Colonnes vertébrales fracturées, ecchymoses, affaiblissement du système immunitaire, altération de la reproduction… Les pêcheurs des Hauts-de-France constatent chaque jour les ravages que provoque sur les poissons la technique de la pêche électrique dans les eaux de la mer du Nord. En visite sur le port de Dunkerque, le 12 janvier dernier, avec le député européen, M. Dominique Riquet, nous n'avons pu que partager cet amer constat face aux poissons abîmés qui nous étaient présentés.
Interdite depuis 1998, la technique controversée de la pêche électrique a toutefois pu se développer par le biais d'un statut dérogatoire depuis 2007, puisque l'Union européenne a autorisé chaque État membre à équiper jusqu'à 5 % de sa flotte de chaluts à perche et ce, au titre d'une expérimentation.
Les Pays-Bas ont très largement équipé leurs navires. Ils usent et abusent de cette technique dans les eaux de la mer du Nord et pratiquent à Bruxelles un lobbying intensif pour que la pêche électrique puisse être généralisée.
Le 16 janvier dernier, le Parlement européen était appelé à statuer sur le devenir de cette pratique. Nos homologues se sont prononcés par 402 voix contre 232 en faveur d'une interdiction stricte de la pêche électrique. Il faut saluer cette décision très courageuse qui n'est toutefois pas suffisante puisque la Commission européenne propose, a contrario, le maintien de l'expérimentation.
La décision finale est donc entre les mains des gouvernements nationaux, et plus précisément de la formation « Agriculture et Pêche » du Conseil de l'Union européenne et du fameux trilogue. Au titre de la procédure ordinaire de codécision, les ministres devront en effet se prononcer définitivement sur l'interdiction, ou non, de la pêche électrique lors de leur prochaine réunion.
Pour influer sur cette décision en tant que parlementaires nationaux, nos marges de manoeuvre sont certes réduites mais pas inexistantes. Cette proposition de résolution européenne permet en effet à la Représentation nationale d'envoyer un message très clair au Gouvernement, en demandant l'interdiction de la pêche électrique.
La position du Gouvernement français sur ce sujet demeure actuellement trop vague. Dès juin 2016, j'avais alerté Mme Ségolène Royal, alors ministre de l'environnement, de l'énergie et de la mer, sur les désastres causés par la pêche électrique. Elle déclarait alors être opposée à cette pratique, sans toutefois agir concrètement pour l'interdire. Vous le rappeliez, Monsieur le Président : en septembre 2017, ici même, j'avais interrogé une première fois M. Stéphane Travert, ministre de l'agriculture et de l'alimentation dans le cadre d'une audition de la commission des affaires économiques autour du thème de la pêche sans obtenir de réponse satisfaisante. Le 8 novembre dernier, je l'ai donc une nouvelle fois interrogé en séance publique. Il déclara alors : « Sachez que la France demande le maintien de la réglementation actuelle encadrant la pêche électrique ». Le ministre ne se prononçait donc pas totalement contre cette technique de pêche puisqu'il souhaitait le maintien de l'expérimentation. De nouveau interrogé le 29 novembre puis le 13 décembre, le ministre répétait que la France s'opposerait à toute levée d'interdiction de la pêche électrique au-delà de la dérogation actuelle. Les garanties apportées par le ministre ne sont pas suffisantes. Par conséquent, dans cette proposition de résolution européenne, nous demandons un engagement clair du ministre pour l'interdiction de la pêche électrique.
Enfin, sur la forme, il est fort regrettable que cette proposition de résolution ne soit pas signée par l'ensemble des groupes. Une fois encore, la majorité a préféré l'entre-soi au rassemblement, en refusant la co-signature de nombreux députés, dont je fais partie, et qui auraient pourtant souhaité être associés à ce texte. Il est dommage que l'élan transpartisan que nous avions donné en janvier dernier dans une tribune cosignée par 249 députés contre la pêche électrique n'ait pas été suivi d'effet. Cela aurait été l'occasion d'envoyer un message fort en direction du Parlement européen.
Le groupe UDI, Agir et Indépendants, encourage le développement d'une pêche durable et soutiendra donc cette proposition de résolution européenne afin d'inciter le Gouvernement français à se prononcer pour une interdiction stricte de la pêche électrique.