La séance est ouverte.
La séance est ouverte à neuf heures trente.
La parole est à M. Jean François Mbaye, pour exposer sa question, no 49, relative au coût des Jeux olympiques de 2024.
Madame la ministre des sports, le 13 septembre dernier, Paris a été désignée ville hôte des Jeux olympiques de 2024. Or qui dit Jeux olympiques dit trop souvent dérive financière. Les acteurs du dossier assurent que la France fera exception en respectant son estimation de 6,8 milliards d'euros en valeur 2024, c'est-à-dire compte tenu de l'inflation.
Ce montant inclut 3,6 milliards pour le volet organisation du comité d'organisation des Jeux olympiques, le COJO, financés par le comité international olympique, la billetterie et les sponsors nationaux.
On prévoit en outre 3 milliards pour les investissements structurels pérennes qui émaneront du secteur public. L'État participera à raison d'1 milliard d'euros et les collectivités territoriales à raison de 500 millions. Le secteur privé apportera quant à lui 1,51 milliard. Les contribuables auront donc 1,5 milliard à leur charge.
La Ville de Paris et la région Île-de-France participeront à hauteur de 145 millions chacune, et la Seine-Saint-Denis à hauteur de 67,4 millions. Les pouvoirs publics doivent également contribuer aux Jeux paralympiques, pour 100 millions d'euros.
Madame la ministre, dans l'histoire récente, seuls les Jeux olympiques de Los Angeles, en 1984, sont parvenus à respecter les prévisions budgétaires. Pour les autres villes organisatrices, la facture a parfois été multipliée par cinq par rapport à ces prévisions, en partie au préjudice des contribuables.
La maire de Paris, Mme Anne Hidalgo, a rappelé que seuls 5 % des équipements doivent être construits : le bassin olympique et les deux villages. Cela semble être de bon augure pour le respect du budget annoncé. Mme Hidalgo assure que les contribuables ne financeront pas les Jeux olympiques et a annoncé le 1er octobre dans un entretien au Parisien : « Je me suis engagée à ne pas augmenter les impôts. Et on ne le fera pas jusqu'en 2020. »
Madame la ministre, quelles dispositions le Gouvernement entend-il prendre pour respecter le budget prévisionnel ?
Pouvez-vous nous préciser si les mesures et les dépenses de sécurité, notamment, ont été prises en compte ? Pour le moment, une enveloppe de 200 millions d'euros est prévue à cet effet dans le budget d'organisation, mais cette estimation est-elle suffisante ? Le coût du déploiement des forces de police en août et en septembre 2024 n'est pas visé dans le budget général et pourrait le grever lourdement.
Par ailleurs, dans un contexte d'économies budgétaires difficiles, la charge financière du projet olympique n'est-elle pas excessive pour les collectivités territoriales ?
Monsieur le député, le contrôle des dépenses afférentes à l'accueil des Jeux olympiques et paralympiques en 2024 est un objet de préoccupation légitime pour l'ensemble de nos compatriotes : d'une part, parce que la France est engagée dans une stratégie ambitieuse de redressement de ses comptes publics ; d'autre part, parce que des expériences récentes à l'étranger ont montré que l'accueil des Jeux est effectivement une opération complexe, qui mérite de ce fait une approche coordonnée.
C'est la raison pour laquelle le Gouvernement a souhaité, en amont de l'annonce de la ratification de l'attribution à Paris des Jeux olympiques et paralympiques par le CIO, organiser un dispositif extrêmement précis d'accompagnement des Jeux, afin de prévenir tout risque de déviation des budgets sur toute la durée de la planification des opérations.
Les actions de l'État et des parties prenantes aux Jeux créent un mécanisme de supervision global que je me permets de rappeler ici. Il inclut d'abord une délégation interministérielle aux Jeux olympiques et paralympiques, dédiée à veiller à la qualité de la coordination entre le COJO, la société de livraison des Jeux – la SOLIDEO – et toutes les parties liées par l'organisation, notamment les collectivités territoriales. Cette structure interministérielle, créée par décret, est opérationnelle. Elle garantit que le calendrier d'exécution des opérations sera tenu. C'est un gage d'efficacité, car on sait que les dérives des délais sont souvent la source principale des surcoûts budgétaires.
Ensuite, un programme budgétaire ad hoc a été créé, dédié au recollement des dépenses olympiques, notamment les crédits de paiement et les autorisations d'engagement alloués aux opérations conduites par la société de livraison des Jeux. C'est une garantie de transparence financière et de suivi de l'exécution des dépenses olympiques. Le programme a été introduit par un amendement du Gouvernement lors de l'examen en première lecture du projet de loi de finances pour 2018.
Par ailleurs, les statuts du COJO, qui seront déposés début 2018, prévoient, en contrepartie de la garantie qui a été accordée au comité dans le projet de loi de finances rectificative pour 2017, de nombreux garde-fous : un contrôle général économique et financier, un comité des rémunérations, un comité d'éthique, un comité d'audit, et des droits renforcés pour l'État en matière d'information et de suivi des activités financières et comptables du COJO. Avec ces mécanismes de surveillance pris dans leur ensemble, celui-ci fait l'objet d'un contrôle de sa gestion et de son fonctionnement qui est exceptionnel pour une association loi 1901. La totalité de ces processus est entièrement inédite pour une structure de droit privé.
Cette approche globale, instaurée pour toute la durée du cycle de l'événement, garantira in fine que l'exposition souveraine aux risques financiers sera jugulée.
Merci de ces précisions, madame la ministre. Il était important de clarifier la situation à l'heure où l'on parle d'économies budgétaires.
J'aimerais, si vous me le permettez, adresser, au nom de l'ensemble de mes collègues, toutes mes félicitations à notre équipe féminine de handball.
Applaudissements sur tous les bancs.
Le handball, équipes masculine et féminine confondues, est pour nous une source de fierté. Bravo à ces joueuses, qui nous ont procuré un bonheur immense !
La parole est à Mme Carole Bureau-Bonnard, pour exposer sa question, no 52, relative à la simplification juridique du contrat d'apprentissage.
Ma question s'adresse à Mme la ministre du travail.
La simplification du cadre juridique du contrat d'apprentissage devrait être au coeur de la réforme de l'apprentissage que le Gouvernement prépare et qui sera examinée par le Parlement dans les prochains mois.
Lors de mes rencontres et de mes visites au sein de ma circonscription – la sixième de l'Oise, de Compiègne à Noyon – , les jeunes apprentis et les entrepreneurs me font souvent part des mêmes attentes : une véritable simplification et un assouplissement du contrat d'apprentissage.
Vous le savez, celui-ci est en effet devenu trop complexe au fil du temps, pour les employeurs comme pour les apprentis : procédure d'autorisation préalable au recours au travail de nuit et aux heures supplémentaires, modalités de rupture, rythme de l'alternance trop rigide. Il convient également de supprimer les limites d'âge applicables à l'entrée dans l'apprentissage, qui constituent un frein à son développement, notamment pour des raisons financières s'agissant des artisans, et parmi des publics désireux de s'engager dans un parcours qui offre les meilleures chances d'accès à l'emploi.
Les spécificités du contrat d'apprentissage doivent néanmoins être préservées. L'apprentissage est une voie de formation complète, destinée à l'acquisition d'un ensemble de compétences qui permettront d'exercer un métier, mais aussi d'envisager un parcours professionnel et personnel riche et épanouissant. Dans l'artisanat, elle est également la voie royale vers la création d'entreprise : 41 % des chefs d'entreprise artisanale ont été apprentis.
Le contrat d'apprentissage et le contrat de professionnalisation doivent être clairement distingués, car leurs objectifs respectifs ne sont pas les mêmes : parcours en formation initiale pour le contrat d'apprentissage, souvent après le collège ; adaptation à un premier emploi ou spécialisation pour le contrat de professionnalisation. Or ils sont trop souvent confondus sous la catégorie générique d'alternance, alors qu'ils sont fondamentalement différents par nature. L'apprentissage allie en effet les avantages d'un mode d'acquisition des savoirs par la pratique et par le geste professionnel à la présence dans l'entreprise, qui permet une réelle osmose entre acquisition du savoir-faire et acquisition du savoir-être. Les objectifs et les publics visés par chacune de ces voies de formation doivent donc être clairement rappelés, les financements associés strictement fléchés et le cadre juridique simplifié.
Quelle est la position du Gouvernement pour réformer l'apprentissage et satisfaire le besoin de simplification exprimé par l'ensemble des acteurs de l'accès à l'emploi par l'alternance ?
Madame la députée, je vous prie d'excuser l'absence de Mme Pénicaud. Je vous fais part de la réponse qu'elle m'a transmise.
Effectivement, les deux contrats de travail dits en alternance n'ont pas le même but. Les contrats d'apprentissage visent à procurer un titre ou un diplôme dans le cadre de la formation initiale, tandis que les contrats de professionnalisation permettent l'acquisition d'une qualification favorisant l'insertion ou la réinsertion dans le cadre de la formation continue.
En matière d'alternance, la France est à la remorque de nombreux États européens. Voilà pourquoi, dans le cadre de la rénovation de notre modèle social, le Président et le Gouvernement souhaitent réformer notre système d'apprentissage pour le refonder sur les attentes et les besoins des jeunes, des familles et des entreprises.
Si le Gouvernement est particulièrement attentif à la préservation des objectifs assignés à chacun des contrats dits d'alternance, nous sommes tout aussi attachés à trouver les voies de simplification et de convergence des parcours en alternance, au bénéfice tant des jeunes alternants que de leur employeur. À cet effet, une large concertation des acteurs de l'alternance a été lancée le 10 novembre dernier par le Gouvernement. Le projet de réforme concerne évidemment l'ensemble des acteurs actuels de l'alternance et leurs rôles respectifs dans le système, mais également les modes de financement de cette voie d'acquisition des compétences professionnelles.
Toutefois, le Gouvernement continuera de veiller à préserver les relations contractuelles et les conditions de formation tant théorique que pratique des alternants mineurs, lesquels bénéficient déjà de protections édictées par le droit européen et ne sauraient être intégrés à un milieu professionnel sans avoir également la protection du droit national.
Ouvrir l'alternance, en professionnalisation comme en apprentissage, à un plus grand nombre de personnes, en adaptant le système aux besoins des usagers, et non l'inverse, tout en garantissant la qualité et le financement des formations dispensées dans ce cadre : telle est l'ambition du Gouvernement dans le cadre des concertations et de la réforme à venir.
Merci, madame la ministre, de vous être faite la porte-parole de la ministre du travail. Je prends bonne note de vos indications ; nous allons suivre le déroulement des concertations dont vous avez parlé.
La parole est à Mme Marie-George Buffet, pour exposer sa question, no 36, relative à l'inspection du travail.
Madame la ministre, entre 2009 et 2016, les effectifs du ministère du travail ont baissé de 20 %, soit une perte de 1 843 postes, surtout de catégorie B et C. Cette année, seuls 19 postes étaient ouverts au concours d'inspecteur et d'inspectrice du travail. En Île-de-France, 49 sections d'inspection vont être supprimées. En Seine-Saint-Denis, la direction prévoit de supprimer 3 postes d'agents de contrôle.
Ce démantèlement de l'inspection du travail est insupportable quand on connaît l'importance de ces agents, garants de la bonne application du code du travail, du respect du droit du travail et plus généralement du bien-être des salariés. Ils ne peuvent plus accomplir leur mission ; le traitement des situations d'urgence est de plus en plus difficile à assurer, et il en va de même des dossiers des travailleurs étrangers. Le Bureau international du travail recommande un inspecteur pour 10 000 salariés. On en est très loin, et ce depuis des années.
Il faut rappeler enfin que les inspecteurs et inspectrices du travail jouent un rôle prépondérant dans la lutte contre le harcèlement sexuel et pour faire respecter l'égalité entre les femmes et les hommes au sein de l'entreprise.
Je m'interroge donc : le Gouvernement veut-il ou non renforcer l'inspection du travail afin de garantir la bonne application des lois et du code du travail dans l'entreprise ? Prévoit-il de rencontrer les représentants syndicaux des inspecteurs et inspectrices du travail afin d'ouvrir un dialogue avec eux et de répondre à leurs revendications ?
Madame la députée, les effectifs de l'inspection du travail sont passés de 2 001 agents en 2006 à 2 251 agents en 2016. Le plan de modernisation et de développement de l'inspection du travail, conjugué à la fusion des quatre services d'inspection du travail qui existaient alors, avait ainsi permis de consolider le système d'inspection du travail.
Il existe aujourd'hui, réparties sur l'ensemble du territoire national, 232 unités de contrôle territoriales au sein des directions régionales des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi, regroupant au total 2 210 sections d'inspection, ainsi que 20 unités de contrôle régionales, essentiellement dédiées à la lutte contre le travail illégal et contre la fraude au détachement.
Toutefois, afin d'ajuster les organisations issues de la profonde réforme du système d'inspection du travail de 2015 et, notamment, de rééquilibrer les charges de travail, des projets en cours d'élaboration au sein des DIRECCTE peuvent aboutir à des créations de postes dans les unités régionales de contrôle et à des suppressions de sections dans différentes régions, comme par exemple en Île-de-France, où le projet est encore en cours de concertation avec les organisations syndicales.
À ce jour, le ratio national moyen est de 8 500 salariés par agent de contrôle, les situations variant en fonction des territoires. Les ajustements en cours dans les services de l'inspection du travail amèneraient ce ratio moyen à environ 9 060 salariés par agent de contrôle, ce qui, contrairement à ce que vous avez affirmé, est un ratio bien meilleur que celui recommandé par le BIT.
Par ailleurs, il convient de souligner l'effort très important de réorganisation du service public de l'inspection, qui permet de garantir une plus grande efficacité collective en regroupant les agents de contrôle en unités de huit à douze personnes en règle générale, en renforçant les pouvoirs d'intervention de ce corps de contrôle important, en transformant les contrôleurs en inspecteurs, agents de catégorie A, et en consolidant le cadre déontologique qui leur est applicable, afin de préserver l'image de la profession et de lui garantir la confiance des usagers.
S'agissant de la lutte contre toutes les formes de harcèlement, le service public de l'inspection du travail est totalement mobilisé et intervient dans des situations délicates qui nécessitent rapidité et respect de la confidentialité. Ainsi, depuis 2015, ce sont plus de 2 400 suites à interventions qui ont été produites sur ces sujets par l'inspection du travail. Quant aux organisations syndicales du ministère du travail, ma collègue Muriel Pénicaud les rencontrera dans les tout prochains jours.
Madame la ministre, la norme du BIT est d'un agent pour 10 000. Je tiens à insister sur l'utilité de ces agents. J'étais hier devant l'entreprise Paprec à La Courneuve, où depuis un an M. Kanté se bat contre la discrimination syndicale – le ministère du travail lui a d'ailleurs donné raison. Cela fait un an qu'il est repoussé par la direction de Paprec, alors qu'il exerce son mandat de délégué syndical. À l'occasion de ce rassemblement, nous avons appris que les chauffeurs des camions Paprec n'ont, dans leur parking, ni toilettes ni vestiaires et qu'ils rentrent chez eux, après une journée de tri, dans leur habit de travail. Ce cas montre bien l'utilité de l'inspection du travail pour faire respecter le droit des salariés à l'intérieur des entreprises.
La parole est à M. Jean-Jacques Gaultier, pour exposer sa question, no 39, relative à la remise en état de la ligne ferroviaire Nancy-Merrey.
Monsieur le président, je souhaitais appeler l'attention de Mme la ministre auprès du ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire, chargée des transports, sur la programmation des travaux de remise en état de la ligne ferroviaire Nancy-Merrey desservant entre autres les stations thermales de Vittel et de Contrexéville ainsi que la ville de Mirecourt, avec ses deux lycées et son école nationale de lutherie. J'associe à ma question le maire de Nancy, Laurent Hénart, le président de la métropole du Grand Nancy, André Rossinot, mes collègues députés, Dominique Potier et Laurent Garcia, ainsi que les présidents de la région Grand Est et des départements de Meurthe-et-Moselle et des Vosges. L'ensemble des élus se rejoignent sur la nécessité absolue de programmer des travaux sur cette ligne neutralisée depuis décembre 2016.
Nancy-Vittel sans train, mettant fin à cent trente-cinq ans d'histoire ferroviaire, cela est absolument inacceptable tant pour les populations locales, lycéens et étudiants, que pour le développement du tourisme et du thermalisme à Contrexéville, à Vittel – 200 000 nuitées touristiques et 12 millions d'euros investis par la ville dans l'établissement thermal – et demain à Nancy – 50 millions d'euros de travaux programmés. En mettant Nancy à une heure de Vittel par le rail et en permettant une connexion au TGV – s'il ne peut passer partout, il doit être accessible partout – , ces travaux lèveraient un véritable frein à l'attractivité et à l'accessibilité de nos territoires.
Mme la ministre a déclaré récemment vouloir donner la priorité aux trains du quotidien et non plus aux grands projets, sous peine d'accroître encore la fracture territoriale et de créer une France à deux vitesses. Dans le cadre du plan d'investissement annoncé par le Premier ministre, le développement des transports durables est doté de 4 milliards d'euros, la moitié de l'enveloppe étant dédiée à la rénovation du réseau ferré. La région Grand Est a confirmé son intention d'envisager des travaux de modernisation et de remise à niveau sur cette ligne, qu'il conviendrait de finaliser par l'intermédiaire d'un avenant au contrat de plan État-région – CPER. Je souhaiterais donc que vous confirmiez la participation de l'État et de SNCF Réseau à cette opération souhaitée par les élus de la région Grand Est, du Grand Nancy et des départements des Vosges et de Meurthe-et-Moselle.
La parole est à M. le secrétaire d'État auprès du ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire.
Monsieur le président, monsieur le député, je vous prie de bien vouloir excuser l'absence de Mme Élisabeth Borne, qui m'a chargé de vous répondre sur cette question importante. Je tiens tout d'abord à vous assurer que le Gouvernement a pleinement conscience du rôle de desserte périurbaine et de report modal de la liaison ferrée Nancy-Merrey. L'État et la région ont ainsi inscrit 4 millions d'euros au CPER 2015-2020 pour financer les travaux urgents de renouvellement de la partie nord de cette ligne, entre Nancy et Pont-Saint-Vincent.
La région a également lancé une étude prospective avec SNCF Réseau sur la ligne Nancy-Merrey pour la réaménager au mieux, y compris en exploitation. Le coût de son renouvellement complet est estimé entre 75 et 100 millions d'euros. Le constat de déficit de maintenance de cette liaison, comme celui de la majorité des lignes régionales dans le Grand Est, a de surcroît donné lieu en 2016 à un avenant au CPER, qui a inscrit 65 millions d'euros supplémentaires pour traiter les cas les plus urgents du réseau régional.
Cet exemple est représentatif du retard d'entretien et de régénération des réseaux existants pris au niveau national. Comme vous l'avez rappelé, il renvoie aux priorités que souhaite donner l'État à sa politique de mobilité. Il faut cibler l'entretien et la modernisation des réseaux existants, ainsi que les transports du quotidien, dans une programmation budgétaire claire, réaliste et surtout sincère.
C'est le sens des travaux menés dans le cadre des Assises de la mobilité entre le 19 septembre et le 13 décembre, qui ont fait l'objet d'une vaste mobilisation et dont la ministre a présenté les premières conclusions la semaine dernière. C'est aussi celui des travaux du Conseil d'orientation des infrastructures, dont les conclusions fin janvier permettront au Gouvernement de définir une trajectoire pluriannuelle de financement de nos infrastructures à inscrire dans la loi qui vous sera présentée au Parlement. C'est enfin le sens de la mission confiée par le Gouvernement à Jean-Cyril Spinetta, qui doit permettre de préparer une stratégie d'ensemble de l'État pour refonder notre modèle de transport ferroviaire, incluant le fret. J'espère, monsieur le député, que ces éléments vous rassureront.
Vous avez mentionné deux études en cours : l'une réalisée sous la maîtrise d'ouvrage de SNCF Réseau, visant à préciser la partie investissement, voire amender les chiffres que vous avez annoncés, et l'autre de la région, sur les coûts de fonctionnement, la manière d'exploiter et la politique des dessertes. Systra est d'ailleurs à la manoeuvre dans ces deux études. Les conclusions en sont prévues en janvier 2018. Je suggère qu'au vu de celles-ci, les parlementaires concernés puissent obtenir un rendez-vous au ministère. Toutes les tendances politiques sont concernées – La République en marche, le MODEM, le Parti socialiste ou encore Les Républicains – , les départements de Meurthe-et-Moselle et des Vosges, la région et l'ensemble des élus.
La parole est à M. Régis Juanico, pour exposer sa question, no 47, relative au devenir du site d'enfouissement des déchets de Borde Matin à Roche-la-Molière.
Ma question s'adressait à M. le ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire. Elle porte sur le devenir du site d'enfouissement des déchets de Borde Matin, à Roche-la-Molière, dans la Loire. Le groupe exploitant, Suez, a déposé en avril dernier à la préfecture de la Loire un dossier de demande de prolongation d'autorisation d'exploitation du site jusqu'en 2051, soit vingt-cinq ans de plus que la durée actuellement autorisée. Les élus locaux, ainsi que les acteurs de la société civile, sont fortement mobilisés contre un tel projet. Ils considèrent, à juste titre, que les habitants de la commune ont suffisamment subi les nuisances liées à l'exploitation du site depuis 1972 : nuisances olfactives, trafic permanent de poids lourds ou encore pollution visuelle par grand vent.
Plus que la durée en elle-même, les élus, dont je fais partie, sont farouchement opposés au projet d'augmentation de la capacité de stockage du site. L'exploitant demande en effet une rehausse de ses casiers de stockage, ainsi qu'une extension géographique de ses installations, pour une capacité totale de stockage du site qui passerait de 5 355 000 tonnes déjà autorisées à 11 404 000 tonnes, avec une capacité de 500 000 tonnes annuelles au maximum, soit 300 000 tonnes par an en moyenne, jusqu'en 2051.
