La séance est ouverte.
La séance est ouverte à vingt et une heures trente.
Cet après-midi, l'Assemblée a commencé l'examen des crédits relatifs à l'outre-mer (no 1302, annexe 31 ; no 1288, tome XIII ; no 1307, tome VI), s'arrêtant à l'amendement no 495 .
Sur l'amendement no 495 , je rappelle que j'ai été saisi par le groupe La France insoumise d'une demande de scrutin public.
Le scrutin est de nouveau annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
La parole est à M. Jean-Hugues Ratenon, pour soutenir l'amendement.
Monsieur le président, madame la ministre des outre-mer, monsieur le rapporteur spécial de la commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire, mes chers collègues, voici encore un cas particulier en lien avec le problème de la cherté de la vie outre-mer. Je veux parler des difficultés que connaissent les personnes à mobilité réduite ou les handicapés moteurs pour acquérir des véhicules adaptés ou des fauteuils roulants électriques.
Cet amendement est la traduction de deux appels à la solidarité lancés sur les réseaux sociaux par des personnes habitant à Bras-Panon, la petite ville de 12 000 habitants où je réside. Alain souhaite trouver un peu de liberté en s'achetant un véhicule adapté, puisqu'il a le permis de conduire. Quant à la maman d'Anna, elle a lancé il y a une semaine une opération de fabrication et de vente de confiture de papaye pour acheter un fauteuil électrique coûtant 5 000 euros.
Combien de cas encore comme cela ? Au niveau de vie relativement bas qu'on constate dans la population ultramarine en général et chez les personnes handicapées en particulier, il faut ajouter le coût exorbitant des véhicules adaptés et des fauteuils roulants. La question des véhicules adaptés, que nous préférons écologiques, rejoint mon propos de tout à l'heure sur la désorganisation totale de nos transports en commun. Souvent peu nombreux et bondés, ils sont parfois inadaptés à l'accueil de passagers en fauteuil roulant. C'est un vrai problème sur nos territoires. La question des déplacements de courte distance se pose également. Par exemple, les caractéristiques physiques de l'île de La Réunion font que nos villes connaissent de grands dénivelés, qui peuvent constituer un obstacle physique important pour les personnes non dotées d'un fauteuil roulant électrique.
Nous proposons donc la création d'un fonds spécial d'aide à l'acquisition de ce genre de matériel afin que nos sociétés soient plus inclusives.
La parole est à M. Olivier Serva, rapporteur spécial de la commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire, pour donner l'avis de la commission sur cet amendement.
Là encore, monsieur Ratenon, vous évoquez une problématique importante pour nos territoires ultramarins : le manque d'équipements destinés aux personnes à mobilité réduite. Cependant, cette question doit être traitée dans le cadre de deux autres missions : la mission « Solidarité, insertion et égalité des chances » et la mission « Relations avec les collectivités territoriales ». Ce n'est pas à la mission « Outre-mer » de porter les crédits relatifs à cette problématique. La commission des finances n'a pas examiné votre amendement ; à titre personnel, je lui donne un avis défavorable.
La parole est à Mme la ministre des outre-mer, pour donner l'avis du Gouvernement.
Vous avez raison, monsieur Ratenon, nos territoires d'outre-mer souffrent de retards en matière de prise en charge du handicap.
Le Gouvernement a pris un certain nombre d'engagements forts, portés par ma collègue Sophie Cluzel, tous applicables dans les territoires d'outre-mer. Ils permettent de faire un pas énorme dans le soutien aux personnes handicapées. Je vais vous en rappeler quelques-uns : l'amélioration de l'accueil dans les structures collectives, avec un bonus pour le financement des crèches qui accueillent des enfants en situation de handicap ; l'attribution à vie des principaux droits comme l'allocation aux adultes handicapés – AAH – et la carte mobilité inclusion ; le renforcement de l'accès aux soins et aux prestations, avec un meilleur remboursement des prestations liées au handicap par l'assurance maladie ; la facilitation de la mobilité, avec la réduction des frais supportés par les accompagnants dans les transports publics, ce qui répond en partie au problème que vous avez soulevé ; la poursuite de la sensibilisation du public, avec la formation, d'ici à la fin de l'année, des ambassadeurs de l'accessibilité, qui seront des jeunes en service civique. Toutes ces mesures seront effectivement mises en place dans les territoires d'outre-mer. Elles s'ajoutent aux outils dont disposent les collectivités locales.
