Cet amendement va peut-être en surprendre quelques-uns : il peut paraître en contradiction avec mes positions sur la nécessité de prendre en compte les externalités environnementales. Cependant, alors que j'ai moi-même voté l'alinéa 3 en commission, je pense que c'est une erreur d'avoir introduit cette disposition rédigée de cette façon. Je vais essayer de m'en expliquer.
Cet alinéa dispose que, dans le cadre de la nouvelle obligation qui incombera aux restaurants collectifs gérés par des personnes morales de droit public, pourront être pris en compte les « produits acquis selon des modalités prenant en compte les coûts imputés aux externalités environnementales liées au produit pendant son cycle de vie ». Cela ouvre la porte à tout et n'importe quoi ! Cette disposition risque d'être utilisée, instrumentalisée, notamment par les grandes multinationales de l'agroalimentaire, pour réduire la consommation des produits mentionnés aux alinéas suivants, en particulier les produits sous signe de qualité, issus de l'agriculture locale ou de cycles courts.
Qu'entendons-nous par « externalités environnementales » ? Comment définissons-nous cette notion ?
Actuellement, on peut déterminer le bilan carbone de l'assiette du consommateur. Une agence allemande, ABCD Agency, a récemment publié une étude classant différents pays en fonction du bilan carbone annuel moyen de l'assiette du consommateur. La France arriverait, paraît-il, à la dix-septième place, avec un bilan carbone moyen de 1 347 kilos et 8 grammes par mangeur. Ce type d'approche peut faire sourire ! Mais pour calculer les externalités environnementales, avons-nous aujourd'hui les moyens d'évaluer le bilan carbone des longs transports de marchandises agricoles ? Peut-être, mais je n'en suis pas certain. Sommes-nous en mesure de prendre en compte la longue chaîne du froid nécessaire aux produits carnés et à de nombreux produits laitiers ? Là aussi, il y a des externalités environnementales : disposons-nous des outils pour les apprécier ? En outre, ces externalités environnementales ne peuvent-elles pas avoir des effets extrêmement pervers sur nos élevages locaux ? Allons-nous tenir compte, par exemple, du méthane largué par l'éructation des bovins ? C'est une externalité environnementale !
Ainsi, l'alinéa 3 a été introduit en toute bonne foi, à partir de considérations éthiques. Je fais partie de ceux qui ont voté cette disposition en commission. Mais je crois maintenant que c'est une erreur : je suis persuadé que nous n'avons pas les outils pour la mettre en oeuvre et qu'elle générera des effets pervers, au détriment des produits sous signe de qualité.