Monsieur le secrétaire d'État auprès du ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire, Nicolas Hulot a déclaré il y a quelques mois : « Sur l'éolien en mer, on s'y est mal pris. »
S'agissant du projet offshore Le Tréport-Dieppe, on s'y est en effet mal pris avec le monde de la pêche, en imposant en 2013, pour l'implantation du parc éolien, la zone la plus riche en ressource halieutique de toute la Manche Est, une zone qui avait été rejetée lors du précédent appel d'offres. On s'y est aussi mal pris vis-à-vis du parc marin, qui s'est vu retirer sa compétence d'avis conforme au cours de l'année 2017 ; résultat : le parc a explosé en vol.
Mais le feuilleton ne s'arrête pas là. Voilà que le Gouvernement, par un cavalier législatif au Sénat, essaie de tordre le bras aux consortiums attributaires des marchés des six projets offshore en cours pour faire baisser le prix de sortie de l'électricité – comme si Bercy venait de découvrir que ce prix était élevé et que la technologie avait évolué depuis 2013 !
On a tous compris qu'il s'agissait là d'un coup de Trafalgar dans la négociation du prix de l'électricité. Deux issues sont possibles, désormais : ça passe ou ça casse. Dont acte.
Cela prouve, premièrement, que l'État, quand il le veut, n'est pas si désarmé que cela pour agir. Ce que nous demandons depuis plusieurs mois pour le projet éolien offshore Le Tréport-Dieppe était donc possible : on aurait pu profiter du vote du texte simplifiant les procédures de développement des énergies marines pour relancer un projet équivalent à l'actuel projet du Tréport dans une zone située plus à l'ouest, moins pénalisante pour la pêche.
Cela signifie, deuxièmement, que les déclarations faites par le Gouvernement à l'automne dernier, au Havre, sur la nécessité de développer les énergies marines en ayant une vision d'ensemble et en réglant au préalable les conflits d'usage attendent toujours une traduction concrète.
Le troisième enseignement de ce qui vient de se passer au Sénat est le suivant : la définition de l'intérêt général par le Gouvernement se limite pour l'instant à la maîtrise du prix de sortie de l'électricité.
Nous, nous craignons la double peine, c'est-à-dire, dans le cas du Tréport, un projet qui va faire très mal à notre pêche artisanale déjà menacée par le Brexit et par les effets collatéraux de la pêche électrique en mer du Nord, et, par ailleurs, des projets renégociés qui offrent aux consortiums la possibilité de faire de la question industrielle et des fameuses usines de Cherbourg et du Havre la variable d'ajustement des négociations avec le Gouvernement.
Mes questions sont donc simples. Dans la négociation avec les attributaires des parcs éoliens, la promesse d'une filière industrielle et le nombre d'emplois sont-ils à vos yeux négociables ? Les mesures compensatoires promises aux territoires – notamment en matière de formation et de pêche – sont-elles également négociables ? En résumé, les emplois industriels et l'avenir de la pêche entrent-ils pour vous dans le champ de l'intérêt général quand vous renégociez, et quelles garanties pouvez-vous – en Normand, monsieur le secrétaire d'État, donc en voisin – obtenir pour ce parc et pour le territoire que vous connaissez bien ?