Intervention de Paul Molac

Séance en hémicycle du lundi 3 janvier 2022 à 15h00
Outils de gestion de la crise sanitaire — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaPaul Molac :

Je veux d'abord vous souhaiter à tous une bonne année 2022 : nos différends n'enlèvent rien à l'estime que je porte à chacun d'entre vous.

La crise sanitaire à laquelle nous sommes confrontés dure depuis près de deux ans. Les mesures barrières et les adaptations quotidiennes auxquelles les citoyens se sont pliés sont de plus en plus difficiles à accepter. Je veux néanmoins saluer l'effort et le civisme de la population, qui a parfaitement mis en œuvre les mesures nécessaires afin de freiner l'expansion du virus et de limiter le nombre de victimes, même quand ces mesures leur paraissaient quelque peu incompréhensibles.

Alors que le pays est confronté à une cinquième vague épidémique particulièrement contagieuse, je tiens, au nom de notre groupe, à exprimer mes sincères remerciements à l'ensemble des forces vives luttant contre l'épidémie. Je pense au personnel soignant, bien sûr, mais je n'oublie pas les personnels administratifs, les enseignants ou les agents d'hygiène et d'entretien.

Avant d'aborder le fond de mon propos, permettez-moi d'ajouter que, malgré un calendrier précipité, nous sommes ici pour exercer nos fonctions jusqu'à la fin de notre mandat. Aussi paraît-il surprenant que le Gouvernement et la majorité s'obstinent à refuser toute clause de revoyure avant le 31 juillet s'agissant du régime d'état d'urgence et de ses déclinaisons, alors que nous avons été convoqués en commission pendant une période d'arrêt de nos travaux, entre Noël et le 1er janvier.

Au sujet de la vaccination, notre position est très claire : si nous reconnaissons son utilité pour atténuer les effets du virus sur les personnes contaminées, nous considérons que la stratégie du tout-vaccinal ne peut être l'unique solution. Sinon, nous courrons à l'échec.

Selon les derniers chiffres de Santé publique France (SPF), publiés le 30 décembre 2021, 91,6 % de la population éligible à la vaccination ont reçu au moins une dose, et 89,7 % sont complètement vaccinés. Dans ces conditions, il paraît illusoire de penser qu'avec 100 % de vaccinés, on parviendra à juguler l'épidémie. La vaccination, si elle permet de réduire les formes graves – et encore, pas toutes, hélas – n'empêche, ne l'oublions pas, ni la contamination, ni la propagation.

Cet entêtement à défendre le tout-vaccinal heurte nombre de nos concitoyens et a pour conséquence de dresser les Français les uns contre les autres. Les tensions entre vaccinés et non-vaccinés vont monter d'un cran avec votre proposition de confier aux commerçants la vérification de l'identité des détenteurs du passse vaccinal. On peut d'autant plus le craindre que, malgré nos demandes répétées, nous n'avons toujours pas reçu de bilan évaluant l'efficacité du passe sanitaire.

Ce projet de loi instaure une vaccination obligatoire déguisée alors que le Président de la République s'était engagé à ce que la vaccination reste facultative. Le passe vaccinal vient ainsi porter atteinte au consentement libre et éclairé du patient en imposant une contrainte étatique. Nous le redisons ici, en ce domaine, il est nécessaire de convaincre sans obliger.

Certaines dispositions du texte paraissent encore très restrictives. Celle, par exemple, qui conditionne l'accès aux transports interrégionaux à la présentation d'un passe vaccinal limite fortement la liberté de déplacement. A-t-on pensé à tous ceux qui, vivant à proximité d'une limite administrative, ne pourront plus prendre le train pour aller sur leur lieu d'étude ou de travail s'ils ne sont pas vaccinés ? Tout laisse croire que cela a été fait à dessein.

L'Organisation mondiale de la santé critique les pays occidentaux et leur volonté de survacciner leurs populations à coups de rappels réguliers. Le virus ne connaît pas les frontières, et les variants se développent précisément dans les endroits du monde où la population n'a pas reçu de vaccin. Le variant delta s'est formé en Inde, le variant omicron en Afrique du Sud. Le meilleur moyen de sortir au plus vite de cette crise est de mettre ces vaccins à la disposition des milliards de personnes qui n'ont même pas reçu une seule dose.

Même si nous disposons de vaccins, nous avons à prendre des mesures pour développer tous les moyens susceptibles de nous aider à lutter contre la pandémie. Je pense bien sûr à ceux qui concernent l'hôpital. Dans une récente tribune collective, des médecins anesthésistes alertent sur le nombre de médecins à recruter : près de 350 postes seraient à pourvoir dans les services de réanimation.

Monsieur le ministre, vous avez fait des efforts, je ne le nie pas, mais vous ne pouvez pas affirmer que vous avez supprimé le numerus clausus : en réalité, vous avez simplement augmenté le nombre de places de 20 %. Ce n'est pas la même chose ! Ce surplus suffira tout juste à combler les départs à la retraite – nous connaissons la démographie médicale, beaucoup de médecins sont relativement âgés. Vos efforts doivent être beaucoup plus substantiels.

Je crains donc que ce texte ne soit nocif pour nos libertés, inefficace pour lutter contre la pandémie et destructeur pour la cohésion sociale. Globalement, le groupe Libertés et territoires ne le soutiendra pas, tel qu'il est rédigé.

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