Intervention de éric Dupond-Moretti

Séance en hémicycle du mercredi 2 juin 2021 à 15h00
Prévention d'actes de terrorisme et renseignement — Article 5

éric Dupond-Moretti, garde des sceaux, ministre de la justice :

Monsieur Ciotti, j'ai soutenu, moi, le texte qui a été censuré peu de temps après avoir été nommé garde des sceaux – je l'ai soutenu au Sénat. Il allait plus loin que celui-ci. Alors, moi aussi, je pourrais vous dire que d'une certaine façon, j'ai été circonscrit dans la façon dont j'envisageais les choses. Je pourrais aussi vous dire : « J'ai été convaincu par les arguments du Conseil constitutionnel. » Mais au fond, peu importe, parce que le Conseil constitutionnel, qu'on le veuille ou non, c'est la conscience de la République, et qu'il faut s'incliner devant sa décision. Ensuite, on en pense individuellement ce que l'on veut, mais collectivement, ici, dans le cœur battant de la démocratie, on est obligé de reconnaître que cette décision est intervenue, point. Il n'y a rien d'autre à dire.

Vous vous plaignez de ce que, au fond, votre parole serait censurée. Mais moi aussi, je pourrais vous dire la même chose. Je ne soutiens pas aujourd'hui le même texte que celui que j'ai soutenu ; entre les deux, il y a une décision du Conseil constitutionnel.

Quand je dis aux syndicats de policiers : « Respectez l'institution judiciaire », c'est parce que, si je suis sévère avec la justice quand il y a des dysfonctionnements, d'un point de vue institutionnel, nous sommes dans la même barque : ces deux institutions sont équivalentes dans leur importance, et l'on ne peut pas taper sur l'une ou sur l'autre. Là, c'est un peu la même chose. Cela me chagrine un peu que vous vous plaigniez ; moi aussi, je pourrais me plaindre, mais je prends acte de cette décision et j'essaie de faire au mieux en tenant compte de la censure qui est intervenue. Voilà le débat. Il ne s'agit pas de vous interdire d'exprimer quoi que ce soit.

Partant de là, monsieur Ciotti, vous proposez un certain nombre d'amendements. Je ne suis pas un censeur dans l'âme, mais si je considère qu'ils franchissent la ligne tracée par le Conseil constitutionnel, il est de mon devoir de vous le dire. C'est ce que j'essaie d'exprimer, et c'est pourquoi le lamento que vous nous avez adressé tout à l'heure est, au fond, un peu inutile : nous savons parfaitement, vous et moi, quelles sont les limites et quel est notre nouveau périmètre. Il est un peu incongru – mais c'est évidemment votre liberté – de vous entendre dire : « On vote le texte » tout en faisant celui qui n'en est pas satisfait et en proposant des choses dont vous savez qu'elles ne peuvent pas être retenues.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Cette législature étant désormais achevée, les commentaires sont désactivés.
Vous pouvez commenter les travaux des nouveaux députés sur le NosDéputés.fr de la législature en cours.