Intervention de Emmanuelle Ménard

Séance en hémicycle du jeudi 1er février 2018 à 21h30
Récépissé de contrôle d'identité — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaEmmanuelle Ménard :

Monsieur le président, madame la ministre, chers collègues, il y a des moments où, comme diraient certains, il faut choisir son camp. Et manifestement, nous ne sommes pas tous, ici, du même camp. Le mien, c'est celui de la sécurité, des forces de sécurité et des braves gens, des honnêtes gens.

Or que nous propose cette proposition de loi, derrière une rhétorique qu'on connaît par coeur, consistant à toujours trouver des excuses à ceux qui ne s'excusent jamais, et à chercher des poux dans la tête à ceux qui sont là pour nous porter secours et nous protéger ? Ce texte propose la mise en place d'un récépissé lors des contrôles d'identité, au moment même, permettez-moi de le relever, où les forces de l'ordre doivent faire face à une recrudescence des agressions qui ont bouleversé non seulement les policiers, mais la France, celle des honnêtes gens, justement. Un récépissé en deux volets, pour éviter qu'on ne fiche les personnes contrôlées, pour permettre les recours devant l'inspection générale de la police nationale et pour ne pas violer les sacro-saintes règles de la CNIL, la Commission nationale de l'informatique et des libertés. Bref, soyons clairs, un récépissé qui sonne comme une présomption de culpabilité à l'égard de nos policiers, soupçonnés d'être des délinquants en puissance, puisque présumés toujours tentés par ces contrôles au faciès dont seraient victimes des contrôlés toujours blancs comme neige, cela va de soi.

La semaine dernière, j'ai accompagné des policiers dans leur ronde de nuit. Ils ont procédé à des contrôles d'identité, bien sûr, envers des personnes de toutes couleurs de peau, je vous rassure, et bingo : il y a eu 100 % de réussite ! tous ceux qui ont été contrôlés avaient quelque chose à se reprocher, de la conduite sans permis ni assurance à la possession de stupéfiants ! De petits délits, me direz-vous ; mais des délits quand même !

Les récépissés que vous réclamez ne constitueraient ni plus ni moins qu'un peu plus de bureaucratie, à l'heure où tous, citoyens comme policiers, aspirent à voir nos forces de l'ordre débarrassées de cette paperasse qui les tient beaucoup trop éloignées du terrain.

Si je ne m'inquiète pas du résultat du vote de la proposition de loi, je m'inquiète en revanche de ce qu'elle véhicule : d'abord, je l'ai dit et je le redis, une véritable suspicion, une défiance à peine voilée à l'égard de nos policiers, mais aussi un mensonge. Comme si les policiers pouvaient agir à leur guise, comme s'ils n'étaient pas encadrés par la loi. Mais, vous le savez – ou plutôt, vous faites semblant de ne pas le savoir – , le Conseil constitutionnel comme la Cour européenne des droits de l'homme se sont penchés sur ce dossier. Et, lorsqu'il y a des abus, ils sont réprimés, Mme la ministre l'a d'ailleurs rappelé tout à l'heure.

Quant au code de la sécurité intérieure, il dispose déjà que « le policier ou le gendarme ne se fonde sur aucune caractéristique physique ou aucun signe distinctif pour déterminer les personnes à contrôler » : difficile de faire plus clair ! Mais, manifestement, ce n'est pas encore assez pour les auteurs de ce texte. Entraver le travail des forces de l'ordre ne les dérange pas ; jeter l'opprobre sur les forces de l'ordre ne les trouble pas. Ils n'ont qu'un mot à la bouche : il ne faudrait pas « humilier », disent-ils, l'éventuelle victime innocente d'un abominable contrôle au faciès ! Mais humilier des gardiens de la paix…

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