Intervention de Sandrine Mörch

Séance en hémicycle du mardi 11 mai 2021 à 9h00
Questions orales sans débat — Situation des travailleurs sociaux

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaSandrine Mörch :

Je souhaite évoquer la situation des travailleurs sociaux, ceux qui sont en prise directe avec le terrain et en première ligne depuis un an. Du jour au lendemain, ils ont vu leur champ d'intervention s'accroître. Ils ont dû compenser le personnel absent, donc les personnes à risque, les cas contacts, les cas positifs. Le premier confinement a été très compliqué à vivre pour eux aussi, parce qu'ils ont été confrontés à de toutes nouvelles situations souvent dramatiques : l'arrêt brutal de nombreux emplois précaires ou la chute de beaucoup d'autoentrepreneurs et d'artisans ont précipité vers eux des familles entières. De nombreux travailleurs sociaux nous ont expliqué que, pour la première fois de leur carrière, ils ont été confrontés à des gens qui avaient faim.

Face à cette situation violente, ils se sont retrouvés déchirés entre leur souci de venir en aide aux plus précaires, ce qui est l'ADN de leur métier, et leur propre peur de tomber malades et de contaminer leurs proches. Près d'un an après, la situation ne s'est pas forcément améliorée pour eux puisqu'ils ont enchaîné avec la période estivale où beaucoup se sont investis dans l'opération vacances apprenantes. Depuis mars 2020, ils ont pris très peu de congés afin d'assurer un mieux-être pour ces enfants et leur famille, bien conscients d'être le maillon essentiel entre le citoyen en détresse et l'État, et d'être peu nombreux à répondre présents physiquement, ce qui est absolument fondamental en période de grand trouble. En effet, il est difficile de gérer une faillite en visioconférence ou un hébergement d'urgence par répondeur interposé.

Aujourd'hui encore, les travailleurs sociaux doivent composer avec des services en perpétuelle réorganisation. En Haute-Garonne, les maisons des solidarités ne proposent que des rendez-vous téléphoniques, sous un délai de six semaines. Dès lors, comment doit réagir le travailleur social face à une personne dans une situation inextricable quand on lui dit que rien n'est envisageable avant quarante-cinq jours ? Leur réaction, c'est l'épuisement physique et moral.

Aujourd'hui, il faut leur apporter la reconnaissance qu'ils méritent, laquelle passe par des mots, mais aussi par des gratifications financières. Les travailleurs sociaux et médico-sociaux du secteur privé non marchand – les associations – n'ont pas pu bénéficier des augmentations du Ségur. Dans le cadre de la mission Laforcade, des négociations ont été ouvertes mais les travailleurs du secteur de l'exclusion craignent justement d'en être exclus et qu'elles soient limitées à ceux qui s'occupent des personnes âgées. En outre, leurs employeurs, les associations, rencontrent eux-mêmes des difficultés financières et ne peuvent les augmenter si leurs propres tarifs ne sont pas réévalués par les financeurs, à savoir l'État et les conseils départementaux. Aussi, madame la ministre déléguée, quelles mesures pouvez-vous prendre pour que ces femmes et ces hommes, qui font preuve d'un engagement sans faille et qui sont un maillon essentiel à la cohésion de notre pays, ne soient pas oubliés et aient la juste reconnaissance qu'ils méritent ?

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