Laissons à ces mesures le temps d'être appliquées dans nos territoires avant d'envisager des mesures spécifiques aux outre-mer. Avis défavorable.
Madame la ministre, vous avez utilisé en commission une formule très intéressante – je suppose que vous l'avez reprise, car je l'entends depuis très longtemps. Vous nous avez appelé à sortir d'une logique de guichet pour passer à une logique de projets, et votre réponse est extrêmement claire. Mais je pense qu'il y a un problème auquel la République devrait réfléchir, qui concerne le périmètre du ministère des outre-mer, son rôle et sa fonction dans cette perspective.
Comment se placer dans ce cadre de projets sans avoir la main sur ce qui va avec ? Je ne dis pas qu'il faut doter le ministère des outre-mer de toutes les compétences régaliennes. Cependant, comme l'a expliqué M. Ratenon, nous sommes confrontés tant au vieillissement de la population qu'à la multiplication des handicaps, notamment chez les personnes âgées. Madame la ministre, si la décision est prise dans les autres ministères, si vous n'avez pas un pouvoir suffisamment important pour imposer votre projet sur la mobilité des personnes en situation de handicap et en maîtriser la mise en oeuvre, alors vous patinez !
Vous êtes prisonnière d'un carcan : le budget de l'outre-mer s'élève à 24 milliards d'euros, mais vous n'en maîtrisez que 10 %, soit 2 milliards d'euros. Les 22 milliards restants sont éparpillés dans les budgets des autres ministères ; ils ne sont pas sous votre responsabilité. Tout est alors question de négociation : si vous avez du poids politique, vous pouvez vous imposer, mais si vous n'en avez pas, les autres ministres font leurs affaires !
Il y a là une grande incohérence. Je dis cela pour l'avenir, à l'attention de ceux qui veulent changer les choses et passer de la logique de guichet à celle de projets.
Depuis tout à l'heure, je présente un certain nombre d'amendements, mais tant M. le rapporteur, président de la délégation aux outre-mer, que Mme la ministre me répondent à chaque fois : « Vous soulevez un vrai problème mais nous repoussons votre amendement. »
Non, nous apportons des réponses !
C'est extrêmement grave.
Sur cet amendement, madame la ministre, vous dites qu'un certain nombre de solutions existent et que tout va bien. Depuis tout à l'heure, tout va bien dans les outre-mer ! Mais depuis plusieurs jours, une mère de famille a entrepris de fabriquer et de vendre, avec la solidarité de quelques amis, des pots de confiture afin d'essayer de récolter 5 000 euros pour acheter un fauteuil roulant électrique. Vous dites qu'il n'y a pas de problème, mais cette dame a déposé à plusieurs reprises un dossier à la maison départementale des personnes handicapées – MDPH – de La Réunion. Elle a sollicité les collectivités mais n'a pas obtenu de réponse. Depuis qu'elle a commencé sa collecte de fonds, beaucoup d'institutions l'ont contactée mais personne n'a trouvé de solution. Vous dites que tout va bien, mais on refuse à cette dame le financement d'un fauteuil roulant au motif que son enfant de vingt-six ans, qui ne peut pas se servir de ses bras, serait incapable d'utiliser la manette. Or la maman demande un fauteuil roulant avec les commandes derrière, pour être soulagée elle-même. Invariablement, vous dites que tout va bien. Ce n'est pas normal !
