La régulation de l'impact environnemental de la publicité n'est pas un sujet nouveau. Déjà, en 2008, le Grenelle de l'environnement s'en était saisi, y voyant un enjeu majeur de la démarche écoresponsable. Pourtant, aujourd'hui encore, la publicité nous invite à acheter plus, sans acheter mieux ; elle nous pousse à une surconsommation délétère, même de produits non essentiels. Son influence est mise au service des produits les plus polluants : rien qu'en 2019, les investissements de publicité et de communication des secteurs automobile, aérien et des énergies fossiles étaient estimés, en France, à plus de 5,1 milliards d'euros.
Plus que jamais, la publicité porte sur tout, est présente partout : à la télévision, sur les sites internet, à l'entrée des villes, dans les boutiques, et même dans les transports en commun. Ne nous y trompons pas : cette omniprésence a une incidence sur nos actes d'achat et sur nos représentations sociales. Le spot publicitaire suscite l'envie et influence notre inconscient ; c'est une arme qui peut être dangereuse, une forme de diktat comportemental. Je fais aussi référence ici à la campagne actuelle de recommandation vaccinale dans le contexte de la crise sanitaire.
Je pense que la publicité peut se mettre au service d'un autre modèle de société, plus compatible avec les enjeux environnementaux. C'est d'ailleurs ce que nous demandent nos concitoyens : selon un sondage, neuf Français sur dix estiment que la publicité doit encourager les bons comportements du point de vue de l'environnement.
Nous avons étudié, ces derniers mois, plusieurs textes visant à se saisir de ces enjeux. Le projet de loi climat et résilience, récemment adopté, prévoit plusieurs mesures pour encadrer davantage le secteur publicitaire. Pour le groupe Libertés et territoires, certaines de ces propositions vont dans le bon sens, notamment la lutte contre l'écoblanchiment et l'obligation d'afficher le score carbone dans les publicités. D'autres articles, en revanche, sont purement cosmétiques. L'interdiction de la promotion des énergies fossiles ou la proscription des banderoles tractées sont surtout des mesures de communication. La limitation de la publicité lumineuse a été réduite à peau de chagrin. Quant à l'élaboration de codes de bonne conduite par les acteurs de la publicité, je doute qu'elle ait les effets escomptés.
La présente proposition de loi prend le contre-pied du texte que nous venons d'examiner. Ses auteurs font le constat de l'inefficacité de l'autorégulation du secteur et prévoient une série d'interdictions pour limiter l'impact direct ou indirect de la publicité sur l'environnement. Nous comprenons l'intention mais nous avons quelques doutes sur la méthode employée.
Votre proposition de loi tend ainsi à interdire la promotion d'une longue liste de biens et services ainsi que certains supports de publicité. Nous nous posons plusieurs questions : comment évaluer les publicités alimentaires visant spécifiquement des enfants ou des adolescents ? En restreignant la publicité aux produits alimentaires classés A ou B dans le nutri-score, ne craignez-vous pas d'exclure certains produits du terroir tels que l'huile d'olive ou la crème fraîche ? Ils font pourtant la renommée de notre gastronomie et contribuent au développement économique de nos territoires. Que penser, en outre, de l'interdiction de la publicité pour les téléphones portables ? N'est-elle pas trop restrictive ? Pourquoi interdire la publicité sur les bouteilles d'eau, mais l'autoriser sur les sodas ? Quant à l'interdiction de principe de toute publicité commerciale dans les gares, aéroports et stations de transports publics de personnes, ne va-t-elle pas trop loin ?
Pour ma part, j'estime qu'aucune décision tendant à encadrer la publicité ne peut faire l'économie d'une évaluation des impacts sur les secteurs qui en tirent une part de leurs ressources. Certaines des interdictions pourraient entraîner des déséquilibres importants ; cela doit être pris en compte avant toute prise de décision.
Mon groupe souhaite plutôt promouvoir une écologie incitative et positive. Aussi, nous soutenons l'interdiction des publicités incitant directement ou indirectement à dégrader, abandonner ou remplacer prématurément des produits encore fonctionnels. De même, nous considérons qu'il est légitime de s'interroger sur les messages publicitaires relatifs à certains secteurs polluants. Plus globalement, nous considérons qu'il est surtout indispensable de renforcer l'information et l'éducation de nos concitoyens, sans jamais promouvoir des messages mensongers ou dangereux.