De deux choses l'une : ou bien tout va pour le mieux dans le meilleur des mondes, auquel cas l'État n'a pas besoin de nous pour engager les négociations, les clauses substantielles et les engagements contractuels des différentes offres ne sont pas remis en cause, et alors l'amendement n'a pas d'objet. Ou bien, comme je l'ai compris, il faut un support juridique aux négociations. Moi, je suis un peu comme saint Thomas : je ne crois que ce que je vois, et j'estime que le rôle de la loi est aussi d'encadrer une négociation. Certes, M. le secrétaire d'État affirme que les engagements industriels seront tenus et j'ai envie de le croire : je le pense honnête. Mais un « tiens » vaut mieux que deux « tu l'auras », et la loi peut nous apporter des garanties à cet égard.
En ce qui concerne notre parc, le prix d'achat de l'électricité produite a été fixé à 240 euros le mégawattheure – je ne sais pas à quel montant nous aboutirons : c'est le secret des affaires et des négociations. Mais, là encore, de deux choses l'une : ou bien les marges de ceux qui jouent au Monopoly avec la politique énergétique de la France sont colossales, et il était temps de s'en rendre compte, surtout si l'on souhaite structurer une filière éolienne « made in France » ; ou bien elles ne sont pas si considérables qu'on le dit, surtout lorsqu'elles s'accompagnent de contreparties substantielles. J'ai du reste fait preuve de sagesse, monsieur le rapporteur : j'aurais pu reprendre, dans mes sous-amendements, l'ensemble des engagements contractuels mentionnés dans le cahier des charges. Or je n'en ai retenu, pour faire simple, que les éléments à mes yeux essentiels : 750 emplois industriels au Havre, une plateforme de maintenance à Dieppe, un centre d'exploitation au Tréport, la formation promise par Estelle Grelier à Fécamp et l'accompagnement de la filière pêche, avec une clé de répartition entre le comité national et le comité régional des pêches afin que les pêcheurs de chez nous bénéficient des accompagnements. Ces engagements font-ils partie des clauses substantielles auxquelles on ne touchera pas ? Si la réponse est oui et si les négociateurs n'y voient pas d'inconvénients, pourquoi ne pas le préciser dans la loi ?
Je ne souhaite l'échec d'aucun projet. J'estime que la parole des pêcheurs n'a pas été entendue – le secrétaire d'État lui-même a indiqué que s'il avait été en fonction plus tôt, il l'aurait davantage prise en compte. Mon rôle est de porter leur parole. Si on relance le projet, on perdra six mois ; tant qu'à faire, autant le déplacer un peu, dans l'intérêt général.
Mes chers collègues, ce ne sont pas des sous-amendements « Dieppe-Le Tréport », car les engagements pris en Vendée et ailleurs sont de même nature. De fait, le niveau d'acceptation des éoliennes est à peu près le même partout : les gens sont toujours pour, à condition qu'elles ne soient pas trop près, qu'elles ne soient pas trop visibles, qu'elles ne bouleversent pas le paysage… Et c'est bien ce qui explique que des contreparties aient partout été accordées pour faciliter l'acceptation des projets. Ces contreparties seront-elles remises en cause dans la négociation ? On m'assure que non. Dans ce cas, j'aimerais savoir comment on passe d'un tarif de 250 euros le mégawattheure à un tarif de 120 euros, voire moins – je ne sais pas jusqu'où on va descendre. Par l'opération du Saint-Esprit ? En renégociant les emprunts ? En optimisant les nouveaux procédés ? À mon avis, le compte n'y est pas ; ou alors l'État était vraiment un bon payeur… Mais je ne crois pas que le gouvernement précédent ait été à ce point irresponsable dans les négociations.
Enfin, j'ajoute que, si on ne règle pas correctement la question de ces six parcs, si les gens ont le sentiment d'avoir été floués, le ministre rencontrera de grosses difficultés lorsqu'il voudra élaborer un plan stratégique de nature à consolider une filière éolienne à la française. Or je suis pour un made in France dans l'éolien et je souhaite qu'on ne dépende pas des autres dans ce domaine. Raison de plus pour tenir les promesses qui ont été faites dans le cadre de ces six parcs. Voilà le sens de mes sous-amendements : si cela ne pose pas de problème, je propose qu'on les vote !