Au cours des six dernières années, depuis les attentats islamistes de novembre 2015, notre pays a passé trois ans en état d'exception, c'est-à-dire autant qu'en droit commun. De plus en plus, l'exception devient la norme. Cela doit nous faire réfléchir, car les enjeux démocratiques sont majeurs. En effet, nous devrions être capables d'affronter des phénomènes structurels tels que le terrorisme ou une pandémie, sans recourir indéfiniment à des dispositions de nature exceptionnelle.
Dans son rapport publié fin septembre : « Les états d'urgence : la démocratie sous contraintes », le Conseil d'État appelle à distinguer les menaces pérennes des circonstances qui peuvent conduire à déclencher l'état d'urgence. « Destiné à répondre à un ''péril imminent'', l'état d'urgence est utile et efficace pour faire face à un désordre momentané, [lorsque] aucun autre outil juridique ou opérationnel n'existe. Pourtant la ''crise'' est aujourd'hui de plus en plus confondue avec les menaces pérennes qui fragilisent en profondeur la société et pour lesquels l'état d'urgence n'est pas une solution pertinente. »
Or c'est la solution que vous nous proposez. Nous tenons à vous dire notre total désaccord : vous ne pouvez pas ignorer qu'en faisant du droit d'exception le droit commun, vous limitez certaines libertés, en particulier les libertés publiques. Rien ne justifie de les restreindre plus longtemps. Monsieur le secrétaire d'État, vous ne répondrez pas à ces objections.