Intervention de Karine Lebon

Séance en hémicycle du mardi 5 octobre 2021 à 15h00
Réélection des juges consulaires dans les tribunaux de commerce — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaKarine Lebon :

La proposition de loi permettant la réélection des juges consulaires dans les tribunaux de commerce est une parfaite illustration des conditions dégradées dans lesquelles les parlementaires doivent légiférer. Elle témoigne des conséquences de l'inflation législative. On le sait, le recours massif et accéléré à la norme juridique a des conséquences fâcheuses : instabilité de la règle de droit, manque de qualité rédactionnelle de textes rédigés très vite, complexité croissante du droit, prise en compte insuffisante des conséquences concrètes de la nouvelle norme.

En l'occurrence, le texte que nous examinons est la démonstration parfaite de la précipitation dans laquelle nous avons été contraints d'examiner le projet de loi relatif à la croissance et à la transformation des entreprises, texte promulgué le 22 mai 2019. En effet, sans en avoir l'intention, la loi PACTE – composée de pas moins de 221 articles – a privé d'éligibilité les membres en exercice et les anciens membres des tribunaux de commerce – dont le collège devrait être prochainement renouvelé –, ainsi que les membres des tribunaux limitrophes. De ce fait, sur un total de 3 357 juges consulaires en exercice, entre 450 et 500 sur les 793 dont le mandat expire en 2021 ne seraient pas rééligibles.

Une telle conséquence n'avait pas été prévue, d'autant que, par tradition, les juges du tribunal de commerce sont des magistrats élus par leurs pairs parmi les commerçants ou les dirigeants des sociétés commerciales. C'est donc involontairement que la loi PACTE a exclu les juges et les anciens juges de ces tribunaux et de ceux qui sont limitrophes. Cette malfaçon aurait eu de graves répercussions, d'autant que sont concernés les magistrats les plus expérimentés, parmi lesquels de nombreux présidents de tribunaux de commerce. La présente proposition de loi corrige donc opportunément cette erreur.

En outre, à l'initiative du rapporteur de la commission des lois du Sénat, diverses autres améliorations ont été apportées au régime électoral des juges consulaires. Ainsi, l'inéligibilité des personnes condamnées pénalement pour agissements contraires à l'honneur, à la probité ou aux bonnes mœurs a été rétablie, de même que celle des personnes frappées d'une peine complémentaire d'interdiction professionnelle ou sanctionnées civilement au titre de législations étrangères relatives à l'insolvabilité des entreprises équivalentes à la législation française.

La limitation à cinq du nombre de mandats, successifs ou non, qu'une même personne peut exercer en tant que juge consulaire dans un même tribunal a été introduite dans l'article 2, conformément à l'intention du législateur lors de l'adoption de la loi de modernisation de la justice du XXIe siècle – dite loi J21 – et de la loi PACTE. L'article 3 ajuste la composition du corps électoral des juges consulaires, en imposant notamment aux anciens juges, pour être électeurs, d'avoir exercé leurs fonctions pendant au moins six années, de n'avoir pas été déclarés démissionnaires et de ne pas être frappés d'inéligibilité. Enfin, l'article 4 proroge le mandat des délégués consulaires élus en 2016 jusqu'au 31 décembre 2021 afin que les élections des juges consulaires prévues en novembre prochain soient organisées sur la base du collège électoral existant avant l'entrée en vigueur de la loi PACTE.

Les députés du groupe de la Gauche démocrate et républicaine voteront cette proposition de loi qui corrige une erreur et met en lumière les conséquences regrettables de l'inflation législative sur la qualité des normes et sur la sécurité juridique.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Cette législature étant désormais achevée, les commentaires sont désactivés.
Vous pouvez commenter les travaux des nouveaux députés sur le NosDéputés.fr de la législature en cours.