Intervention de Jean-Christophe Lagarde

Séance en hémicycle du dimanche 3 juin 2018 à 9h30
Évolution du logement de l'aménagement et du numérique — Article 29

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJean-Christophe Lagarde :

On va donc accélérer la spécialisation sociale des territoires à l'intérieur même d'un EPT. Prenons, non pas le mien, mais un autre tout proche, l'EPT Grand Paris-Grand Est : Le Raincy, Villemomble, Gagny, Livry-Gargan sont des villes de couleur politique différentes, situées en Seine-Saint-Denis. Et dans le même territoire, vous trouvez des villes plus compliquées : Neuilly-sur-Marne, les quartiers « camemberts » de Noisy-le-Grand. C'est évidemment à Villemomble et au Raincy qu'on vendra les – quelques – logements sociaux qui existent ; et c'est tout aussi évidemment à Neuilly-sur-Marne que l'on reconstruira.

L'idée que l'on permette de vendre le patrimoine social à un endroit pour le reconstruire ailleurs, grâce aux intercommunalités, me choque profondément. Et nous devrions d'autant plus y réfléchir que c'est à cause de cette spécialisation des années 60 que l'on a engagé les premiers programmes de rénovation urbaine – que le gouvernement cherche d'ailleurs à poursuivre. Nous essayons de réparer les erreurs du passé à coups de milliards. C'est pourquoi il faut freiner la vente de logements sociaux dans les communes qui ne sont pas parvenues à atteindre les 25 % de logements sociaux – ou qui n'ont pas voulu.

L'amendement no 2128 de M. Peu me semble néanmoins peu convaincant, car il pourrait permettre au mécanisme d'exister à l'intérieur d'un territoire. Quant au no 2129, il me paraît trop restrictif. Si j'ai demandé un scrutin public sur l'amendement no 1147 – ce qui n'est pas, reconnaissez-le, une manie du groupe UDI, Agir et indépendants – c'est parce que sa logique me paraît intelligente. Il ne fige pas totalement le patrimoine : le bailleur, le maire, le préfet peuvent après tout considérer comme intéressant de vendre des logements sociaux situés dans une commune qui n'atteindrait pas les 25 %. Mais, en échange, le bailleur doit reconstruire des logements sociaux neufs en nombre équivalent sur le territoire de la commune en question. On permet ainsi la mobilité et la mobilisation des fonds ; le bailleur peut à la fois gérer son patrimoine, encaisser de l'agent, reconstruire ; mais la commune continue de bénéficier d'autant de logements sociaux – sans doute de surcroît de meilleure qualité, avec notamment des rendements énergétiques bien meilleurs. Ça je pourrais le comprendre !

J'invite donc la majorité à réfléchir à ce dispositif : sans figer le patrimoine, celui qui vend utilise l'argent de la vente pour reconstruire et maintenir un équilibre social, peut-être aussi pour diversifier le parc social.

Ce système ne me paraît pas parfait, mais nous débattrons encore de la loi SRU plus tard : il y a en effet logement social et logement social. Il reste une difficulté, que nous proposerons de régler par amendement : selon que l'on utilise le prêt locatif social – PLS – ou le prêt locatif aidé d'intégration – PLAI – on ne fait pas du logement social de la même façon ! On ne s'adresse pas aux mêmes populations.

Celui qui laissera vendre sur son territoire du PLAI pour construire du PLS se moque du monde : ce faisant, il spécialisera socialement son territoire. Mais, pour être honnête, le nombre de PLAI qui seront vendables sera assez faible, en raison tant de la qualité de la construction que des quartiers où ils sont situés, parce que le prix du foncier devait être bas. Mais il faudra aussi traiter ce sujet : ne pas être obnubilés par les 25 %, mais regarder ce qu'il y a à l'intérieur, et diversifier les logements sociaux, faire en sorte que toute la palette soit présente.

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