Intervention de Xavier Breton

Séance en hémicycle du mercredi 9 juin 2021 à 15h00
Bioéthique — Article 4 (précédemment réservé)

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaXavier Breton :

Avec l'article 4, nous entrons dans le cœur juridique de l'extension de l'assistance médicale à la procréation. L'article 1er était en effet davantage d'ordre symbolique alors que celui-ci relève de travaux pratiques juridiques, beaucoup plus complexes que la simple affirmation d'un slogan.

La construction juridique est bancale. D'abord sur la forme : je passerai vite sur le fait que la version initiale du projet de loi du Gouvernement suscitait déjà de nombreuses interrogations de la part du Conseil d'État. Un amendement, qui n'avait fait l'objet d'aucune étude d'impact ni d'avis du Conseil d'État, a fait évoluer la rédaction du texte, sans parvenir à une formulation équilibrée. Notre collègue Gérard Leseul a affirmé que cette rédaction valait « pour l'instant » et qu'elle répondait au compromis du moment, sous-entendant qu'il faudra revenir, dans les mois ou années futurs, sur l'établissement du mode de filiation, alors que cette dernière est l'un des piliers de notre société.

Sur le fond, je reprendrai les arguments de mes collègues Annie Genevard, Patrick Hetzel ou Pascal Brindeau : ce texte supprime la branche paternelle pour des enfants auxquels on interdit à tout jamais d'avoir un père. Cela crée une discrimination pour eux et cela envoie un signal à tous les hommes de la société : le rôle du père est optionnel dans une famille, il n'est pas indispensable. Il est vrai que certains pères sont absents et défaillants, mais ils existent ; un adjectif qualifie son comportement mais ils sont là. Avec ce texte, le père disparaît. On nous dira que des oncles ou des grands-pères pourront remplir la fonction de référent masculin, mais le masculin ne résume pas le paternel, qui va bien au-delà.

Le mode de filiation que vous établissez ne dépend que de la seule volonté des adultes. Dans cette perspective, tout est ouvert dès qu'un adulte dit qu'il veut un enfant, qu'il veut l'élever et l'aimer – vous dites toujours suivre la logique de l'amour. Toutes les constructions possibles sont permises si on ne fonde pas la filiation sur des repères objectifs.

Nous aurons l'occasion, au cours de l'examen de l'article 4, de montrer que le dispositif que vous proposez n'est pas un droit supplémentaire, contrairement à ce que vous dites, mais bien un bouleversement du droit de la filiation, lequel en sortira durablement ébranlé. Il y aura à la fois un effet domino – des changements inéluctables, en cascade – et un effet mikado – en modifiant un élément, on influe sur d'autres aspects du droit de la filiation.

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