En doublant la capacité totale de stockage du site, dans une tendance baissière du volume de déchets enfouis annuellement dont on ne peut que se réjouir, il est aisé de comprendre que le site pourra être exploité plus longtemps : en l'occurrence, pendant la durée d'une génération humaine supplémentaire, pendant vingt-cinq ans. C'est bien de l'augmentation de la capacité de stockage totale du site, liée à la rehausse des casiers de stockage, ainsi qu'à son extension géographique, que découle l'importante durée de l'éventuelle prolongation de l'autorisation d'exploitation, et non l'inverse.
La question de la durée de l'autorisation d'exploitation n'est pas l'enjeu majeur, contrairement à ceux de la capacité de stockage et du volume de déchets enfouis annuellement. Au regard des orientations législatives nouvelles de réduction à la source de la quantité de déchets enfouis, les capacités de stockage actuelles semblent suffisantes et n'appelleraient donc pas à une extension. En effet, la loi relative à la transition énergétique pour la croissance verte et son décret d'application imposent une réduction des capacités de stockage de déchets autorisées dans les prochaines années.
Les capacités de stockage demandées par l'exploitant dans ce dossier sont exorbitantes au regard des capacités respectées en Auvergne-Rhône-Alpes : elles représentent entre un tiers et 50 % des capacités totales au niveau régional à l'horizon 2020 et 2025, selon les objectifs de la loi. Le département de la Loire et sept communes du secteur travaillent actuellement à l'élaboration d'un périmètre de protection et de mise en valeur des espaces agricoles et naturels périurbains – un PAEN – dont les objectifs semblent clairement incompatibles avec l'extension géographique des installations de l'exploitant, laquelle conduirait à une détérioration ou une destruction de l'espace envisagé. Pour toutes ces raisons, et parce que ce sujet revêt un enjeu majeur pour la population de Roche-la-Molière, commune de 10 000 habitants, je souhaite connaître la position du Gouvernement sur ce dossier, ainsi qu'un point d'avancement précis et un calendrier de décision actualisé.
La parole est à M. le secrétaire d'État auprès du ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire.
Monsieur le président, monsieur le député, permettez-moi d'excuser l'absence de Nicolas Hulot, ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire, qui m'a chargé de vous répondre. Votre question porte sur l'avenir de l'installation de stockage de déchets non dangereux située à Roche-la-Molière, dans votre département de la Loire. Je vais tenter de vous préciser où en est la procédure du point de vue du droit. Cette installation, exploitée par la société Suez, est actuellement autorisée à recevoir des déchets jusqu'en 2026. Comme vous l'avez rappelé, elle a effectivement fait l'objet d'une demande d'autorisation d'augmentation globale de capacités et de durée d'exploitation. Votre inquiétude sur cette augmentation de la capacité de stockage totale du site est, bien entendu, légitime.
Je tiens néanmoins à rappeler que la loi relative à la transition énergétique a fixé des objectifs ambitieux de diminution du stockage des déchets pour 2020 et 2025 et que le Plan climat, annoncé par Nicolas Hulot en juillet, a placé l'économie circulaire au coeur de notre feuille de route ministérielle. Concernant l'installation que vous citez, cette demande apparaît tout à fait compatible avec le récent plan départemental de prévention et de gestion des déchets non dangereux. Des discussions ont bien évidemment eu lieu entre les services de l'État et l'exploitant. L'instruction se poursuit à la fois au niveau national et au niveau régional, pour apporter une réponse à l'exploitant qui tienne évidemment compte de la trajectoire de diminution du stockage, fixée par la loi.
Ces discussions devraient se conclure au plus tard au premier trimestre 2018. Nous devons, collectivement, être responsables pour que ces objectifs soient tenus. Des efforts doivent donc être engagés, notamment par les exploitants de ces installations. Sachez que le plan régional de prévention et de gestion des déchets, déclinaison de la loi relative à la transition énergétique, est en cours d'élaboration. Il permettra d'orchestrer la diminution de la mise en décharge sur le territoire. L'ensemble du ministère reste à votre disposition pour veiller à l'application de la procédure dans le bon sens.
Je ne peux pas me satisfaire de la réponse de M. le ministre. La loi exige une réduction des capacités de stockage des déchets autorisées dans les prochaines années. Or, si l'autorisation est donnée à l'exploitant, une commune de 10 000 habitants concentrera entre un tiers et 50 % des capacités totales de stockage de déchets pour l'ensemble de la grande région Auvergne-Rhône-Alpes. J'en appelle au Gouvernement pour examiner à nouveau ce dossier, car cette commune a déjà fait beaucoup en termes de solidarité territoriale en matière de traitement des déchets. Nous devons étudier les solutions alternatives à l'enfouissement et voir, très concrètement, comment limiter la production des déchets à la source.
La parole est à Mme Ramlati Ali, pour exposer sa question, no 51, relative à l'aéroport de Dzaoudzi.
Ma question s'adresse à madame la ministre auprès du ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire, chargée des transports.
Le 12 décembre dernier, nous fêtions les quinze ans de la convention de développement pour Mayotte, qui couvrait la période 2003-2007 et avait posé le principe de la construction d'une piste longue afin d'inscrire Mayotte dans une stratégie d'ouverture sur l'international. Cette ambition avait été actée par la mise en place d'une commission du débat public qui avait permis de retenir le scénario d'une piste convergente de 2 600 mètres, au coût moins élevé et qui tenait compte des contraintes et exigences environnementales.
Cependant, depuis 2010, l'État semble avoir reculé sur cette ambition, car ni le contrat de plan État-région pour 2015-2020 ni les fonds structurels européens n'ont inscrit l'allongement de la piste de l'aéroport de Mayotte parmi les priorités.
Néanmoins, le contrat de plan pour 2015-2020 ouvre la possibilité d'une reprise des études sur un éventuel allongement de la piste, qui pourrait s'avérer nécessaire dans l'hypothèse où les appareils commandés par la compagnie Air Austral, les Boeing 787 « Dreamliner », ne permettraient pas la desserte en direct de la métropole par tous temps.
Cela appelle trois observations.
D'abord, cette position conforte l'idée de maintenir le monopole de la compagnie réunionnaise. Or, si nous voulons garantir le développement de Mayotte, il est essentiel de disposer d'un hub capable de recevoir les dizaines de compagnies qui desservent les autres aéroports de la grande région Océan Indien et de l'Afrique de l'est.
Ensuite, plus d'une année après leur mise en service, ces appareils montrent leurs limites, avec des vols directs vers Paris contraints de faire une escale technique à Nairobi, l'appareil ne pouvant décoller à pleine charge de Mayotte, et avec des difficultés d'atterrissage récurrentes, notamment lors de la saison des pluies, qui portent une atteinte grave à la sûreté aéroportuaire et à la sécurité des habitations limitrophes.
Enfin, les nouvelles normes européennes, applicables dès 2018, risquent de sceller le sort de l'aéroport de Mayotte, puisqu'elles imposent un allongement de quatre-vingt-dix mètres de la piste à chaque extrémité, afin de mettre en place les fameuses « RESA », les aires de sécurité d'extrémité de piste.
Monsieur le secrétaire d'État, à l'heure où nos territoires mènent une réflexion globale en vue de leur développement à travers les Assises des outre-mer, pourriez-vous dire aux Mahorais où en est le projet de piste longue qui, de par ses enjeux, mérite d'être inscrit parmi les projets stratégiques d'intérêt national du quinquennat ?
La parole est à M. le secrétaire d'État auprès du ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire.
Madame la députée, je vous prie d'excuser ma collègue Élisabeth Borne, qui m'a chargé de vous répondre au nom du Gouvernement.
Afin d'améliorer la sécurité, l'Agence européenne de la sécurité aérienne impose désormais aux exploitants d'aérodromes un certain nombre d'exigences techniques, dont l'installation d'aires supplémentaires de sécurité d'extrémité de piste. La date butoir pour la mise en place de ces installations a été fixée au 31 décembre 2018.
Du fait de l'environnement très contraint de l'aéroport de Mayotte, que je connais personnellement, ces exigences ont requis un travail approfondi de la part des services de l'État et de l'exploitant afin de définir des solutions finançables et techniquement conformes pour ne pas réduire la longueur de piste disponible. Une réponse innovante est envisagée avec le déploiement de lits d'arrêt d'urgence, en vue duquel un appel d'offres a été lancé. La négociation avec les industriels est en cours.
Si rien n'avait été entrepris dès 2016 pour accompagner la mise en conformité de l'aéroport tout en garantissant les performances de la piste actuelle, il en résulterait une réduction de la distance de roulement qui empêcherait tout mouvement d'aéronef d'importance, menaçant ainsi la pérennité de la desserte aérienne de Mayotte. L'État et l'exploitant sont parvenus, malgré un calendrier très contraint, à concilier la mise aux normes de l'aéroport et un aménagement de performance équivalente.
L'impact sur l'environnement du déploiement de la technologie des lits d'arrêts est sans commune mesure avec les répercussions catastrophiques qu'engendrerait la construction d'une nouvelle piste sur le très fragile écosystème du lagon de Mayotte, qui abrite notamment des dugongs, espèce très vulnérable.
En outre, le coût d'une telle infrastructure était évalué à plus de 200 millions d'euros, alors que la charge financière du déploiement des lits d'arrêt est de l'ordre de 13 millions d'euros. Cette solution permettra donc de ne pas répercuter le coût élevé de l'infrastructure sur le prix du billet d'avion. Les compagnies aériennes sont unanimement favorables à une solution technologique qui allie sécurité, intégration environnementale et efficience économique.
Enfin, vous l'avez rappelé, tout cela s'inscrit dans le cadre des Assises des outre-mer ; sur ces questions, les ministres Girardin et Borne restent à votre disposition.
Monsieur le secrétaire d'État, je vous remercie pour ces précisions. Les Mahorais connaissent la présence des dugongs dans le lagon, qui est effectivement très fragile. Toutefois, ils soulignent aussi sans cesse que les avions survolent la population. Je prends acte de votre réponse, qui constitue une belle avancée, mais nous espérons le « décollage » – c'est le mot ! – de la piste.
La parole est à Mme Marietta Karamanli, pour exposer sa question, no 48, relative à la desserte ferroviaire de la Sarthe.
Ma question s'adresse à Mme la ministre auprès du ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire, chargée des transports. Elle porte sur la qualité de la liaison ferroviaire entre Le Mans, et la Sarthe, et Paris. En effet, depuis de nombreux mois, l'ensemble des usagers constatent une dégradation du service ferroviaire.
D'abord, les trains à grande vitesse – TGV – sont moins nombreux à desservir Le Mans : plus de quarante d'entre eux ne s'arrêtent plus en gare ; la desserte par Ouigo exclut des centaines d'abonnés. Le TGV devient ainsi le « train à petit service ».
Ensuite, les tarifs sont élevés et incompréhensibles : des rames qui s'arrêtent au Mans et font partie d'un même train, sans autre arrêt, ne proposent pas le même tarif. Le TGV reste le « train à grand tarif », avec des prix oscillant, sans carte, entre 60 et 80 euros l'aller.
Enfin, les retards longs s'accumulent pour diverses raisons. Le TGV, qui compte pourtant cher à la nation, devient ainsi le TGR, « train à grand retard ». La construction de nouvelles lignes devrait toutefois améliorer la desserte ; ce qui fait la force du train à grande vitesse japonais – six secondes de retard au plus : un rêve ! – , c'est justement de disposer de lignes dédiées.
Les usagers des trains intercités et des transports express régionaux – les TER – constatent dans le même temps une dégradation lente du service sur ces lignes, ainsi qu'une augmentation du prix des billets. Les personnels, eux-mêmes souvent malmenés, estiment que les choix qui ont été faits fragilisent l'entreprise et que l'on a perdu le sens de ce qui, pour eux, reste le service public. Les problèmes sont nombreux ; ils ne se résument pas à des dysfonctionnements, même majeurs, dans une gare parisienne, provoquant la mobilisation des pouvoirs publics durant vingt-quatre à quarante-huit heures. Faute de temps, je n'évoquerai pas, par exemple, les nuisances sonores consécutives à la mise en service de la nouvelle ligne à grande vitesse vers la Bretagne ; la réglementation en vigueur ne permet pas, en effet, une compensation adaptée aux besoins des riverains.
Monsieur le secrétaire d'État, je ne vous demande pas de me lire une énième réponse préalablement rédigée par le groupe public, qui semble avoir toujours une bonne excuse. Je souhaiterais que ces questions soient traitées en relation avec les élus locaux responsables, et en écoutant les usagers. Pourquoi ne pas venir à l'improviste partager le quotidien de ceux qui galèrent dans les transports publics ? J'attends donc, au nom des élus locaux et des usagers, que je représente ici, un engagement concret !
La parole est à M. le secrétaire d'État auprès du ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire.
Madame la députée, je vous prie d'excuser encore une fois ma collègue Élisabeth Borne, qui m'a chargé de vous répondre.
Vous interpellez le Gouvernement au sujet de la dégradation du service ferroviaire sur la ligne Paris-Le Mans. Tout d'abord, je veux vous rassurer : en termes de fréquence, le service annuel prévoit plus de trajets aller-retour à grande vitesse en semaine en 2018 qu'en 2017.
Vous évoquez l'impact de Ouigo sur les abonnés. Je rappelle que SNCF Mobilités dispose d'une liberté de gestion sur ses services commerciaux. Je me contenterai donc d'indiquer que l'entreprise a opéré des ajustements d'offres, mais que ceux-ci interviennent en dehors des heures de pointe et qu'ils ne concernent pas les TGV empruntés par la majorité des abonnés et des usagers dont vous vous faites, ce matin, la porte-parole.
S'agissant de la tarification, elle est décidée par SNCF Mobilités dans la limite d'un plafond fixé par l'État, qui peut être rehaussé pour les trajets sur les lignes à grande vitesse. Elle repose sur le principe de la dégressivité du prix kilométrique en fonction de la distance. C'est ce qui explique que, pour le trajet relativement court entre Paris et Le Mans, le prix soit comparativement plus élevé. Néanmoins, la mise en place sur cette ligne de nombreuses offres à « petits prix » permet au TGV de rester accessible à tous.
Pour ce qui est de la régularité, il faut souligner que celle de la ligne entre Paris et Le Mans est en moyenne supérieure à celle du TGV Atlantique. Les trains en heure de pointe sont certes plus fragiles, davantage exposés aux difficultés de gestion du trafic, mais la SNCF prend de nombreuses mesures afin d'améliorer ces résultats.
Enfin, la ligne a subi de plein fouet la répercussion des incidents survenus en gare Montparnasse. La ministre Élisabeth Borne a demandé à la SNCF des actions fortes, qui se sont traduites par la mise en place d'une mission de préfiguration, afin de définir une nouvelle organisation et un nouveau management de la gestion des grands travaux et de l'ingénierie. Un programme d'amélioration de la robustesse des services et de l'information aux voyageurs est aussi en cours de préparation. Nous suivrons avec une attention particulière l'application de ces mesures, afin que ces questions, sur lesquelles l'ensemble des élus de votre région alertent régulièrement, depuis de très nombreuses années, le Gouvernement, soient traitées.
Monsieur le secrétaire d'État, je prends bonne note de ces informations. Cependant, je me permets d'insister. L'amélioration du service que vous évoquez pour 2018…
L'augmentation de la fréquence !
Quoi qu'il en soit, elle n'est pas perceptible aujourd'hui. Et au-delà des questions de retard, nous avons perdu un grand nombre de trains.
S'agissant de la gare Montparnasse, nous avions signalé le problème depuis bien longtemps. En outre, même si l'on arrive à le traiter, cela ne résoudra pas les problèmes qui se posent sur le reste de la ligne. Le Mans se trouve doublement impacté.
Il faut rappeler que la contribution financière des habitants du Mans et de la Sarthe a été très élevée, puisqu'ils ont payé deux fois le TGV depuis 1982. Or, s'agissant de la tarification, Le Mans ne bénéficie d'aucune des offres dont bénéficient d'autres villes situées à une heure de Paris. Les élus et les usagers le soulignent sans cesse, mais sans effet. Par exemple, nous n'avons pas accès à l'offre Ouigo.
Tous ces éléments cumulés font que les usagers et les élus locaux n'en peuvent plus. J'invite vraiment Mme la ministre à venir à l'improviste constater la situation.
La parole est à Mme Clémentine Autain, pour exposer sa question, no 35, relative aux pannes d'ascenseurs dans les immeubles en Seine-Saint-Denis.
Ma question s'adresse au ministre de la cohésion des territoires. Elle porte sur les pannes récurrentes d'ascenseurs que déplorent les locataires d'immeubles collectifs dans les villes les plus en difficulté. Cette situation, qui dure depuis très longtemps, a fait l'objet de plusieurs mobilisations citoyennes, notamment en Seine-Saint-Denis – et pour cause : dans le quartier des Beaudottes à Sevran, à Bagnolet ou encore à Bobigny, certains habitants sont restés durant plus de quatre mois sans ascenseurs dans des immeubles de plus de dix étages. Imaginez-vous les conditions de vie effroyables, intolérables, que cela représente ?
Ces pannes engendrent de nombreuses difficultés quotidiennes et mènent certains habitants à l'isolement total. Les personnes à mobilité réduite ne peuvent tout simplement pas sortir de chez elles. Les bailleurs sociaux sont en cause : ce sont eux qui doivent s'assurer du bon fonctionnement des ascenseurs, même si la maintenance des équipements est du ressort des ascensoristes privés – quel imbroglio ! Bien que les habitants paient leurs charges, d'ailleurs de plus en plus lourdes – et avec la réforme des aides personnelles au logement, cela ne va pas s'améliorer – , la situation ne cesse de se dégrader.
Ce problème n'est qu'un symptôme parmi d'autres du sentiment, qui correspond à une réalité, que lorsqu'on habite dans un territoire très populaire, on est traité comme un citoyen de seconde zone. Beaucoup d'habitants me disent : « Serait-il imaginable que, dans les Hauts-de-Seine, à Neuilly par exemple, les ascenseurs desservant les immeubles très hauts ne fonctionnent pas durant plusieurs mois ? ». De fait, je n'ai jamais eu écho d'une situation de ce type !
Monsieur le secrétaire d'État, ma question est simple : allez-vous enfin vous occuper de ce problème ? Quelle réponse concrète comptez-vous apporter à ces habitants, afin qu'ils puissent vivre dans un habitat digne de notre République ?
Applaudissements sur les bancs du groupe FI.
La parole est à M. le secrétaire d'État auprès du ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire.
Madame la députée, M. Jacques Mézard, ministre de la cohésion des territoires, m'a transmis sa réponse, que je vais vous lire avec la plus grande fidélité possible.
Vous appelez l'attention du Gouvernement sur les problèmes rencontrés par les locataires – en l'occurrence, les locataires de Seine-Saint-Denis, mais j'ai bien compris que votre préoccupation embrasse tous les locataires, au-delà même de ce département – en raison des dysfonctionnements récurrents des ascenseurs dans certains grands ensembles immobiliers.
La loi du 2 juillet 2003 dite « urbanisme et habitat » a posé le cadre du renforcement de la sécurisation des ascenseurs. Les principales obligations réglementaires incombant aux copropriétaires sont en particulier de passer un contrat d'entretien, de réaliser un contrôle technique quinquennal de l'appareil et de réaliser, dans un délai de quinze ans, des travaux de mise en sécurité sur les ascenseurs installés avant le 24 août 2000. Le décret du 9 septembre 2004 relatif à la sécurité des ascenseurs a institué l'obligation de mettre en place dix-sept types de dispositifs de sécurité sur les ascenseurs installés avant le 27 août 2000. Les travaux de mise en sécurité ont été répartis en trois tranches se terminant respectivement en 2008, 2013 et 2018, afin de répartir les charges financières pour les propriétaires.
Dans le cadre d'un bail d'habitation soumis à la loi du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs, le bailleur – vous l'avez dit – doit répondre d'un certain nombre d'obligations vis-à-vis du locataire. Aux termes de l'article 6 de cette loi, le bailleur doit fournir au locataire un logement en « bon état d'usage et de réparation ainsi que les équipements mentionnés au contrat de location en bon état de fonctionnement ». Il doit également permettre au locataire de profiter pleinement et paisiblement de son logement « et le garantir des vices ou des défauts de nature à y faire obstacle ». Enfin, le bailleur a l'obligation « d'entretenir les locaux en état de servir à l'usage prévu par le contrat et d'y faire les réparations, autres que locatives, nécessaires au maintien en état et à l'entretien normal des locaux loués ». Cette obligation d'entretien implique que le bailleur fasse les travaux qui s'imposent afin que le logement soit utilisable conformément à la destination pour laquelle il a été loué et qu'il le reste intégralement durant l'exécution du bail.
À l'occasion de contentieux, l'étendue de cette obligation a fait l'objet de précisions jurisprudentielles afin de mieux cerner la nature et l'étendue des travaux à la charge du bailleur. Ainsi, l'obligation du bailleur ne se limite pas seulement aux éléments principaux du local loué, mais aussi au fonctionnement des équipements annexes. Selon la Cour de cassation, ceux-ci – y compris les ascenseurs – doivent aussi être garantis par le bailleur. Par conséquent, si le bailleur – social ou non – ne respecte pas son obligation d'entretien, le locataire est en droit d'obtenir, à l'amiable ou judiciairement, que des mesures de réfection, des réparations ou toutes autres mesures techniques soient entreprises.
Telle est, madame la députée, la réponse que donne le ministre Jacques Mézard à votre question.
Cette réponse appelle plusieurs remarques de ma part. Vous nous renvoyez vers les bailleurs sociaux, à qui incombe l'obligation d'entretien de ces équipements. Mais je vous ferai remarquer que vous avez adopté des mesures diminuant drastiquement leurs moyens : or on sait bien que les bailleurs des territoires les plus en difficulté manquent déjà de moyens pour faire face aux besoins de rénovation.