Il en est de même pour Alain, le jeune homme qui a lancé une collecte de fonds sur le site Leetchi. com. À l'âge de vingt ans, il s'est retrouvé dans un fauteuil roulant à la suite d'un accident de plongée. Il a alors quitté La Réunion pour venir ici, dans l'hexagone, passer son permis à ses frais – il a d'ailleurs payé beaucoup plus cher que les autres ! De retour à La Réunion, il n'a pas les moyens de s'acheter un véhicule. Or, pour lui, avoir un véhicule pour se déplacer, c'est retrouver un peu de liberté et pouvoir soulager sa famille. Et vous dites à ces personnes que tout va bien et que toutes les mesures sont prises !
Mme Danièle Obono applaudit.
J'aborde ce débat avec beaucoup d'humilité : je veux simplement vous apporter un témoignage. Lors de la discussion du projet de loi de financement de la sécurité sociale et du débat budgétaire, nous avons démontré que le droit commun en matière de prise en charge des personnes en situation de handicap n'était pas à la hauteur des besoins. Nous avons dénoncé cette situation avec force – François Ruffin a évoqué la scolarisation des enfants en situation de handicap – et avons notamment souligné les difficultés sociétales auxquelles nous sommes confrontés, liées au vieillissement des personnes en situation de handicap et à notre incapacité à leur offrir des structures adaptées. Ces personnes vivent plus longtemps qu'avant, ce qui est une bonne chose, et l'insuffisance des moyens qui leur sont consacrés saute aux yeux.
Dans les départements d'outre-mer, la situation est encore plus grave, tant en termes de moyens mis en oeuvre que de cumul des critères d'exclusion et donc d'accès à ces droits fondamentaux. Mes collègues ont raison de poser cette question fondamentale : madame la ministre, dans les discussions que vous avez ou que vous subissez avec vos collègues des autres ministères, comment pouvez-vous obtenir des crédits exorbitants du droit commun, prenant en compte des situations extraordinaires, atypiques en termes de situations sociales et d'inégalités ? En droit français, dans des situations différentes, des traitements différents peuvent être appliqués afin de tendre vers l'égalité. Or le mépris perçu par les outre-mer réside justement dans votre incapacité à prendre en compte, notamment dans le cadre de ce budget, leur situation spécifique et leurs besoins exorbitants du droit commun. C'est particulièrement vrai en matière de handicap. Les témoignages que nous venons d'entendre nous tordent le ventre !
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 73
Nombre de suffrages exprimés 70
Majorité absolue 36
Pour l'adoption 21
Contre 49
L'amendement no 495 n'est pas adopté.
La parole est à M. Jean-Hugues Ratenon, pour soutenir l'amendement no 497 .
Dans cet amendement, monsieur Ratenon, vous proposez de récupérer des crédits pour financer des activités liées à la continuité territoriale.
Outre que 40 millions d'euros sont déjà consacrés chaque année à la continuité territoriale, vous proposez de récupérer des fonds liés à l'accès des petites entreprises au financement, alors que c'est un élément important pour le développement économique des outre-mer. Pour cette raison, même si la commission ne s'est pas prononcée sur cet amendement, j'exprime un avis défavorable.
Un mot sur cet amendement, mais aussi sur tous les autres, dont nous débattons depuis quelques heures, et sur ceux qui sont encore à venir. Le réflexe outre-mer consiste précisément à ce que tous les ministres prennent aujourd'hui en compte les spécificités des territoires d'outre-mer. Il n'y a pas de mépris, et surtout pas de ma part. Je ne supporte pas ce mot ! Ne dites pas qu'il y a du mépris envers les territoires d'outre-mer : ce n'est pas vrai, ni dans ce gouvernement, ni dans la plupart des autres, qui ont soutenu de nombreuses démarches dans ces territoires.
Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM.
Quand on en arrive là dans les débats,...
… c'est lorsqu'on ne parvient pas à porter ensemble des projets. L'important, c'est que le débat nous conduit à dire, comme je l'ai déjà dit, que le Livre bleu est le projet de tous les ministères, le projet de ce gouvernement, et non pas seulement le Livre bleu du ministère des outre-mer : chaque ministère y a inscrit ses engagements pour répondre aux besoins des territoires d'outre-mer, qui sont vraiment pris en compte.
