !
Ils visent à prendre en compte les notions de pollution de l'air, de l'eau, mais également la pollution des sols.
Un tel élargissement pourrait être pertinent, mais il faut se donner le temps de mesurer l'effectivité du présent dispositif, pour ensuite voir comment l'adapter. Nous pourrions, certes, le faire dès maintenant, mais il est préférable de ne pas aller trop vite, pour ne pas risquer de tout compromettre.
Nous sommes en train de transformer l'écosystème juridique en matière de droit de l'environnement : la loi relative au parquet européen, à la justice environnementale et à la justice pénale spécialisée permettra la création de pôles judiciaires spécialisés. Laissons-leur le temps de mettre en place une jurisprudence et de gérer les contentieux. Avis défavorable.
Je partage l'avis du rapporteur. Quant à la pollution des sols, elle est déjà couverte avec le délit de mise en danger par la pollution des eaux superficielles,…
…à l'origine d'une grande partie de la pollution des sols. La pollution par les déchets est aussi désormais prise en compte. Vos propositions sont donc en partie déjà satisfaites, et pour le reste, à la suite de M. le rapporteur, je dirai que nous avançons en marchant.
Je veux bien que nous fassions des petits pas, et je suis heureuse d'entendre Mme la ministre sur la pollution des sols. Je rappelle cependant que nous avons besoin de grands pas sur cette question, notamment en Martinique et en Guadeloupe, où les sols sont pollués par la chlordécone, nous empoisonnant pour les 500 ans à venir.
Applaudissements sur les bancs du groupe FI. – M. Gérard Leseul applaudit également.
L'amendement n° 5654 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
Il vise à supprimer la notion d'atteinte grave et durable à l'environnement, car elle n'est pas suffisamment précise et risque de faire l'objet de discussions d'appréciation juridique.
D'autre part, suite à la suppression de 15 % des effectifs du ministère de l'écologie et de ses opérateurs depuis 2017, se pose la question de savoir qui va contrôler le caractère de gravité des atteintes à l'environnement et apprécier les situations. Il faudrait surtout octroyer davantage de moyens à la prévention des atteintes à l'environnement, ce qui serait plus judicieux que de se borner à constater les dégâts.
À cet égard, vous ne pouvez pas utiliser l'argument – que vous avez avancé précédemment concernant la DGCCRF – du manque de moyens de contrôle et de prévention pour limiter nos ambitions politiques. Il est nécessaire de renforcer les effectifs de l'OFB – Office français de la biodiversité – et de l'ONF – Office national des forêts –, afin que l'État assume ses responsabilités. Sinon, nous resterons au stade de l'incantation et de la communication, comme cela est actuellement le cas.
Mme Mathilde Panot applaudit.
Sur les amendements identiques n° 4330 et 6255 , je suis saisi par le groupe Les Républicains d'une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
La discussion commune se poursuit : les amendements n° 5309 de Mme Cécile Untermaier, 614 de M. Loïc Dombreval et 6331 de Mme Frédérique Tuffnell sont défendus.
La parole est à Mme Souad Zitouni, pour soutenir l'amendement n° 7085 .
Il vise d'une part à substituer aux mots « grave et durable », les mots « non négligeable » ,
Mme Delphine Batho applaudit
qui figurent à l'article 1247 du code civil, s'agissant de la réparation du préjudice écologique, dans un souci de cohérence. Cet amendement a été élaboré avec France nature environnement.
Il vise d'autre part à supprimer l'alinéa 10 qui précise que les atteintes durables sont celles « susceptibles de durer au moins dix ans ». Je ne sais pas comment déterminer cette durée.
L'amendement n° 5653 de Mme Annie Chapelier est défendu.
Quel est l'avis de la commission sur les amendements en discussion commune ?
Revenons au contexte et aux principes qui régissent notre droit de l'environnement, sans faire un cours docte, ce dont je serais incapable, le droit de l'environnement étant tellement complexe qu'il faudrait plus d'un mandat…
…pour l'appréhender correctement et pour le comprendre.
