L'adoption est une institution dont le visage continue d'évoluer et la loi se doit de refléter deux changements majeurs : l'ouverture de l'adoption à toutes les formes de couple, et un changement de paradigme qui, conformément à l'intérêt supérieur de l'enfant, ne vise plus à maintenir absolument les liens biologiques, mais à donner la meilleure famille à un enfant – et non à assouvir un désir de devenir parent.
La proposition de loi dont nous débattons aujourd'hui a le mérite de mettre ces sujets à l'ordre du jour. Nous regrettons cependant vivement que le Sénat et l'Assemblée n'aient pas abouti à un accord constructif. Le double objectif visé par le texte – d'une part, faciliter et sécuriser le recours à l'adoption, d'autre part, renforcer le statut de pupille de l'État – aurait pourtant dû mettre tout le monde d'accord. Si quelques ajouts du Sénat ont été conservés et que des points de convergences ont pu être trouvés sur certaines dispositions, il demeure des désaccords majeurs et, finalement, nous allons voter en lecture définitive un texte décevant.
Tout d'abord, il ne comble absolument pas toutes les lacunes en matière d'adoption. Le constat est partagé sur les nombreuses difficultés de ce régime juridique qui conduit au paradoxe selon lequel de nombreuses familles sont à la recherche d'un enfant à adopter, tandis que des pupilles de l'État restent sans solution. De plus, les mesures disparates de ce texte semblent parfois concerner davantage la volonté de faciliter l'adoption pour les candidats, que celle de sécuriser la situation de l'enfant.
Ensuite, ce texte est décevant parce qu'il intègre de manière inopportune des mesures qui ne devraient pas s'y trouver. Je pense notamment à l'article 9 bis . Le groupe UDI et indépendants s'est opposé à cet article qui aurait mérité une discussion approfondie dans le cadre de la loi bioéthique. Comme le souligne le Sénat, cette mesure n'a pour objet que de régler un litige entre adultes sans considération de l'intérêt de l'enfant. L'ajout de la mention « à titre exceptionnel » n'est qu'un artifice sans aucune portée juridique. De même, nous ne vous suivons ni au sujet de l'absence de consentement exprès à l'adoption des enfants placés à l'ASE ni concernant la suppression de la possibilité de confier son enfant à un organisme autorisé à l'adoption, car parfois ces organismes sont bien utiles.
Enfin, ce texte est décevant car il ne présente pas de vision globale de la protection de l'enfance, qui fait actuellement l'objet de textes divers et d'habilitation à légiférer par ordonnances sans cohérence d'ensemble.
Je ne dis pas tout cela contre vous, madame la rapporteure : vos intentions étaient louables. D'ailleurs, votre rapport de 2019, qui a donné lieu à cette proposition de loi, est un travail que je tiens à saluer. Il aura permis quelques avancées inscrites dans ce texte. Je tiens en effet à souligner tout de même des points de consensus.
Je pense tout d'abord à l'ouverture de l'adoption aux couples pacsés ou en concubinage, qui est la mesure phare de ce texte. Il y a ensuite le fait de mieux préparer les familles à l'adoption, notamment grâce à une formation préalable à l'obtention de l'agrément. C'est une bonne chose car, trop souvent, les couples demandeurs ne sont pas assez informés sur le processus d'adoption et ses suites. Nous soutenons enfin le fait de faciliter l'adoption des enfants qui peuvent l'être, au besoin sous la forme d'une adoption simple, objectif qui transparaît dans l'ensemble de la proposition de loi.
Il y a donc quelques petites évolutions positives qui, nous l'espérons, vont pouvoir soutenir le processus d'adoption d'enfants qui en ont vraiment besoin. Mais, vous l'aurez compris, le groupe UDI et indépendants reste très partagé sur ce texte. Nous aurions souhaité plus et mieux pour nos enfants.