La PAC laisse déjà une part de compétence aux États membres avec le second pilier, qui définit la politique de développement rural cofinancée par les États. Une PAC à la carte s'esquisse ainsi, les États membres ayant toute latitude pour sélectionner les actions à soutenir.
La réforme de 2013 a accru cette subsidiarité en élargissant la flexibilité au premier pilier : aides couplées à hauteur de 15 %, soutien bonifié aux zones soumises à des contraintes naturelles, paiement redistributif pour apporter une bonification aux exploitations de taille modeste ou encore conditions de mise en œuvre du verdissement.
Enfin, certaines mesures font l'objet d'un encadrement entièrement national : l'indemnité compensatoire de handicap naturel, les aides à l'installation ou encore les mesures agroenvironnementales et climatiques.
Ainsi la PAC crée-t-elle déjà un équilibre entre la définition d'une politique commune et l'adaptation aux spécificités de chaque État membre.
Ne pensez-vous pas que les plans stratégiques remettront en cause cet équilibre et conduiront à un démantèlement progressif de la PAC ? Le risque est grand d'une distorsion de concurrence entre les États membres, en faisant reculer leur ralliement normatif et leurs exigences environnementales. En outre, les plans stratégiques de chaque État membre pourront cibler certaines filières pour les rendre plus compétitives au détriment des autres États membres.
La machine n'est-elle pas en route pour que la PAC prenne la forme d'une politique de cohésion agricole et rurale comptant vingt-sept stratégies agricoles différentes, voire divergentes ? Une fois de plus, l'Union européenne ira à rebours des autres puissances agricoles de taille continentale, comme la Chine et le Brésil, qui continuent d'investir massivement dans des politiques agricoles harmonisées et qui dépensent deux fois plus pour leur soutien à l'agriculture que l'Europe.
Monsieur le ministre, vous disposez de deux minutes pour me dire si vos choix tiendront compte de cette problématique.