Avant toute chose, je remercie de tout cœur tous les orateurs qui ont affirmé à la tribune leur soutien pour cette proposition de loi. Ils ont compris, je l'ai senti, qu'il ne s'agit pas de réclamer plus, mais de mettre fin aux discriminations et aux injustices vécues par certains membres, civils ou militaires, de la fonction publique de l'État.
Madame la ministre, j'ai bien entendu que vous avez défini un calendrier de travail conformément aux engagements de M. le Président de la République quand il s'est rendu en Polynésie française. Mais vous le savez, des engagements, nous en avons entendu d'autres. Nous avons déjà fait preuve de confiance. Mais comme l'a dit M. Kamardine, ce sont des mots, des mots, des mots. Certes, et les quelques réunions que nous avons tenues ensemble m'en ont convaincu, vous avez compris le problème dont souffrent nos collectivités et mesuré le ressentiment de nos fonctionnaires et de nos militaires. Cela nourrit bien sûr un grand espoir. Mais il reste peu de temps. La dernière fois qu'on s'était vus, vous nous aviez annoncé des mesures avant la fin de la législature ; aujourd'hui, vous évoquez seulement 2022. Ce n'est pas que nous n'avons pas confiance, mais nous avons déjà tellement cru en la parole de l'État – lequel, malheureusement, n'a pas toujours tenu ses engagements.
Vous évoquez l'installation d'un comité consultatif mais, depuis la visite du Président de la République en Polynésie française, il aurait largement pu être constitué, d'autant que cela faisait partie de ses engagements ! Le temps a sa valeur, particulièrement pour un fonctionnaire ultramarin qui part à la retraite : chaque année, le montant de l'ITR baisse – moins 800 euros de moins au 1er janvier 2022. Vous avez aussi évoqué un travail partenarial, mais sachant votre agenda chargé en cette fin de législature, et dans la mesure où l'Assemblée finira ses travaux en février, je m'interroge. Certes, vous vous êtes engagée, comme tous vos prédécesseurs…
Cette proposition de loi, elle, est concrète. Que tous nos concitoyens la lisent et ils verront que ce ne sont pas des paroles, qu'elle aborde concrètement trois sujets majeurs pour les fonctionnaires et les militaires ultramarins. Elle propose réellement des avancées. Comme je l'ai dit dans mon intervention liminaire, elle n'est pas parfaite, mais elle a encore un parcours à suivre, avec son passage au Sénat, ce qui devrait vous laisser le temps de mener vos travaux de concertation et de l'enrichir, alors que la rejeter d'emblée serait manquer encore une fois à un engagement de l'État. Et comme je vous l'ai dit, madame la ministre, des engagements, nous en avons déjà entendus avant vous. Comment expliquer une injustice comme celle que vivent les militaires du Pacifique, et qui dure depuis plus de cinquante ans ! Et pourtant le Pacifique a joué son rôle pour que la France soit une puissance nucléaire et occupe la deuxième place en matière de superficie maritime. C'est à de telles injustices et discriminations que la proposition de loi cherche à mettre fin.
S'agissant du CIMM, le guide que vous venez de publier ne va satisfaire que les services de l'État ! Vous n'avez pas entendu les agents qui doivent subir un véritable parcours du combattant pour seulement être reconnus originaires de leur propre collectivité. Est-ce qu'on demande un Breton de constituer un dossier pour prouver son origine ? Le CIMM, c'est ça : pour accorder une priorité légale d'affectation, on va jusqu'à réclamer tous les bulletins scolaires du demandeur ! Vous pouvez sans peine imaginer le ressentiment que cela peut susciter, d'autant que l'agent concerné n'est même pas certain de se voir reconnu originaire de la collectivité pour peu qu'il ait épousé une métropolitaine ou acheté sa première maison dans l'Hexagone.
Maina Sage l'a dit, nous recevons de nombreuses demandes relatives à ce sujet, tout cela parce que les services administratifs de l'État ne reconnaissent pas l'origine de ces fonctionnaires. Et même lorsque ces derniers obtiennent le CIMM, d'autres critères sont rajoutés par les directions régionales ou par les directions locales, et ils ne sont plus considérés comme prioritaires ! Ils ont fait le choix de s'engager pour l'État, le choix de s'engager pour la France s'agissant des militaires mais, malheureusement, ils doivent se battre pour retourner chez eux. C'est une grande inégalité et une grande injustice.
J'ai bien compris que les groupes de la majorité allaient rejeter cette proposition de loi. Mais vous avez tout le temps d'enrichir ces propositions, en vous fondant sur les travaux de la commission que vous souhaitez mettre en place et sur les différents débats que vous comptez mener avec les partenaires concernés. N'oubliez surtout pas d'entendre ces fonctionnaires, ces militaires, qui se sentent aujourd'hui abandonnés par l'État !