Un deuxième problème se pose, lié à la maintenance et aux pièces. Je pense que la puissance publique devrait aller mettre son nez dans l'économie de ces ascenseurs. Peut-être cela pourrait-il faire l'objet d'une commission d'enquête parlementaire ? Je peux vous dire, en tout état de cause, que j'ai bien l'intention de continuer cette bataille. Il ne suffit pas d'en appeler à la loi, puisque dans les faits elle ne s'applique pas, et que les habitants souffrent de délais de réparation anormaux.
J'ai été alertée ce week-end par des habitants de la maison de retraite publique Les Glycines de Sevran, dont l'ascenseur est en panne depuis plusieurs semaines. C'est une situation insupportable ! Nous devons y faire face. Je vous interpellerai à nouveau sur ce sujet. Vous avez dit que la dernière tranche des travaux de mise en sécurité prendrait fin en 2018 : je n'oublie pas cette date. J'ai bien peur que les habitants doivent attendre encore : je resterai vigilante.
La parole est à M. Vincent Rolland, pour exposer sa question, no 43, relative à l'offre de mobilité ferroviaire et aux trains de nuit.
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, ma question est simple :quid de la SNCF dans nos territoires de montagne ?
Depuis quelques années, nous déplorons la baisse progressive des liaisons régulières entre Paris et les villes moyennes de France. En Savoie, cette année encore, depuis le 10 décembre, deux liaisons ont été supprimées. Ces suppressions s'ajoutent à celle de 2016, et font suite à la suppression des trains de nuit entre Paris et Bourg-Saint-Maurice, pour – nous dit-on – des raisons tenant à leur manque de rentabilité. Ces trains ont pourtant rendu de précieux services pendant des années à des générations successives, à qui ils ont permis d'accéder aux sports d'hiver dans des conditions financières plutôt abordables par rapport au TGV.
Dans le même temps, il est vrai, l'offre de transport par car a été développée, mais la filiale de la SNCF Ouibus est grandement déficitaire : ses pertes égalent son chiffre d'affaires ! Que dire en outre des infrastructures immobilières ? À Aime, par exemple, en Tarentaise, au pied du domaine skiable mondialement connu de La Plagne, la gare – en pleine saison touristique – n'assure aucun accueil. Du lundi soir au vendredi matin, les clients trouvent porte close : aucun agent, aucun service !
Ma question est simple, monsieur le ministre : quelle est la position du Gouvernement concernant l'offre de mobilité ferroviaire pour les habitants de tous les territoires ? Pourrait-on envisager de relancer un train de nuit modernisé et redynamisé ? Cette solution serait à la fois écologique et bénéfique au développement des territoires ruraux.
La parole est à M. le secrétaire d'État auprès du ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire.
Monsieur le député, je vous prie d'excuser Élisabeth Borne, ministre des transports, pour son absence. Je me charge de vous faire part de la réponse qu'elle apporte à votre question.
Vous interpellez le Gouvernement sur les offres de mobilité pour les territoires de montagne, notamment la Savoie, ainsi que sur la relance des trains de nuit.
S'agissant de la desserte de la Savoie, les liaisons TGV sur l'axe Annecy-Chambéry-Paris, dont je rappelle qu'elles relèvent de la liberté de gestion de l'établissement public SNCF Mobilités, ont en effet évolué le 10 décembre avec le nouveau service annuel. Ainsi, le TGV Annecy-Paris via Chambéry de 5h31 a été supprimé, car son taux de remplissage s'avérait largement inférieur à 50 %. Le TGV Paris-Annecy du dimanche à 7h49 est lui aussi supprimé.
Ces modifications n'affectent toutefois pas l'offre en semaine, qui reste, elle, stable. Leur impact sur les voyageurs professionnels sera donc très limité. Par ailleurs, SNCF Mobilités a naturellement mis en place des alternatives ferroviaires en correspondance via Aix-les-Bains et Lyon Part-Dieu.
S'agissant des trains de nuit, l'offre est désormais recentrée sur deux lignes, Paris-Briançon et Paris-Rodez-Latour-de-Carol, répondant à une préoccupation d'aménagement équilibré du territoire. Les autres lignes ne sont aujourd'hui plus exploitées, en raison non seulement de leur déficit, mais aussi de la desserte des territoires concernés par des offres alternatives de transport de bon niveau – vous avez mentionné l'une de ces offres.
Plus globalement, le Gouvernement entend se doter d'une stratégie forte pour le secteur ferroviaire à l'heure où les nouveaux usages de la mobilité se développent rapidement et bouleversent son modèle, déjà affecté – nous le savons tous – par une dette colossale. C'est le sens de la mission de concertation menée actuellement par Jean-Cyril Spinetta pour refonder ce modèle, dans le cadre d'un marché bientôt ouvert à la concurrence, tout en préservant les missions d'un service public performant.
Les conclusions de cette mission sont attendues pour fin janvier et permettront d'alimenter la future loi d'orientation sur les mobilités, qui devra nous permettre de réfléchir collectivement aux solutions de mobilité les plus pertinentes pour tous nos concitoyens, dans tous les territoires.
Mme la ministre des transports m'a demandé en outre de vous assurer de sa disponibilité sur cette question.
Je serais heureux de pouvoir échanger avec elle à ce sujet, si possible au début de l'année 2018.
Permettez-moi de revenir un instant sur la question du train de nuit. La raison principale de l'arrêt de la ligne Paris-Bourg-Saint-Maurice tient à son manque de rentabilité. Mais il faut savoir que ce train n'a fait l'objet d'aucune communication, d'aucune promotion. Vous connaissez l'adage : « Qui veut noyer son chien, l'accuse de la rage. » D'une certaine manière, on a laissé mourir petit à petit ce train.
Je suis pourtant convaincu qu'il existe – pour peu que l'on daigne s'en préoccuper – un marché pour ce genre de train : cette offre intéresserait notamment les étudiants et les jeunes actifs, gens peu fortunés à qui il est difficile de s'acquitter du prix élevé des billets de TGV aux heures de pointe. Je demande donc de réexaminer tout cela : c'est ce que je dirai très prochainement à Mme la ministre des transports.
La parole est à Mme Nicole Trisse, pour exposer sa question, no 57, relative aux cotisations sociales des retraités transfrontaliers.
Je salue madame Gény-Stephann qui vient d'arriver au banc du Gouvernement.
Madame la secrétaire d'État, en tant qu'élue de la Moselle, dans une circonscription frontalière avec l'Allemagne, je souhaite vous interroger sur les difficultés rencontrées par les retraités transfrontaliers dits mixtes concernant le paiement de leurs cotisations de retraite.
Selon la législation européenne, les travailleurs frontaliers, salariés ou indépendants, ne peuvent être affiliés qu'à un seul régime de sécurité sociale, celui du pays membre dans lequel ils travaillent et cotisent. Les retraités transfrontaliers résidant en Moselle et percevant à la fois une pension de retraite allemande et une pension de retraite française sont affiliés de manière obligatoire au régime d'assurance-maladie français. Ces retraités sont, de fait, assujettis à la CSG – contribution sociale généralisée – et à la CRDS – contribution au remboursement de la dette sociale – non seulement sur leur retraite française, mais aussi sur leur retraite allemande.
Ils ont pourtant cotisé en Allemagne, et ainsi financé la sécurité sociale allemande ! Il ne me semble pas légitime qu'un retraité soit grevé de charges sociales découlant de l'application de plusieurs législations nationales, alors qu'il ne peut revêtir la qualité d'assuré qu'au regard d'une seule de ces législations.
Les retraités frontaliers dits mixtes ne bénéficient réellement que de la branche maladie de la Sécurité sociale ; leur retraite, elle, est allemande. Il serait plus équitable d'établir un système de cotisations spécifiques pour ces retraités dits mixtes. Ce système permettrait, au choix : ou bien que les prélèvements sur les pensions de retraites étrangères effectués au titre de la CSG et de la CRDS concernent uniquement la branche maladie, ou bien que le taux d'imposition global soit considérablement diminué – le nouveau taux étant fixé par décret.
Madame la secrétaire d'État, pouvez-vous m'indiquer ce que le Gouvernement compte proposer pour mettre fin au régime actuel de double cotisation, qui pénalise fortement ces retraités ?
La parole est à Mme la secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie et des finances.
Madame la députée, vous interrogez le Gouvernement sur la situation, au regard des cotisations sociales, des retraités qui, résidant en France, perçoivent à la fois une pension française et une pension d'un autre pays de l'Union européenne – en l'occurrence, l'Allemagne.
Vous avez rappelé très justement qu'en application de la législation européenne en matière de coordination de sécurité sociale, ces personnes sont assujetties à la seule législation de sécurité sociale française du fait qu'elles résident en France et perçoivent au moins une pension française. Cette affiliation dans un seul État, selon le principe d'unicité de la législation applicable, permet d'éviter que ces personnes soient soumises à une double cotisation de sécurité sociale.
Il est donc normal que l'ensemble des revenus français et allemands de ces personnes soit soumis aux prélèvements sociaux destinés à financer leur couverture sociale, en l'espèce la CSG et la CRDS. Vous remarquerez à cet égard qu'ils sont en cela placés à égalité avec les personnes qui, assurées en France, ne touchent qu'une seule pension de retraite de même niveau qu'eux.
Vous trouvez en outre injuste que ces pensionnés subissent des prélèvements qui vont au-delà du financement de leur couverture maladie, seule couverture dont ils auraient selon vous besoin, estimant à cet égard qu'ils ont déjà cotisé pour les autres risques sur leurs revenus allemands quand ils étaient actifs.
Rappelons tout d'abord que notre système de sécurité sociale, toutes branches confondues, repose – comme celui de l'Allemagne d'ailleurs et des pays européens en général – sur un principe de solidarité qui s'applique notamment entre les générations, c'est-à-dire entre les actifs et les retraités. Les actifs financent ainsi les pensions des retraités, tandis que ces derniers prennent leur part au financement de l'ensemble des branches de la Sécurité sociale. Il ne s'agit pas d'un système d'assurance classique où les personnes s'assurent en fonction de leurs besoins personnels et de leurs moyens, mais d'un système solidaire de sécurité sociale.
Enfin, un pensionné peut ne pas avoir seulement besoin d'une couverture maladie, mais aussi – c'est de moins en moins rare – de prestations familiales, voire – ce que je ne lui souhaite pas – de prestations liées à une situation de dépendance.
Dans ces conditions, vous comprendrez que le Gouvernement reste attaché au système actuel et ne puisse se montrer favorable à vos propositions.
Madame la secrétaire d'État, je vous remercie, pas vraiment pour votre réponse mais parce qu'elle a le mérite d'être claire pour nos travailleurs et nos retraités transfrontaliers. Cela va être compliqué pour moi de la justifier auprès d'eux, car s'ils ont travaillé aussi en Allemagne, c'est sans doute parce qu'il n'y a pas assez de travail en France : ce n'est pas un choix délibéré de leur part. Je vais tout de même m'efforcer de leur expliquer la vision du Gouvernement à ce propos, mais je ne suis pas sûre que sa réponse les satisfasse.
La parole est à Mme Béatrice Descamps, pour exposer sa question, no 63, relative à la société Ascoval.
En janvier 2017, Vallourec a bouclé la cession d'une participation majoritaire dans son aciérie de Saint-Saulve, près de Valenciennes, dans le Nord, au spécialiste européen des aciers spéciaux, Ascometal, dossier suivi bien sûr par Bercy. Cet accord conclu par les deux groupes a abouti à la création d'une co-entreprise baptisée Ascoval, détenue à 40 % par Vallourec et à 60 % par Ascometal. Philippe Crouzet, président du directoire de Vallourec, déclarait à l'époque que cette cession devait permettre à l'aciérie de Saint-Saulve d'écrire avec Ascometal une nouvelle page de son histoire tout en continuant à approvisionner Vallourec en aciers spéciaux. Après quinze longs mois d'angoisse quant à leur avenir, les salariés furent alors soulagés – même s'ils avaient des doutes sur la viabilité de ce consortium. Ils ne cessent, depuis, de relever tous les défis dans ce site industriel ultramoderne, à la capacité de production en constante augmentation, et idéalement placé au coeur des réseaux ferroviaires et fluviaux.
L'annonce, le 20 novembre dernier, moins d'un an après cet accord, de la mise en procédure de redressement judiciaire du groupe Ascometal interpelle et inquiète fortement les 320 salariés de Saint-Saulve, qui craignent de subir le même sort que leurs collègues du site de Dunkerque, pour lesquels j'ai une pensée sincère puisque 140 d'entre eux vont passer Noël en ayant perdu leur emploi. Ascoval est aujourd'hui en procédure de sauvegarde. Pouvez-vous, madame la secrétaire d'État, nous donner des informations de nature à rassurer les employés d'Ascoval au lendemain de ce qui devait être, hier, une journée importante dans l'évolution de ce dossier ?
La parole est à Mme la secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie et des finances.
Madame la députée, comme vous l'avez rappelé, Ascometal est actionnaire à hauteur de 60 % de la société Ascoval, les 40 % restants étant détenus par Vallourec. Le placement en redressement judiciaire du groupe industriel Ascometal, le 22 novembre dernier, a conduit la société Ascoval à demander la protection du tribunal de grande instance de Strasbourg, qui a ouvert une procédure de sauvegarde le 29 novembre.
Le groupe industriel Ascometal connaît malheureusement des difficultés depuis plusieurs années. Sa reprise à la barre du tribunal en 2014 ne lui a pas permis d'atteindre l'équilibre économique pourtant recherché. Face aux besoins massifs de financements pour opérer le redressement du groupe, il a été décidé, il y a plusieurs mois, d'engager une recherche de repreneurs. Si le cadre procédural diffère pour ces deux entités – redressement judiciaire pour Ascometal et procédure de sauvegarde pour Ascoval – , le Gouvernement a une approche globale de l'avenir de la totalité du groupe. Soyez assurée, madame la députée, que les services du ministère sont particulièrement mobilisés sur ce dossier.
Je comprends l'inquiétude des salariés d'Ascoval ; l'ouverture d'une procédure collective est toujours une épreuve pour les salariés et l'attente dans ce contexte est extrêmement pénible. Vous avez raison de souligner que la procédure entre dans une phase importante, puisque trois offres viennent d'être déposées et sont examinées attentivement, d'une part sous l'angle du périmètre qu'elles recouvrent, d'autre part sous l'angle de leurs moyens de financement, et, enfin, du point de vue des conditions spéciales qui s'attachent à chacune d'entre elles. Il appartiendra ensuite au tribunal de grande instance de Strasbourg d'examiner ces offres et de retenir celle qui permettra, dans les meilleures conditions, d'assurer le plus durablement l'emploi et le paiement des créanciers, et qui présentera les meilleures garanties d'exécution. Avant de statuer, le tribunal devra recueillir l'avis du ministère public, des organes de la procédure, mais également celui des instances représentatives du personnel. D'après les informations dont je dispose, nous nous orientons vers une audience fin janvier. Je vous confirme une fois de plus, madame la députée, la complète détermination du Gouvernement, des services du ministère et de moi-même pour qu'une solution crédible de reprise soit identifiée.
Je vous remercie, madame la secrétaire d'État, de votre réponse.
J'aimerais avoir quelques précisions concernant l'offre proposée par Liberty. Elle ne semble pas dans un premier temps concerner Ascoval, mais pouvez-vous me le confirmer ? Et qu'en est-il de la position de Vallourec dans ce dossier ?
Les offres, y compris celle dont vous parlez, sont encore à l'examen. Je ne veux donc pas préjuger des conclusions qu'en tireront les services et le tribunal. Je ne peux pas préciser à ce stade la position de Vallourec.
La parole est à M. Patrice Verchère, pour exposer sa question, no 41, relative aux abattements sur la taxe d'habitation des communes nouvelles.
La loi de finances rectificative pour 2015 a introduit dans le code général des impôts un article 1411-II quater qui crée une situation particulière pour les communes nouvelles membres d'un EPCI à fiscalité propre. En effet, cet article prévoit, en cas de création de commune nouvelle, telle celle de Cours, dans le Rhône, l'abrogation pure et simple pour lesdites communes des abattements existants au niveau communautaire – je rappelle que ces abattements sont issus du transfert par les départements de la taxe d'habitation aux EPCI. Ainsi, les contribuables de la commune nouvelle redevables de la taxe d'habitation ne bénéficient plus des abattements accordés aux contribuables des autres communes du même EPCI à fiscalité propre, ce qui entraîne une rupture d'égalité devant l'impôt.
Appliquée seulement depuis 2017 par l'administration fiscale, cette disposition remet en cause le principe constitutionnel d'égalité des citoyens devant l'impôt, principe issu de la déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789. Une telle disposition est donc à la merci de la première question prioritaire de constitutionnalité qui sera posée à ce sujet.
Dans ce contexte, le Gouvernement envisage-t-il de supprimer cette disposition, qui certes n'est pas le fait du ministre actuel, mais qui fragilise juridiquement la levée de l'impôt sur les communes concernées, et de rembourser les contribuables lésés par le calcul de leur taxe d'habitation pour 2017 ?
La parole est à Mme la secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie et des finances.
Monsieur le député, je vous prie d'excuser Gérald Darmanin, ministre de l'action et des comptes publics, qui n'a pas pu être présent de matin.
Vous contestez la suppression des correctifs d'abattements de la taxe d'habitation prévus au II quater de l'article 1411 du code général des impôts en cas de création d'une commune nouvelle. Comme vous le savez, la part départementale de la taxe d'habitation a été transférée aux EPCI en 2010. Afin d'assurer la neutralité de ce transfert pour les contribuables, le II quater de l'article 1411 du code général des impôts a prévu que les abattements appliqués dans les communes ou dans les EPCI fassent l'objet d'un ajustement, ce qu'on appelle les « correctifs d'abattements ». La loi de finances rectificative pour 2015 a complété ce dispositif en prévoyant, en cas de création de commune nouvelle, la suppression de ces correctifs d'abattements à compter de l'année au cours de laquelle les abattements appliqués sur le territoire de cette commune sont harmonisés.
Il n'est pas envisagé de modifier ce dispositif qui est logique, et ce pour quatre raisons. En premier lieu, la création d'une commune nouvelle se faisant à partir de la fusion de plusieurs communes, elle implique que celle-ci mette en place sa propre politique d'abattements et doive donc les harmoniser sur tout son territoire. Garder les correctifs hérités de 2011 et appliqués par les anciennes communes de son territoire n'a alors plus de sens. Ils sont donc supprimés. En deuxième lieu, la suppression des correctifs d'abattements s'applique aussi aux EPCI auxquels appartenaient les anciennes communes aujourd'hui fusionnées lorsqu'ils n'ont pas déjà adopté leur propre politique d'abattements. En effet, dans le cas où un EPCI n'a pas institué sa politique d'abattements, leur correction a été déterminée à partir des données communales issues de 2010. Avec la création de la commune nouvelle, ce maintien n'a pas de sens. La suppression de la correction des abattements s'applique donc à la fois à la part communale et à la part intercommunale. En troisième lieu, revenir sur le principe de la suppression des correctifs conduirait à maintenir, sur le territoire d'une même commune nouvelle, des correctifs différents sur chacun des périmètres correspondant aux territoires des anciennes communes, et ce alors même que les abattements auront été harmonisés. Il s'ensuivrait une différence de traitement entre les redevables, ce qui porterait atteinte au principe d'égalité devant les charges publiques. En quatrième lieu, la suppression du mécanisme de correction des abattements étant tantôt favorable, tantôt défavorable aux contribuables selon les cas, puisque la variable d'ajustement mise en place en 2011 est susceptible d'augmenter ou de diminuer la cotisation des redevables, si l'EPCI veut en atténuer les effets, il peut tout simplement délibérer en vue de mettre en place sa propre politique d'abattements sur l'ensemble de son territoire.
Madame la secrétaire d'État, une telle situation va poser de vrais problèmes pour la création de communes nouvelles. Il y a bien sûr, vous venez de le dire, une rectification au niveau des abattements pour que ceux-ci soient communs sur tout leur territoire, et cette unification est bien entendu nécessaire. Mais l'exemple de la ville de Cours que j'ai évoqué montre qu'en unifiant ces abattements – ou en les supprimant selon le choix de la commune nouvelle – , on supprime des abattements départementaux transférés aux EPCI dont bénéficiaient éventuellement auparavant les habitants de la commune nouvelle. Le problème ne concerne pas uniquement la commune nouvelle, mais aussi l'EPCI, communauté de communes ou, en l'occurrence, communauté d'agglomération, le contribuable de la commune voisine qui n'a pas fusionné continuant à bénéficier des abattements sur la taxe d'habitation qu'il paye à l'EPCI alors que le contribuable de la commune nouvelle n'en bénéficie plus. Il y a donc bien une rupture d'égalité devant l'impôt entre ceux de la commune nouvelle et ceux des communes voisines membres du même EPCI. Cela pose un vrai problème. L'Association des maires de France est saisie de cette affaire. Si on veut qu'il n'y ait plus de communes nouvelles en France, ne changeons rien. Certes, vous n'y êtes pour rien puisque cela date de 2015, mais il y a là une vraie erreur. Nous allons poser une question prioritaire de constitutionnalité, parce qu'il s'agit d'une vraie rupture devant les charges publiques entre les contribuables de la commune nouvelle, qui payent leur taxe d'habitation à l'EPCI, et ceux des autres communes du même EPCI, qui, eux, continuent à bénéficier des abattements – ceux décidés antérieurement par le département du Rhône en l'occurrence. Je tenais à le dire, madame la secrétaire d'État.
La parole est à M. Stéphane Mazars, pour exposer sa question, no 50, relative aux aides « qualité veau sous la mère ».
Ma question porte sur les retards de régularisation dans le versement des aides qualité « veau sous la mère » et « veau bio » pour la campagne 2016. Dans le cadre de cette campagne, la première fraction d'aides « veau sous la mère », a été versée, bien qu'abaissée par rapport au montant annoncé de 35 euros par veau éligible et de 70 euros par veau labellisé. Par contre, la fraction complémentaire, représentant la différence entre le montant estimatif et le montant définitif, reste due.
