Monsieur le ministre, j'ai écouté avec grand intérêt votre réponse à la question posée sur les langues régionales, selon laquelle on en dénombrerait cinq outre-mer. Je veux espérer que vous comptabilisez, parmi ces cinq langues, le mahorais. À défaut, je vous demanderais naturellement de tenir compte du fait que le mahorais constitue également une langue régionale de la République.
L'école à Mayotte est gravement malade, monsieur le ministre : un médecin compétent aurait diagnostiqué une affection de longue durée. En effet, vous n'êtes pas sans savoir qu'il ne se passe pas un seul jour sans qu'elle ne soit le théâtre d'un fait divers. Outre la surcharge des classes, qui comptent plus de trente élèves, et les rotations qui progressent, année après année, dans le primaire, elle est l'objet de violences, de plus en plus graves, dans le secondaire. La surcharge des établissements secondaires est aussi une réalité : conçus pour accueillir 600 élèves, ils en abritent le double, si ce n'est plus.
En regardant l'école de la République à Mayotte, une impression particulière se dégage et, plus encore, une certitude : il n'y a d'école que le nom, à Mayotte. Les enseignants, malgré leur volonté, sont épuisés. Les parents sont inquiets pour la sécurité de leurs enfants. Certains leur demandent même de s'armer pour se défendre en cas de besoin. D'autres fuient Mayotte et partent scolariser leurs enfants ailleurs.
Les élèves se rendent à l'école la peur au ventre. Les parents ont fini par prendre conscience que leurs enfants ne vont pas dans des établissements secondaires pour appendre, mais dans des crèches et des garderies, de la maternelle à la terminale. C'est ce qui explique que de plus en plus de parents n'envoient plus leur progéniture à l'école de la République, mais dans le privé. À cette situation s'ajoutent les agressions en tous genres : agressions physiques, rackets et autres violences multiples, qui frappent indifféremment élèves et enseignants, notamment dans le secondaire, aussi bien dans les enceintes des établissements qu'à leurs abords immédiats.
À plusieurs reprises, les familles ont demandé des mesures de sécurisation des établissements pour protéger leurs enfants. Ces appels au secours sont restés quasiment sans effet. À Mamoudzou, à Kahani, à Chiconi, à Sada, pour ne citer que ces localités, les violences devant l'école sont devenues monnaie courante. Face à ces situations, les enseignants n'ont d'autre ressource que d'invoquer leur droit de retrait. Ce fut le cas à Kahani où, durant tout le mois de décembre, les enseignants ont refusé de faire cours, pour ne pas exposer davantage leur sécurité et celle de leurs élèves.
Aussi, monsieur le ministre, ma question est simple : que doit-il se produire pour que des mesures urgentes de sécurisation de ces établissements de l'État soient prises, alors que nous avons déjà déploré des pertes de vies humaines, notamment à Mamoudzou ? Je vous soumets un dicton personnel : loin des yeux, près du coeur. Mayotte est peut-être loin, mais je vous demande qu'elle soit proche de votre coeur.