Intervention de Yannick Favennec-Bécot

Séance en hémicycle du jeudi 20 janvier 2022 à 15h00
Augmentation du salaire minimum — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaYannick Favennec-Bécot :

Faisant écho à la candidate du Parti socialiste à l'élection présidentielle, le groupe Socialistes et apparentés nous propose une hausse substantielle du SMIC. À n'en pas douter, il existe dans notre pays un problème des bas salaires qui rejoint celui des inégalités sociales, dont tout indique qu'elles se sont considérablement accrues durant la crise sanitaire.

Nous sommes convaincus que le travail constitue un formidable vecteur d'émancipation, que tout le monde aspire à être mis à contribution et à faire bénéficier la collectivité de ses talents. Néanmoins, comment donner du sens à son travail lorsque celui-ci ne paie pas, lorsqu'il ne permet pas de s'enrichir, de faire des projets, d'accéder à la propriété, de fonder ou d'assumer une famille ? Or les travailleurs qui perçoivent un salaire modeste sont directement touchés par l'inflation : concentrée sur les produits du quotidien – le carburant indispensable aux déplacements, l'énergie nécessaire pour se chauffer, les denrées alimentaires –, celle-ci affecte leur famille dans ses besoins essentiels. Du reste, les prix inédits atteints par les carburants, au-delà des fluctuations des marchés, conduisent à soulever la question des taxes perçues par l'État.

Si nous partageons avec le groupe socialiste l'objectif d'augmenter le pouvoir d'achat, en particulier celui des ménages les moins fortunés, nos convictions divergent fondamentalement s'agissant de la méthode. En effet, la soudaine augmentation du SMIC accroîtrait d'autant, et de manière tout aussi abrupte, le coût du travail ; en d'autres termes, l'effort en vue d'une hausse du pouvoir d'achat des Français serait exclusivement fourni par les entreprises, dont les prélèvements obligatoires trop élevés minent déjà la compétitivité. Les difficultés supplémentaires que rencontreraient alors les acteurs économiques se répercuteraient directement sur le recrutement.

Outre qu'elle constitue une aberration économique, votre proposition suscite de dangereux espoirs en suggérant qu'il suffirait d'augmenter le salaire minimum pour résoudre le problème des bas salaires. Comment une petite entreprise de quelques salariés, qui se démène quotidiennement afin de survivre tant bien que mal, pourrait-elle supporter le coût d'une telle mesure ? De surcroît, je le répète, celle-ci reviendrait à stigmatiser indirectement tous les employeurs en laissant croire qu'il suffit de leur tordre le bras, quelle que soit la situation financière de leur société, pour augmenter le pouvoir d'achat de millions de Français.

Nous sommes au contraire partisans d'une diminution considérable des prélèvements obligatoires, seule mesure capable de rapprocher le salaire net du salaire brut, donc d'accroître réellement le pouvoir d'achat des travailleurs. Plus largement, il faut libérer les entreprises des contraintes qui les assaillent, ce qui passe également par la réduction du temps consacré aux tâches administratives, bureaucratiques – temps perdu pour la production, entravant le développement de l'entreprise, les recrutements et les hausses de salaire.

Par ailleurs, au sein même du Parti socialiste, votre proposition ne semble pas faire consensus. L'ancien Premier ministre Bernard Cazeneuve, qui a récemment rejoint l'équipe de campagne d'Anne Hidalgo, déclare ainsi que les conditions de l'augmentation du SMIC doivent être déterminées dans le cadre d'une conférence sociale : or ce texte prévoit à la fois l'augmentation et la conférence, indépendamment l'une de l'autre ! Il est curieux, chers collègues, que vous nous soumettiez une mesure aux conséquences aussi importantes, alors que le débat n'est pas tout à fait tranché entre vous.

Pour toutes ces raisons, le groupe UDI et indépendants ne soutiendra pas cette proposition de loi.

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