Intervention de Carole Grandjean

Séance en hémicycle du mercredi 26 janvier 2022 à 15h00
Ratification de l'ordonnance relative aux modalités de représentation des travailleurs indépendants recourant aux plateformes — Présentation

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaCarole Grandjean, rapporteure de la commission mixte paritaire :

Le présent projet de loi confère à des travailleurs de plus en plus nombreux – les chauffeurs de VTC, les véhicules de tourisme avec chauffeur, et les livreurs de marchandises à deux roues – le droit de désigner des représentants chargés de dialoguer avec les plateformes numériques auxquelles ils recourent pour leur activité. Il s'inscrit dans le prolongement de la loi El Khomri qui a posé le principe de la responsabilité sociale des plateformes à l'égard des travailleurs indépendants. Il découle aussi de la loi d'orientation des mobilités qui a permis aux plateformes d'établir une charte fixant les conditions et modalités d'exercice de cette responsabilité. Cette dernière loi a impulsé la construction d'un dialogue social entre les plateformes et les travailleurs indépendants en autorisant le Gouvernement à définir par ordonnance les modalités de représentation de ces travailleurs et les conditions d'exercice de cette représentation.

C'est ainsi qu'a vu le jour l'ordonnance du 21 avril 2021 que l'article 1er du projet de loi tend à ratifier. En l'état, l'ordonnance traite de la représentation des travailleurs indépendants et confie à un nouvel établissement public, l'Autorité des relations sociales des plateformes d'emploi (ARPE), la régulation des relations sociales entre les plateformes et les travailleurs. Par cohérence, l'article 2 habilite le Gouvernement à prendre par ordonnance les dispositions nécessaires à la poursuite de la construction du dialogue social dans ces secteurs.

Le 28 septembre, notre Assemblée adoptait le texte en première lecture, après l'avoir enrichi ; je pense notamment à la précision selon laquelle les représentants des travailleurs et des plateformes pourront recourir à une expertise sur les éléments nécessaires à la négociation des accords de secteur. Peu après, le Sénat adoptait le projet à son tour, non sans l'avoir amendé. Cela n'a pas empêché, et c'est heureux, la commission mixte paritaire réunie le 5 janvier dernier de s'accorder sur le texte que la rapporteure pour le Sénat, Frédérique Puissat, et moi-même leur proposions d'adopter. Permettez-moi d'y revenir brièvement.

À l'article 1er , il nous est apparu utile, ainsi que le soutenait le Sénat, de recentrer le rôle de l'ARPE sur la régulation du dialogue social entre les plateformes numériques et les travailleurs plutôt que sur la régulation des relations sociales entre les deux parties. Par ailleurs, par souci de simplicité, nous avons souhaité ne pas imposer aux travailleurs qui exerceraient à la fois une activité de conduite de VTC et de livraison de marchandises d'avoir à choisir un secteur plutôt qu'un autre pour exercer leur droit de vote.

À l'article 2, les divergences entre les deux assemblées ont cédé la place à une rédaction de compromis. Tout d'abord, l'habilitation à légiférer par ordonnance pour organiser le dialogue social au niveau de chacune des plateformes est supprimée. Ensuite, le souci partagé d'encadrer davantage les futures dispositions relatives à la périodicité et au champ de la négociation collective au niveau des secteurs trouve une traduction dans l'habilitation à légiférer par ordonnance plutôt que dans un nouvel article destiné à inscrire d'ores et déjà ces dispositions dans le code du travail. Ainsi, l'ordonnance définira les thèmes et la périodicité de la négociation collective. Ces thèmes incluront notamment les modalités de détermination des revenus des travailleurs, mais aussi les mesures visant à améliorer leurs conditions de travail et à prévenir les risques professionnels auxquels ils peuvent être exposés.

En outre, les missions de l'ARPE évoluent : son rôle de médiation ne s'exercera pas entre les plateformes et les travailleurs indépendants, mais entre les premières et les représentants des seconds. Enfin, l'ordonnance devra être prise dans un délai de neuf mois. Cela lui permettra d'intégrer les lignes directrices que la Commission européenne aura édictées sur la question de la compatibilité entre le droit de la concurrence européen et les accords issus de la négociation collective entre les travailleurs indépendants et les plateformes numériques d'emploi.

Mes chers collègues, le présent texte est une avancée pour les quelque 50 000 travailleurs des plateformes de la mobilité et de la livraison. Nous sommes convaincus que le dialogue social est le meilleur moyen de rééquilibrer les relations entre travailleurs et plateformes. C'est toute l'ambition de ce projet dont nous suivrons attentivement la mise en œuvre.

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