Aujourd'hui, vous avez des ICPE et des installations, ouvrages, travaux et activités ayant une incidence sur l'eau et les milieux aquatiques (IOTA). Elles sont d'une part soumises à autorisation, d'autre part contrôlées. Ici, nous renforçons des sanctions qui existent déjà pour ceux qui enfreignent leurs autorisations. Un contrôle administratif existe également, et c'est toute la complexité du droit de l'environnement : il est articulé entre le droit administratif des autorisations, et de leur contrôle, et la justice. En cas de non-respect, une astreinte est prononcée et un délai vous sera donné pour vous mettre aux normes. Si vous ne respectez pas ce délai, on bascule vers le contentieux judiciaire.
Mais il y a bien deux niveaux : dépasser un seuil n'est pas la même chose que de prendre un risque énorme – on vous enjoint de rebâtir une station d'épuration, et vous ne le faites pas, par exemple. Si nous supprimons les termes « grave et durable », le petit débordement…
C'est là toute la différence : il ne sera pas grave et durable ; il sera substantiel.
Si nous supprimons ces termes, n'importe quoi et tout pourra être sanctionné. Ce serait déséquilibré, et cela poserait un problème de sécurité juridique pour les acteurs économiques. Or je veux que ceux-ci puissent entreprendre, créer des outils de production – en respectant des règles que nous nous fixons.
Nous reparlerons tout à l'heure du seuil des dix ans puisque je m'exprimerai sur les amendements qui visent à l'abaisser. J'avais, vous le savez, proposé à la commission spéciale de le supprimer, mais cette dernière en a décidé autrement, et mon rôle de rapporteur est de respecter son choix.
Avis défavorable sur l'ensemble des amendements.
J'ajoute aux arguments du rapporteur que, si nous supprimons les termes « grave et durable », nous risquons de créer une insécurité juridique en élargissant considérablement la portée de l'article, qui pourrait en devenir difficile à appliquer.
Madame Taurine, ce sont le plus souvent les inspecteurs de l'environnement qui constatent ce genre d'atteintes.
Madame Zitouni, vous faites référence au « préjudice écologique », que je connais bien, puisqu'il a été créé par la loi du 8 août 2016 pour la reconquête de la biodiversité, de la nature et des paysages. Mais il s'agit là de réparer un dommage effectivement causé à la nature : c'est différent de l'article 67 dans lequel il n'est pas question de dommage, mais de mise en danger. Le rapprochement des deux notions pourrait créer des incompréhensions qui me paraissent peu favorables au développement du droit de l'environnement.
Avis défavorable.
Je voudrais vous demander de revenir sur cette notion de « durable ». Je prends deux exemples, tirés de documents que m'a fait parvenir le CEDRE, le centre de documentation, de recherche et d'expérimentations sur les pollutions accidentelles des eaux, qui surveille les pollutions marines à Brest. Nous avons connu au cours des cinquante dernières années deux catastrophes majeures, très différentes l'une de l'autre. Il y a vingt ans, l'Erika a déversé du fioul lourd qui a été récupéré par nappes ; les conséquences n'ont duré que – si j'ose dire – deux ans et les parcs à huîtres, par exemple, ont pu être rouverts en 2001. Il y a cinquante ans, l'Amoco Cadiz a déversé du fioul bien plus léger, mais la pollution a duré plus de dix ans, par exemple dans certains marais des Abers. Ces pollutions maritimes sont probablement les catastrophes environnementales qui durent le plus longtemps. Pouvez-vous donc préciser vos propos, monsieur le rapporteur ? Quel est le bon équilibre ?
Si nous supprimons les termes « grave et durable », nous retrouvons des infractions qui sont dès aujourd'hui condamnables. Je ne veux pas laisser croire que si une atteinte n'est pas grave et durable, il ne se passe rien ! Il existe des amendes administratives et des infractions pénales. Nous sommes en train d'établir une distinction, de créer une nouvelle gradation pour ces délits plus graves. Si nous ne distinguons pas, nous faisons une bêtise !
Monsieur Pahun, je ne connais pas assez bien le cas de l'Erika pour savoir s'il y avait une mise en danger de l'environnement. Nous parlerons des pollutions constatées à l'article 68. Ici, il s'agit bien de mise en danger, de fautes commises en amont, mais pas de la catastrophe qui en serait la conséquence.
