Intervention de Nathalie Elimas

Séance en hémicycle du mardi 15 mai 2018 à 15h00
Lutte contre les violences sexuelles et sexistes — Après l'article 1er

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaNathalie Elimas :

Les médecins jouent un rôle vital dans le dépistage précoce de l'inceste et des violences sexuelles commises à l'encontre des enfants. C'est l'obligation de signaler qui en permettra la réalisation concrète. En effet, la majorité des médecins ont encore, dans notre pays, la liberté de choisir entre signaler les suspicions de violences sexuelles au procureur de la République ou de s'abstenir de le faire. Aujourd'hui, seuls les médecins fonctionnaires ont une obligation de signalement de tels faits, en vertu de l'article 40 du code de procédure pénale.

Depuis 1999, on compte pas moins de huit tentatives de modification par voie d'amendement de l'article 226-14 du code pénal, alors même qu'il semblait urgent de trouver une solution au dilemme éthique des médecins. Ce dilemme peut se résumer de la façon suivante : soit ils signalent les cas de suspicion de violence dont ils sont témoins, en application de cet article, et s'exposent alors à des poursuites et à des sanctions disciplinaires et pénales, soit ils ne les signalent pas. Dans ce cas, ils peuvent faire l'objet de poursuites pénales et de condamnations, conformément aux articles 434-1, 434-3 et 226-3 du code pénal pour non-assistance à enfant en péril ou pour entrave à la saisine de la justice, si les violations des dispositions figurant aux mêmes articles sont démontrées.

Les enfants ne sont, quant à eux, pas protégés des violences. C'est ce dilemme qui explique le faible taux de signalement. L'introduction, à l'article 226-14 du code pénal, de l'obligation de signalement des suspicions de violences psychologiques, physiques et sexuelles y mettrait un terme.

Cinq instances internationales, dont le Comité des droits de l'enfant, recommandent l'obligation de signaler. Selon l'article 3 de la Convention internationale des droits de l'enfant, la CIDE, « l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale » dans toutes les décisions qui le concernent.

Avec l'obligation de signaler, un médecin manifeste son respect pour l'enfant qui a eu le courage de se confier à lui malgré les violences, les menaces ou le chantage, car il engage sa responsabilité envers lui. L'obligation de signaler protégera l'enfant du risque de se voir exposé à de nouvelles violences et permettra à d'autres enfants de ne pas être victimes du même agresseur.

L'amendement no 76 prévoit quant à lui que l'obligation légale de signalement des soupçons de violences sexuelles sur mineurs doit impérativement s'accompagner d'une protection des professionnels concernés de toute poursuite devant les juridictions pénales ainsi que devant les instances disciplinaires professionnelles.

Il faut que cesse la peur de signaler : les enfants sont les premières victimes de ces insuffisances de notre législation. Plus tôt les violences seront dépistées, plus tôt il sera possible d'apporter aux victimes le suivi et les soins dont elles auront besoin pour se reconstruire.

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