Intervention de Adrien Quatennens

Séance en hémicycle du jeudi 6 mai 2021 à 15h00
Limitation des impacts négatifs de la publicité — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaAdrien Quatennens :

Madame la ministre, en réponse à ma collègue qui reprenait Proudhon et adaptait sa phrase à la publicité et au viol, vous avez cru bon de citer la formule « tout ce qui est excessif est insignifiant », en l'attribuant à René Char alors qu'elle est de Talleyrand.

On parle souvent du monde d'avant et du monde d'après. Une chose est certaine : la génération à laquelle j'appartiens est au pied du mur, obligée de penser un monde entièrement neuf. Elle devra le faire advenir contre vents et marées, au sens propre comme au figuré, contre la volonté de ceux qui veulent voir se perpétuer l'actuel modèle de développement, contre de nombreux intérêts particuliers.

Il y a des raisons objectives de penser que l'épidémie de covid-19 que vit l'humanité depuis plus d'un an et la mobilisation qu'elle requiert ne sont peut-être qu'une répétition générale. Les scientifiques parlent désormais de l'ère des pandémies, au pluriel, et cela est lié au bouleversement de notre écosystème sous l'effet du changement climatique.

Telle qu'elle est organisée, l'activité humaine menace le seul écosystème compatible avec la vie humaine. Parce qu'il n'y en a qu'un, il y a un intérêt général humain qui doit s'imposer aux intérêts particuliers. La libre poursuite des intérêts particuliers ne pourra pas nous éviter un réchauffement catastrophique du climat et la disparition des espèces qui en découle.

Le changement climatique est commencé. Des seuils d'irréversibilité ont déjà été dépassés. Pendant que le Président de la République et quelques autres veulent faire payer aux Français une dette dont ils ne sont pas responsables, en imposant le retour de l'austérité, la brutale réforme de l'assurance chômage et en faisant revenir par la fenêtre la réforme des retraites, il est une dette plus inquiétante, dont on parle trop peu : la dette écologique.

Depuis les années 1970, cette dette de l'humanité envers la planète se dégrade à un rythme toujours plus soutenu. Désormais, c'est dès le mois d'août que nous entrons en dette écologique. Cela veut dire qu'en huit mois l'humanité consomme l'ensemble des ressources que la Terre peut régénérer en un an. Ceux qui subiront le plus les effets du changement climatique sont ceux qui en sont les moins responsables. Si toute la population mondiale vivait comme on vit aux États-Unis, il faudrait 5 planètes en termes de ressources : il en faudrait 3 pour l'Allemagne et 2,7 pour la France.

La Terre est en surchauffe, or notre modèle de développement est basé sur une croissance infinie dans un monde dont on sait les ressources finies. Nous sommes entrés dans une décennie décisive. La pente est glissante et raide. Nous sommes sur une trajectoire de réchauffement située entre 3 et 5 degrés Celsius. Les phénomènes extrêmes se font de plus en plus fréquents et intenses : inondations, cyclones, gigantesques incendies. La sixième extinction de masse est commencée : en cinquante ans, 68 % des populations de vertébrés ont disparu. L'Arctique se réchauffe deux fois plus vite que le reste du monde, accroissant la montée des eaux. L'insécurité alimentaire progresse : on dénombrait 24,8 millions de déplacés climatiques en 2019 et le quatrième rapport de l'ONU évalue à 280 millions le nombre de personnes qui pourraient avoir à se déplacer sous l'effet de la montée du niveau des océans.

Pour contenir le réchauffement climatique dans la limite acceptable définie par les accords de Paris sur le climat, il nous faut diviser par cinq les émissions de gaz à effet de serre d'ici à 2030. Si nous faisons moins bien, nous franchirons un point de bascule. Ce sera alors un grand saut dans l'inconnu car les conséquences en chaîne du changement climatique et de l'extinction de la biodiversité modifieront radicalement les conditions d'existence des sociétés humaines.

Face à ce constat, le bilan d'Emmanuel Macron est coupable.

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