Intervention de Paul Christophe

Séance en hémicycle du jeudi 14 juin 2018 à 9h30
Protection des savoir-faire et des informations commerciales — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaPaul Christophe :

Monsieur le président, madame la ministre, madame la présidente de la commission des lois, monsieur le rapporteur, chers collègues, je salue à mon tour la commission mixte paritaire pour le travail qu'elle a accompli. Elle est parvenue à trouver un accord sur un texte maintenant l'équilibre entre, d'une part, la protection du secret des affaires et la réparation des préjudices, et d'autre part, les exceptions nécessaires pour garantir le respect des droits fondamentaux et la liberté d'information et d'expression des journalistes, lanceurs d'alerte et salariés.

Tout l'enjeu de cette proposition de loi résidait précisément dans la détermination du point d'équilibre : c'est tout le travail parlementaire qui a permis, dans un temps court et en l'absence d'une véritable étude d'impact, de transposer avec justesse une directive européenne renforçant un peu plus notre arsenal législatif pour la protection des savoir-faire et des informations commerciales.

Cette question a longtemps alimenté le débat public et a donné lieu à diverses tentatives de réformes, qui jusqu'à présent avaient toutes échoué. Aussi l'échelon communautaire est-il apparu comme le plus pertinent pour aborder ce problème où se croisent de nombreux enjeux. Cette directive européenne nous permet enfin de prendre en considération, dans la loi, la réalité à laquelle sont confrontés les acteurs économiques français et européens.

Dans une économie mondialisée, numérisée et ouverte, nos entreprises doivent disposer d'un cadre juridique efficace pour lutter contre l'obtention, l'utilisation et la divulgation illicites des informations dont elles disposent. Ce défi ne fera que s'accroître dans la mesure où les entreprises investissent de plus en plus dans la recherche, le développement et l'innovation, afin d'en tirer des avantages comparatifs dans la compétition économique, et sont parallèlement de plus en plus exposées à des pratiques illicites de renseignement et d'espionnage.

Il appartenait donc au législateur de transposer la directive, de préciser la notion de secret des affaires, de fixer les conditions dans lesquelles la protection est accordée et les cas dans lesquels il est possible d'y déroger. Certes, nos marges de manoeuvre dans la transposition de la directive étaient réduites. Toutefois, le Parlement européen et le Conseil ont laissé le soin aux États membres de préciser les contours de cette notion sensible. Au terme de discussions constructives, c'est finalement la définition proposée par l'Assemblée nationale qui a été retenue. Recentrée sur le caractère commercial et non plus économique du secret des affaires, cette définition garantit l'équilibre du texte.

Face aux mobilisations et aux inquiétudes que peut susciter l'adoption de cette proposition de loi, il convient de faire preuve de pédagogie pour que ce nouvel arsenal législatif soit compris, assimilé et respecté, tant par les entreprises que par les journalistes et les lanceurs d'alertes. Il ne s'agit pas de favoriser la protection du secret des affaires au détriment de la liberté d'information, non plus que l'inverse, mais de concilier ces deux principes en les encadrant par la loi. Cette proposition de loi renforce donc simultanément la protection du secret des affaires et celle des lanceurs d'alerte : dans la continuité des dispositions introduites par la loi « Sapin 2 », elle renforce la protection accordée, par exception au secret des affaires, aux citoyens qui font souvent l'objet de pressions considérables, et sacrifient parfois leur vie familiale, sociale et professionnelle pour une noble cause.

Les journalistes d'investigation qui mènent des enquêtes pour attirer l'attention des pouvoirs publics et de l'opinion publique sur les pratiques scandaleuses de certaines entreprises seront eux aussi protégés.

Par ailleurs, le groupe UDI, Agir et indépendants se réjouit que la commission mixte paritaire ait choisi de réintroduire l'amende civile contre les procédures dilatoires et abusives. Cette innovation majeure permettra de dissuader le recours à la pratique des procédures-bâillons, qui visent à étouffer les affaires judiciaires en épuisant financièrement et moralement ceux qui les ont révélées.

Madame la ministre, chers collègues, vous l'aurez compris : le groupe UDI, Agir et indépendants votera pour cette proposition de loi dans sa rédaction élaborée par la commission mixte paritaire, qui a le mérite de présenter une solution juste et équilibrée, dans le respect de la liberté d'expression.

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