Cette situation préoccupe particulièrement les éleveurs de cette filière d'excellence, et ce à deux titres : d'une part, rien n'explique la diminution du montant unitaire estimatif à 27,50 euros par tête au titre de veau éligible, et donc au double, 55 euros, au titre de veau labellisé, et malgré ce qu'a acté l'arrêté ministériel du 22 juin 2017 ; d'autre part, alors que la campagne est terminée depuis maintenant plusieurs mois et compte tenu de la stabilité du montant des enveloppes PAC et du nombre de veaux en label connus, le montant unitaire définitif de l'aide « veau sous la mère » devrait s'élever à 37,50 euros par tête éligible et au double – 75 euros – par tête labellisée.
Aussi, considérant le montant unitaire estimatif versé et le montant unitaire définitif – 37,50 euros ou 75 euros – , il apparaît un manque à verser par tête respectivement de 10 euros par veau éligible et de 20 euros par veau labellisé. Mais plus encore que de ce différentiel, soit le montant du delta, les éleveurs s'inquiètent de ne pas connaître encore à ce jour la date du versement.
Madame la secrétaire d'État, je vous remercie de bien vouloir rassurer les éleveurs de cette filière d'excellence, en particulier ceux de mon département, l'Aveyron, en indiquant quel est le montant unitaire exact « veau sous la mère » retenu par l'administration et de préciser le calendrier de versement du delta de l'aide, sans laquelle nos éleveurs auront les plus grandes difficultés à maintenir leur production.
La parole est à Mme la secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie et des finances.
Monsieur le député, je vous prie d'excuser M. Stéphane Travert, ministre de l'agriculture et de l'alimentation, qui ne peut pas être avec nous ce matin. Vous avez raison, les paiements des aides au veau sous la mère et au veau bio au titre de la campagne 2016 ont été effectués en deux vagues, l'une en juin, l'autre en juillet 2017.
Ces retards de paiement étaient été dus à un problème de calibrage des deux enveloppes au regard du nombre d'animaux éligibles. Or modifier leur calibrage impliquait de recueillir l'accord de la Commission européenne.
Le ministère de l'agriculture et de l'alimentation a donc réuni en juin les représentants de la profession afin de faire le point sur ce dossier et de leur présenter la stratégie retenue au niveau européen.
Il a réussi in fine à obtenir un accord de la Commission, ce qui a permis la revalorisation des montants unitaires. Les montants unitaires définitifs ont été établis par un arrêté du 18 juillet : 27,50 euros par tête pour les veaux labellisables et 55 euros par tête pour les veaux labellisés.
C'est moins que ce que la profession attendait, mais nettement mieux, s'agissant de l'aide au veau labellisé, que le montant provisoire fixé en juin. Pour la campagne 2017, les enveloppes ont été calibrées au mieux afin de tenir compte des nouvelles règles de fongibilité.
Toutefois, le montant unitaire retenu dépendra du nombre d'animaux éligibles. J'appelle néanmoins votre attention sur le fait que les aides couplées mises en place par la France font l'objet d'une procédure d'audit par les services de la Commission européenne.
Si l'important travail réalisé par le ministère de l'agriculture et de l'alimentation a permis de sécuriser la très grande majorité des régimes d'aides couplées, le dispositif d'aides au veau sous la mère continue de susciter des interrogations fortes de la part de la Commission, interrogations qui pourraient se traduire, in fine, par la suppression de cette aide pour les campagnes à venir.
Les professionnels ont été avertis de ce risque par le ministère de l'agriculture et de l'alimentation, qui reste pleinement mobilisé en vue de pérenniser ce régime d'aides pour la fin de la programmation.
Je vous remercie pour votre réponse, madame la secrétaire d'État. Je crains cependant que sur le fond, les éleveurs ne soient pas pleinement satisfaits, dans la mesure où le deuxième versement au titre de la campagne 2016 n'a toujours pas été effectué.
Si je ne reviens pas sur le montant retenu pour le premier versement, ils attendent toujours le versement du second. Or dans votre réponse, madame la secrétaire d'État, vous ne donnez toujours pas de date pour celui-ci, alors que cela permettrait aux éleveurs d'organiser effectivement la bonne gestion de leur exploitation.
Une difficulté subsiste donc. Nous savons aujourd'hui que ces aides au veau sous la mère sont sous le regard de la Commission européenne, mais aussi que le ministère de l'agriculture et de l'alimentation tient au maintien de ces filières d'excellence que sont le veau sous la mère et le veau bio.
J'espère bien évidemment que les intérêts de ces éleveurs seront préservés, d'autant que dans le cadre des États généraux de l'alimentation – les EGA – , nous sommes en train de structurer les filières et souhaitons veiller à que ce type d'élevage puisse bénéficier d'une plus-value.
Son modèle économique semble aujourd'hui correspondre à l'état d'esprit dans lequel s'inscrivent les EGA. Tels sont les éléments de réponse que je souhaitais porter à votre connaissance, madame la secrétaire d'État.
Je reste quoi qu'il en soit un peu sur ma faim s'agissant du montant restant à percevoir par les éleveurs de veaux sous la mère au titre de la campagne 2016 et du calendrier, qui reste malheureusement totalement opaque.
La parole est à Mme Marie-France Lorho, pour exposer sa question, no 65, relative à la situation de la filière vito-vinicole.
Il y a quelques jours, dans notre hémicycle, la majorité a rejeté une exonération fiscale portant sur le contrat vendanges. Le motif de ce rejet était assez intéressant : une telle mesure aurait créé une sorte de discrimination positive dans la filière vito-vinicole !
Cela fait partie des merveilles de notre fonction : nous pouvons tirer du bien d'un concept dangereux.
Nous avons besoin de soutenir massivement nos viticulteurs qui sont déjà, sur des sujets comme les droits de plantation ou l'appellation château, confrontés au danger européen. Il nous faut également les accompagner dans l'exportation et la valorisation d'un savoir-faire français.
Nous devons aussi réparer une part du mal que l'État fait en ne permettant pas l'assurance des parcelles viticoles ou en interdisant, par le matraquage fiscal, la constitution de réserves financières.
Cette année, au mois d'avril, dans certaines zones du Vaucluse comme du Luberon, 50 % des vignes ont été touchées par le gel : ce phénomène nous interpelle sur la survie de toute une filière économique et culturelle face aux événements climatiques.
Deux demandes étaient alors formulées : la possibilité pour les vignerons d'adopter, en cas de crise due à des incidents climatiques, un comportement de négociant et un plan de développement des assurances dans le secteur. Que compte faire le ministère de l'agriculture et de l'alimentation sur ces deux sujets ?
La parole est à Mme la secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie et des finances.
Madame la députée, vous interrogez M. Stéphane Travert sur le dispositif d'exonération de la part salariale des cotisations de sécurité sociale dans le cadre du contrat vendanges, ainsi que sur les raisons de sa suppression. Tout d'abord, contrairement à son objectif initial et en dépit de son coût, ce dispositif n'est jamais parvenu à rendre ces emplois plus attractifs.
En outre, la proximité de ce dispositif avec celui envisagé dans le cadre de la loi de financement rectificative de la sécurité sociale pour 2014 visant à instaurer une réduction dégressive des cotisations salariales de sécurité sociale, censuré par le Conseil constitutionnel, faisait peser un doute sérieux sur le respect par l'exonération liée au contrat vendanges du principe d'égalité entre les assurés au sein du régime agricole de protection sociale.
Par ailleurs, les salariés ayant signé un contrat vendanges bénéficieront, comme tous les autres, des mesures de gain de pouvoir d'achat prévues à l'article 8 du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2018, puisque la suppression des cotisations salariales maladie et chômage s'appliquera également aux salariés agricoles.
Je tiens à rappeler l'engagement permanent de l'État pour accompagner la filière viticole.
Comme vous l'avez souligné, votre département a été sévèrement touché par de nombreux phénomènes climatiques au cours de l'année 2017.
Dans ce contexte d'aléas multiples, un certain nombre de dispositifs ont déjà été déployés depuis cet été pour aider les viticulteurs en difficulté. S'agissant du dégrèvement de la taxe sur le foncier non bâti pour les parcelles touchées par les sinistres, le ministre de l'agriculture et de l'alimentation a sollicité son collègue Gérald Darmanin afin de faciliter la prise en compte par ses services des pertes importantes subies par les viticulteurs.
S'agissant de la prise en charge des cotisations sociales, une enveloppe de 30 millions d'euros a été répartie au niveau national dans le cadre d'un fonds national d'action sanitaire.
Par ailleurs, tout exploitant agricole se trouvant dans une situation financière et économique difficile peut solliciter auprès de la caisse de mutualité sociale agricole dont il dépend la mise en place d'un échéancier de paiement des cotisations sociales.
S'agissant des mesures d'allégement des charges, celles permettant d'accompagner la prise en charge des frais financiers liées à la restructuration de l'endettement ou à l'année blanche pour l'annuité bancaire en cours sont ouvertes jusqu'à fin 2017.
Pour aider les entreprises, des cellules d'identification et d'accompagnement des exploitants en difficulté seront mises en place dans chaque département selon une organisation rénovée.
S'agissant de l'assurance récolte, celle-ci couvre aujourd'hui 25 % des viticulteurs français : il est donc essentiel que les agriculteurs puissent, grâce au dispositif d'assurance récolte contre les risques climatiques soutenu par l'État, assurer plus largement leurs productions.
Enfin, vous évoquez le dispositif des achats de vendanges mobilisable en réponse à des phénomènes climatiques défavorables. L'arrêté et l'instruction technique aux services définissant les modalités et conditions de ces achats ont été publiés pour les vendanges 2017 afin que les préfets de département puissent dès cette année autoriser, dans les zones touchées par des phénomènes climatiques défavorables, les achats de raisins frais et de moûts par les viticulteurs sinistrés.
Madame la secrétaire d'État, je vous remercie de votre réponse. Si les mesures envisagées bénéficieront sûrement aux grandes exploitations, il faut être très vigilant concernant les petites, car ce sont elles qui ont le plus besoin d'aides. Il faut par conséquent rester vigilant à leur égard.
La parole est à Mme Françoise Dumas, pour exposer sa question, no 59, relative à la carte judiciaire et à la Cour d'appel de Nîmes.
Ma question s'adresse à Mme la garde des sceaux, ministre de la justice. La justice est une priorité de ce quinquennat, comme en témoigne la large concertation lancée le 6 octobre dernier par le Premier ministre et Mme la garde des sceaux, avec les acteurs de terrain, autour de cinq chantiers thématiques.
Sur la forme, je salue tout d'abord la méthode adoptée : la réflexion collaborative permet d'une part aux parties prenantes de s'exprimer et d'autre part de faire remonter aux ministères concernés les expériences et les initiatives locales. Elle constitue en outre le meilleur moyen de trouver un consensus et de répondre non seulement aux besoins des juridictions, mais également aux attentes de nos concitoyens.
Sur le fond, en plus de la transformation numérique, de la réforme de la procédure civile, de la procédure pénale, du sens et de l'efficacité des peines, sera étudiée la question de l'adaptation de l'organisation judiciaire.
Je vous interroge ce matin sur ce dernier chantier. L'objectif est en effet de mettre en place des équipes pluridisciplinaires autour des magistrats et de maintenir le contentieux du quotidien à proximité des justiciables.
C'est la raison pour laquelle, avec mes collègues parlementaires du Gard, nous avons récemment rencontré Mme la garde des sceaux afin d'évoquer les enjeux relatifs à la pérennité de la juridiction de Nîmes.
Cette rencontre a eu lieu au moment où Dominique Raimbourg et Philippe Houillon – tous deux anciens présidents de la commission des lois de l'Assemblée nationale – , chargés d'une mission dont les conclusions orienteront les évolutions de la carte judiciaire, débutent leurs travaux.
Si Mme la garde des sceaux a réaffirmé à l'occasion de cette rencontre son engagement à ne fermer aucune juridiction d'appel et à maintenir celle de Nîmes, des inquiétudes demeurent néanmoins quant à la spécialisation de cette dernière.
Si celle-ci devait se concrétiser, les hypothèses actuellement envisagées laissent présager de la fuite vers Montpellier et Toulouse de la moitié des contentieux aujourd'hui traités à Nîmes.
Une telle évolution aurait des conséquences importantes, non seulement bien sûr sur le nombre des magistrats en poste à Nîmes ainsi que sur les cabinets d'avocats installés dans l'agglomération, mais également, in fine, sur les justiciables, tant en termes de délai de traitement des contentieux restants qu'en termes de modalités de leur défense.
Or, parmi les principes assurant la cohérence dans l'action de la justice figurent, comme Mme la garde des seaux l'a rappelé, ceux de proximité et d'efficacité.
Pouvez-vous donc, madame la secrétaire d'État, nous communiquer des éléments de nature à répondre aux préoccupations légitimes du monde de la justice nîmois, c'est-à-dire des professionnels du droit, des élus et de nos concitoyens gardois ?
La parole est à Mme la secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie et des finances.
Madame la députée, je vous prie d'excuser Mme Nicole Belloubet, qui est absente ce matin. Elle a cependant déjà eu l'occasion d'évoquer la question importante de la réorganisation de notre réseau judiciaire.
Il s'agit, comme vous l'avez noté, d'un sujet sensible pour nos territoires comme pour l'ensemble des acteurs du monde judiciaire. Le 5 octobre dernier ont été lancés, avec le Premier ministre, les cinq chantiers de la justice, qui traduisent notre volonté de transformer la justice de notre pays.
C'est une des grandes priorités du Président de la République et du Premier ministre, comme en atteste, avec 3,9 % d'augmentation et 1 000 emplois créés, le budget pour 2018.
Ces chantiers de la justice portent sur la transformation numérique, la simplification de la procédure civile et pénale, l'efficacité de la peine et l'adaptation de l'organisation territoriale de la justice. Nous ne pouvons en rester au statu quo : il nous faut faire évoluer notre justice afin de mieux répondre aux attentes des justiciables.
Mais il faut dialoguer et ne pas imposer brutalement : c'est pourquoi il a été demandé, ainsi que vous l'avez mentionné, à deux anciens présidents de votre commission des lois – MM. Philippe Houillon et Dominique Raimbourg – de mener une mission de concertation avec l'ensemble des parties prenantes sur la question de l'organisation judiciaire.
Comme la garde des sceaux a déjà eu l'occasion de le dire, la volonté du Gouvernement est claire : le maillage actuel de nos juridictions sera maintenu. En outre, comme vous le savez, le bâtonnier du barreau de Nîmes a été reçu par la mission de concertation. Toutes les propositions qu'il aura pu formuler pourront donc être prises en compte dans ses conclusions, qui seront remises le 15 janvier prochain.
Concernant l'organisation territoriale de notre justice, la démarche suivie n'a qu'un seul objectif : adapter notre réseau aux défis qui s'imposent à la justice et rendre le meilleur service possible aux justiciables, dans des conditions optimales pour les acteurs du monde judiciaire.
Je vous remercie, madame la secrétaire d'État, pour ces précisions. J'insiste : lorsque l'on parle de proximité et d'efficacité, la Cour d'appel de Nîmes, qui a la particularité d'être à cheval sur plusieurs départements – l'Ardèche, la Lozère et le Vaucluse – et sur plusieurs régions, permet vraiment de répondre à toutes les orientations que le Gouvernement souhaite donner à sa politique judiciaire.
Je serai par conséquent, comme mes collègues gardois, extrêmement vigilante quant à l'évolution de ce dossier.
Au regard de la particularité démographique de nos deux régions, qu'il s'agisse de l'Occitanie ou de Provence-Alpes-Côte d'Azur, nous avons intérêt à garder – puisque les deux autres cours d'appel, que ce soit celle de Montpellier ou celle de Toulouse, sont, comme celle d'Aix-en-Provence, déjà surchargées – la Cour d'appel de Nîmes.
Le statu quo actuel nous permettrait, en tout cas dans un premier temps, de répondre à cette nécessité de proximité et d'efficacité.
La parole est à M. Christophe Euzet, pour exposer sa question, no 53, relative aux festivals et au label « ville festivalière ».
Monsieur le président, mesdames les ministres, chers collègues, ma question s'adresse à Mme la ministre de la culture, dont je salue la présence dans l'hémicycle, et concerne les politiques festivalières et le mécénat. Je viens d'une circonscription de l'Hérault, sur les bords de la Méditerranée, dont on mentionne plus volontiers les terres reculées à propos de la crise viticole, des difficultés ostréicoles et des problèmes économiques et sociaux. Je voudrais, à ce propos, féliciter toutes les personnes qui luttent au quotidien contre ces problèmes plutôt que de se réfugier dans la complainte. Je souhaite, pour ma part, faire référence à ces territoires pour mentionner les collectivités territoriales, les associations, les bénévoles et les bailleurs privés qui se mobilisent tout l'hiver pour organiser les festivals d'été, afin que nos vacances – vos vacances, chers collègues – se passent au mieux durant cette période où vous les rejoignez. Des dizaines de festivals sont ainsi organisés à Sète, à Pézenas, à Tourbes, à Vias, et des dizaines, voire des centaines de milliers de visiteurs se rassemblent pour les célébrer tous les étés.
Devenus une véritable marque de fabrique, ces festivals symbolisent le savoir-faire qui permet à ces acteurs et collectivités de se mobiliser pour rester vivants et attractifs. Il convient de saluer les organisations institutionnelles, les collectivités territoriales et bien sûr les associations, mais aussi d'entretenir la flamme des bénévoles, qui paient de leur personne au quotidien, et celle des bailleurs privés qui sont sollicités à cette occasion. Car comme le dit Georges Brassens, « l'arc-en-ciel qui dure un quart d'heure, personne ne l'admire plus », et l'avenir de ces festivals est évidemment incertain. Le manque des dotations, la lassitude des bénévoles, les limites du recours au mécénat : vous avez déjà été sollicitée sur ces enjeux, madame la ministre, et vous vous êtes prononcée. Ma question sera double : peut-on imaginer la création d'un label de « ville festivalière » pour encourager les collectivités les plus dynamiques et les rendre éligibles à des dotations publiques de façon prioritaire ? D'autre part, au-delà de la loi Aillagon de 2003, que faire pour que la culture du mécénat se développe dans notre pays ?
La parole est à Mme la ministre de la culture, que je remercie pour sa présence.
Monsieur le président, mesdames et messieurs les députés, monsieur Euzet, soulignant à juste titre le rôle des festivals et du spectacle vivant dans l'attractivité de nos territoires – et je connais bien le vôtre ! – , vous m'interrogez sur les actions du ministère de la culture pour les soutenir. Je tiens tout d'abord à saluer, comme vous l'avez fait, le dynamisme de l'offre festivalière en France : on ne recense pas moins de 3 000 festivals fréquentés par plus de 6 millions de visiteurs chaque année. Afin de soutenir cette tendance, les aides publiques aux festivals seront reconduites dans leur intégralité en 2018, dans le cadre d'une politique déterminée de soutien à la création et à la diffusion. Pour le spectacle vivant, le financement de l'État s'élève à 19 millions d'euros. J'ai nommé, au sein de mon ministère, un haut fonctionnaire chargé des festivals afin d'approfondir notre dialogue avec les collectivités territoriales sur l'ensemble des questions qui se posent et de favoriser le développement de cette forme de partage plébiscitée par nos concitoyens et de cet outil essentiel à la vie des artistes.
S'agissant des coûts croissants liés à la sécurité de ces manifestations, 6 millions d'euros d'aides ont été apportés depuis 2015, et le fonds d'urgence sera à nouveau abondé de 4 millions d'euros en 2018. Nous travaillons également au sein d'une cellule interministérielle à forger l'action commune de l'État. Dans ce contexte et face au risque accru de concentration, une réflexion plus globale doit être menée, en lien avec les collectivités territoriales. Je souhaite en effet qu'une attention particulière soit accordée aux festivals qui proposent des programmations exigeantes et soucieuses de la diversité artistique, et qui répondent à la double ambition de l'équité territoriale et de l'effectivité des droits culturels. Pour ce qui est du mécénat, ce soutien est encouragé par l'État et doit se renforcer, notamment en direction des TPE et des PME. Je me suis saisie de ce sujet afin d'identifier les freins à lever pour stimuler cette pratique. Vous m'interrogez enfin sur l'opportunité de créer un label « ville festivalière ». Je suis bien sûr prête à réfléchir, en lien avec la représentation nationale et les collectivités territoriales, à toute initiative de nature à promouvoir la richesse de notre savoir-faire culturel dans nos territoires.
Madame la ministre, je vous remercie pour cette réponse déterminée, persuasive et pleine de force et de conviction. Je me réjouis de vos annonces et vous appelle à entrer en échange direct avec nous dans les semaines à venir à propos de deux questions que je me permets d'évoquer publiquement. D'une part, nous envisageons le classement des joutes traditionnelles au patrimoine mondial immatériel de l'UNESCO, et j'espère que vous nous ferez l'honneur d'accompagner ce processus. D'autre part, nous sommes préoccupés par les menaces qui pèsent sur un festival local, « La maman des poissons », qui se déroule à Pézenas ; je me rapprocherai de vous pour voir comment pérenniser cette manifestation qui rassemble tous les ans 5 000 enfants pour leur présenter des bandes dessinées destinées au divertissement.
La parole est à M. Raphaël Gérard, pour exposer sa question, no 56, relative à l'abbaye de la Tenaille à Saint-Sigismond-de-Clermont.
