Il y a peu de choses à dire sur l'efficacité des aides aux entreprises et la légitimité des dispositifs, n'est-ce pas ? À la fin 2020, les subventions, prêts garantis et autres mécanismes représentaient à la louche entre 150 et 160 milliards d'euros. Ces dispositifs étaient surtout les bienvenus pour les TPE-PME et dans les secteurs d'activité très touchés. Tout cela a permis la sauvegarde du tissu économique, dont témoigne d'ailleurs de manière un peu contre-intuitive la baisse des faillites en 2020 par rapport à 2019.
Mais le vrai sujet, c'est la sortie de crise et les conditions d'extinction des dispositifs. Or l'effort public considérable n'est-il pas déjà sollicité pour être poursuivi, avec en toile de fond votre trajectoire politique qui est la baisse des impôts des entreprises et, dernière en date, la baisse des impôts de production bien sûr qui, elle, relève d'une logique politique « normale », à vos yeux du moins ? Dès lors, nous nous trouvons à nouveau face à une double exigence à laquelle votre ministère et votre gouvernement n'ont absolument pas répondu : d'une part, des contreparties sociales et environnementales aux aides octroyées aux entreprises et, d'autre part – cela a été dit bien au-delà de nos rangs –, une contribution enfin significative des groupes qui n'ont pas souffert de la crise car ils existent, et vous le savez. En effet, un certain nombre de grandes entreprises aidées par des fonds publics n'ont pas sauvegardé leurs effectifs ni, évidemment, ceux de leurs sous-traitants – à cet égard la situation dans les secteurs de l'aéronautique et de l'automobile est flagrante –, et alors que les groupes du CAC 40 ont dégagé 37 milliards d'euros de bénéfices, certes en baisse, – Sanofi : 4,8 milliards, LVMH : 3 milliards, Vivendi : 2,8 milliards – ils vont, et c'est tout de même assez remarquable, puiser dans leur trésorerie pour dégager au total 51 milliards de dividendes aux actionnaires – Saint-Gobain en triple le montant, Veolia le quintuple.
Vous comprenez bien que, dans ces conditions, il existe une forte revendication de blocage des licenciements dans les entreprises, notamment les grandes entreprises qui ont été aidées, et une exigence de contribution des grands groupes qui ont été épargnés et ont même sereinement poursuivi leur itinéraire de profitabilité durant cette crise. Pour les députés communistes, ces revendications sont toujours d'actualité, car les dépenses d'aides considérables ne peuvent continuer d'emprunter la même trajectoire, surtout si elles sont maintenues, parce qu'en fin de compte, cela se traduit par des sacrifices pour d'autres, en l'occurrence pour les salariés et les demandeurs d'emploi.
Vous pourriez me répondre que le salaire moyen a augmenté de cinq points pendant la période. Oui, mais en ont été écartés les travailleurs qui ont été licenciés et qui étaient faiblement rémunérés. Parallèlement, tout indique une pression renforcée sur les salaires. D'ailleurs, les négociations annuelles obligatoires s'annoncent dans un contexte très tendu. Le chômage est en hausse, l'inflation est au plus bas, et tout cela pèsera, dans les mois à venir, sur l'évolution des salaires. Signe des temps, la multiplication des accords de performance s'ajoute aux périodes de chômage partiel qui, de fait, se sont soldées par une baisse du pouvoir d'achat des salariés, le tout sur fond de refus gouvernemental d'intervenir sur les bas revenus salariaux, ce que nous avons dénoncé à plusieurs reprises.
Si vous parvenez encore à épargner le capital d'une année noire – ce dont il s'est chargé lui-même, au reste –, les salariés, eux, ne supporteront pas l'année noire qui leur est réservée au vu de la situation dans les entreprises. Rappelons-le une fois de plus : dans les entreprises, il y a le capital mais aussi le travail !