Monsieur le président, madame la secrétaire d'État, monsieur le président de la commission, monsieur le rapporteur, chers collègues, nous examinons aujourd'hui une proposition de loi visant à renforcer le système Bloctel et à systématiser un consentement en opt-in pour le démarchage téléphonique. De quoi s'agit-il ?
Ces vingt dernières années, les technologies numériques et les moyens de communication se sont considérablement développés, permettant un renouvellement des pratiques commerciales et de marketing direct alliant ciblage et communication sur tous les canaux – mail, SMS, téléphone.
S'il est légitime pour les acteurs économiques – entreprises, artisans, commerciaux – de chercher de nouveaux clients afin de faire croître et prospérer leurs entreprises, il faut aussi constater l'agacement et le rejet du consommateur face à ce trop-plein de sollicitations.
C'est bien pour concilier cette dualité et surtout renforcer le droit des consommateurs que la loi du 17 mars 2014, dite loi Hamon, a instauré Bloctel, un dispositif d'opposition au démarchage téléphonique. Mis en place le 1er juin 2016, Bloctel faisait suite au dispositif Pacitel, qui s'était révélé inefficace. Pour mémoire, c'est la directive ePrivacy du 12 juillet 2002 qui impose aux États membres de mettre en place un service gratuit permettant de s'opposer à la prospection téléphonique directe.
Le bilan de ce service public est mitigé à ce jour. En effet, 81 % des consommateurs utilisant Bloctel saluaient le dispositif huit mois après son lancement, et j'en fais partie ! Ce niveau de satisfaction s'est ensuite peu à peu dégradé : 82 % des utilisateurs déclarent maintenant ne pas observer de diminution significative des appels à la suite de leur inscription sur Bloctel. Sur le million de réclamations déposées à ce jour, plus des deux tiers proviennent de fraudes, dont des « ping calls ». En outre, les petites entreprises méconnaissent le dispositif.
Pour corriger cette situation insatisfaisante, ce texte nous propose plusieurs pistes.
La première consiste à améliorer l'information du consommateur sur l'entreprise effectuant la prospection et sur son donneur d'ordre. Cette information renforcée ne peut être que souhaitable. Elle mérite d'être accompagnée d'opérations de communications sur le dispositif Bloctel afin de le faire mieux connaître des entreprises et des consommateurs.
Il nous est ensuite proposé de limiter, voire d'interdire le démarchage dans un cadre contractuel. Non seulement cette disposition est contraire aux pratiques commerciales nécessaires à la vie d'un contrat, mais elle va à l'encontre du RGPD, entré en vigueur le 25 mai dernier, aux termes duquel les traitements de données personnelles sont licites lorsqu'ils sont nécessaires à l'exécution du contrat. De plus, le RGPD introduit, dans ses articles 6, point f) et 21, point 2, ainsi que dans ses considérants 47 et 70, la possibilité d'opt-out pour la prospection commerciale. En effet, il reconnaît à cette activité un « intérêt légitime », n'impliquant pas nécessairement le consentement préalable de l'individu.
Enfin, le niveau des sanctions est augmenté, ce qui peut effectivement décourager les fraudes.
Pour terminer, la directive ePrivacy est en cours de débat à Bruxelles. Les discussions autour de la nouvelle proposition de règlement entendent harmoniser les normes de protection du consommateur en matière de démarchage téléphonique. Un accord doit intervenir dans les prochains mois. Il paraît donc prématuré de légiférer sur quelques points, au risque de devoir réviser le texte adopté et de créer de l'instabilité juridique.
Cette proposition de loi doit donc être corrigée pour mieux répondre à ses objectifs et être compatible avec les autres textes en vigueur. Des amendements en ce sens ont été déposés par notre groupe et par le Gouvernement.