Intervention de Dimitri Houbron

Séance en hémicycle du mardi 18 mai 2021 à 15h00
Motion de rejet préalable (projet de loi organique) — Discussion générale commune

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaDimitri Houbron :

Le peuple français est un peuple épris de justice, et parfois cette passion va jusqu'au goût de la contestation. Là est notre défi : refaire de l'institution judiciaire, le ciment de notre République. Toutes celles et ceux qui s'attaquent à l'institution, fragilisent la justice et son travail, prennent une responsabilité immense vis-à-vis de notre démocratie et de notre État de droit.

L'intitulé de ce projet de loi est ambitieux, et les dispositifs qu'il contient sont à la hauteur de son objectif. Les illustrations de la volonté qu'a le Gouvernement de restaurer la confiance dans l'institution judiciaire sont légion sur le plan législatif comme sur le plan réglementaire. Vous êtes sur tous les fronts, monsieur le garde des sceaux, et je suis personnellement fier de faire partie d'une majorité qui aura tant fait pour la justice, car selon une variante plus littéraire du « y a qu'à, faut qu'on » – une fable de Jean de La Fontaine, « Conseil tenu par les rats » – : « Ne faut-il que délibérer, / La cour en conseillers foisonne ; / Est-il besoin d'exécuter, / L'on ne rencontre plus personne. »

Sans revenir sur l'architecture générale de ce projet de loi, brillamment exposée par notre rapporteur, j'utiliserai le temps qui m'est imparti pour, d'une part, saluer le travail de notre commission des lois, et, d'autre part, présenter certains des amendements que je défendrai au nom du groupe Agir ensemble.

L'article 1er du projet de loi prévoit la possibilité d'enregistrer et de diffuser des audiences, même lorsqu'elles ne sont pas publiques. De prime abord, une telle idée pourrait sembler inquiétante : la société du spectacle étendrait-elle ses antennes jusque dans nos prétoires ? n'a-t-on pas tiré les leçons de la terrible affaire O. J. Simpson aux États-Unis en 1995 ?

Une rapide lecture du texte suffit à lever nos doutes. Les dispositions prévues par ce projet de loi ont permis de border cette incursion des caméras dans les salles d'audience. Les dérives potentielles sont anticipées et neutralisées, la diffusion ne pourra se faire qu'une fois l'affaire définitivement jugée, les visages seront floutés, et le droit à l'oubli respecté.

En commission des lois, un amendement défendu par notre collègue Laëtitia Avia a été adopté, précisant que cette diffusion sera accompagnée d'éléments de description de l'audience et d'explications pédagogiques accessibles sur le fonctionnement de la justice. Le groupe Agir ensemble et moi-même sommes convaincus que cette précision est fondamentale pour parfaire l'équilibre de cet article.

En effet, si nous avons tous pu être médusés par les documentaires de Raymond Depardon, ils ne contribuent pas nécessairement à nous transmettre une meilleure connaissance du fonctionnement de l'institution judiciaire. Il faudra donc, pour que l'objectif soit véritablement atteint, que la diffusion de ces enregistrements soit suivie d'une explication claire et pédagogique fournie par un membre de l'institution judiciaire, un auxiliaire de justice ou un professeur de droit.

Je tiens également à saluer l'apport de mon collègue Didier Paris au présent projet de loi, qui a permis d'augmenter la peine encourue pour violation du secret de l'instruction. La partie à qui une reproduction des pièces ou acte d'une procédure d'instruction a été remise et qui diffuse ces documents à un tiers risque aujourd'hui 10 000 euros d'amende ; demain, la peine encourue s'élèvera à trois ans d'emprisonnement et 45 000 euros d'amende. Ceux qui violent le secret de l'instruction manquent de respect à toute l'institution judiciaire et contribuent à affaiblir la confiance de nos concitoyens envers elle et envers ses acteurs. Le groupe Agir ensemble salue donc cette avancée.

Notre groupe a également apporté sa pierre à l'édifice en commission, en rendant obligatoire l'audience de mise en état des affaires criminelles, qui permettra d'éviter, par exemple, de faire venir des témoins de la France entière alors que leurs témoignages n'ont le moindre intérêt pour l'affaire. Les conditions relatives à la tenue de cette audience seront facilitées par des amendements que les trois groupes de la majorité défendront ensemble cette semaine.

Je soutiendrai, au nom de mon groupe, une vingtaine d'amendements visant notamment à améliorer la prise en charge des détenus durant leur incarcération mais également l'efficacité des enquêtes relatives à des criminels en série.

Cela a été dit mais rappelons-le : la confiance ne s'impose pas, elle se tisse au fil du temps. Ce projet de loi nous permet incontestablement de retisser ce lien abîmé entre nos concitoyens et notre institution judiciaire. Vous l'aurez donc compris, le groupe Agir ensemble votera en faveur de ces deux projets de loi.

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