Intervention de Paul Molac

Séance en hémicycle du mardi 9 novembre 2021 à 15h00
Projet de loi de finances pour 2022 — Outre-mer

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaPaul Molac :

Nous sommes amenés à examiner les crédits de la mission "Outre-mer" . Je dois vous dire que cette expression « outre-mer » me gêne un peu car je la trouve assez inappropriée à l'égard de nos compatriotes résidant dans des territoires non européens. Le temps où l'on désignait tous ces territoires par l'expression « empire colonial » est révolu, et personne ne s'en plaindra, mais s'ils sont aujourd'hui partie prenante des territoires français, leurs habitants ne sauraient être désignés à travers un terme générique qui les regrouperait sous le seul trait commun de leur non-appartenance au continent européen.

On a trop souvent tendance à considérer les territoires à travers le prisme de la centralité, maladie bien française qui conduit à souligner la dualité entre Paris et la province : selon des définitions en creux, ou en opposition, un provincial est désigné par le fait qu'il ne réside pas à Paris et un ultramarin par le fait qu'il ne réside pas dans l'Hexagone. Pour ma part, je ne me considère pas comme un provincial : je suis tout simplement un Breton, de même que certains de nos collègues sont Martiniquais, Polynésiens, Néo-Calédoniens, etc.

Je souhaite redire ici tout le respect que notre groupe Liberté et territoires accorde à la diversité des origines de l'ensemble des concitoyens, auxquels doivent répondre des politiques publiques différenciées, définies au plus près des réalités territoriales. Je dirai que la France est diversité ; certains le nient encore et cherchent une espèce de pureté dans une francité qui n'a jamais existé et n'existera jamais – on en a quelques exemples en ce moment sur certaines chaînes de télévision.

Une fois ce propos liminaire effectué, je voudrais également avoir une pensée pour notre collègue Sylvain Brial, député de la circonscription de Wallis-et-Futuna qui ne peut siéger parmi nous depuis trop longtemps. Je ne saurais oublier également les temps difficiles que traversent plusieurs de ces territoires cette année qui connaissent une résurgence très importante de l'épidémie de covid.

Au-delà de la crise sanitaire, c'est aussi tout un pan de l'économie qui a été durement atteint – on connaît l'importance du tourisme dans ces territoires. Je tiens à ce propos à faire état de notre pleine solidarité à l'égard des populations touchées dans des territoires ayant trop souvent souffert d'un déficit de l'investissement public dans le domaine de la santé.

Je tiens aussi à faire taire une musique entendue tout au long de l'été, qui voudrait laisser croire qu'il existerait une forme de responsabilité des habitants de ces territoires en raison de leur refus – parfois réel, j'en conviens – de la vaccination. En effet, mes chers collègues, il est avant tout nécessaire de bien comprendre qu'accepter une recommandation sanitaire de cette sorte nécessite un fort lien de confiance avec l'État. Rappelez-vous que les populations de Polynésie française ont subi durant des décennies les essais nucléaires censément sans danger que la France leur a imposés. Rappelez-vous également le scandale de la chlordécone aux Antilles, face auquel les autorités sanitaires ont tardé à réagir. Face au fléau du covid, ce n'est pas de stigmatisation qu'il faut faire preuve, mais de soutien, de confiance et de pédagogie.

Je tiens à évoquer également, puisque la parole m'est confiée, le processus d'autodétermination en cours en Nouvelle-Calédonie. Aux termes des accords de Matignon, un troisième vote doit se tenir en 2022. Si la date du 12 décembre a d'ores et déjà été annoncée, celle-ci doit faire l'objet d'une confirmation dans les prochaines heures. De nombreuses voix se sont fait entendre – cet après-midi encore – concernant la tenue de ce scrutin au regard des conditions sanitaires actuellement très difficiles sur l'île. Il est peu aisé aujourd'hui de préjuger de l'organisation d'un tel scrutin et de la possibilité de mener une campagne. Ce scrutin devra avoir lieu dans de bonnes conditions sanitaires et politiques, afin d'éviter d'altérer sa sincérité.

Alors que de nouvelles mesures en matière sanitaire devraient être annoncées ce soir par le Président de la République et que les préfets commencent déjà à serrer les vis dans certains territoires, il paraît étonnant qu'un référendum aussi déterminant pour l'avenir de la Nouvelle-Calédonie puisse se tenir si la circulation du virus y reste très active.

Pour en revenir à l'aspect budgétaire de cette mission, notre groupe reconnaît la légère hausse du budget dédié à ces territoires concernant plusieurs axes prioritaires. Toutefois, les crédits restent relativement modestes. Il est nécessaire de terminer le déploiement du plan logement outre-mer 2019-2022 pour résorber l'habitat insalubre et améliorer les conditions de vie.

Les principaux motifs d'inquiétude résultent de l'isolement dans lequel sont plongés certains territoires éloignés et qui vont subir de plein fouet la crise des transports avec l'explosion du coût de ces derniers, pour les biens comme pour les personnes. Il en va de même pour le coût de la vie dans ces territoires, beaucoup plus élevé qu'en métropole.

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