Je voudrais préciser que l'on entend par atteintes « durable » au-delà du temps écoulé. Il s'agit des atteintes à la santé, aux sols et aux eaux souterraines – car les atteintes aux sols et aux eaux souterraines demeurent tant qu'aucune dépollution n'est intervenue.
M. Aubert a parlé de « punition préventive ». Ce n'est pas cela. L'enjeu, c'est de construire les bons outils. En matière d'environnement, on peut bien punir autant qu'on veut, une fois que la pollution a eu lieu, il est trop tard pour intervenir. C'est tout le drame contre lequel nous luttons avec ce texte mais aussi avec la création de pôles judiciaires spécialisés et en articulant mieux le droit de l'environnement, le droit administratif et le droit pénal. L'idée, c'est d'éviter les pollutions : oui, monsieur Aubert, la prévention est bien l'enjeu principal. Voilà pourquoi ce délit de mise en danger de l'environnement est important. Les règles doivent être précises et claires, et il ne peut pas y avoir d'impunité ; les entreprises le savent, et sans doute plus de 90 % d'entre elles agissent d'ailleurs sérieusement. Si une entreprise, après des astreintes, après des avertissements, continue à prendre un risque, il faut la sanctionner.
Encore une fois, on a beau essayer de réparer une pollution, on n'arrivera jamais à l'effacer complètement.
C'est après l'affaire de l'Amoco Cadix que l'action de l'État en mer (AEM) a été créée : voilà un service de sécurité français pour toute l'Europe qui est assez fantastique. Mais nous ne sommes pas allés assez loin : rappelez-vous, l'Erika n'avait qu'une simple coque, quand il aurait fallu une double coque pour transporter ces produits dangereux. De cette deuxième catastrophe est venue une autre évolution des règles de sécurité, au bénéfice de l'environnement.
S'agissant de l'atteinte « durable » à l'environnement, le texte mentionne une durée de dix ans. Comment peut-on prévoir qu'une atteinte va durer dix ans ? C'est impossible ! Rappelez-vous Lubrizol : même les scientifiques sont incapables aujourd'hui d'évaluer les conséquences de l'incendie sur la qualité de l'air. Pourquoi cette durée de dix ans ? Expliquez-nous ! J'ai besoin de comprendre. J'ai peur que, tel qu'il est rédigé, cet article ne soit pas applicable : il sera impossible de vérifier et de juger qu'une atteinte est durable. Voilà pourquoi notre amendement n° 6331 fait référence à une atteinte « non négligeable ».
Mme Delphine Batho applaudit.
Mme Tuffnell a parfaitement résumé la situation, et c'est bien ce qui montre que cet article n'est que de l'affichage.
Monsieur le rapporteur, j'ai bien compris votre logique, et j'en déduis que vous serez favorable à mon amendement n° 7169 qui précise que « lorsque ces faits peuvent faire l'objet d'une mise en demeure prononcée par l'autorité administrative compétente, l'infraction ne peut être constituée qu'après l'expiration du délai de mise en conformité prévu par cette mise en demeure ». Ainsi, les étapes se succèdent correctement.
Enfin, je ne retrouve pas dans votre texte la question de l'intention, et de sa différence avec la négligence. De mon point de vue, elles ne doivent pas, en amont, être traitées de la même manière. J'ai peur que cet affichage ne serve qu'à faire fuir encore un peu plus, à l'heure où l'on parle pourtant de réindustrialisation du pays, des entrepreneurs qui ne sont pas des délinquants par nature mais qui essayent de faire leur travail dans un environnement juridique complexe. Et le ministre de la justice n'est même pas présent pour nous apporter ses lumières sur l'état du droit !
Je peux donner un exemple : imaginons une personne publique ou privée, disons un entrepreneur peu scrupuleux, qui enterre des bidons de produits chimiques. Il n'y a pas encore de pollution, mais il y a bien un risque qu'à terme, ces bidons s'éventrent et que les produits chimiques se répandent dans le sol et le polluent. Or on sait que ces pollutions durent : sans dépollution, elles restent. Voilà typiquement une atteinte grave et durable, qui pourra être réprimée par cet article.
Les infractions aux règles en matière de déchets sont mentionnées à l'article 67 !