En même temps, il est vrai qu'il existe dans les outre-mer des besoins que le budget 2019 n'épuisera pas, ni même, malheureusement, ceux de 2020 et 2021. J'ai sans doute été la première ici à déclarer que la situation de Mayotte était un échec collectif, et je peux, du reste, le faire pour plusieurs sujets, sur plusieurs territoires d'outre-mer. Il est donc vrai que je ne parviendrai pas répondre, même avec le soutien de tous les autres ministères, aussi vite qu'on le voudrait, et j'en suis la première frustrée. Avançons avec toutes les nouvelles mesures instaurées et regardons comment aller plus vite, tous ensemble. C'est véritablement ce que je souhaite faire avec tout le monde.
Nous abordons là un sujet central et je me permets d'intervenir encore, car c'est, pour moi, fondamental. Madame la ministre, si vous maintenez L'Agence de l'outre-mer pour la mobilité – LADOM – dans un seul sens, vous tuez certains pays d'outre-mer. Je ne vous accuse certes pas de tuer quoi que ce soit, mais vous expurgerez démographiquement ces pays, phénomène qui a commencé avec le BUMIDOM – Bureau pour le développement des migrations dans les départements d'outre-mer – qui, dans les années 1960, a fait venir en métropole des milliers de personnes pour dégonfler démographiquement différents pays considérés comme étant, selon la philosophie de l'époque, en surpopulation. Si vous maintenez LADOM uniquement en direction de Paris depuis Fort-de-France, Pointe-à-Pitre, Cayenne ou Saint-Denis, vous dévitaliserez démographiquement ces pays, car vous aurez installé un réflexe assez mécanique, qui consiste à penser que la seule solution est de quitter le pays – et même pas pour se rendre à proximité, comme, depuis la Martinique, pour aller à Trinidad, au Canada ou au Mexique, mais à Paris.
Qui plus est, malgré les mesures que nous avons fait adopter dans le cadre de la loi de programmation relative à l'égalité réelle outre-mer, il n'existe pas de LADOM retour : les deuxième, troisième et quatrième générations d'Antillais nés ici de père et de mère venus dans les années 1960 pour travailler à La Poste ou dans les hôpitaux ne peuvent pas bénéficier de la dynamique de retour.
En dix ans, la Martinique a perdu 30 000 personnes, soit 3 000 personnes par an : ce sont une fécondité et des cerveaux exportés. Si vous continuez ainsi, vous allez détruire ces pays – en vingt ans, 60 000 personnes quitteront la Martinique. Or, 40 % des gens ont plus de soixante ans, et vous imaginez bien que ce n'est pas à soixante-dix ans qu'on fait des enfants.
Je vous en supplie, mettez en place une dynamique démographique locale qui puisse permettre de relancer la démographie locale. Plus particulièrement, instaurez LADOM retour. Nous avons fait partir ces gens voilà trente ans. Faites-les revenir.
Madame la ministre, vous avez déclaré que Mayotte était un échec collectif. La réalité à Mayotte est très compliquée et il faut garder de l'humilité face à la difficulté de la tâche. En 2011, lorsque Mayotte est devenue officiellement département français, aucune préparation n'avait été faite en vue de cette bascule vers une départementalisation réelle, ou du moins vers cette création de droits. Ce n'est, en réalité, qu'à partir de 2012 que le travail a commencé.
La loi sur l'égalité réelle a permis une accélération du rattrapage en matière de droits, et en particulier de droits sociaux. Cela ne règle pas tout le problème, mais c'est une pierre de l'édifice. On ne peut pas dire que seule la responsabilité est collective ; la construction l'est aussi et chacun apporte sa pierre, dans la mesure des responsabilités qui le lui permettent. C'est un premier point.
