Excusez-moi de vous le dire comme cela, madame la députée, mais votre question comporte un nombre d'erreurs assez colossal.
Premièrement, contrairement à ce que vous prétendez, l'arrêté « abeilles » n'impose en aucun cas le travail de nuit : c'était même la ligne rouge que j'avais résolument tracée d'emblée.
Deuxièmement, cet arrêté est le fruit d'une très large concertation, car il faut trouver un équilibre parfois compliqué entre des intérêts divers. Votre intervention en apporte d'ailleurs un témoignage criant : vous commencez par vous poser en défenseure des abeilles avant de conclure que tout ce que nous avons entrepris est bon à jeter à la poubelle.
C'est parce que la réalité est complexe que nous avons prévu des dérogations destinées à trouver de justes équilibres. C'est pour cela que nous avons adopté une approche pragmatique et défini des conditions d'application pour cet arrêté. Quant au cadre familial, il a été au centre de mes préoccupations et à l'origine de mon choix de ne jamais imposer de travail de nuit. Ce n'est pas ma vision d'une société de progrès !
Si votre énumération ne correspond pas à l'arrêté pris, vous avez raison sur deux points sur lesquels je voudrais insister.
Premier point : ces débats sur les produits utilisés dans l'agriculture doivent avoir lieu au niveau européen ; quand ils sont traités à un niveau national, les décisions prises entraînent des distorsions de concurrence. Aussi ai-je décidé d'en faire un objectif prioritaire de la présidence française du Conseil de l'Union européenne.
Deuxième point : l'importance de la recherche. À cet égard, je vous ferais observer que nous avons investi massivement dans ce domaine, comme peu de gouvernements l'ont fait, notamment en saisissant les occasions offertes par de nouveaux plans tels que le plan France 2030.
Néanmoins, la recherche peut prendre beaucoup de temps quand elle doit résoudre des problèmes compliqués – ce n'est pas le ministre, mais l'ingénieur agronome qui vous le dit. À juste titre, on dit souvent qu'en agriculture, on a l'année culturale pour tester une recherche. Ce seul considérant donne une idée du temps nécessaire.
Il nous faut rattraper des retards dus à des années de sous-investissement dans la recherche, même si nos instituts, qu'ils soient publics ou privés, font partie des meilleurs au monde. J'ai appelé « troisième révolution agricole » celle qui a lieu autour du vivant et de la connaissance, et qui passe par le numérique, l'agrorobotique, la génétique, le biocontrôle.
Trois mots résument donc notre action : pragmatisme, équilibre, investissements. Les transitions nécessaires ne se feront pas sur injonction mais grâce à des investissements, et c'est pourquoi nous investissons 2,4 milliards d'euros dans cette révolution agricole.