Nous demandons également la suppression de la mention d'une durée de dix ans – suppression à laquelle vous êtes favorable, monsieur le rapporteur, je crois. On ne peut pas attendre dix ans pour constater la pollution d'une rivière, par exemple ! Revenons sur la pollution causée par l'Erika : avec votre texte, il n'y aurait pas eu de condamnations.
Mais si ! Dans le cas de l'Erika, il y a eu une pollution, justement !
L'amendement n° 5653 n'est pas adopté.
L'amendement n° 7170 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
Je cite mon collègue Bruno Millienne qui a dit en commission spéciale que lorsque Julien Aubert et Guillaume Kasbarian étaient d'accord, il écoutait avec attention.
M. le rapporteur général sourit.
Ainsi, j'espère que Mme le ministre nous écoutera avec attention et que M. le rapporteur, qui nous a expliqué qu'il était d'accord avec ma logique, donnera un avis favorable sur le fait que la constatation de l'infraction doit intervenir après l'expiration du délai.
La parole est à M. Guillaume Kasbarian, pour soutenir l'amendement n° 6255 .
Je constate que M. Aubert est taquin car il a demandé un scrutin public sur ces amendements identiques. Je partage son analyse sur ce sujet et j'ai quelques craintes sur la caractérisation de l'intentionnalité des entreprises visées. Le fait d'attendre l'expiration de la mise en demeure avant de lancer la procédure serait de nature à rassurer les acteurs, notamment quant à cette caractérisation. Comme en commission spéciale, je rejoins la position de M. Aubert sur ce sujet.
L'amendement n° 7169 de M. Julien Aubert est défendu.
J'informe l'Assemblée que, sur l'article 67, je suis saisi par le groupe La République en marche d'une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
Quel est l'avis de la commission sur les trois amendements ?
J'essaie de vous donner une explication claire car c'est un sujet important. L'alinéa 2 de l'article 67 crée une circonstance aggravante des délits prévus par les articles L. 173-1 et L. 173-2 du code de l'environnement.
Le I de l'article L. 173-1 sanctionne le fait d'exploiter une installation sans autorisation, agrément, homologation ou certification. Dans le cas où le préfet aurait la faculté de procéder à une mise en demeure de se conformer aux obligations légales et qu'il ne le ferait pas, votre amendement aurait des conséquences redoutables : aucune infraction ne serait constituée, alors même que le risque existe. Par son inaction – on peut toujours imaginer le pire –, le préfet bloquerait l'action du juge, ce qui serait inacceptable. Cette situation pourrait engendrer des inégalités de traitement importantes.
En outre, les délits définis au 5
J'espère que vous avez compris la logique, même si, je vous l'accorde, ce n'est pas simple.
Mme la ministre sourit.
Après ces explications claires, j'émets un avis complètement défavorable sur ces amendements.
Si M. le rapporteur a été très clair d'un point de vue technique ,
Sourires sur plusieurs bancs
j'essaierai de l'être encore plus. Nous pouvons tenter d'y parvenir.
Il y a plusieurs situations. La première est déjà satisfaite car dans le cadre de la plupart des infractions aggravées par la mise en danger de l'environnement, l'autorité administrative est tenue de mettre en demeure le contrevenant, ce qui est le cas pour les exploitants d'ICPE. Votre amendement est donc pleinement satisfait puisqu'il faut attendre l'expiration de la mise en demeure pour que la sanction soit prononcée.
Pour les autres infractions, une mise en demeure préalable n'est pas nécessaire pour des raisons simples : dans le cas de la poursuite d'une activité malgré une mesure d'arrêt, il paraît évident d'imposer une sanction sans mise en demeure.
Autre situation : l'exploitation sans autorisation préalable. Lorsqu'une demande de mise à l'arrêt n'a pas été respectée ou que les exploitants n'ont pas les autorisations requises, on peut considérer sans risque que l'intentionnalité est caractérisée. C'est une évidence : ils exercent une activité alors qu'ils ne disposent pas d'une autorisation d'exploiter, donc ils commettent intentionnellement une infraction.
Par ailleurs, ces situations font, pour la plupart, l'objet d'une mise en demeure préalable, sauf les cas de danger immédiat qui nécessitent des mesures d'urgence.
J'espère avoir complètement rassuré mes anciens collègues : il n'y a aucun risque que quelqu'un commette une bêtise sans intention de le faire. Dans ces cas précis, soit on est mis en demeure, soit on exploite une activité alors que l'on devrait arrêter puisque cela a clairement été notifié.
