Notre crainte, monsieur Descrozaille, est que l'État joue les Ponce Pilate – pour reprendre l'expression que vous avez employée – non seulement à travers ce qu'a dit le ministre, mais aussi, dans les faits, à travers ce projet de loi. Notre crainte, c'est que dans ce texte, l'État ne prenne pas ses responsabilités et qu'il ne s'interpose pas lorsque cela ne va pas entre Lactalis, Bigard, Leclerc et les agriculteurs.
Voici quelques chiffres qui viendront appuyer ce que je disais sur Lactalis. Le prix en rayon de la brique de lait a augmenté de 30 % en quinze ans. Eh bien, dans le même temps, l'industrie a fait plus 50 %, la distribution plus 100 % et le producteur moins 4 %. Voilà ce qui résulte du régime des accords entre parties ! L'industrie en rafle un peu, la grande distribution beaucoup et le producteur est à la ramasse. Je crains qu'en laissant faire « l'interprofession », c'est-à-dire en laissant les trois parties négocier entre elles, on reproduise les rapports de domination, et que, dans cette négociation tripartite, le paysan soit à nouveau le dominé.