Intervention de Stéphane Mazars

Séance en hémicycle du mardi 18 mai 2021 à 21h00
Motion de rejet préalable (projet de loi ordinaire) — Article 1er

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaStéphane Mazars, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République :

Permettez-moi de revenir sur le dispositif prévu dans le projet de loi et sur les garanties offertes aux personnes présentes dans la salle d'audience au moment de l'enregistrement des images, comme lors de leur diffusion.

Distinguons entre audience publique et non publique, seules les premières étant accessibles à tous. Ainsi, si la salle où elles se déroulent peut accueillir quarante personnes et que vous vous présentez parmi les quarante premières, vous pourrez voir les visages de tous les acteurs du procès – ceux du public, des juges, des témoins, des victimes, des accusés. Il s'agit ici de la même idée. Nous n'allons pas demander à toutes les personnes présentes dans la salle où se tient une audience publique l'autorisation de les filmer : elles seront sous l'objectif des caméras comme elles sont aujourd'hui sous le regard du public qui assiste aux débats.

C'est seulement pour les audiences privées – qu'elles se déroulent en chambre du conseil, comme les divorces, ou à huis clos, pour la justice des mineurs –, que l'enregistrement d'images sera subordonné, aux termes du projet de loi, à une autorisation préalable des parties.

J'en viens à la diffusion des images enregistrées. Si l'audience est publique, les parties au procès et les témoins seront floutés, impossibles à reconnaître, totalement anonymisés, sauf s'ils acceptent de paraître à visage découvert. En commission, il a été précisé qu'il leur serait demandé de remplir une autorisation écrite en ce sens et qu'ils pourraient se rétracter, ce qui garantit une double sécurité. En outre, les mineurs, les majeurs incapables, ainsi que certains membres des forces de sécurité intérieure, ne pourront pas donner leur autorisation, ni, a fortiori, se rétracter.

Par ailleurs, quand les audiences se déroulent en chambre du conseil ou à huis clos, les personnes concernées seront automatiquement floutées, impossibles à reconnaître.

En plus de ce dispositif, il faut mentionner le droit à l'oubli, dont nous avons parlé tout à l'heure. Le visage des personnes qui auront donné par écrit leur autorisation pour apparaître lors de la retransmission d'une audience publique sera automatiquement flouté, cinq ans après la première diffusion et dix ans après l'enregistrement. Il sera impossible de les reconnaître. En effet, nous considérons qu'au bout d'un certain temps, après que les images ont été utilisées pour des reportages, le droit à l'oubli doit prévaloir.

Quant aux images enregistrées lors d'audiences en chambre du conseil, ou à huis clos, elles ne permettront bien évidemment jamais l'identification des personnes concernées. En effet, ces audiences nous placent dans l'intimité des gens, ou concernent des mineurs, dont la protection doit être assurée du début à la fin, de l'enregistrement à la diffusion.

À ces dispositions s'ajoute la police de l'audience. Imaginons – l'hypothèse a été évoquée – que l'enregistrement crée une émotion particulière et que le président du tribunal éprouve des difficultés à tenir l'audience. Dans ce cas, celui-ci pourra à tout moment mettre fin à l'enregistrement ou le suspendre, en vertu de son pouvoir de police de l'audience.

Le dispositif est, vous le voyez, parfaitement ficelé. Il garantit la protection des individus, la préservation des droits de la défense, le respect du principe de la présomption d'innocence.

L'important, cela a été rappelé, est que la diffusion des images ne sera possible que lorsque l'affaire aura fait l'objet d'une décision définitive. On évitera ainsi l'écueil du trash ou du sensationnel et, surtout, l'atteinte au principe de la présomption d'innocence dans le cas où il y aurait quelques velléités de diffuser l'image d'un justiciable qui ne serait pas définitivement jugé.

Tel est le dispositif prévu. Mon intervention a été un peu longue, mais j'ai répondu ainsi par avance aux auteurs de nombreux amendements. J'émets un avis défavorable sur l'ensemble des amendements de cette discussion commune.

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