Par conséquent, j'espère que toutes ces précisions vous conduiront à retirer vos amendements ; à défaut, j'émettrai un avis défavorable.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 69
Nombre de suffrages exprimés 69
Majorité absolue 35
Pour l'adoption 5
Contre 64
Avec M. Kasbarian, nous allons fonder une association : elle comptera cinq membres, mais pas beaucoup de députés de LaREM !
L'amendement n° 7169 n'est pas adopté.
Les deux séries d'amendements identiques n° 5655 de Mme Annie Chapelier et 6917 de Mme Mathilde Panot d'une part, n° 624 de M. Loïc Dombreval, 5077 de Mme Cécile Untermaier et 7086 de Mme Souad Zitouni d'autre part, pouvant faire l'objet d'une discussion commune, sont défendus.
Les amendements n° 5657 de Mme Annie Chapelier, 5254 de Mme Cécile Untermaier et 5656 de Mme Annie Chapelier, pouvant faire l'objet d'une discussion commune, sont défendus.
J'ai annoncé, tout à l'heure, que je m'exprimerai sur ces amendements. Vous le savez, j'avais déposé, en commission, des amendements visant à supprimer la durée de dix ans. À titre personnel, je continue de penser qu'il ne faudrait laisser l'appréciation relative à l'atteinte durable au juge et ne pas préciser de délai, mais la commission spéciale a fait un autre choix. En tant que rapporteur, j'en prends acte et j'émets en conséquence un avis défavorable. Nous verrons comment les choses évolueront au cours de la navette.
Je me rappelle très bien des amendements que vous aviez défendus en commission spéciale et que j'avais d'ailleurs votés. Vous aviez raison. Sinon, il faut assumer que des scandales écologiques très importants passent à travers les mailles du délit aggravé, puis de celui d'écocide que vous souhaitez créer. Non seulement, cette disposition n'est pas à la hauteur des enjeux, mais en plus, cette durée risque d'assurer une impunité aux pollueurs.
J'espère que vous donnerez tout à l'heure un avis favorable sur notre amendement et je ne comprends pas pourquoi vous êtes défavorable à celui-ci. Après tout, nous ne sommes pas liés par les débats en commission spéciale : nous sommes dans l'hémicycle, nous sommes législateurs et nous pouvons décider collectivement. Il faut supprimer cette durée car elle restreindra le champ d'application de la mesure de manière très stricte.
Madame Panot, lorsque vous êtes rapporteur, vous vous exprimez au nom de la commission, vous donnez sa position. Je suis dans mon rôle.
Sur le fond, il ne s'agit pas d'une « atteinte », mais d'une mise en danger. Le juge aura la liberté de considérer qu'elle dure dix ans puisque, de toute façon, il n'y aura pas eu de pollution. Dès lors, on ne peut pas dire que le juge n'aura pas une liberté de manœuvre : le juge pourra parfaitement considérer, en son âme et conscience, que l'atteinte potentielle aura duré dix ans et la personne pourra être condamnée. Ainsi, ce n'est pas non plus un drame absolu.
La parole est à Mme Josette Manin, pour soutenir l'amendement n° 4541 .
Comme nous évoquons la notion de durée, permettez que je vous empoisonne trente secondes avec la question du chlordécone. Il a fallu une trentaine d'années pour connaître les premiers effets négatifs de ce produit au niveau écologique, sanitaire et économique. Par ailleurs, les données scientifiques sur les conséquences néfastes de son utilisation ne sont pas encore totalement connues, alors que l'on peut affirmer avec certitude que les sols et les milieux aquatiques sont pollués pour 600 ans.
L'amendement vise à prendre en compte la durée de ce type de pollution qui peut durer plus d'une centaine d'années et qui doit pouvoir faire l'objet de poursuites devant un tribunal.
Applaudissements sur les bancs du groupe FI. – M. Gérard Leseul et Mme Delphine Batho applaudissent également.
Tout d'abord, par rapport aux débats que nous avons eus sur les crimes sexuels et qui ont conduit à augmenter leur délai de prescription,…
…cent ans ne semble pas raisonnable.