Madame la ministre de la culture, la question du patrimoine culturel est devenue centrale, à raison : la France peut en effet se targuer d'un patrimoine exceptionnel qui participe largement à sa renommée et qui explique les près de 85 millions de visiteurs étrangers chaque année. Toutefois ce patrimoine est en danger, la plupart du temps en raison des coûts souvent très importants qu'engendre la rénovation des bâtiments, mais parfois également en raison de l'inaction fautive de certains propriétaires. J'en veux pour preuve le cas de l'abbaye de la Tenaille qui se trouve sur ma circonscription de Charente-Maritime, à Saint-Sigismond-de-Clermont. Cet ensemble patrimonial d'une valeur inestimable se compose d'une église romane classée au titre des monuments historiques – une des rares églises à file de coupoles de notre territoire – ainsi que d'un château et de ses écuries du dix-huitième siècle, inscrits au titre des monuments historiques depuis 1958. L'ensemble du site est laissé volontairement à l'abandon par son propriétaire, malgré les nombreuses injonctions qui lui ont été faites depuis plusieurs années, signe selon moi d'une malveillance coupable.
Ce défaut d'entretien de l'ensemble des bâtiments met chaque jour un peu plus en danger les habitants de la commune. Je n'ignore pas que la maire a la possibilité d'engager une procédure de péril enjoignant au propriétaire de réaliser les travaux indispensables pour garantir la sécurité du public, voire de s'y substituer en cas d'inaction. Cependant cette petite commune de 166 habitants n'a pas les moyens financiers ni juridiques pour engager ce type de procédure. En outre, les bâtiments menaçant ruine, bien que protégés, ne sont qu'inscrits au titre des monuments historiques et non classés, ce qui ne permet pas à vos services d'enjoindre le propriétaire à agir. Ce problème déjà soulevé par de nombreux élus avant moi explique le désarroi profond que ressent aujourd'hui la maire de cette commune.
Enfin, et au-delà du fait que les bâtiments menacent la sécurité publique, nous sommes face à un site patrimonial qui doit être considéré comme un ensemble, fruit d'une histoire, et dont la disparition faute d'entretien serait plus que regrettable pour notre territoire. Je ne doute pas, madame la ministre, que vous avez déjà déduit de mes propos la double question que je compte vous poser. D'une part, pouvez-vous nous informer sur ce que comptent faire les services déconcentrés de votre ministère pour soutenir ces collectivités dans la sauvegarde d'un patrimoine menacé par la négligence coupable de propriétaires privés défaillants ? D'autre part, envisagez-vous de travailler à un dispositif contraignant, voire coercitif, pour que ces situations, ô combien nombreuses, ne perdurent plus ?
Monsieur le président, mesdames et messieurs les députés, monsieur Gérard, comme vous le soulignez, les vestiges de l'abbaye de la Tenaille font l'objet d'une protection mixte au titre des monuments historiques depuis 1958 : la chapelle romane est classée tandis que les façades et toitures du château et des écuries du dix-huitième siècle sont inscrites. Les services du ministère de la culture ont régulièrement appelé l'attention de son propriétaire, qui réside aux États-Unis, sur la situation très dégradée de cet ensemble et notamment sur les risques d'effondrement des toitures. En 2013, le propriétaire a affiché sa volonté de faire réaliser des études et travaux par un architecte du patrimoine. La direction régionale des affaires culturelles, la DRAC, a donc réservé, année après année, des crédits pour contribuer à la réalisation de ces travaux sans que la situation n'évolue. Le ministère a alors mis en demeure le propriétaire de l'abbaye de la Tenaille de réaliser les travaux nécessaires à sa sauvegarde.
Faute d'un lancement rapide des travaux, une procédure particulièrement contraignante permettant à l'État de se substituer au propriétaire en engageant des travaux d'office, puis de recouvrer la moitié du coût de ces travaux auprès du propriétaire, sera ainsi mise en oeuvre sur la partie classée. S'agissant de la partie inscrite de cet ensemble, en application du code de la construction et de l'habitation, le maire peut prendre un arrêté de péril, enjoignant au propriétaire de réaliser les travaux indispensables pour garantir la sécurité du public. Dans cette hypothèse, l'État se tient prêt à appuyer la commune et le propriétaire, notamment par l'octroi de subventions. Sachez enfin que l'abbaye de la Tenaille pourrait également avoir vocation à bénéficier du fonds pour le patrimoine en péril, institué grâce à l'adoption récente par le Parlement d'une disposition créant un loto du patrimoine.
Madame la ministre, je vous remercie pour cette réponse. En effet, je sais que vous avez fait du patrimoine et du budget alloué à sa restauration une priorité pour les années à venir. Ce cas met en lumière un trou dans le dispositif existant, du fait de la mixité de la protection. Des tentatives avaient été faites pour obtenir le classement des deux parties de bâtiments qui ne sont qu'inscrites, mais elles n'ont malheureusement pas abouti. Il faut néanmoins se poser la question de ce patrimoine. Peut-être que la mission confiée par le Président de la République et par vous-même à Stéphane Bern permettra d'identifier ces patrimoines privés qui se situent dans une zone grise de notre dispositif et d'apporter des réponses précises car, je le répète, pour une commune de la taille de Saint-Sigismond-de-Clermont, ce patrimoine est très important, même si une partie des bâtiments n'est qu'inscrite aux monuments historiques.
La parole est à M. Grégory Galbadon, pour exposer sa question, no 58, relative au théâtre municipal de Coutances.
Monsieur le président, madame la ministre, chers collègues, je souhaite vous interroger, madame la ministre, sur le festival « Jazz sous les pommiers » et plus particulièrement le théâtre municipal de Coutances, le TMC. « Jazz sous les pommiers » se tient chaque année depuis 1982. Avec plus de 100 000 spectateurs accueillis, il est le troisième festival français et le moins cher pour la billetterie. Sa programmation est éclectique, allant du jazz aux musiques électroniques ainsi qu'aux spectacles de rue. Au programme, toujours des grands noms et des découvertes, des artistes internationaux et des figures locales. Le Comité coutançais d'action culturelle, le CCAC, est la structure porteuse du TMC et du festival « Jazz sous les pommiers ». Il croise deux déclinaisons artistiques aux objectifs communs : résidences d'artistes, découverte de nouveaux talents, soutien à la création, recherche de nouveaux publics, éducation artistique, soutien aux pratiques en amateur et aux artistes en région.
Au-delà de la manifestation ponctuelle « Jazz sous les pommiers », le TMC s'emploie à faire vivre la culture dans notre territoire en présentant toute l'année une programmation en direction de la jeunesse. Il propose des spectacles pour tous les niveaux de classes, de la maternelle au lycée. Au moment du développement de la nouvelle communauté de communes Coutances, mer et bocage, il voit sa capacité d'accueil du public scolaire diminuer. Le TMC vient d'accéder au dispositif « scène conventionnée d'intérêt national », mention « Art, enfance et jeunesse ». Nous en sommes très fiers. Il est ainsi soutenu par le ministère de la culture, à travers la DRAC Normandie, mais aussi par la ville, la communauté Coutances, mer et bocage, le département et la région.
Fort de son succès, mais aussi de ses nouveaux engagements, le TMC souhaite avoir les moyens de maintenir la qualité de son travail et son volume actuel. Il s'agirait de consolider les postes des personnes qui y travaillent, d'accroître la capacité d'accueil du jeune public et de renforcer les moyens de soutien à la création. Dans une ville de 9 000 habitants et un bassin de vie de plus de 50 000 personnes, il est rare de trouver une structure comme le CCAC qui porte une saison d'envergure régionale et un festival de dimension internationale. Je vous interroge donc, madame la ministre, sur la pérennité du nouveau dispositif « scène conventionnée d'intérêt national », moins sécurisant qu'une labellisation, et sur les moyens que les DRAC alloueront à ce titre. Quel avenir réserve-t-on à cette belle initiative de plus de trente ans, qui fait vivre le théâtre, la culture et le jazz dans la Manche ?
Monsieur le président, mesdames et messieurs les députés, monsieur Galbadon, vous m'interrogez sur le soutien que le ministère de la culture entend apporter au théâtre municipal de Coutances et au festival « Jazz sous les pommiers », devenu incontournable dans le monde du jazz pour la qualité de sa programmation et l'importance de son audience. Je vous en remercie, car cela m'offre l'occasion de saluer dans cette enceinte le travail remarquable de cette structure en particulier, scène conventionnée depuis 2003, mais aussi de toutes celles qui, comme elle, font naître sur nos territoires une vie culturelle de qualité et de proximité. En 2018, le ministère de la culture a confirmé son soutien financier au théâtre, dans le cadre des scènes conventionnées, devenues scènes conventionnées d'intérêt national, à hauteur de 55 000 euros.
À ce dispositif se sont ajoutées une subvention de 113 430 euros apportée au festival « Jazz sous les pommiers » et une autre de 12 500 euros en soutien à la résidence de la batteuse de jazz Anne Paceo dans le cadre du dispositif « compositeur associé » mis en place conjointement par le ministère de la culture et la Société des auteurs, compositeurs et éditeurs de musique, SACEM. Monsieur le député, mon ministère accorde et continuera à accorder toute l'importance qu'elle mérite à cette structure dont l'action, notamment à destination des jeunes publics, rejoint, vous le savez, la priorité que je me suis fixée : permettre à toutes et à tous, et surtout aux plus éloignés de la culture, de rencontrer les artistes et leurs oeuvres.
Je vous remercie de votre réponse, madame la ministre. Vous serez toujours bienvenue pour assister au festival « Jazz sous les pommiers ».
La parole est à M. Sébastien Jumel, pour exposer sa question, no 37, relative à la profession d'ivoirier artisan d'art.
Madame la ministre de la culture, la sculpture de l'ivoire est intimement liée à l'histoire de Dieppe, qui possède la deuxième collection d'Europe d'ivoires, avec plus de 2 000 objets conservés au château-musée. L'activité ivoirière, qui s'est développée à partir du XVIe siècle, a fait du port de Dieppe une place portuaire internationale. De la dînette en ivoire remise à Henri IV au couteau en ivoire de mammouth et contenant un fragment de la météorite Gibéon offert au Dieppois Thomas Pesquet, la prestigieuse production dieppoise a essaimé dans tous les hauts lieux du pouvoir. Un atelier dieppois a compté jusqu'à quarante ouvriers au XIXe siècle, âge d'or de la sculpture d'ivoire à Dieppe.
Aujourd'hui, Dieppe compte encore deux ateliers. Les professionnels de la sculpture de l'ivoire – moins de dix en France – sont reconnus artisans d'art par un arrêté ministériel du 24 décembre 2015, eu égard aux qualités et spécificités de ce métier. Ils sont indispensables à la restauration des pièces en ivoire des collections publiques conservées dans nos musées – musée de Dieppe, musée Guimet, musée de Commercy, notamment.
Le 16 août 2016, Ségolène Royal, ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie a interdit par décret toute vente d'objet sculpté réalisé à partir de stocks d'ivoire ancien. Légitimement engagé dans la lutte contre le trafic international d'ivoire, le ministère n'a alors pas pris la pleine mesure des conséquences de cette décision, non concertée, sur l'économie du métier d'ivoirier.
Aujourd'hui, les ateliers sont asphyxiés par l'interdiction de vente qui s'impose à eux, alors même qu'ils ne travaillent qu'à partir de stocks d'ivoire anciennement constitués, souvent transmis de génération en génération, et expertisés par la brigade de la Convention sur le commerce international des espèces de faune et de flore sauvages menacées d'extinction – CITES. Leur travail n'a donc aucune part dans le trafic international d'ivoire, qui entraîne le braconnage des éléphants, ni incidence sur celui-ci.
Depuis 2016, nous avons multiplié les démarches pour sauver les ivoiriers victimes d'une mesure bien intentionnée, mais manifestement mal ciblée. Une modification du 4 mai 2017 apportée au décret a levé l'interdiction pour deux autres professions, les facteurs d'orgue et de piano.
Reste le métier culturel d'ivoirier. Aujourd'hui, madame la ministre, je vous demande ce que vous comptez entreprendre pour sauver le métier d'art d'ivoirier de la disparition certaine à laquelle le condamne le décret du 16 août 2016, en l'état. Cette profession participe pourtant du rayonnement culturel de notre pays : son savoir-faire rare est indispensable à l'entretien des collections publiques d'objets en ivoire.
À ce titre, j'associe à ma question les artisans couteliers de Thiers et de sa région qui travaillent certaines de leurs pièces avec de l'ivoire ancien.
Monsieur le député, je salue votre engagement pour les métiers d'art, et particulièrement celui d'ivoirier, qui, par leur richesse, contribuent au rayonnement de la France dans le monde.
Comme vous le savez, l'arrêté du 4 mai 2017 portant modification de l'arrêté du 16 août 2016 relatif à l'interdiction du commerce de l'ivoire d'éléphants et de la corne de rhinocéros sur le territoire national a été conçu en accord avec les représentants des professionnels, reçus par le ministère de l'environnement, de l'énergie et de la mer.
Des aménagements ont ainsi été apportés pour le commerce d'articles de coutellerie et pour la restauration des objets fabriqués avant le 18 janvier 1990 avec de l'ivoire légalement importé sur le territoire de l'Union européenne avant cette date, à condition d'utiliser de l'ivoire provenant du stock d'ivoire brut détenu par le restaurateur avant la Convention sur le commerce international des espèces de faune et de flore sauvages menacées d'extinction.
Aujourd'hui, et malgré ces dérogations, la profession d'ivoirier est fortement fragilisée, ce que je déplore. En effet, vous le savez, monsieur le député, le ministère de la culture a une responsabilité particulière dans le domaine des métiers d'art. J'ai récemment reçu leurs représentants afin d'attribuer des certificats à certains métiers, et valoriser leur transmission. Nous veillons à préserver ces métiers magnifiques, à les soutenir et à les valoriser car ils contribuent non seulement à préserver notre patrimoine, mais aussi à assurer la vitalité de la création et le rayonnement de la France à l'international.
C'est pourquoi, monsieur le député, mes services se rapprocheront de ceux du ministère de la transition écologique et solidaire, afin d'étudier la situation particulière des ivoiriers que vous avez souhaité relayer, ce dont je vous remercie.
Je vous remercie, madame la ministre, de cette réponse. Je me tiens évidemment à votre disposition pour accompagner ces réunions de travail.
J'insiste sur le fait que ces ivoiriers travaillent près de quatre kilogrammes d'ivoire par an provenant de stocks anciennement constitués et parfaitement répertoriés par le CITES. Leur travail, vous l'avez bien compris, madame la ministre, n'est donc pas de nature à aggraver le trafic d'éléphants, que je condamne par ailleurs.
Par ailleurs, Dieppe est l'une des cinq premières villes de France à avoir reçu le label Ville d'art et d'histoire, ce qui est le fruit d'un engagement fort de la collectivité dont j'ai été le maire, pour valoriser, préserver et faire rayonner le patrimoine culturel, artistique et immatériel que représente le savoir-faire des ivoiriers.
J'attache beaucoup d'importance à ce que ces réunions de travail débouchent dans un délai court sur des solutions pragmatiques prenant en compte la spécificité et les difficultés de vie des ivoiriers. Je vous remercie, madame la ministre, de l'attention que vous avez bien voulu porter à ce sujet.
La parole est à Mme Patricia Mirallès, pour exposer sa question, no 61, relative aux effectifs de magistrats au tribunal de grande instance de Montpellier.
Madame la garde des sceaux, ministre de la justice, par décret no 2016-514 du 26 avril 2016, les dispositions de l'article R. 212-64 du code de l'organisation judiciaire ont été complétées aux fins de créer des conseils de juridiction, co-présidés par le président du tribunal et le procureur du parquet, visant à instaurer un lieu d'échanges et de communication entre la juridiction et la cité.
Lors du premier conseil de juridiction, qui s'est tenu le 6 novembre 2017, il a été rappelé que le tribunal de grande instance de Montpellier connaissait la plus forte activité des juridictions du groupe 2, avec 1 254 affaires poursuivables par mois, alors que des villes comme Nice et Nancy en comptaient respectivement 801 et 673.
Cette activité particulièrement dense s'explique notamment par une forte augmentation mensuelle du nombre de nouveaux habitants – près de 1 250 personnes supplémentaires par mois depuis une dizaine d'années – et par une activité touristique particulièrement développée, Montpellier accueillant 5 millions de visiteurs par an alors que le département de l'Hérault voit sa population multipliée par cinq en période estivale.
Or il convient de relever corrélativement que le parquet du tribunal de Montpellier jouit du taux de magistrats par habitant le plus faible des juridictions de même échelle. Ainsi, le parquet de Montpellier dénombre 1,85 magistrat pour 1 000 habitants alors que des villes connaissant une moindre délinquance, comme Nice ou Grasse, bénéficient en moyenne de 2,88 magistrats pour 1 000 habitants. En d'autres termes, le parquet de Montpellier compte quinze magistrats en lieu et place des vingt-deux ou vingt-trois qui devraient officier si l'on appliquait le ratio en vigueur dans des juridictions comparables.
Madame la ministre, je souhaiterais donc connaître vos ambitions en matière de recrutement de magistrats pour le parquet du tribunal de grande instance de Montpellier et l'échéance à laquelle celui-ci pourra bénéficier de l'effectif nécessaire à une réponse pénale à la fois réactive et de qualité.
Madame la députée, je vous prie tout d'abord d'excuser Mme la garde des sceaux, ministre de la justice, qui ne peut être présente aujourd'hui.
Vous avez appelé l'attention du Gouvernement sur les effectifs de magistrats au parquet du tribunal de grande instance de Montpellier. Nous souhaitons souligner en premier lieu que, depuis plus de cinq ans, des moyens ont été mobilisés sur le plan national pour accompagner la mise en oeuvre des différentes réformes engagées. Une attention particulière a été portée au recrutement par une augmentation du nombre de postes offerts aux concours. En outre, des concours complémentaires ont été organisés.
Le budget de la justice pour l'année 2018, en augmentation de 3,9 %, sera la première étape d'une loi de programmation sur cinq ans visant à améliorer le fonctionnement quotidien des juridictions : 148 créations de postes dans les services judiciaires, dont 100 postes de magistrats, viendront ainsi combler pour partie les vacances de postes en juridiction et développer les équipes autour du magistrat.
En solde net, près de 159 magistrats viendront renforcer les juridictions en 2018. Un effort tout particulier sera accompli pour résorber la vacance des emplois dans les juridictions pour lesquels les besoins sont les plus importants.
À cet égard, la cour d'appel de Montpellier constitue un point d'attention, notamment en matière de lutte contre la criminalité organisée. S'agissant plus particulièrement du parquet du tribunal de grande instance de Montpellier, les quinze postes figurant dans la circulaire de localisation des emplois pour l'année 2017 sont tous pourvus à ce jour, cette juridiction ayant également bénéficié de la création d'un nouveau poste de vice-procureur de la République en 2016.
Les services du ministère de la justice continueront de porter une attention particulière à la situation des effectifs du tribunal de grande instance de Montpellier, notamment dans le cadre des dialogues de gestion et de l'élaboration des prochains projets de nomination de magistrats ainsi que de la liste des postes offerts aux auditeurs de justice de la promotion 2016.
La parole est à M. Bertrand Sorre, pour exposer sa question, no 54, relative aux audiences foraines du tribunal de grande instance de Coutances.
Madame la garde des sceaux, ministre de la justice, j'appelle votre attention sur les audiences foraines tenues par les juges et greffiers du tribunal de grande instance de Coutances, dans le département de la Manche.
Lorsque le tribunal de grande instance d'Avranches a été fermé en 2010, il a été convenu que des audiences foraines du tribunal de Coutances, dans le ressort duquel le Sud-Manche se trouve désormais compris, se tiendraient régulièrement au tribunal d'instance d'Avranches, pour maintenir une égalité d'accès à la justice de grande instance des populations de nos territoires ruraux éloignés de Coutances.
Ces audiences foraines, qui peuvent se tenir hors des murs du palais de justice et dans une autre commune que celle où siège la juridiction, permettent aux habitants d'un territoire d'accéder à une justice de proximité. À titre d'exemple, il faut en moyenne une heure vingt-cinq pour parcourir les quatre-vingt-trois kilomètres qui séparent la commune du Teilleul du tribunal de grande instance de Coutances.
Jusqu'à ce jour, cet engagement a été tenu, mais j'ai appris qu'il est actuellement remis en cause. En effet, le bâtonnier de Coutances m'a alerté d'un manque de personnel de greffe, à la suite des départs en retraite simultanés de plusieurs agents, alors qu'il n'est pas prévu de pourvoir leurs postes dans l'immédiat. Ma crainte est malheureusement justifiée puisque, à compter du 1er janvier 2018, il n'y aura plus, à Avranches, que des séances concernant les affaires familiales.
Tout le monde a conscience des difficultés et de la situation des juridictions du pays, et il serait incompréhensible que ces audiences foraines soient amenées à disparaître. Les habitants du sud de la Manche, s'ils devaient se déplacer à Coutances, seraient pénalisés dans leur accès à la justice de grande instance.
Avec les acteurs locaux, j'espère que le Gouvernement parviendra à remédier à cette situation, notamment au travers d'un projet de loi de programmation de la justice, assorti d'une réforme de son organisation, afin de redresser cette situation au cours du quinquennat. Il ne serait pas acceptable que les engagements pris par l'État soient soudainement remis en cause, qui plus est sans préavis ni concertation avec les représentants locaux.
Je profite également de cette question pour vous indiquer que le tribunal de grande instance de Coutances reste dans l'attente de deux affectations de magistrats du siège – sur les seize postes localisés, seuls quatorze sont actuellement pourvus – et d'un magistrat du parquet, puisque quatre postes ont été pourvus, sur les cinq localisés. Au parquet, le poste de substitut chargé des affaires des mineurs est vacant depuis septembre 2016, soit près de quinze mois, et aucune arrivée n'a été signalée.
Aussi, madame la ministre, je souhaiterais connaître les mesures que vous comptez mettre en place, d'une part, pour maintenir ces audiences foraines à Avranches et, d'autre part, pour pourvoir les postes actuellement vacants au tribunal de grande instance de Coutances.
Monsieur le député, la situation du tribunal d'instance d'Avranches, dans lequel sont organisées des audiences foraines pour assurer une proximité du contentieux de grande instance pour la population du sud de la Manche, est particulière et conjoncturelle.
