Intervention de Jean-Jacques Bridey

Séance en hémicycle du vendredi 15 décembre 2017 à 21h30
Projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2018 à 2022 - projet de loi de finances pour 2018 — Article 14

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJean-Jacques Bridey :

L'article 14 a pour objectif de stabiliser le montant des restes à payer au niveau qui sera atteint dans quelques jours, à la fin de l'année 2017. Ce niveau est très élevé – un peu plus de 100 milliards d'euros – et on constate, comme vous le dites, monsieur le ministre, que les restes à payer ont en effet fortement augmenté du fait du lancement par le précédent gouvernement du dernier programme d'investissements d'avenir.

Si nous souhaitons tous que cessent de telles pratiques, un mécanisme tel que celui envisagé par le Gouvernement fait cependant peser plusieurs risques sur la prochaine loi de programmation militaire.

Le premier de ces risques est de rendre difficile la gestion des aléas inhérents aux programmes d'armement – aléas techniques ou industriels, mais parfois aussi liés à des mesures de régulation budgétaire telles que nous les connaissons. Peut-on imaginer, par exemple, que le lancement d'un nouveau programme soit empêché par le retard pris par un autre programme, du fait d'un autre industriel ?

Le deuxième risque est l'effet de ciseaux : la hausse bienvenue du budget de la défense annoncée par le Président de la République va effectivement permettre de réduire les restes à payer dans les années à venir, mais sans doute pas assez rapidement pour éviter un effet de ciseaux en 2019. Il suffirait, nous dit-on, que les autorisations d'engagement d'autres ministères soient couvertes par des crédits de paiement pour redonner des marges de manoeuvre au ministère des armées. Est-il bien raisonnable cependant de soumettre la programmation de la défense nationale à la rigueur d'autres ministères, ou de prendre par exemple le risque d'une remise en cause très rapide de ce plafond s'il se révélait intenable ? Je ne crois pas que cela contribue à rendre crédible le travail que nous menons ici et les décisions que nous prenons.

Le troisième risque est celui d'un plafonnement des restes à payer, qui pourrait inciter à recourir à des stratégies de contournement – je pense par exemple aux sociétés de projets envisagées dès 2015 pour s'exonérer des contraintes budgétaires : à l'époque déjà, je m'étais élevé contre un tel projet.

Dernier risque, enfin, et le plus paradoxal : alors que la mesure est censée être vertueuse du point de vue des finances publiques, le plafonnement trop rigide des restes à payer pourrait empêcher la réalisation d'économies d'échelle dans le cadre de commandes globales. Lorsqu'il s'agira, par exemple, d'engager une commande groupée pour renouveler nos quatre sous-marins nucléaires lanceurs d'engins, qui sont garants de la sécurité nationale, il est évident que le prix demandé par les industriels ne sera pas le même pour quatre commandes étalées dans le temps que pour un seul marché groupé.

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