Ensuite, la notion de prescription pourrait pertinement être discutée à l'article 68 mais elle ne peut s'appliquer à l'article 67. Gardez à l'esprit que ce dernier article s'applique lorsque la pollution n'a pas eu lieu. Le délit de mise en danger de l'environnement vise précisément à éviter que le dommage se réalise. Il n'y a pas lieu de décaler la date de prescription après la réalisation du dommage puisqu'il n'y a pas eu de dommage.
Madame Batho, nous examinons l'article 67 qui est relatif à la mise en danger : la pollution n'a pas eu lieu. Est-ce que tout le monde l'a bien compris ? S'il n'y a pas de pollution, aucun délai de prescription ne peut précisément s'appliquer la concernant.
Sourires.
L'amendement n° 4541 , repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.
L ' amendement n° 5365 , repoussé par la commission et le Gouvernement n'est pas adopté.
Les amendements n° 5391 de Mme Cécile Untermaier, 6328 de Mme Frédérique Tuffnell et 7087 de Mme Souad Zitouni, pouvant faire l'objet d'une discussion commune, sont défendus.
L'amendement n° 7087 est retiré.
Il est défendu. Je vais changer de tactique. Je ne présenterai plus mes amendements, dans l'espoir qu'ils soient adoptés.
Sourires.
Il est défavorable. En commission spéciale, je vous avais expliqué, monsieur Aubert, qu'en introduisant la notion d'« avantage tiré de la commission de l'infraction », nous reprenions une disposition existant dans le droit financier. Je tiens à insister sur le fait qu'il s'agit d'une belle avancée, car les peines prononcées pourront être très lourdes et proportionnelles aux méfaits commis.
Pour reprendre l'exemple que j'ai précédemment utilisé, quelqu'un qui tricherait et déciderait de ne pas construire une station d'épuration afin d'économiser plusieurs millions d'euros devra, le jour où il se sera fait épingler, s'acquitter d'une amende trois fois supérieure à l'avantage qu'il a tiré de sa tricherie.
Cette mesure me semble intéressante et plus satisfaisante que les amendes fixées suivant le chiffre d'affaires de l'entreprise, que certains codes, comme le code de l'environnement, prévoient pour certaines infractions. Je le répète, l'introduction de la notion d'« avantage tiré de la commission de l'infraction » me semble constituer une belle avancée.
L'amendement n° 7171 , repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.
Sourires.
Les amendements identiques n° 632 de M. Loïc Dombreval, 5211 de Mme Cécile Untermaier et 7089 de Mme Souad Zitouni sont défendus.
L'amendement n° 5269 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
L'amendement n° 2033 de M. le rapporteur est un amendement de coordination.
L'amendement n° 2033 , accepté par le Gouvernement, est adopté.
L'amendement n° 234 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 69
Nombre de suffrages exprimés 67
Majorité absolue 34
Pour l'adoption 58
Contre 9
L'article 67, amendé, est adopté.
Nous en venons aux amendements portant article additionnel après l'article 67.
La parole est à M. Gérard Leseul, pour soutenir l'amendement n° 3832 .
Je présenterai en même temps, par anticipation, l'amendement n° 3834 qui le suit. Ils visent à intégrer d'une manière ou d'une autre la notion de « limites planétaires » dans le code de l'environnement. Cette référence me semble en effet indispensable, car ces limites ne doivent pas être dépassées si nous ne voulons pas compromettre les conditions favorables de notre propre existence et de l'ensemble des écosystèmes.
Je ne m'attarde pas davantage sur cette question dont nous avons déjà discuté en commission spéciale. Peu importe que nous adoptions l'amendement n° 3832 ou le n° 3834, l'important est d'introduire une référence aux limites planétaires dans le texte.
Les limites planétaires sont un concept très intéressant. Vous savez que c'est mon avis et je crois qu'il est partagé par tous dans la majorité, à commencer par Mme la ministre. Les limites planétaires sont intéressantes, car elles disent certaines choses de notre rapport à la nature et des limites aux atteintes que nous pouvons lui porter, car au-delà de celles-ci nous mettons en danger la pérennité même de l'espèce humaine et de la planète.