Comme vous le savez, la garde des sceaux est attentive à ce que le service public de la justice soit assuré de manière pérenne, en tout point du territoire. Cinq agents sur les huit actuellement affectés au tribunal d'instance d'Avranches partiront à la retraite en moins d'une année, entre octobre 2017 et juillet 2018. Un premier adjoint administratif a quitté ses fonctions dans le courant du mois d'octobre. Par ailleurs, deux greffiers et deux adjoints administratifs quitteront leurs fonctions entre les mois de février et juillet 2018.
Cette importante vague de départs a contraint les chefs de la cour d'appel de Caen, seuls compétents en la matière, à envisager de suspendre, à partir du 1er janvier 2018, l'autorisation de tenue d'audiences foraines du tribunal de grande instance de Coutances au tribunal d'instance d'Avranches.
Toutes les dispositions nécessaires ont été prises par la direction des services judiciaires pour anticiper et combler rapidement les vacances de postes dans ce tribunal d'instance. La situation exceptionnelle de la juridiction d'Avranches pourrait conduire la direction des services judiciaires à proposer les deux postes de greffier vacants en sortie d'école, ce qui permettrait de combler rapidement les vacances de postes.
En tout état de cause, sept greffiers placés sont affectés à la cour d'appel de Caen, lesquels peuvent être délégués provisoirement dans les juridictions du ressort de la cour pour renforcer leurs effectifs. Tout sera mis en oeuvre afin que la situation des effectifs du tribunal d'instance d'Avranches se rétablisse dans les meilleurs délais, permettant ainsi une reprise rapide des audiences foraines tenues par le tribunal de grande instance de Coutances au tribunal d'instance d'Avranches.
La parole est à Mme Brigitte Kuster, pour exposer sa question, no 38, relative à la circulation autour de la Cité judiciaire de Paris.
Ma question s'adresse à M. le ministre d'État, ministre de l'intérieur. Comme vous le savez, le chantier de la future Cité judiciaire réunissant le tribunal de grande instance de Paris, la direction régionale de la police judiciaire et la maison de l'ordre des avocats s'achèvera courant 2018 à la porte de Clichy, dans le 17e arrondissement de Paris.
Ce projet titanesque, voulu et décidé par Nicolas Sarkozy en 2009, permettra de moderniser notre appareil policier et de rendre la justice dans des conditions dignes d'un grand État de droit. Mais un tel projet ne va pas sans poser de problèmes, notamment en matière de sécurité et de circulation automobile. Il faut, en effet, imaginer que la Cité judiciaire attirera pas moins de 8 000 visiteurs par jour et plusieurs milliers de personnels judiciaires.
Dans cette perspective, la mairie du 17e arrondissement a très tôt, et à plusieurs reprises, alerté la Ville de Paris sur la nécessité de créer une bretelle supplémentaire d'accès au périphérique au niveau de la porte de Clichy – demande soutenue depuis et relayée comme une priorité par la mairie de Clichy et le département des Hauts-de-Seine. Il s'agit d'une réalisation indispensable pour fluidifier la circulation, qui est déjà congestionnée dans le secteur, et faciliter le transport quotidien des détenus. Sans cet accès supplémentaire, les convois pénitentiaires et de police se trouveront dans l'obligation, pour rejoindre le périphérique, d'effectuer un long détour par la porte d'Asnières, dans une zone déjà saturée.
Mais la Ville de Paris s'y oppose, au motif qu'un tel projet contreviendrait à sa politique de réduction de la circulation automobile. Cette position ignore totalement les enjeux sécuritaires considérables qu'engendre la présence d'institutions aussi sensibles que le tribunal de grande instance et la direction régionale de la police judiciaire, qui plus est dans le contexte de menace terroriste que nous connaissons.
Dès lors, ma question est simple : êtes-vous favorable à l'installation de cet équipement indispensable à la sécurité du secteur ? Si oui, quelle part entendez-vous prendre dans son financement ? Le cas échéant, comment comptez-vous inciter la Ville de Paris à autoriser cette indispensable réalisation ?
La parole est à Mme la ministre auprès du ministre d'État, ministre de l'intérieur.
Madame la députée, la création de la Cité judiciaire est un acte majeur dans l'amélioration des conditions de travail de nos magistrats et fonctionnaires de police. Son installation dans le quartier des Batignolles, dans le 17e arrondissement de Paris, s'est accompagnée d'une réflexion sur les enjeux majeurs que constituent la sécurité et la circulation des forces de l'ordre dans le secteur.
Dès la conception du projet, ce secteur a connu des aménagements destinés à répondre aux problématiques soulevées et à intégrer la Cité judiciaire au site. Le déploiement d'un nouveau plan de circulation prenant en compte la circulation des véhicules des forces de l'ordre est prévu dès l'achèvement des travaux de voirie qui sont en cours dans le secteur de la zone d'aménagement concertée Clichy-Batignolles.
À cette fin, diverses mesures sont mises en place : l'avenue de la porte de Clichy sera aménagée en deux files de circulation et un couloir de bus circulant dans les deux sens ; mise en circulation à sens unique des rues André Suarès et du Bastion afin de préserver l'accès à la Cité judiciaire par la création d'un contresens réservé aux véhicules de police et de justice ; création d'un tunnel reliant directement les parkings de la direction régionale de la police judiciaire au boulevard Berthier pour faciliter la sortie des véhicules de police.
Par ailleurs, afin de limiter le nombre de véhicules en circulation sur le secteur, les offres en termes de transports en commun seront renforcées – ligne T3 du tramway, prolongement de la ligne 14 du métro, nouveau plan de bus.
Enfin, la création d'un accès direct au boulevard périphérique extérieur au niveau de la porte de Clichy pourrait apporter une souplesse supplémentaire à l'ensemble des voies du secteur et bénéficier à la Cité judiciaire, qui disposerait ainsi d'une alternative supplémentaire aux itinéraires et convois vers l'ouest et le sud parisiens.
Cet accès permettrait aussi aux véhicules en provenance de la banlieue et de la commune riveraine de Clichy-la-Garenne de bénéficier d'un accès direct au boulevard périphérique extérieur sans avoir l'obligation de se rabattre sur l'accès de la porte d'Asnières, située 800 mètres plus loin. La création de cette bretelle d'accès est, j'en ai conscience, fortement sollicitée par les élus du 17e arrondissement ; elle constitue également un enjeu en termes de fluidité et de sécurité.
C'est pourquoi le préfet de police a sollicité une évaluation de la direction des routes d'Île-de-France afin que soient étudiées la faisabilité technique et la pertinence d'un tel projet. Je ne manquerai pas d'en suivre les conclusions pour garantir aux riverains, forces de sécurité et magistrats le choix de la meilleure option. Bien sûr, nous vous en tiendrons informés.
Merci, madame la ministre, pour cet espoir. Je sais en effet que le préfet de région a convoqué une réunion, différentes études mettant en évidence ce problème de circulation.
J'appelle toutefois votre attention sur un point, car je comprends que vous n'avez pas tous les éléments en main : nous avons malheureusement appris hier que la ligne 14 a pris du retard et est reportée à 2020. La RATP nous a annoncé cette très mauvaise nouvelle : deux ans de retard pour soulager ce secteur, qui est celui de la ligne 13, alors que le tramway a pris également du retard. Je serai donc également amenée à interpeller la ministre des transports.
Je vous remercie pour votre présence et votre réponse, madame la ministre, ainsi que pour le soutien que vous nous apporterez pour que la Ville de Paris se trouve à vos côtés dans cette opération.
La parole est à M. Jean-Noël Barrot, pour exposer sa question, no 45, relative à la réhabilitation de la piscine de Satory.
Madame la ministre auprès du ministre d'État, ministre de l'intérieur, ma question porte sur les travaux de réhabilitation de la piscine de Satory, située sur le terrain militaire au coeur du quartier de Satory à Versailles.
Équipement sportif ouvert en 1973, composé d'un bassin d'apprentissage et d'un bassin de vingt-cinq mètres, géré par la gendarmerie, la piscine est utilisée à 15 % pour les entraînements de la gendarmerie dont ceux du groupe d'intervention de la gendarmerie nationale, le GIGN, par des familles de gendarmes ou de militaires de l'armée de terre, par des clubs sportifs civils versaillais et par certains scolaires de Versailles.
Une éventuelle fermeture de la piscine au motif qu'elle n'est utilisée qu'en petite partie pour des entraînements de gendarmerie inquiète, alors que ce taux de 15 % monte à 35 % avec les entraînements des militaires de l'armée de terre et de leurs familles.
Malgré la contrainte budgétaire pesant sur la gendarmerie et l'obligeant à faire des arbitrages pour préserver en priorité le financement de ses actions opérationnelles, un accord entre l'État et la ville de Versailles sur les solutions de financement permettrait une remise en état et le maintien durable de cet équipement sportif utile et apprécié par ses utilisateurs. Des travaux a minima permettraient de réduire significativement les chiffrages déjà évalués des travaux. Une hypothèse de transfert temporaire de gestion permettrait également d'éviter la fermeture programmée à l'été 2018.
Dans un contexte, malheureusement bien connu, de sentiment d'abandon des militaires au regard de la vétusté de leurs logements et de leurs équipements, je vous demande, madame la ministre, de nous accorder votre soutien dans ces démarches afin de trouver une issue favorable à la préservation de cet équipement sportif au-delà de l'été 2018, garantissant ainsi une continuité de service.
La parole est à Mme la ministre auprès du ministre d'État, ministre de l'intérieur.
Monsieur le député, vous m'interrogez sur l'avenir de la piscine de Satory. En effet, cette piscine est la seule au plan national dont la gendarmerie assume encore la gestion. Concrètement, la majeure partie du temps, elle est utilisée pour des activités strictement privées ou scolaires, et non professionnelles, comme vous venez de le rappeler.
D'un point de vue opérationnel, cet établissement mobilise l'équivalent de huit personnels à temps plein issus du groupement blindé de la gendarmerie mobile, alors que, dans le contexte que vous connaissez, les forces de sécurité doivent se mobiliser pour la protection de nos concitoyens.
Le ministre de l'intérieur a donc acté le retrait de la gendarmerie au 1er juillet 2018. Si des travaux de modernisation peuvent être souhaitables à moyen terme, la piscine est cependant parfaitement entretenue et répond à toutes les normes en vigueur. Son coût de fonctionnement annuel est actuellement compensé par les recettes d'exploitation.
C'est pourquoi le ministère de l'intérieur a proposé que la commune de Versailles reprenne l'exploitation à son compte, dans le cadre d'une autorisation d'occupation temporaire. Il conviendrait que les conditions d'ouverture soient préservées pour permettre aux citoyens civils comme aux militaires qui en faisaient usage de maintenir leur activité.
Le ministre de l'intérieur et moi-même partageons votre préoccupation sur l'ardente nécessité d'un effort d'amélioration des conditions de vie et de travail des militaires et de leurs familles dans un certain nombre de casernes vétustes.
Nous partageons également vos préoccupations concernant les logements. Ainsi, sur le plateau de Satory, la situation des logements du quartier Delpal fait l'objet de toutes les attentions, pour qu'une opération de rénovation puisse intervenir dans les meilleurs délais. En effet, l'amélioration des conditions de travail de ceux qui s'engagent au quotidien pour la sécurité des Français est la moindre des choses : c'est même primordial.
Je vous remercie, madame la ministre. L'une des options envisagées serait en effet un transfert temporaire de gestion, soit à la municipalité de Versailles, soit à des structures associatives qui seraient potentiellement en mesure de maintenir le site ouvert.
La parole est à M. Vincent Ledoux, pour exposer sa question, no 64, relative à la reconnaissance de l'état de catastrophe naturelle dans le Nord.
Madame la ministre, je souhaite vous interroger sur la méthodologie relative à l'examen des dossiers de reconnaissance en catastrophe naturelle, très nombreux dans le département du Nord. Ayant été maire pendant plus de seize ans, j'ai pu constater à quel point nous étions dans l'ignorance du suivi des dossiers, celui-ci étant très long. Souvent, lorsque la décision prise est contraire aux intérêts des victimes, elle est très difficile à expliciter, parce que les critères scientifiques sur lesquels s'appuie la décision sont un peu complexes pour le commun des mortels.
Les communes de Neuville-en-Ferrain et de Roncq ont ainsi connu deux épisodes importants l'année dernière – une sécheresse et une coulée de boue. L'instruction des dossiers a été très longue : plus de dix mois. Pour la victime, cela signifie qu'il se passe beaucoup de temps sans la moindre information entre la transmission de son dossier à la mairie et son instruction par les services. C'est très long lorsque votre maison a subi d'énormes fissures, comme j'ai pu le constater – et l'on sait combien une maison est extrêmement importante pour la personne qui a dû beaucoup travailler pour l'obtenir.
Actuellement, quarante-deux dossiers concernant la commune de Neuville-en-Ferrain et sept concernant la commune de Roncq sont en cours d'instruction. J'aimerais savoir si vous avez des informations sur le suivi de ces dossiers.
Par ailleurs, le Gouvernement entend-il d'améliorer la procédure, s'il ne la juge pas satisfaisante ? Sous quelle forme envisage-t-il de le faire ? Je propose qu'une commission d'enquête parlementaire soit nommée pour étudier cette question extrêmement importante, qui concerne beaucoup de familles, victimes d'événements très forts, très violents, très subits, et pour lesquelles la réponse tarde à venir.
Ce sont des questions très simples, et je vous remercie de la réponse que vous y apporterez.
La parole est à Mme la ministre auprès du ministre d'État, ministre de l'intérieur.
Monsieur le député, comme vous le précisez, l'instruction des demandes communales de reconnaissance de l'état de catastrophe naturelle nécessite des expertises et un travail interministériel conséquent s'appuyant sur des données et des analyses météorologiques, géologiques ou minières.
Chaque collectivité, chaque citoyen et en effet en droit d'attendre un examen rapide et le plus juste possible de son dossier. Les délais d'instruction, fixés par le code des assurances entre trois à cinq mois, sont en moyenne inférieurs à vingt-cinq jours depuis plus de deux ans. Cependant, les délais d'instruction dépendent directement de la nature et de l'ampleur des phénomènes naturels concernés.
Pour l'épisode de coulée de boue du 7 juin 2016 sur la commune de Roncq qui faisait suite aux inondations dans le nord de la France en mai et juin 2016, le délai que vous mentionnez s'explique notamment par le nombre très important de dossiers déposés. En effet, dans votre seul département, 1 345 dossiers ont été traités.
La demande de reconnaissance de l'état de catastrophe naturelle de la commune de Roncq a été réceptionnée par mes services le 12 juillet 2016 et a donné lieu à une décision favorable par arrêté interministériel du 16 septembre 2016 publié au Journal officiel le 20 octobre 2016.
S'agissant ensuite des épisodes de sécheresse et réhydratation des sols de l'année 2016, les demandes des communes de Neuville-en-Ferrain et de Roncq ont, quant à elles, donné lieu à deux décisions qui ont été signifiées par arrêtés des 27 septembre 2017 et 24 octobre 2017, respectivement publiés au Journal officiel les 20 octobre et 1er novembre 2017.
La répétition d'épisodes de sécheresse et de fortes pluies accroît le risque d'altération sur les bâtiments. Afin de tenir compte de ces caractéristiques, l'intensité de la sécheresse est analysée par Météo France qui établit un rapport annuel. Ainsi, plus de 2 500 demandes ont été instruites dès le mois de juin 2017, dans la foulée de la publication du rapport sur l'année 2016. La décision est prise au regard de la force et de l'intensité anormale de la cause naturelle.
Vous le savez, les demandes de Neuville-en-Ferrain et de Roncq ont été rejetées : le niveau d'humidité des sols superficiels observé ne révélait pas de sécheresse anormale pour les périodes étudiées.
Sur le deuxième volet de votre question, je tiens à affirmer devant vous que la simplification des procédures de reconnaissance de l'état de catastrophe naturelle est un objectif de ce Gouvernement, avec en ligne de mire l'amélioration des délais d'instruction. Ainsi, je vous annonce que la dématérialisation complète de la procédure est en cours, puisque l'application eCatNat, déployée à partir du premier semestre 2018, facilitera le suivi des dossiers pour les services de l'État et les communes. Ces derniers pourront ainsi répondre au mieux aux interrogations et aux attentes des sinistrés. Cette application permettra également une transmission instantanée des demandes instruites, notamment aux niveaux communal et départemental.
Je tiens à vous assurer, monsieur le député, que les préfectures et la direction générale de la sécurité civile et de la gestion des crises se tiennent à l'entière disposition des collectivités pour les accompagner.
Je salue la qualité de la réponse de Mme la ministre et j'accueille avec beaucoup de bonheur la nouvelle de la mise en service d'eCatnat qui permettra à chacun de suivre l'évolution de son dossier.
Je vous assure que les préfectures, et particulièrement celle dont je dépends, sont à l'écoute des maires. C'est un réconfort extrêmement important qu'il faut souligner. On est toujours prompt à critiquer les services de l'État, mais il faut aussi les saluer lorsqu'ils fonctionnent bien.
Enfin, le collectif, qui reste mobilisé pour défendre les biens, poursuivra son action dans les instances appropriées, notamment devant la justice.
La parole est à M. Maxime Minot, pour exposer sa question, no 42, relative à l'hôpital de Clermont et à l'offre de soins dans l'Oise.
Madame la ministre, le Président de la République et le Gouvernement auquel vous appartenez disent vouloir incarner une rupture. Or, y compris sur un sujet comme celui qui nous occupe, aussi modeste pour vous qu'il est essentiel à mes yeux, vous avez ici et maintenant l'occasion de faire de la politique autrement. Ne vous inscrivez pas dans la droite ligne du précédent gouvernement socialiste qui, pendant cinq ans, a entretenu le flou et fait de l'ambiguïté une méthode de gouvernement.
Mon prédécesseur sur ces bancs, Édouard Courtial, n'a eu de cesse de demander dans cet hémicycle, en vain, une réponse claire à une question qui l'est tout autant : quel avenir pour l'hôpital de Clermont-de-l'Oise ? Sa ténacité et, aujourd'hui, mon acharnement à m'inscrire dans ses pas illustrent notre attachement à cet établissement essentiel à l'offre de soins de proximité sur notre territoire – et qui m'est d'autant plus cher que j'y suis né.
La désertification médicale n'est pas un mirage, mais bel est bien une réalité qu'il nous faut affronter. Dans ce contexte, l'hôpital de Clermont apparaît comme un symbole, un exemple flagrant d'un double langage qui n'est pas acceptable. D'un côté, de belles promesses, et, de l'autre, la fermeture des hôpitaux dans des villes de taille moyenne au profit de structures dans les agglomérations. Il ne faudrait pas que les groupements hospitaliers de territoire desservent les territoires ruraux !
De nombreuses incertitudes demeurent. Il y a quelques jours, je me suis rendu dans les services où j'ai pu lire l'inquiétude, voire le désarroi, dans le regard des personnels dévoués et des patients.
L'autorisation de l'agence régionale de santé – ARS – pour la maternité a été renouvelée cette année, mais qu'en sera-t-il dans deux ans, alors que des rumeurs persistantes évoquent aussi la fermeture de la maternité de Creil ? J'ai d'ailleurs une pensée pour la mobilisation prévue ce soir devant cet hôpital qui connaît aussi des difficultés.
Quant à la rénovation des urgences, elle avait été annoncée par Laurence Rossignol, en 2015, alors qu'elle était en campagne. Mais rien ne bouge, et il semble même que l'enveloppe ait déjà été consommée pour financer le fonctionnement de l'établissement.
Madame la ministre, vous voulez renverser la table : prouvez-le et prenez des engagements clairs pour, enfin, assurer la pérennité de l'hôpital de Clermont !
Monsieur le député, l'ARS des Hauts-de-France s'attache à maintenir une offre de soins de proximité. Aussi souhaitons-nous accompagner les élus et les professionnels de santé désireux de mettre en oeuvre leurs projets.
Au début de 2018, un guichet unique verra le jour dans le département de l'Oise afin de permettre aux médecins et aux infirmiers de gagner du temps pour accomplir leurs formalités d'installation.
S'agissant de l'avenir du centre hospitalier de Clermont, la reconstruction du service des urgences n'est pas remise en cause, mais elle doit s'inscrire dans un projet de réorganisation globale de l'offre de soins de l'établissement.
Cette réorganisation doit également intégrer la transformation de la maternité en centre périnatal de proximité afin de garantir le maintien d'un service de proximité autour des femmes enceintes ainsi que le projet de reconstruction du secteur personnes âgées – quatre-vingt-dix lits d'unité de soins longue durée et trente lits d'établissement d'hébergement pour personnes âgées dépendantes – EHPAD. Ces projets sont soutenus par l'ARS et le conseil départemental, afin de garantir durablement l'équilibre financier de la structure. Il n'y a donc pas de fermeture de la structure.
Le centre hospitalier de Clermont travaille actuellement sur un projet d'un montant de 22 millions d'euros qui prévoit un commencement des travaux à la fin de 2018 pour un achèvement à la fin de 2020.
En ce qui concerne le groupement hospitalier de territoire – GHT – Oise Ouest et Vexin, les coopérations préexistantes au GHT entre le centre hospitalier de Clermont et celui de Beauvais ont vocation à perdurer. La population de Clermont peut ainsi bénéficier des consultations avancées des praticiens du centre hospitalier de Beauvais.
Le projet médical partagé de ce groupement prévoit plusieurs actions qui concernent particulièrement le centre hospitalier de Clermont : renforcement des actions de traitement du cancer ; création d'une unité de dialyse médicalisée ; consultations avancées en chirurgie, cardiologie, pédiatrie et néphrologie ; consolidation des liens avec le SAMU ; développement des téléconsultations ; création d'équipes médicales de territoire et d'un laboratoire public de territoire. J'espère que ces éléments permettront de vous rassurer.
