Monsieur le ministre des solidarités et de la santé, depuis quelques jours, partout en France, des infirmières et infirmiers anesthésistes font grève : c'est l'arrêt des blocs opératoires et la déprogrammation de nombreuses opérations. Plus généralement, dans les hôpitaux, le manque de reconnaissance, le rythme infernal, la dégradation des conditions de travail, l'épuisement et la démotivation provoquent la multiplication des arrêts maladies et des démissions : l'absentéisme est important et beaucoup de postes sont vacants.
Les soignants – que je salue – ont été mis à rude épreuve pendant la crise sanitaire, qui a contribué à accélérer cette dégradation, mais n'est pas responsable de tous les maux. Déjà en 2019, un agent hospitalier sur deux ne souhaitait plus exercer jusqu'à la retraite. Ainsi, faute de personnel, les services et les lits sont réduits, des services d'urgences opèrent un tri des patients et vont jusqu'à fermer leurs portes, dans plusieurs régions. Le Conseil scientifique évalue à 20 % le nombre de lits d'hôpitaux fermés, notamment en raison de l'épuisement des soignants : 13 000 lits ont été supprimés en cinq ans.
Pourquoi le Ségur de la santé n'a-t-il pas résolu ces difficultés structurelles et stoppé l'hémorragie d'absentéisme ? Les accords de revalorisation, sans amélioration des conditions de travail, sont-ils à la hauteur des enjeux ?
Pensez-vous qu'il soit suffisant, face à une situation devenue très inquiétante, de prendre des mesures d'urgence, dans l'urgence, sans engager une véritable réforme de notre système de santé ? Une énième enquête sur les difficultés des hôpitaux et des soignants – bien connues, depuis des années – ne peut remplacer une vision stratégique, prenant en compte les besoins en personnel, les attentes des soignants, mais aussi les réalités territoriales, les déserts médicaux, l'accès aux soins rendu difficile au point d'aller jusqu'à une perte de chance pour les patients, et, bien évidemment, la nécessité d'une gestion moins technocratique.