Cela étant, et ce n'est pas faute d'avoir essayé, je ne suis pas parvenu à articuler cette notion avec notre droit, car elle est fluctuante. Dans votre amendement, vous dressez la liste des limites planétaires, mais rien ne nous dit que, demain, un chercheur n'affirmera pas qu'il existe une nouvelle limite importante et qu'elle manque à cette liste. J'estime donc que si ce concept doit nous guider politiquement, il n'est aujourd'hui pas déclinable dans notre droit. Je ne vois sincèrement pas comment nous pourrions introduire une définition des limites planétaires, qui ait un caractère opérationnel, dans notre droit sans créer d'insécurité juridique.
Je répète mon attachement à ce concept, qui doit nourrir notre réflexion politique, pour ne pas dire humaniste,…
…mais, en l'état actuel des connaissances scientifiques et de notre droit, il ne me paraît pas transposable juridiquement.
La notion de limites planétaires est structurante pour notre action nationale, mais aussi internationale. Elle fait suite aux réflexions relatives à l'empreinte écologique, qui ont permis de faire comprendre à tous que nous ne disposons que d'une seule planète et que nous la mettons en danger dès lors que nous utilisons plus de ressources qu'elle n'est en mesure de fournir. Cela explique d'ailleurs pourquoi le modèle de développement des pays les plus avancés ne peut être reproduit à l'infini pour l'ensemble des habitants de la planète : les ressources de la planète ne le permettent pas.
Il nous faut donc définir collectivement, à l'échelle de la communauté internationale, notamment lors des échanges que nous aurons à l'occasion des prochaines COP, un modèle de développement permettant à tous les êtres humains – et même à tous les êtres vivants – de vivre correctement, de bénéficier d'un certain confort et de profiter des progrès que nous réalisons, mais sans reproduire les mêmes bêtises écologiques qu'ont malheureusement commises les pays industrialisés.
La notion de limites planétaires est donc très importante, à tel point que les membres de la Convention citoyenne pour le climat ont proposé de l'intégrer dans notre droit. Cela a suscité une grande réflexion, laquelle, M. le rapporteur l'a dit, n'a pas encore abouti. Pour le dire clairement, ce n'est pas encore « mûr » pour que nous l'introduisions dans notre droit.
La réflexion se poursuit néanmoins, notamment dans le cadre de la mission temporaire confiée par le Gouvernement à votre collègue Cécile Muschotti. Mais au stade où nous en sommes, je répète qu'en intégrant ce concept dans notre droit nous créerions davantage d'incertitudes juridiques que nous ne résoudrions de problèmes. Il me semble capital de continuer à travailler, à parler et à sensibiliser sur cette question essentielle, mais, à stade, je suis défavorable à l'introduction de la notion de limites planétaires dans le projet de loi.
L'amendement n° 3832 n'est pas adopté.
Les amendements identiques n° 3880 de Mme Delphine Batho et 7093 de Mme Souad Zitouni sont défendus.
Quel est l'avis de la commission sur ces deux amendements ?
Nous avions discuté de ces amendements en commission spéciale : il serait contreproductif de les adopter. Leur objet est complètement satisfait et inscrire dans le texte les dispositions qu'ils contiennent engendrerait une insécurité juridique pour les contentieux en cours et priverait par surcroît certaines associations du droit d'agir en justice dont elles disposent aujourd'hui au motif qu'elles ne sont pas agréées au titre de la protection de l'environnement. J'étais à l'origine favorable à votre proposition, mais après avoir travaillé sur la question nous avons réalisé qu'il ne fallait surtout pas aller dans cette direction, car ses effets seraient contreproductifs.
L'amendement n° 7093 est retiré.
L'amendement n° 3880 , repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.
L'amendement n° 7092 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
Alors que nous venons de discuter de la durabilité de la pollution – Mme la ministre a pris l'exemple d'une entreprise qui ne respecterait pas les règles –, je souhaite, par cet amendement, aborder la question de l'abandon de produits amiantés. Aujourd'hui, beaucoup de particuliers et d'entreprises peu scrupuleux déposent dans la nature des déchets amiantés, tels que des isolants ou des revêtements comme des plaques en fibrociment, au lieu de les jeter dans une déchetterie. On retrouve ainsi ces déchets sur des chemins ruraux, dans nos campagnes, ou dans les champs des agriculteurs, générant une pollution durable. Pire, nous assistons à un phénomène qui a récemment été pointé du doigt : celui d'annonces publiées sur des plateformes numériques très connues proposant aux particuliers de se débarrasser de leurs produits amiantés. Moyennant quelques euros, ces derniers sont ensuite déversés dans des dépôts sauvages, comme à Carrières-sous-Poissy, où vous vous êtes rendue il y a quelques mois, madame la ministre.