Je vous remercie pour votre réponse, madame la ministre. Si vous ne dissipez pas complètement le brouillard qui entoure l'avenir de l'hôpital, je vous concède une volonté d'avancer dans la bonne direction au nom de l'intérêt général. Je vous remercie des informations que vous m'avez apportées.
La parole est à Mme Marguerite Deprez-Audebert, pour exposer sa question, no 46, relative à la stratégie nationale de santé dans les territoires.
Madame la ministre, M. Minot et moi ne nous sommes pas concertés, mais la concomitance de nos questions témoigne de la réalité des problèmes que connaissent les Hauts-de-France. Vous le savez, dans le Pas-de-Calais, la situation est très compliquée.
Parmi les priorités de votre ministère, figurent la lutte contre les inégalités sociales et territoriales d'accès aux soins ainsi que le renforcement de la présence médicale et soignante, pour lesquels vous faites confiance aux acteurs des territoires pour construire des projets et innover. Ces propositions vont dans le bon sens pour garantir une meilleure prise en charge des patients. Je salue aussi votre volonté de mettre l'accent sur la prévention.
Mais le territoire artésien – un groupement hospitalier de territoire de 600 000 habitants – connaît une situation très critique : la menace de la fermeture du service de cardiologie de l'hôpital de Béthune Beuvry est une urgence à laquelle la mutualisation seule ne peut répondre. Aujourd'hui, une solution de court terme permet de maintenir le service de cardiologie ouvert, grâce à la mobilisation des acteurs du territoire, mais elle n'est que temporaire. Il est, en outre, impossible d'occulter la fermeture du service de pneumologie à Lens, dans une zone où la silicose a atteint des milliers d'anciens mineurs. Quant à l'établissement public de santé mentale de Saint-Venant, sa situation est tout aussi inquiétante : alors que trente-cinq praticiens seraient nécessaires pour prendre en charge 12 000 patients, souvent en phase aiguë, l'établissement n'en comptera bientôt plus que douze. Dans ces conditions, comment assurer la prise en charge des patients ?
La médecine de ville connaît également une situation très tendue : les prises de rendez-vous, autant chez les spécialistes que chez les généralistes, sont devenues un véritable et chronophage parcours du combattant.
Ces exemples reflètent certes la situation nationale dans laquelle, à l'exception des métropoles, les zones périurbaines et rurales manquent cruellement de personnel médical. Mais, dans les Hauts-de-France, les indicateurs de santé de la population sont les plus mauvais de l'Hexagone.
Quelles mesures incitatives et innovantes comptez-vous prendre pour enrayer l'hémorragie médicale et éviter que des territoires comme l'Artois se voient dépouillés de leur offre de soins un peu plus chaque année ?
Madame la députée, vous m'interrogez sur la stratégie nationale de santé, et plus particulièrement sur son deuxième axe – les mesures pour lutter contre les inégalités d'accès aux soins, notamment les inégalités territoriales.
Il s'agit d'une de mes priorités. Aussi ai-je mis en place un Plan pour l'égal accès aux soins dans les territoires, présenté en octobre dernier, qui s'appuie sur des mesures innovantes et très pragmatiques : accroître le temps médical, favoriser la coopération entre professionnels de santé, ou bien encore généraliser la téléconsultation et la télé-expertise. L'année 2018 sera celle du déploiement opérationnel de ce plan.
En ce qui concerne votre territoire, l'ARS construit un projet en concertation avec les centres hospitaliers de Béthune et de Lens afin de mettre en place un dispositif pérenne, notamment pour la cardiologie. Ainsi, depuis le 1er novembre, les patients continuent à être soignés en cardiologie au centre hospitalier de Béthune, en hospitalisation dans une unité de neuf lits, ainsi que pour des consultations et des examens programmés.
Enfin, vous abordez la problématique de l'unité de pneumologie au centre hospitalier de Lens. Un travail de restructuration est engagé avec les pneumologues des établissements publics afin de mettre en place une équipe médicale de territoire, à laquelle les autres établissements pourront prendre part. Une première réunion sur le sujet a eu lieu le 24 novembre dernier à l'ARS. L'agence doit animer des équipes de territoire de manière à répondre aux besoins de santé dans les territoires sous-dotés. L'ARS comme le ministère sont aux côtés des élus et des usagers pour trouver ensemble des solutions pérennes et efficaces.
Vous avez conscience qu'il y a urgence. On sent la colère monter dans les territoires. La population, au travers des associations, les élus et les syndicats se mobilisent. Je vous remercie pour ces précisions.
La parole est à M. Loïc Prud'homme, pour exposer sa question, no 34, relative à l'hôpital d'instruction des armées de Villenave d'Ornon.
Madame la ministre, le groupement de coopération sanitaire de moyens dénommé BAHIA – Bagatelle-Hôpital d'instruction des armées – prévoit la disparition en 2021 de l'hôpital militaire Robert-Picqué dans le cadre d'une fusion avec la maison de santé protestante Bagatelle, située à Talence.
Depuis plus de trois ans, ce projet opaque suscite des inquiétudes légitimes de la part des personnels et des usagers. L'ARS, le ministère des armées et la maison de santé protestante sont restés sourds aux appels à la concertation comme à la demande de communication de l'accord du 6 décembre 2016, relatif à la constitution du groupement de coopération. De nombreuses incertitudes techniques demeurent sur l'aménagement qui porte sur une surface de 7 hectares contre 33 actuellement. Il n'est pas exclu que les projections virtuelles se fracassent sur la réalité du terrain au cours de la réalisation du projet, obligeant à revoir à la baisse les capacités pourtant indispensables à l'accueil de la population concernée. Aujourd'hui, l'hôpital reçoit plus de 80 % de patients civils dans un bassin de population de 180 000 habitants.
Alors que l'État s'apprête à injecter pas moins de 30 millions d'euros dans cette fusion vers une structure privée, des alternatives susceptibles de satisfaire au mieux l'intérêt général semblent ne pas avoir été suffisamment considérées. Pire encore : des arguments fallacieux sur le caractère obsolète des bâtiments de l'hôpital Robert-Picqué ont été avancés pour justifier ce choix. Ils sont réfutés par les personnels civils et militaires qui travaillaient sur place.
J'ai bien reçu, et je vous en remercie, votre réponse du 6 décembre visant à me rassurer sur l'offre publique de soins, notamment le maintien du secteur 1 déjà bien écorné. Mais, faute d'argument, le doute est permis devant le désengagement de votre ministère sur toute l'agglomération bordelaise et le basculement de la santé publique vers des structures privées.
Si ce projet BAHIA et cette fusion sont si merveilleux, pourquoi refusez-vous de mettre le contenu de l'accord à la disposition des habitants et des élus, malgré de nombreuses demandes et malgré le récent avis positif de la commission d'accès aux documents administratifs, la CADA ?
Madame la ministre, je vous demande formellement la communication de ce document par l'agence régionale de santé, ainsi qu'un moratoire sur ce projet. Donnerez-vous l'ordre que l'avis de la CADA soit respecté ?
Monsieur le député, comme vous le savez, le projet de groupement de coopération sanitaire BAHIA est issu de la coopération civilo-militaire de la maison de santé protestante de Bagatelle, établissement privé non lucratif, et de l'hôpital d'instruction des armées Robert-Picqué. Il vise à localiser la totalité des activités sur le site de la maison de santé protestante de Bagatelle. Le projet d'investissement pour agrandir les locaux de cette maison de santé protestante présente des avantages importants en termes de fonctionnalité et saura évoluer en fonction des besoins de la population.
Ce projet est équilibré, fondé sur un projet médical commun et une gouvernance partagée et paritaire entre les deux établissements. Le rapprochement de ces établissements se justifie par leur proximité géographique, la concordance des bassins d'attractivité, la complémentarité de leurs activités médicales et la nécessité d'améliorer l'efficience de l'offre de soins dans un contexte de contrainte financière et pour répondre aux besoins de la population concernée.
Il répond donc à l'objectif de pérenniser une offre de soins complète et de haut niveau sur ce territoire. Il favorise le développement d'un parcours de soins coordonné avec les autres acteurs locaux. Ce rapprochement a pour objectif partagé de garantir pour la population du territoire un accès aux soins sans dépassement d'honoraire, ce qui est clairement énoncé dans le protocole d'accord signé en 2016.
Je souligne enfin que le projet fait l'objet d'une validation complète de la part du ministère des armées ainsi que du soutien des services locaux du ministère des solidarités et de la santé.
Comme vous pouvez le constater, monsieur le député, ce sujet est suivi de très près au niveau interministériel pour répondre aux besoins de la population.
Madame la ministre, je prends note de votre réponse qui ne me surprend pas. Vous ne répondez pas sur la non-communication du protocole d'accord, qui semble valider l'offre de secteur 1, que vous garantissez. Or, si l'on n'a pas connaissance de ce protocole, rien ne permet de vous croire ni de s'assurer de la pérennité du dispositif envisagé. C'est là que le bât blesse.
Il en va de même pour la prétendue évolutivité du projet, qui rentre avec un chausse-pied, sur sept hectares de terrain – si tant est qu'il y parvienne, tant l'espace est contraint – , alors qu'un autre projet pouvait bénéficier d'une surface au moins quatre fois supérieure.
Vous engagez plusieurs dizaines de millions d'argent public pour participer à l'extension du patrimoine immobilier d'une structure privée. Comprenez que cela suscite quelques interrogations de la part des contribuables et du député que je suis. Au moment où l'on demande à chacun d'entre nous de justifier, dans un souci de transparence, l'argent public qu'il utilise, il serait de bon aloi que les ministres fassent de même lorsqu'ils décident d'une opération comme celle-ci. En l'espèce, l'argent public servira à étendre un patrimoine immobilier et ne reviendra pas à la communauté nationale à l'issue du projet.
Enfin, je note que non seulement l'offre de soins sur la métropole bordelaise s'appuie sur de nombreuses structures privées lucratives, mais qu'elle est défaillante. En ce moment, il y a des grèves partout, dans les structures privées autant que publiques. Vous ne pouvez pas ne pas en tenir compte dans la manière d'organiser et de gérer l'offre de soins dans l'agglomération.
Suspension et reprise de la séance
Nous allons suspendre un instant la séance, pour attendre l'arrivée de M. le ministre de l'éducation nationale.
La séance est suspendue.
La séance, suspendue à douze heures cinq, est reprise à douze heures dix, sous la présidence de M. Hugues Renson.
La parole est à M. Xavier Batut, pour exposer sa question, no 55, relative à la politique d'éducation dans les territoires ruraux.
Monsieur le ministre de l'éducation nationale, j'ai l'honneur d'être l'élu d'une circonscription rurale qui s'étend sur 27 % du département de la Seine-Maritime, soit 1 800 kilomètres carrés, et regroupe 233 communes, ainsi que de nombreuses écoles avec des classes uniques.
Comme de nombreux autres départements, la Seine-Maritime est confrontée depuis des années à la fermeture de classes en maternelle comme en école primaire, alors même que, dans les secteurs les plus ruraux de ce territoire, le maintien des classes est indispensable du fait de l'éloignement de ces communes et des distances que devraient parcourir de si jeunes enfants si leur école venait à fermer. Dans ces petites communes, médecin et boulanger ont déjà déserté, ainsi que tant de services publics de proximité.
Vous comprenez donc la réaction de parents qui voient une classe fermer à partir de calculs pointilleux, sur des moyennes calculées à la virgule près. Pourtant, lors de sa campagne, Emmanuel Macron avait annoncé le maintien des classes en milieu rural. Il est de notre devoir, malgré les contraintes et les héritages budgétaires à assumer, de respecter cet engagement.
Dans le département dont je suis l'élu, trop d'enseignants sont isolés dans des petites écoles disséminées. Le territoire compte 1 100 écoles, là où 800 suffiraient. Il faudrait regrouper ces écoles, mutualiser les moyens.
Comment maintenir un service public d'éducation qualitatif, partout et pour tous ? Comment répondre à la nécessité de garantir à chaque enfant l'opportunité de progresser ? En particulier, quels moyens seront alloués aux communes qui se regroupent pour construire des classes supplémentaires ? En résumé, comment pouvons-nous redéfinir la ruralité par sa politique d'éducation ?
Monsieur le député, cette question extrêmement importante est au coeur des politiques publiques que nous avons à mener en matière d'éducation. Vous le savez, je me suis déjà engagé dans cet hémicycle sur ce grand dossier.
Oui, conformément à l'engagement du Président de la République, il va y avoir, il y a déjà une politique de l'éducation nationale pour la ruralité. Il ne s'agit pas d'une politique comptable, mais d'une politique qualitative, dont la pointe avancée est l'approfondissement de la démarche des conventions ruralité pour chaque département.
Vous le savez, quarante contrats de ce type ont été signés par le passé, qui ont donné plutôt satisfaction. J'ai demandé au sénateur Alain Duran, auteur d'un rapport sur la mise en oeuvre des conventions ruralité, de continuer son travail, afin que, dans l'avenir, les soixante-six départements potentiellement concernés aient signé une telle convention.
Non seulement le nombre de départements signataires augmentera, mais le contenu des conventions sera considérablement approfondi à plusieurs égards, et d'abord sur le plan qualitatif, ce qui permet d'affirmer une stratégie de revitalisation des territoires ruraux grâce à l'école. Nous agirons avec un grand pragmatisme, en examinant les situations au cas par cas. Comme vous l'avez dit, dans certains cas, le regroupement est pertinent et consensuel. On peut en avoir une vision pluriannuelle. Dans d'autres, il est préférable de conserver l'école telle qu'elle est, et d'essayer d'engager, grâce à elle, une dynamique démographique.
Notre approche ne sera donc pas comptable, mais qualitative, explicite, pluriannuelle dans les contrats ruraux. Par ailleurs, nous souhaitons une dynamisation des écoles et des collèges ruraux, notamment au travers de l'innovation pédagogique.
Celle-ci sera au coeur de ce que nous allons faire pour montrer non seulement que l'école rurale n'est pas en retard sur les écoles urbaines, mais qu'elle peut au contraire indiquer une voie. Ainsi, sur le plan pédagogique, le fait d'avoir des classes multiniveaux peut être considéré comme un atout plus que comme un problème.
Nous allons aussi travailler à ce que l'école du socle commun et le lien entre l'école et le collège soient encore plus forts en milieu rural qu'en milieu urbain, et que ce soit un atout.
Enfin, vous le savez, nous allons mener une politique d'internat extrêmement volontariste, permettant parfois de revitaliser certains territoires ruraux grâce à la venue d'élèves d'autres lieux, donnant une nouvelle vie aux établissements.
Vous le voyez, il existe à la fois une stratégie et une cohérence sur l'ensemble des sujets de la politique éducative, conformément aux engagements pris par le Président de la République.
Monsieur le ministre, je vous remercie pour votre réponse. Sachez que je continuerai à faire de la pédagogie sur mes territoires ruraux, en particulier en ce qui concerne les écoles primaires. Je serai également attentif aux moyens que donne l'État aux collectivités pour regrouper écoles et groupes scolaires, afin que les écoles puissent fonctionner sur le plan pédagogique dans la ruralité.
La parole est à M. Yannick Kerlogot, pour exposer sa question, no 60, relative à la baisse du nombre de postes d'enseignants bilingues ouverts en 2018.
« Depuis des siècles, la France se tient comme un peuple uni par sa langue, uni par sa culture, uni par son histoire. [… ] je dis aussi que cette France indivisible, elle est plurielle, elle a d'autres langues [… ] toutes ces langues qui, de la Bretagne à la Corse, doivent pouvoir vivre dans la République, sans en rien menacer la langue française. »
« Sans offre scolaire suffisante, ces langues, disons-le clairement, peuvent mourir. Tout doit donc être mené pour que le choix soit possible, de la maternelle à l'université. »
Ces propos tenus par Emmanuel Macron, alors candidat à la présidentielle, sont extraits d'un discours prononcé lors d'un meeting et de son ouvrage Révolution.
Fort de son engagement, je reviens vers vous, monsieur le ministre, pour m'assurer que des mesures seront prises afin de garantir le bon développement des réseaux d'enseignement bilingue. D'ores et déjà, j'appelle votre attention sur la baisse annoncée du nombre de postes d'enseignants bilingues du premier degré ouverts au prochain concours externe de professeurs des écoles.
Ces postes sont répartis sur le contingent de l'Institut supérieur des langues de la République française dans cinq réseaux d'écoles associatives bilingues sous contrat, en Bretagne, au Pays basque, en Occitanie, en Alsace et en Catalogne.
En 2017, sur les trente-cinq postes demandés, vingt-sept ont été ouverts. Pour 2018, tenant compte de la croissance de ces cinq réseaux, quarante-six postes ont été sollicités, mais le ministère n'en a inscrit que vingt. Ces baisses suscitent de l'incompréhension, alors même que les effectifs des élèves augmentent d'année en année.
Prenons l'exemple du réseau d'écoles associatives laïques et gratuites Diwan. Pour le concours de 2017, ce réseau d'enseignement par immersion ne s'est vu octroyer que sept postes et, en 2018, il n'y en aura pas davantage. Pourtant, une école ouvre tous les ans, et Diwan demande quinze postes au regard de ses besoins en constante progression. Une convention signée en 2015 entre la région Bretagne et l'État, relative à la transmission des langues de Bretagne, fixe comme objectif la promotion de l'enseignement de la langue bretonne, mais force est de constater que cet engagement politique ne se traduit pas en actes.
Il en est de même pour les quatre autres langues concernées. Je partage ce constat avec trente autres députés dans un courrier cosigné, dont vous avez été destinataire il y a peu. Au regard des engagements du Président de la République, êtes-vous en mesure, monsieur le ministre, de revoir à la hausse le nombre de postes attribués au concours ?
M. Kerlogot prononce quelques mots en breton.
Monsieur le député, vous l'avez dit – nul ne saurait le contester – les langues régionales sont très importantes. Le Président de la République l'a affirmé, aussi bien pendant la campagne présidentielle que depuis lors. Non seulement notre action au service de la langue française n'est pas contradictoire avec cette reconnaissance, mais elle se nourrit au contraire de ce dynamisme linguistique.
De fait, les huit langues régionales métropolitaines et les cinq langues ultramarines sont une richesse pour la France et participent de notre patrimoine. Nous allons inaugurer cette année la première session de l'agrégation externe des langues de France avec, notamment, un poste ouvert en breton. Il faut déjà se féliciter de cette nouveauté, qui est un très grand signal de cette évolution.
Vous souhaitez, par votre question, appeler mon attention sur le nombre de postes d'enseignants bilingues du premier degré ouverts au concours externe de 2018 sur le contingent de l'Institut supérieur des langues de la République française – l'ISLRF – , et plus particulièrement sur le nombre de postes à pourvoir dans le réseau des écoles associatives Diwan, en Bretagne.
Les modalités de fixation du nombre de postes ouverts au concours externe d'accès à l'échelle de rémunération des professeurs des écoles sont très claires et vont dans le sens de ce que vous souhaitez. De fait, nous nous appuyons sur les différents réseaux de l'enseignement privé, qui sont en pointe sur ces enjeux : l'Institut supérieur des langues de la République française, l'enseignement catholique, Eurécole, le Fonds social juif unifié, et nous prenons en compte dans toute la mesure du possible les besoins exprimés.
La réponse à l'ensemble de ces demandes doit aussi garantir un équilibre entre les différents réseaux, qui n'ont ni les mêmes effectifs, ni la même dynamique, ni les mêmes taux d'encadrement. Si l'on prend en compte, dans son ensemble, l'évolution des moyens de l'enseignement privé, on constate que l'enseignement des langues régionales connaît une perspective positive. Le calibrage national tient compte, en effet, des prévisions des départs à la retraite et du nombre de services vacants.
Au regard de ces éléments, nous procédons à une répartition aussi proche que possible des demandes exprimées. En 2017, nous avions un schéma d'emploi positif de 1 000 postes pour l'enseignement privé ; parmi elles, 35 demandes ont été recueillies pour le réseau ISLRF, et 27 postes, vous l'avez dit, ont été ouverts. Pour 2018, 4 350 postes ont été ouverts, tous concours confondus, ce qui représente une baisse relative par rapport à 2017, puisque le schéma d'emploi est neutre.
Malgré cela, le réseau ISLRF bénéficie tout de même de vingt-deux postes offerts, soit cinq postes en moins par rapport à 2017, ce qui le place dans une situation comparable aux autres réseaux, et même un peu plus favorable. Dans ce contexte d'ajustement, le réseau Diwan a été plutôt préservé, puisque, vous l'avez rappelé, le nombre de postes offerts – sept – est resté le même qu'en 2017.
Nous continuons au même rythme de créations de postes. Sur la décennie, nous approchons les 300 créations de postes : 290 ont déjà été accordées à l'ensemble des réseaux d'enseignement privé de langues régionales, le réseau Diwan bénéficiant d'un tiers d'entre elles, avec trente-trois créations de postes.
La convention signée en 2015 entre la région Bretagne et l'État, à laquelle vous faites référence, a donc d'ores et déjà bénéficié, pour son application, de moyens nouveaux, et nous nous inscrivons dans la continuité de ces moyens. C'est dans cette vision pluriannuelle qu'il faut s'inscrire. Certes, la loi de finances ne prévoit pas de créations d'emplois supplémentaires mais, dans le contexte budgétaire général, on peut se féliciter de la continuité dans l'encouragement de ces langues.
À l'occasion de la rentrée scolaire, nous avons aussi été particulièrement attentifs, en matière de contrats aidés, au réseau Diwan. C'est d'un oeil favorable et bienveillant que nous considérons ce réseau, qui doit être apprécié, je le répète, dans le contexte budgétaire général et dans les perspectives pluriannuelles de la décennie.
Je vous remercie de votre réponse argumentée, monsieur le ministre.
Je voudrais insister sur la convention spécifique pour la transmission des langues de Bretagne. Je vous rappelle l'engagement, qui a été tenu par l'État et la région, d'atteindre l'objectif de 20 000 élèves scolarisés dans les filières bilingues, alors que nous en sommes à 17 000 aujourd'hui. Nous avons donc une marge de progrès. Je ne doute pas que nous poursuivrons un dialogue tout au long de cette législature pour que cela se traduise dans les faits.
