Intervention de Paul Molac

Séance en hémicycle du dimanche 16 janvier 2022 à 16h00
Outils de gestion de la crise sanitaire — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaPaul Molac :

Nous voici donc réunis en ce dimanche pour la fin du cycle quelque peu chaotique d'un projet de loi débattu et voté, encore une fois, dans la précipitation. Au-delà du fond, ce processus est le symbole à la fois du mépris de l'exécutif à l'égard du Parlement et des errements – que nous avons maintes fois dénoncés – du Gouvernement dans la gestion de la crise sanitaire.

Nous avons toujours affirmé que nous serions prêts à remplir le mandat que nous ont confié les Français pour répondre aux évolutions de la crise que nous traversons. Nous avons également indiqué que nous serions toujours prêts à assumer nos responsabilités et à venir siéger, même après la session parlementaire qui doit s'achever à la fin du mois de février s'il en était besoin, puisque notre mandat court jusqu'en juin. S'il est nécessaire de préserver l'ordre sanitaire, mais aussi – certains l'oublient parfois – les libertés publiques, nous répondrons présents.

Pourtant, je me permets de rappeler que le Gouvernement et la majorité n'avaient pas souhaité donner suite à la clause de revoyure que nous avions proposée dans le cadre de la discussion de la loi du 10 novembre 2021, portant diverses dispositions de vigilance sanitaire, laquelle prévoyait notamment de prolonger jusqu'au 31 juillet prochain le régime d'exception en vigueur et son corollaire, le passe sanitaire, dont on a pu apprécier l'efficacité contre les variants delta et omicron.

À peine un mois plus tard, le Président de la République décidait de convoquer le Parlement en urgence, afin d'imposer, cette fois-ci, le passe vaccinal, alors que les épidémiologistes indiquent que nous semblons atteindre le pic épidémique de la cinquième vague et que les contaminations baissent – en Île-de-France, c'est bien le cas. On peut dès lors se poser sérieusement la question de l'efficience réelle d'une telle mesure contraignante, non seulement pour les individus qui subiront des restrictions dans leurs activités quotidiennes, mais aussi pour celles et ceux qui auront la charge de la faire appliquer – je pense notamment aux professionnels du secteur de la restauration, auxquels vous avez soudainement souhaité confier des missions de contrôle d'identité de leurs clients.

La grande majorité du groupe Libertés et territoires s'est exprimée contre le texte, et il en sera de même dans le cadre du vote définitif de la loi. N'y voyez pas un refus de protéger les Français, comme certains ont pu l'affirmer. Nous avons toujours été clairs concernant la nécessité de faire usage d'une stricte proportionnalité entre les moyens engagés et l'objectif visé. Nous avons toujours eu à cœur d'être vigilants sur les raisons qui pourraient nous pousser à restreindre les libertés fondamentales. Malgré des demandes répétées, notamment de la CNIL, le Gouvernement n'a pas fourni de garanties sur l'efficacité concrète d'un outil comme le passe sanitaire, qu'un bon nombre de pays voisins n'ont d'ailleurs pas jugé utile de mettre en place.

Nous n'avons jamais eu non plus d'explications sincères et argumentées concernant l'efficience supposée du passe vaccinal, alors que 91 % de la population éligible est déjà vaccinée – on atteint même 98 % dans certains départements. D'autant que nous avons tous pu le constater : un schéma vaccinal complet n'empêche en rien la contamination ni la transmission, même s'il permet – et nous nous en réjouissons – d'éviter les formes graves de la maladie.

En fait, la raison réelle du passe vaccinal nous a été dévoilée à la lecture d'un article paru dans Le Parisien, dans lequel le Président de la République a fait part de son souhait « d'emmerder » les non-vaccinés. Au sein de notre groupe, nous ne concevons pas notre mandat de la sorte. Nous sommes là pour protéger les Français et pour garantir leur liberté, et non pour les dresser les uns contre les autres en attisant les tensions. Le Président de la République et sa majorité confondent campagne sanitaire et campagne électorale.

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