Madame la présidente, monsieur le ministre, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, la proposition de loi que nous avons à examiner répond à un constat simple : le régime d'ouverture des écoles privées est dépassé, incohérent et à bien des égards dangereux.
Le caractère obsolète des dispositions actuelles a été mis en lumière par la forte croissance de l'enseignement privé hors contrat ces dernières années. Cette augmentation s'explique par divers motifs : un engouement pour des pédagogies alternatives, le choix d'une éducation religieuse, une volonté d'accorder plus de place aux langues étrangères ou régionales, mais aussi parfois, il faut le reconnaître, une déception à l'égard de l'éducation nationale.
L'augmentation du nombre de créations d'écoles hors contrat fait qu'il nous faut avoir un discours clair vis-à-vis de ces structures. Bien évidemment, il n'est pas question d'empêcher leur création mais il est indispensable de les maintenir dans un cadre déclaré et contrôlé. Si notre assemblée doit respecter la liberté d'enseignement, elle doit aussi légiférer pour établir des règles strictes en matière d'ouverture et de contrôle de ces écoles.
Cette proposition de loi répond à ce besoin. En effet, son article 1er simplifie la législation en fusionnant les trois régimes existants. Il renforce la capacité de contrôle exercée par les différentes autorités, dont le maire, en allongeant notamment les délais et motifs d'opposition. Il en ajoute également de nouveaux comme cela a été rappelé par les précédents orateurs.
Je souhaite revenir plus longuement sur l'article 2 de cette proposition de loi qui affirme le principe d'un contrôle obligatoire de chaque établissement hors contrat au cours de la première année. Cette mesure me semble absolument justifiée. En effet, ces contrôles sont fondamentaux en ce qu'ils permettent de certifier que les enseignements prodigués au sein de ces établissements ne servent pas à ancrer une quelconque idéologie.
Le texte réaffirme que le contrôle se déroule dans l'établissement, ce qui est également essentiel. En effet, certains parents se laissent parfois abuser par des projets pédagogiques qui n'en ont que le nom et certaines écoles se résument à des appartements où les enfants, à l'abri des regards, reçoivent quelque chose qui n'a rien à voir avec l'idée que l'on se fait de l'enseignement.
Ces contrôles a posteriori sont d'une extrême importance parce que certaines choses ne peuvent se voir qu'une fois l'établissement ouvert. Or les contrôles sont encore insuffisants en règle générale. Les académies les plus concernées reconnaissent que de nombreux établissements hors contrat n'ont jamais fait l'objet d'un quelconque contrôle. Trop peu d'établissements nouvellement créés sont contrôlés au cours de leur première année d'exercice : moins de la moitié pour l'année scolaire 2016-2017. Nous sommes bien en deçà des objectifs fixés par la circulaire du 17 juillet 2015, à savoir un contrôle lors de la première et de la cinquième année d'exercice.
Il faudra, et nous comptons sur vous, monsieur le ministre, que le ministère de l'éducation nationale se donne les moyens, notamment dans les académies où se concentrent les ouvertures de tels établissements, de rendre ce contrôle systématique la première année de fonctionnement du nouvel établissement. Je me félicite des garanties que vous avez déjà apportées à cet égard dans votre propos liminaire.
Ces contrôles doivent, pour être efficients, être réalisés en étroite collaboration avec l'ensemble des services de l'État, au premier rang desquels le ministère de l'intérieur, lequel dispose d'informations parfois utiles pour prévenir des ouvertures qui ne seraient pas souhaitables.
Monsieur le ministre, le sujet du contrôle est très important. Il conviendra de professionnaliser ces contrôles, afin d'aider et épauler les inspecteurs dans cette mission parfois très délicate.
Il aurait également pu être envisagé, comme le demandent certains groupes, un contrôle annuel des établissements hors contrat. Mais tout laisse à penser que ce contrôle annuel disperserait les moyens alloués. Nous risquerions ainsi de supprimer les marges de manoeuvre des rectorats et in fine de limiter l'efficacité de ces contrôles.
Si un contrôle annuel semble donc difficilement réalisable, voire irréaliste, il est impératif de renforcer les contrôles inopinés : ce sera l'objet d'un amendement à l'article 2 que je défendrai.
Aujourd'hui, force est de constater que la grande majorité des contrôles des établissements scolaires hors contrat sont planifiés. Afin d'en renforcer l'efficacité, il me semble important qu'ils puissent se faire ici et là de manière inopinée.
Enfin, comme pour les établissements publics et les établissements sous contrat, il est demandé que ce contrôle se double d'un contrôle des titres et des noms des enseignants, afin de pouvoir vérifier que ces derniers ne figurent pas dans les divers fichiers judiciaires intéressant la sûreté de l'État ou répertoriant les auteurs d'infractions sexuelles ou d'actes de terrorisme. Cela a beau sonner comme une évidence, il est utile de le rappeler et de le graver dans le marbre.
Mes chers collègues, les dispositions de cette proposition de loi vont dans le bon sens. Elles représentent l'aboutissement d'un travail de compromis visant à instituer un régime le plus simple et le plus efficace possible, conforme à l'intérêt général mais qui ne fait pas fi pour autant du souci de préserver la liberté d'enseignement. C'est pourquoi j'invite tous les parlementaires sur ces bancs à voter la proposition de loi.