Intervention de Thibault Bazin

Séance en hémicycle du mercredi 26 janvier 2022 à 15h00
Ratification de l'ordonnance relative aux modalités de représentation des travailleurs indépendants recourant aux plateformes — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaThibault Bazin :

L'Assemblée nationale et le Sénat, réunis en commission mixte paritaire, sont parvenus à un accord sur ce projet de loi qui vise à instaurer un dialogue social entre travailleurs indépendants et plateformes de livraison et de véhicules de tourisme avec chauffeur.

Le groupe Les Républicains accorde autant d'importance au dialogue social qu'à l'entrepreneuriat. Nous sommes d'abord attachés à l'entrepreneuriat et au travail indépendant : nous soutenons la liberté d'entreprendre, et souhaitons donner à chacun la possibilité de développer sa petite entreprise. Si un jeune a une idée, il faut lui donner la chance de se lancer. Valoriser le travail, c'est valoriser toutes les formes qu'il peut prendre. Alors que certains ne prônent que le salariat et souhaitent mettre tous les travailleurs dans une même case, nous sommes au contraire pour la diversité. Certes, il faut défendre le statut de salarié, qui correspond aux besoins d'une large majorité de la population. Ainsi, la France comptait plus de 25 millions de salariés en 2020. Mais il faut également soutenir et développer l'emploi non salarié, qui concerne plus de 3 millions de travailleurs.

Ensuite, nous sommes attachés au dialogue social. La droite républicaine a d'ailleurs toujours œuvré à le développer. Ainsi, ne vous en déplaise, madame la ministre, l'article L. 1 du code du travail, qui oblige le Gouvernement à mener une concertation préalable à tout projet de réforme avec les partenaires sociaux, a été institué par la loi Larcher de 2007. Son pendant parlementaire, le protocole Accoyer, a été élaboré par Bernard Accoyer.

Dans cette perspective, nous pouvons nous satisfaire de certaines dispositions de ce projet de loi, notamment celles relatives à la mise en place d'une représentation des travailleurs indépendants des plateformes par le biais des organisations professionnelles et des syndicats. En revanche, nous étions opposés dès la première lecture au processus d'étatisation du dialogue social que constitue la création, à l'article 1er , d'un établissement public – un de plus ! – dénommé Autorité des relations sociales des plateformes d'emploi. De même, nous étions opposés à l'article 2, qui prévoit le recours à une énième ordonnance : pour toutes ces raisons, nous avions voté contre l'ensemble du projet de loi.

Bien que nous regrettions les conditions d'emploi de certains indépendants dans les secteurs considérés, nous sommes persuadés que l'amélioration de leurs conditions de travail passera par un dialogue social renforcé entre les plateformes et les indépendants. La situation n'est d'ailleurs pas la même selon qu'ils travaillent dans le secteur des véhicules de tourisme avec chauffeur ou dans celui de la livraison, notamment de repas. Dans le premier cas, il appartient aux transporteurs indépendants – qui choisissent de travailler ou non avec certaines plateformes – de s'organiser afin de se faire entendre. Il en va autrement de la livraison de repas, qui recouvre souvent du salariat déguisé et des conditions de travail particulièrement difficiles. De plus, les personnes embauchées n'ont le plus souvent pas de lieu de travail commun et ont du mal à s'organiser pour se faire entendre.

Sans remettre en cause leur statut indépendant ni leur autonomie, nous sommes favorables au développement de leurs droits, notamment en matière de protection sociale et de prévention des accidents du travail. Ainsi, les précisions sur les thèmes et la périodicité de la négociation collective vont dans le bon sens. Celle-ci devra porter sur les modalités de détermination des revenus, le développement des compétences professionnelles, la sécurisation des parcours professionnels et l'amélioration – tant attendue – des conditions de travail.

L'examen du texte au Sénat a permis de revenir sur certaines dispositions, ce qu'a confirmé la commission mixte paritaire. Ainsi, l'ARPE sera recentrée sur sa mission de régulation du dialogue social : elle ne sera pas chargée de réguler les relations sociales entre les plateformes et les indépendants. Par ailleurs, la CMP a maintenu la suppression, à l'initiative du Sénat, de l'habilitation à légiférer par ordonnance pour organiser le dialogue social au niveau de chaque plateforme.

Malgré ces avancées, que nous devons au Sénat et à une collaboration fructueuse entre nos deux chambres, notre groupe n'est toujours pas favorable à la création d'un établissement public, ni à la possible future mise sous tutelle du dialogue social par l'État – surtout sachant à quel point le Gouvernement a malmené ce dialogue, notamment à propos de la réforme des retraites et de la suppression des caisses autonomes. Pour ces raisons, le groupe Les Républicains s'abstiendra sur ce projet de loi.

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