D'une part, elle est prévue dans le code de la sécurité sociale et non dans celui de l'action sociale et des familles ; son contentieux est du ressort des juridictions de la sécurité sociale ; elle relève de la solidarité nationale et non familiale, contrairement à ce que vous affirmez, tout simplement parce que la solidarité familiale ne s'applique qu'aux dispositifs d'aide sociale. D'autre part, par sa nature, l'AAH ne peut être considérée comme un minimum social. En effet, l'AAH est un revenu de substitution accordé par décision médicale à des personnes qui ne peuvent exercer une activité professionnelle à temps plein ou à temps partiel du fait de leur handicap.
C'est pour ces raisons que j'ai déposé l'année dernière la proposition de loi que nous examinons. Je le rappelle, elle a été adoptée en première lecture le 13 février 2020 par l'Assemblée puis le 9 mars 2021 par le Sénat, qui l'a améliorée, grâce au travail de son rapporteur, Philippe Mouiller. À chaque fois, le vote a dépassé les clivages politiques.
En deuxième lecture à l'Assemblée, en juin dernier, le texte a été totalement vidé de son contenu par un amendement du Gouvernement et de la majorité qui substitue au mécanisme d'individualisation de l'AAH un abattement forfaitaire sur les revenus du conjoint. Ce mécanisme, adopté dans les conditions indignes d'un vote bloqué et repris dans le projet de loi de finances, dénature pleinement l'ambition originelle de la proposition de loi. Les bénéficiaires de l'AAH ne souhaitent pas une augmentation de la prestation, mais la garantie d'une véritable autonomie. C'est pourquoi les sénateurs ont rétabli, le 12 octobre dernier, le texte dans sa version initiale.
L'individualisation de l'AAH constitue une demande de longue date des personnes en situation de handicap et, nous le savons, son adoption serait historique. D'autres mesures de cette proposition de loi me sont chères, comme le report de 60 à 65 ans de l'âge limite, sauf exception, pour solliciter la prestation de compensation du handicap (PCH), ainsi que les dispositions visant à soutenir et à encourager le parcours sportif des personnes en situation de handicap.
Nous ne pouvons ignorer la très forte mobilisation que suscite la proposition de loi, en particulier les plus de 100 000 signatures de la pétition en ligne sur le site du Sénat, qui l'ont amené à inscrire le texte à l'ordre du jour.
Enfin, en revenant sur la déconjugalisation, le Gouvernement crée une incohérence juridique à l'origine d'une différence de traitement entre bénéficiaires. En effet, l'article 2 de la proposition de loi, qui prévoit la suppression de la majoration du plafond de cumul de l'AAH avec la rémunération garantie pour les bénéficiaires en couple, a été adopté conforme par le Sénat en première lecture. Cette situation crée une inégalité vis-à-vis des autres bénéficiaires de l'AAH, toujours soumis à la conjugalisation de l'allocation.
Mes chers collègues, je vous invite dès lors à voter les amendements de rétablissement des articles 3 et 3 bis . J'appelle véritablement chaque député à voter en son âme et conscience. À la veille de la journée internationale des personnes handicapées, si nous rétablissons le texte dans sa version adoptée par le Sénat, nous ferons un beau geste de reconnaissance vis-à-vis des personnes en situation de handicap, qui l'attendent depuis si longtemps.