Ainsi, ne pouvant proposer d'interdire ce type d'annonce en ligne, car je me serais heurté à l'article 45 de la Constitution, il me semble néanmoins pertinent de dénoncer ce phénomène en cherchant, par le présent amendement, à alourdir les sanctions encourues pour dépôt sauvage de déchets amiantés.
Nous en avons parlé ensemble, monsieur Dive, et vous savez que je partage votre préoccupation. On ne peut laisser certaines personnes polluer impunément en déposant sauvagement des déchets amiantés, dont nous connaissons les dangers. Toutefois, les sanctions prévues à l'article L. 541-46 du code de l'environnement, relatif à l'abandon et au dépôt de déchets en violation des règles édictées par ce même code et au dépôt sauvage de déchets issus du secteur du bâtiment et des travaux publics, me semblent suffisantes. Cet article prévoit en effet une peine de deux ans d'emprisonnement et de 75 000 euros d'amende. La porter, comme vous le proposez, à trois ans d'emprisonnement et 300 000 euros d'amende me semblerait contraire au principe de proportionnalité des peines, ce qui ferait courir un risque juridique au dispositif.
J'ajoute que ce même article L. 541-46 du code de l'environnement prévoit une peine aggravée de sept ans d'emprisonnement et de 150 000 euros d'amende lorsque l'infraction est commise en bande organisée, ce qui me semble de nature à répondre à votre préoccupation relative aux annonces en ligne.
Enfin, en applications des articles L. 173-8 du code de l'environnement et 131-38 du code pénal, le montant de l'amende peut être quintuplé si l'infraction a été commise par une personne morale. Le quintuple de 150 000 euros, cela représente une somme importante…
Je souhaite simplement rappeler le travail accompli dans le domaine très important de la lutte contre les dépôts sauvages de déchets lors de l'examen du projet de loi relatif à la lutte contre le gaspillage et à l'économie circulaire. À cet égard, madame la ministre, peut-être pourriez-vous nous dire si les décrets d'application des dispositions que nous avons adoptées ont été publiés ?
Je vais retirer mon amendement, car il est vrai que je n'y suis pas allé avec le dos de la cuillère, mais il était important pour moi que la question des débouchés en ligne soit abordée dans l'hémicycle. On a réussi récemment à interdire la vente d'animaux sur les plateformes en ligne, on doit pouvoir interdire, de la même façon les offres de débouchés sauvages pour les matières dangereuses.
Je ne répéterai pas l'éventail des sanctions qui existent déjà et qui me semblent couvrir largement ce problème, au demeurant fort légitime.
Quant à M. Pahun, il a raison de m'interpeller sur la loi AGEC – anti-gaspillage pour une économie circulaire. Pour lutter contre les déchets sauvages, il fallait aussi apporter une réponse à certains professionnels du bâtiment qui n'avaient pas de solution satisfaisante pour gérer leurs déchets – le secteur étant aujourd'hui l'un des plus gros pourvoyeurs en la matière. Le fait de mettre en place une filière à responsabilité élargie du producteur (REP) pour le bâtiment permet d'imposer des obligations, ce qui limitera la quantité de déchets sauvages. Vous voyez qu'il y a une cohérence dans notre action.
Concernant cette REP, je n'ai plus en tête le calendrier, mais je vous le communiquerai après vérification. Nous avons lancé la procédure de consultation. Cela prend du temps, car c'est une REP importante et nous voulons qu'elle soit correctement élaborée. Je peux vous garantir néanmoins qu'elle sera mise en place dans les plus brefs délais.
L'amendement n° 4682 est retiré.
Prochaine séance, cet après-midi, à quinze heures :
Suite de la discussion du projet de loi portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets.
La séance est levée.
La séance est levée à treize heures.
Le directeur des comptes rendus
Serge Ezdra