La parole est à M. Mansour Kamardine, pour exposer sa question, no 40, relative à la sécurité aux abords et à l'intérieur des établissements scolaires à Mayotte.
Monsieur le ministre, j'ai écouté avec grand intérêt votre réponse à la question posée sur les langues régionales, selon laquelle on en dénombrerait cinq outre-mer. Je veux espérer que vous comptabilisez, parmi ces cinq langues, le mahorais. À défaut, je vous demanderais naturellement de tenir compte du fait que le mahorais constitue également une langue régionale de la République.
L'école à Mayotte est gravement malade, monsieur le ministre : un médecin compétent aurait diagnostiqué une affection de longue durée. En effet, vous n'êtes pas sans savoir qu'il ne se passe pas un seul jour sans qu'elle ne soit le théâtre d'un fait divers. Outre la surcharge des classes, qui comptent plus de trente élèves, et les rotations qui progressent, année après année, dans le primaire, elle est l'objet de violences, de plus en plus graves, dans le secondaire. La surcharge des établissements secondaires est aussi une réalité : conçus pour accueillir 600 élèves, ils en abritent le double, si ce n'est plus.
En regardant l'école de la République à Mayotte, une impression particulière se dégage et, plus encore, une certitude : il n'y a d'école que le nom, à Mayotte. Les enseignants, malgré leur volonté, sont épuisés. Les parents sont inquiets pour la sécurité de leurs enfants. Certains leur demandent même de s'armer pour se défendre en cas de besoin. D'autres fuient Mayotte et partent scolariser leurs enfants ailleurs.
Les élèves se rendent à l'école la peur au ventre. Les parents ont fini par prendre conscience que leurs enfants ne vont pas dans des établissements secondaires pour appendre, mais dans des crèches et des garderies, de la maternelle à la terminale. C'est ce qui explique que de plus en plus de parents n'envoient plus leur progéniture à l'école de la République, mais dans le privé. À cette situation s'ajoutent les agressions en tous genres : agressions physiques, rackets et autres violences multiples, qui frappent indifféremment élèves et enseignants, notamment dans le secondaire, aussi bien dans les enceintes des établissements qu'à leurs abords immédiats.
À plusieurs reprises, les familles ont demandé des mesures de sécurisation des établissements pour protéger leurs enfants. Ces appels au secours sont restés quasiment sans effet. À Mamoudzou, à Kahani, à Chiconi, à Sada, pour ne citer que ces localités, les violences devant l'école sont devenues monnaie courante. Face à ces situations, les enseignants n'ont d'autre ressource que d'invoquer leur droit de retrait. Ce fut le cas à Kahani où, durant tout le mois de décembre, les enseignants ont refusé de faire cours, pour ne pas exposer davantage leur sécurité et celle de leurs élèves.
Aussi, monsieur le ministre, ma question est simple : que doit-il se produire pour que des mesures urgentes de sécurisation de ces établissements de l'État soient prises, alors que nous avons déjà déploré des pertes de vies humaines, notamment à Mamoudzou ? Je vous soumets un dicton personnel : loin des yeux, près du coeur. Mayotte est peut-être loin, mais je vous demande qu'elle soit proche de votre coeur.
Monsieur le député, je fais volontiers mien votre dicton. Comme vous le savez, j'ai une expérience de recteur de la Guyane, qui présente beaucoup de points communs avec Mayotte. J'ai toujours observé avec beaucoup d'attention les réalités de Mayotte ; je sais à quel point elles sont complexes et nécessitent de l'attention.
Vous reconnaîtrez avec moi que les difficultés scolaires de Mayotte que vous avez mentionnées ne sont pas intrinsèques au système scolaire, mais s'expliquent par des facteurs démographiques et par l'existence d'une certaine violence, qui, malheureusement, sont une réalité mahoraise, et viennent s'imposer, en quelque sorte, au système scolaire. Celui-ci, il est vrai, doit développer des stratégies pour y répondre.
Depuis de nombreuses années, en particulier depuis la départementalisation, l'État a accompli des efforts conséquents en termes de création de postes dans le domaine scolaire. Ces efforts doivent être reconnus si l'on veut porter un diagnostic juste.
Pour répondre plus directement à votre question, il existe, vous le savez, une politique de l'éducation prioritaire à Mayotte. Celle-ci doit être développée et, à l'avenir, adaptée aux réalités de Mayotte, pour répondre aux difficultés que vous avez exposées.
Une évaluation de la politique de l'éducation prioritaire à Mayotte a été réalisée en 2015. L'analyse de la situation sociale a conduit mon ministère à classer la totalité du territoire en réseau d'éducation prioritaire, ce qui est un cas tout à fait exceptionnel. Aussi, à ce jour, sur les vingt et un collèges du département, neuf sont classés en éducation prioritaire renforcée – REP + – et les autres en éducation prioritaire, ce qui permet de déployer des mesures spécifiques pour Mayotte, comme le dédoublement des classes au cours préparatoire.
Mayotte connaît effectivement un contexte social violent, dans lequel l'école, ses élèves et ses personnels subissent l'importation de violences extérieures. C'est pourquoi, face aux problèmes d'atteinte à la sécurité que vous avez à juste titre soulignés, le Gouvernement a mis en place un renforcement des actions préventives menées dans les établissements auprès des élèves, un engagement accru des forces de l'ordre, avec, notamment, une présence systématique aux abords des établissements et des contrôles de sacs dans les transports scolaires, l'équipement des établissements en barreaudage, clôture et vidéosurveillance, qui représente 1,2 million d'euros en 2017, et une augmentation des moyens humains et matériels pour la sécurité dans les établissements à la rentrée scolaire 2017, avec, notamment, quatre-vingt-deux assistants d'éducation, vingt-deux assistants de prévention et de sécurité et sept conseillers principaux d'éducation.
Vous le voyez, dans le domaine de la vie scolaire comme dans celui de la pédagogie, ce sont des moyens importants qui sont engagés par le ministère pour répondre aux difficultés. Mais il faut faire plus, au regard du contexte du département. C'est pourquoi une attention particulière a été portée à la constitution des équipes mobiles de sécurité, qui ont été renforcées en moyens humains. Le ministère de l'éducation nationale a accompagné le renforcement de ces équipes à Mayotte par l'attribution de quatorze emplois sur le programme 141, dont cinq à la rentrée 2016, et de quatre emplois sur le programme 140, à la rentrée 2017. Nous avons souhaité que les équipes mobiles de sécurité répondent de manière très pragmatique aux situations de violence qui peuvent survenir dans les établissements.
Par ailleurs, Mayotte dispose de 75 emplois de direction pour 33 établissements, soit, en moyenne, 2,3 emplois par établissement contre 1,78 en moyenne nationale. On ne peut donc pas dire que Mayotte soit dans une situation défavorable par rapport au reste du pays. Au contraire, elle bénéficie d'efforts spécifiques. Nous continuerons à les engager, en implantant de nouveaux emplois de direction – seize d'entre eux ont été créés au cours des trois dernières années scolaires.
Nous allons devoir aussi assouplir les règles, de façon à prendre des mesures appropriées sur le territoire, pour répondre à ces enjeux de sécurité, tout en engageant un travail interministériel renforcé, pour que les forces de l'ordre soient encore plus présentes aux abords des établissements.
Je vous remercie de votre réponse, monsieur le ministre, et vous invite à venir sur place, car un contact sur le terrain vaut toujours mieux qu'un bon rapport. Vous verrez que les accès aux établissements de Mayotte sont de véritables passoires. Les mesures que vous proposez sont bonnes. Encore faut-il que l'on puisse sécuriser les entrées, pour qu'on ne pénètre pas dans les enceintes des établissements comme on entre dans une mosquée ou dans une église.
La parole est à M. Laurent Garcia, pour exposer sa question, no 44, relative au statut des agents d'animation et d'encadrement.
Monsieur le ministre, je souhaite appeler votre attention sur deux métiers exercés dans les établissements scolaires. Les communes sont chargées de l'encadrement périscolaire, aussi bien en ce qui concerne les rythmes scolaires que s'agissant de la mise à disposition d'ATSEM – agents territoriaux spécialisés des écoles maternelles. Le code de l'éducation prévoit un ATSEM par groupe scolaire, mais il n'est pas rare que, dans une classe d'une trentaine d'enfants, les communes emploient de surcroît des agents que l'on pourrait qualifier « d' assimilés ATSEM ».
Souvent, les communes optent pour des agents titulaires du CAP petite enfance, mais ce diplôme n'étant pas reconnu par la fonction publique territoriale, les rémunérations versées restent proches du niveau de salaire des agents d'entretien. Dans ces conditions, est-il envisageable de créer un statut spécifique pour les personnels ayant ces compétences ?
Par ailleurs, concernant les agents d'encadrement et d'animation des activités périscolaires liées à la réforme des rythmes scolaires, il n'est pas rare que les communes embauchent un agent superviseur ou référent, interlocuteur à la fois des parents, des enseignants et des personnels municipaux, durant ces activités et souvent aussi en dehors de celles-ci.
Or les communes peinent à garder à leur poste ces agents, parce que le statut de la fonction publique territoriale ne permet pas de les rémunérer mieux qu'avec un salaire amélioré d'agent d'animation. Peut-on envisager de créer un statut spécifique pour les agents référents ou superviseurs ?
Monsieur le député, les deux questions que vous posez sont très importantes, parce qu'elles ont trait à la vie quotidienne de nos écoles, et que la qualité des réponses qui y seront apportées aura un impact pédagogique et éducatif réel.
J'insiste beaucoup, vous le savez, sur l'école maternelle qui, par définition, est la première porte d'entrée des enfants dans l'école primaire. Les enjeux y sont décisifs, notamment pour le langage. De ce point de vue, je suis donc très attentif à la formation, à la qualité professionnelle ainsi qu'au bien-être au travail des ATSEM.
Les agents territoriaux spécialisés des écoles maternelles qui travaillent auprès des enseignants ont vu leurs missions éducatives évoluer ces dernières années, notamment du fait de la réforme des rythmes scolaires.
Comme vous l'avez rappelé, les ATSEM sont placés sous une double autorité : l'autorité hiérarchique de la collectivité territoriale employeuse et l'autorité fonctionnelle des directeurs d'école qui doivent organiser leur contribution au bon fonctionnement des classes dans lesquelles ils travaillent.
Sur le temps périscolaire, les ATSEM relèvent de la seule autorité communale. Leur présence à la fois dans le temps scolaire et dans le temps périscolaire fait qu'ils jouent un rôle important de passerelle pour les enfants, et nous en avons besoin.
Le cadre d'emploi dont dépendent les ATSEM a connu des évolutions significatives. L'accès à ce cadre d'emploi requiert la réussite à un concours ; justifier d'un CAP accompagnant éducatif petite enfance est normalement la règle.
Attentifs à l'engagement de ces agents territoriaux, nous avons décidé, en lien avec le secrétariat d'État à la fonction publique, de publier un rapport conjoint de l'inspection générale de l'éducation nationale et de l'inspection générale de l'administration relatif à l'évolution de ce métier. J'ai porté une attention particulière à ce rapport, dont Gérald Darmanin et moi-même avons décidé la publication, parce que celle-ci est précisément un pas vers les évolutions souhaitables.
Ce rapport a été élaboré en prenant en compte la position des organisations syndicales, des collectivités et des employeurs territoriaux. Sur la base de ces travaux et des concertations qui ont été menées en parallèle, nous avons commencé à envisager plusieurs propositions qui seront soumises très prochainement à l'avis du Conseil supérieur de la fonction publique territoriale.
La première est l'actualisation de la définition des missions des ATSEM. Nous pouvons les enrichir, notamment en insistant sur le lien entre le scolaire et le périscolaire.
La deuxième est la création d'un débouché en catégorie B, avec l'ouverture pour les ATSEM d'une voie de concours interne d'accès au cadre d'emploi d'animateur territorial. C'est évidemment une réponse directe à votre question.
La troisième est la reconnaissance de la fonction de coordination parfois confiée par les communes à certains ATSEM, avec le cas échéant un accès au cadre d'emploi des agents de maîtrise, c'est-à-dire à la catégorie C plus. Bien entendu, nous allons poursuivre la concertation avec les organisations syndicales et les représentants des employeurs territoriaux sur l'amélioration des conditions de travail des ATSEM.
Comme vous, monsieur le député, je crois qu'il est nécessaire de mieux reconnaître le rôle et les missions des ATSEM. Nous devons le faire avec les collectivités locales, dans un parfait consensus avec les communes de France. Nous devons valoriser la fonction de coordination de ces agents et améliorer leurs conditions de travail, notamment par la formation, ce qui sera in fine un bénéfice pour nos élèves. La revalorisation de la fonction d'ATSEM est de nature à inciter davantage de candidats à se tourner vers cette carrière. C'est aujourd'hui une voie plus pertinente que la création d'un nouveau statut au sein de la fonction publique territoriale, pour répondre à votre deuxième question. Elle permettra d'ailleurs d'englober éventuellement d'autres missions. En effet, notre objectif n'est pas de multiplier les statuts, mais d'améliorer la qualité de chacun d'eux.
La parole est à M. Philippe Gomès, pour exposer sa question, no 62, relative à la situation de la jeunesse calédonienne.
Monsieur le ministre, comme vous le savez, la Nouvelle-Calédonie est compétente en matière d'enseignement, bien que l'État conserve la compétence concernant la colonne vertébrale : la délivrance des diplômes, les programmes, même si nous avons une capacité d'adaptation, la formation des maîtres, le contrôle pédagogique. L'État continue également à financer l'exercice de la compétence, même si la capacité décisionnelle est désormais dans les mains de la Nouvelle-Calédonie. Le transfert est effectif depuis le 1er janvier 2012 et, dans ce cadre, après plusieurs années de travaux, nous avons adopté ce qu'on appelle le projet éducatif calédonien : faire de l'école de la République une école du pays, une école du destin commun, une école du rétablissement de l'égalité des chances ; et vous savez à quel point cela est nécessaire dans notre pays.
Dans ce projet éducatif, il y a bien sûr un sujet majeur : la lutte contre le décrochage scolaire, qui est un cancer calédonien. Je rappellerai quelques chiffres : 600 jeunes sortent de notre système scolaire avant l'âge de seize ans, sans qualification, sans diplôme ni emploi ; ils sont 400 âgés de seize à dix-huit ans à être dans cette situation. Ce sont donc au total 1 000 décrocheurs scolaires sur 67 000 élèves.
Dans le même temps, faute de structures adaptées, ces jeunes décrocheurs scolaires traînent dans la tribu, le squat, le quartier, le village. Je crois beaucoup aux proverbes de grand-mère ; l'un d'eux disait : « L'oisiveté est mère de tous les vices. » Et, en effet, la délinquance des mineurs est extrêmement importante dans notre pays : pas moins de 2 100 mineurs ont été mis en cause en 2017, et le développement a été exponentiel ces dernières années. Parmi ces mineurs délinquants, 43 % ont moins de quinze ans. En métropole, la délinquance des mineurs représente 20 % de la délinquance de proximité ; chez nous, c'est 60 %. C'est donc un problème majeur en Nouvelle-Calédonie.
Or nous constatons collectivement que nous manquons des outils nécessaires pour le traiter. Parmi ceux-ci, il en est un qui, bien que ne relevant pas de l'éducation nationale, mérite d'être mentionné : l'établissement pour l'insertion dans l'emploi, qui a pu accueillir pendant une période à présent révolue des jeunes dès l'âge de seize ans, leur dispenser une formation en alternance en relation avec des entreprises, avec un encadrement militaire. Ce dispositif a produit certains résultats.
Je pense également à d'autres outils relevant plus particulièrement de l'éducation nationale ou du champ médico-social et éducatif. Les ITEP, instituts thérapeutiques éducatifs et pédagogiques, ont pour mission d'accueillir des jeunes au comportement déviant, difficile, ayant de graves difficultés de socialisation. Il en existe 400 en métropole, 7 dans les départements d'outre-mer. Or, s'il y a un endroit de la république où un ITEP doit être implanté, c'est bien en Nouvelle-Calédonie. Nous devons absolument pouvoir disposer d'un tel outil.
De la même manière, les EREA, établissements régionaux d'enseignement adapté, accueillent des jeunes en situation de graves difficultés scolaires ou sociales, ou en rupture scolaire, avec des difficultés d'accès aux apprentissages. Là aussi, on trouve 80 EREA en métropole, et 1 en outre-mer, à Mayotte, me semble-t-il. Là encore, un tel outil nous permettrait, pour une part, de reprendre la main, de redonner une chance à cette population scolaire en situation de rupture qui, hélas, à mesure que les années passent, prend le chemin de Camp Est, la prison calédonienne.
Par conséquent, monsieur le ministre, ma question est la suivante : l'État est-il prêt à nous accompagner, même si beaucoup de ces sujets relèvent aujourd'hui de la compétence de la Nouvelle-Calédonie, dans la création d'outils indispensables pour offrir une nouvelle chance à une jeunesse calédonienne en situation de rupture par rapport au système scolaire ?
Monsieur le député, je vous remercie de votre question, qui me donne l'occasion de rappeler que nous sommes véritablement attachés aux mêmes objectifs que vous, en l'occurrence l'insertion réussie de tous les jeunes sur le marché du travail.
Vous l'avez dit, les compétences de l'État en matière d'enseignement primaire et secondaire ont été transférées pour une large part à la Nouvelle-Calédonie, qui s'est dotée d'un projet éducatif par la délibération du congrès du 15 janvier 2016 relative à l'avenir de l'école calédonienne.
L'État demeure néanmoins au côté de la Nouvelle-Calédonie pour l'accompagner dans la mise en oeuvre de sa politique éducative, notamment au moyen du dispositif unique de mise à disposition globale et gratuite des personnels de l'État datant du transfert de compétences du 1er janvier 2012.
Un protocole d'accord a été signé le 26 octobre 2016 entre la Nouvelle-Calédonie et l'État qui définit les modalités d'accompagnement de mise en oeuvre du projet éducatif sur la période 2017-2019. Bien entendu, nous le respectons. Il précise l'aide et les moyens, à la fois humains et financiers, apportés par l'État.
J'aimerais les énumérer, et établir leur lien avec la question que vous venez de poser. Le premier objectif est de développer l'identité de l'école calédonienne, en étant attentif, notamment, à ce que la définition du socle commun de connaissances, de compétences et de culture soit contextualisée par rapport au territoire tout en contribuant à ce que chaque jeune, à la fin de la scolarité obligatoire, c'est-à-dire à l'âge de seize ans, ait réellement acquis ce socle, qui est le premier des vaccins contre le décrochage scolaire.
Le deuxième objectif est de considérer la diversité des publics pour une école de la réussite, une école de l'égalité des chances, pour reprendre vos propos. À cette fin, trente-cinq postes, dont vingt-huit emplois d'enseignant ont été créés pour quatre nouveaux BTS.
Enfin, pour la première fois à cette session, les épreuves écrites des baccalauréats général et technologique seront corrigées en Nouvelle-Calédonie, ce qui permettra une reconquête du temps scolaire pour les élèves au mois de novembre, ce qui est précieux.
Le troisième objectif est d'ancrer l'école dans son environnement, sur les plans tant culturel qu'écologique, et de l'ouvrir sur son environnement international.
Nous devons bien entendu être également attentifs aux attentes que vous venez de formuler. Un exemple intéressant de l'accompagnement de l'État en Nouvelle-Calédonie est la réalisation de deux nouveaux lycées, Pouembout et Mont-Dore. Ce dernier établissement a d'ailleurs été inauguré en novembre dernier par le Premier ministre, à l'occasion de son déplacement en Nouvelle-Calédonie. Grâce à ces deux constructions, près de 1 500 élèves seront accueillis dans les filières générales, technologiques et professionnelles proposées dans ces deux établissements. Cela doit permettre d'offrir à la jeunesse calédonienne de nouvelles opportunités. Le financement de l'État s'élève pour ces deux projets à 45 millions d'euros.
Cependant, nous pouvons éventuellement aller plus loin, et je serai attentif dans le futur aux préoccupations que vous avez formulées. La politique nationale de lutte contre le décrochage scolaire, en particulier, est aussi pertinente à appliquer, sinon plus, en Nouvelle-Calédonie qu'en métropole. Le système est ouvert pour permettre des transferts de technologie, notamment afin de repérer numériquement les élèves qui ont décroché. Il faut aussi pouvoir développer les dispositifs que vous avez mentionnés, en lien avec l'armée ou avec les administrations sociales, dans le respect des compétences transférées. Nous sommes évidemment prêts à étudier cela avec vous.
Je serai d'autant plus bref que je suis le dernier orateur, monsieur le président.
Sourires.
Je vous remercie de votre réponse, monsieur le ministre. Bien évidemment, et même si la compétence nous a été transférée, nous avons besoin du concours de l'État pour l'installation des outils que j'ai mentionnés, notamment l'EREA et l'ITEP. Le gouvernement de la Nouvelle-Calédonie ne manquera donc pas de vous solliciter pour faire de cet accompagnement une réalité afin que soient mis en place ces outils indispensables pour donner une nouvelle chance à notre jeunesse qui décroche.
Prochaine séance, cet après-midi, à quinze heures :
Questions au Gouvernement ;
Explications de vote et vote par scrutin public sur le projet de loi relatif à l'orientation et à la réussite des étudiants ;
Fixation de l'ordre du jour ;
Discussion, en lecture définitive, du projet de loi mettant fin à la recherche ainsi qu'à l'exploitation des hydrocarbures et portant diverses dispositions relatives à l'énergie et à l'environnement ;
Discussion, en nouvelle lecture, du projet de loi de finances rectificative pour 2017.
La séance est levée.
La séance est levée à douze heures quarante-cinq.
La Directrice du service du compte rendu de la séance
de l'Assemblée nationale
Catherine Joly