La fraude et l'évasion fiscales portent atteinte à notre pacte républicain. L'argent qui s'évade ainsi représente un manque à gagner pour l'État alors même qu'il devrait être utilisé pour rétablir la justice sociale et financer les réformes structurelles dont notre pays a besoin. Lutter contre cette captation frauduleuse de richesses, c'est se donner les moyens de mieux les répartir. C'est agir en faveur de la cohésion sociale.
Je salue au nom du groupe La République en Marche un texte qui a du sens. Je veux insister sur trois points.
D'abord, ce projet de loi s'inscrit parfaitement dans la cohérence d'ensemble de l'action de notre majorité qui vise à libérer l'économie et à instaurer la confiance tout en luttant efficacement contre les abus. Ce texte illustre notre volonté de lever les obstacles qui entravent l'action de nos entreprises et de nos concitoyens.
Mais ce permis de faire ne signifie pas laisser faire. S'il faut faire confiance à ceux qui jouent le jeu de notre pacte républicain, il faut sanctionner ceux qui le trahissent en trichant.
Ensuite, ce texte n'est pas un texte de circonstance. La lutte contre les fraudeurs fiscaux correspond à une vraie volonté politique de la France. Au niveau international, notre pays a joué un rôle moteur dans les négociations de la convention fiscale multilatérale BEPS. En allant plus loin que les autres pays dans la ratification de cette convention, la France incite à l'exemplarité.
Au niveau européen, la France est au coeur des négociations, notamment sur deux dossiers : l'établissement de la liste européenne des paradis fiscaux et la taxation des GAFA. Au niveau national, ce texte exprime une vraie volonté d'accentuer la lutte contre toutes les formes de fraude fiscale, douanière et sociale.
Le Parlement joue un rôle majeur dans ce combat. En un an, notre collègue Bénédicte Peyrol a conduit une mission d'information sur l'optimisation et l'évasion fiscales et notre collègue Émilie Cariou une mission d'information commune sur les procédures de poursuite des infractions fiscales. Le texte que l'on étudie aujourd'hui concrétise certaines de leurs recommandations et il est faux de dire qu'il ne comporte pas de mesures de lutte contre l'évasion fiscale.
Enfin, le présent projet de loi est un bel exemple de la méthode que nous mettons en oeuvre depuis le début de notre mandat : la coconstruction. Outre le travail de la commission des finances et de la commission des lois, je souhaite saluer tout particulièrement le travail effectué par Émilie Cariou, qui était la rapporteure de la la mission d'information commune, présidée par notre collègue Éric Diard, sur le verrou de Bercy, et qui est également la rapporteure du présent projet de loi. Le travail sur ce texte témoigne d'une collaboration de grande qualité entre le Gouvernement et la représentation nationale. Monsieur le ministre, vous avez fait preuve d'une grande confiance dans le travail du Parlement et d'une capacité d'écoute remarquable.
Je veux rappeler ici qu'à l'occasion de l'examen de ce projet de loi en commission des finances en juillet, 200 amendements ont été examinés et 87 adoptés, soit 40 %, qui provenaient de tous les groupes politiques, y compris de La France insoumise. Cette intelligence collective nous a permis d'obtenir l'unanimité moins deux abstentions. Même si nous pouvons nous réjouir de ce travail de coopération pragmatique et efficace, nous ne pourrons être persuadés de l'efficacité du texte qu'après une évaluation ex post de son impact.
Ce projet de loi poursuit un objectif clair : lutter contre les fraudeurs qui contreviennent délibérément aux principes fondamentaux d'égalité devant les charges publiques et de consentement à l'impôt.
Il comporte des avancées majeures dans le domaine de la prévention et de la répression de la fraude. Il améliore la détection de la fraude fiscale, avec la création d'une police fiscale, l'échange de données entre administrations ; la transmission d'informations par les contribuables et par les plateformes d'économie collaborative. Il ne s'agit pas ici de taxer les revenus exceptionnels ou occasionnels mais de détecter les professionnels qui tirent profit de l'utilisation de ces plateformes. Il durcit les sanctions, en instaurant le name and shame, des amendes pénales révisées et une sanction administrative contre les intermédiaires. Il ouvre la faculté au procureur de la République d'engager la procédure dite de plaider-coupable et de conclure une convention judiciaire d'intérêt public. Il intensifie la lutte contre les paradis fiscaux. Il instaure plus de transparence et de collaboration entre l'administration fiscale et la justice là où le verrou de Bercy était l'objet de critiques quant à son opacité depuis sa mise en place en 1920. Je suis heureux que ce soit notre majorité qui ait engagé ce travail.
Ce combat contre les fraudeurs fiscaux se doit de dépasser les clivages politiques. C'est pourquoi j'espère qu'une large majorité se dégagera pour adopter ce texte.