L'histoire de France est un bloc. On ne peut en dissocier les zones d'ombre et les zones de lumière. L'important aujourd'hui n'est plus de dénoncer ou de dévoiler des secrets ; il est de comprendre et plus encore d'accepter. Il s'agit non de se résigner, mais d'accepter que ce passé, et peut-être plus encore la manière dont il a été géré après la guerre, est révolu.
En ce sens, dans la lignée du rapport Stora et du rapport Duclert, de l'annonce récente de la ministre de la culture d'ouvrir avec quinze ans d'avance les archives sur les enquêtes judiciaires liées à la guerre d'Algérie, de la récente reconnaissance par le Président de la République de la fusillade de la rue d'Isly, à Alger, la France peut être fière de son travail mémoriel. Il a fallu du courage pour faire la lumière sur les zones d'ombre de notre histoire. Nous nous tenons droit face à l'histoire quand peu de nations osent se confronter à leurs propres noirceurs.
Un pas de plus est franchi aujourd'hui avec l'examen de ce projet de loi. Il conclut un travail de reconnaissance et de réparation mené tout au long du quinquennat en faveur des harkis, qu'il s'agisse, en 2018, de l'augmentation de l'allocation de reconnaissance et de l'allocation viagère de 600 euros par an, ou de la création, en 2019, d'un fonds social de soutien pour les enfants de harkis, doté de 13,6 millions d'euros – près de 2 000 d'entre eux ont ainsi été aidés.
Lors de son discours du lundi 20 septembre 2021, le Président de la République a bien rappelé l'objet du projet de loi. Ce texte n'a pas vocation à dire ce qu'est l'histoire – c'est le rôle des historiens : il souligne en revanche la singularité du drame des harkis, liée à la maltraitance des familles accueillies en métropole. En gravant dans le marbre de la loi la responsabilité de la France dans les conditions d'accueil des harkis, nous répondons aussi à une demande historique des associations. Enfin, nous continuerons de faire vivre cette page de notre histoire et de l'entretenir dans les mémoires, pour que les Français n'oublient pas, en particulier grâce à la journée d'hommage fixée au 25 septembre.
À l'issue de la commission mixte paritaire, ce texte sort renforcé et enrichi. L'article 1er n'omet rien de cette page de notre histoire en rappelant que nous avons « abandonné » les harkis et qu'après les accords d'Évian, leurs conditions d'accueils ont été « source d'exclusion, de souffrances et de traumatismes ». Je remercie nos collègues sénateurs, qui en lien avec le Gouvernement, ont amendé le texte pour que la commission instituée à l'article 3 soit rattachée au Premier ministre et non à l'ONACVG. À cela s'ajoute la nomination du président de cette commission par le Président de la République, traduisant tout l'attachement de l'État à cette question. Le Gouvernement, le Parlement et les associations ont donc œuvré ensemble, il convient de le rappeler.
Nous soulignons également la volonté de la CMP de dépasser les haines en supprimant l'article 8 qui instituait un délit d'injure spécifique. Non, avoir été un supplétif de l'armée française n'est pas une honte ! Il était nécessaire de ne pas conserver cet article qui aurait pu raviver des plaies.
Mes chers collègues, ce projet de loi constitue donc une avancée mémorielle majeure et une juste réparation pour les harkis. Il permet à la France, notre pays, d'être plus unie, plus digne et mieux préparée pour faire face à d'autres aléas de l'histoire. En bref, nous voilà plus aptes à faire nation.
Le groupe Agir ensemble remercie donc tous ceux qui ont contribué à ce travail et votera en faveur du texte.