Intervention de Marie-Noëlle Battistel

Séance en hémicycle du mardi 30 octobre 2018 à 21h30
Projet de loi de finances pour 2019 — Conseil et contrôle de l'État

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaMarie-Noëlle Battistel :

Monsieur le président, madame la secrétaire d'État, monsieur le ministre, mesdames et messieurs les rapporteurs, chers collègues, les missions relatives au conseil et au contrôle de l'État, aux pouvoirs publics et à la direction de l'action du Gouvernement recouvrent des sujets importants sur lesquels les citoyens et les élus que nous sommes exercent une vigilance particulière. À l'heure où l'on parle de maîtrise de la dépense publique, de réforme de l'État et d'exemplarité, vous comprendrez que je m'attarde quelques minutes sur ces questions.

Les crédits de la mission « Pouvoirs publics » semblent de prime abord marqués par la stabilité, à l'exception du budget de l'Élysée qui continue d'augmenter comme il le fait depuis le début du quinquennat, passant de 103 millions en 2018 à 106 en 2019. Dans ce domaine, chacun s'accorde à reconnaître que de nombreux progrès avaient été accomplis, notamment grâce au règlement du 29 novembre 2016 reprenant les normes applicables à la gestion budgétaire et comptable publique, qui s'est traduit, comme vous le savez, par une réduction considérable du budget de l'Élysée, passé de 109 millions d'euros en 2012 à l'objectif fixé de 100 millions en 2017.

On constate sur ce point une rupture nette avec les efforts accomplis jusqu'à présent. J'appelle en particulier votre attention sur les dépenses de personnel de la Présidence de la République, qui représentent plus des deux tiers du budget global et qui augmentent de plus de 2,5 millions d'euros. Il aurait peut-être été souhaitable, à la suite des événements que nous avons connus cet été, d'avoir plus de précisions sur le personnel au service de l'Élysée, comme l'a d'ailleurs relevé notre collègue Dalloz.

Le groupe Socialistes et apparentés présentera donc un amendement visant à réduire ce budget afin de financer les missions de la Chaîne parlementaire, dont l'objectif est de rapprocher le Parlement des citoyens.

Le budget dédié aux assemblées parlementaires pose également question. Pour apprécier convenablement la stabilité du budget de l'Assemblée nationale, qui nous est présenté avec une très légère baisse de 0,07 %, il est nécessaire de le mettre en perspective avec les budgets précédents, grevés par les dépenses exceptionnelles – estimées à environ 35 millions d'euros – liées au renouvellement de l'Assemblée, qui avaient, de fait, engendré une augmentation de 13 millions d'euros, soit de 2,5 %, par rapport au PLF 2016, et de près de 26 millions par rapport au budget 2015. On peut donc se demander si le « bleu » budgétaire ne sous-évalue pas les besoins.

En tout cas, il est regrettable de ne pas avoir de précisions quant au coût des missions d'évaluation des politiques publiques, qu'elles soient menées par les commissions permanentes ou par le comité d'évaluation et de contrôle. À cet égard, le budget alloué ce dernier mériterait d'être précisé afin que nous puissions le comparer avec celui d'autres institutions étrangères.

Si le CEC produit déjà des travaux de qualité, sa mission est suffisamment essentielle pour mériter une augmentation sensible des crédits qui lui sont consacrés. Or ce n'est pas le cas : les fonds alloués aux études ne dépassent guère les 100 000 euros. Pour y remédier, le groupe Socialistes et apparentés proposera de prélever sur le budget de l'Élysée les crédits nécessaires pour renforcer les moyens d'évaluation du Parlement, afin que ce dernier puisse effectuer les missions de contrôle que lui confère la Constitution et auxquelles nous sommes très attachés.

J'en viens à la mission « Direction de l'action du Gouvernement ». S'agissant de la coordination du travail gouvernemental, on peut noter deux particularités. La première touche les services de l'information du Gouvernement, dont les crédits ont atteint 19,8 millions d'euros en 2018 avant de redescendre à 13,3 millions dans ce PLF, ce qui pose la question du fléchage des dépenses. La seconde particularité concerne l'augmentation de 40 % du budget des « études et recherches » de France stratégie ; la question se pose du moyen de garantir la neutralité des évaluations menées par cette institution et d'organiser les éventuels appels d'offre.

S'agissant du Défenseur des droits, dont le nombre de saisines a bondi de plus de 17,3 % en l'espace de seulement deux ans, on peut légitimement se demander si les moyens sont à la hauteur des missions qu'il exerce. En effet, la majorité des emplois créés par le PLF 2019 au sein du programme « Protection des droits et libertés » bénéficierait à la CNIL.

La mission « Conseil et contrôle de l'État » nous interpelle également par bien des aspects, mais compte tenu du temps qui m'est imparti, je m'attarderai seulement sur la Cour nationale du droit d'asile. L'augmentation conséquente des affaires traitées par la CNDA nécessite plus que les 122 équivalents temps plein supplémentaires que vous nous proposez. Entre 2010 et 2017, leur nombre a en effet doublé. Par ailleurs, la réforme « Asile et immigration » que vous avez votée cette année impose à la CNDA de diminuer drastiquement les délais de jugement à cinq mois en collégiale et à cinq semaines en juge unique, ce qui nécessite, là aussi, des moyens supplémentaires. Étant donné la gravité de la situation, chers collègues, de simples mots et les quelques moyens supplémentaires envisagés ne suffiront malheureusement pas pour traiter chacun avec dignité.

Vous comprendrez, chers collègues, l'approche de notre groupe sur ces missions importantes. Il ne s'agit pas de dépenser plus, mais de dépenser mieux ; de favoriser l'action du Parlement et de lui permettre d'assurer ses missions de contrôle et d'évaluation indispensables à la démocratie ; de maîtriser les dépenses de l'Élysée, comme chacun s'y était engagé. Il s'agit enfin de nous donner les moyens de répondre à l'objectif de raccourcir les délais d'attente des demandeurs d'asile.

Sans moyens à la mesure de tous ces sujets, nous ne pourrons que constater que la volonté affichée ne suffit pas.

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