Deuxième point, tous les débats évoqués aujourd'hui l'ont, en fait, déjà été dans le cadre de la loi sur l'égalité réelle. Il y a deux sujets : le rattrapage de tous les retards historiques en termes de droits fondamentaux de la République et une nouvelle impulsion provenant des plans de convergence – mais pas des plans de convergence à 23 millions d'euros ! Ces plans doivent prévoir une arrivée d'argent frais qui nous permette de structurer nos territoires et de les propulser dans la nouvelle vision que nous avons de notre ancrage océanique. C'est là toute la question que soulèvent M. Ratenon et d'autres collègues.
On en revient donc à l'idée qu'il faut définir ces plans de convergence et les inscrire dans une coconstruction avec les territoires, comme l'ont voulu les députés et les sénateurs, afin que nous ayons les moyens d'une construction nouvelle et entièrement rénovée de notre propre développement dans nos espaces, qui sont complètement océaniques, et non pas exclusivement tournés vers l'Hexagone.
Deux réponses. Pour ce qui concerne, d'abord, les problèmes démographiques que connaissent la Martinique et d'autres territoires, se pose certes la question de la mobilité, mais aussi – soyons très clairs ! – celle de l'attractivité. Quand je demande à des Martiniquais pourquoi ils ne rentrent pas en Martinique, ils répondent que c'est parce que les territoires ne le leur permettent pas. La question est d'abord celle du développement économique, des emplois, des écoles et de l'attractivité globale du territoire. C'est ce que nous commençons à mettre en place, et que d'autres peut-être imaginaient auparavant, souhaitant y arriver par les contrats de convergence et de transformation que nous allons signer.
Madame la députée, vous connaissiez vos contraintes quand vous avez fait la loi sur l'égalité réelle – nous avons participé au même Gouvernement et je me souviens de certains messages. Le montant prévu pour les contrats de convergence n'est pas de 23 millions d'euros, comme vous l'avez dit, mais de 2,1 milliards d'euros. Si vous citez des chiffres, il faut utiliser les bons : ces 23 millions sont le montant supplémentaire engagé cette année et il me semble que nous sommes au rendez-vous des contraintes budgétaires que rencontre ce gouvernement et que vous avez connues à une autre époque.
Il convient d'être efficace avec chaque euro investi et de faire en sorte que nos jeunes rentrent dans nos territoires d'outre-mer. Je rencontre sur mon territoire le même problème que vous et nous devons travailler tous ensemble sur ces questions.
Quant à la mobilité régionale, c'est la première fois que LADOM intervient en ce sens et qu'il est possible de rester dans son bassin, sans doute pour permettre de revenir plus facilement dans son territoire d'outre-mer. Vous savez très bien que, lorsque les jeunes ont passé une, deux, trois ou quatre années en métropole, ils y ont fait leur vie et que le retour est compliqué – souvent, d'ailleurs, il faut alors deux emplois pour qu'ils puissent revenir. Nous devons travailler sur cette question.
Le rapport d'Olivier Serva sur la fonction publique – tout le monde n'est pas fonctionnaire, mais il y en a – formule diverses propositions visant à permettre aux fonctionnaires de rentrer chez eux ou aux jeunes d'avoir directement accès à la fonction publique par des concours locaux. Certaines de ces propositions seront reprises.
Nous travaillons à l'attractivité des territoires, au développement de l'emploi et au développement économique du territoire, à son rayonnement dans le bassin et à notre capacité à réfléchir autrement qu'en regardant la métropole lorsqu'on se trouve dans un territoire d'outre-mer. Vous avez entièrement raison et je suis persuadée que c'est comme cela que nous gagnerons, petit à petit et tous ensemble.
Pour ce qui est du volet social et des différents accompagnements, je vous prie, là aussi, de ne pas me faire le procès. Vous citez quelques exemples, mais je pourrais en citer d'autres. Je connais bien les difficultés ultramarines et, même si on n'en fait jamais assez pour les gens qui sont en difficulté, les réponses formulées ici, plus globalement, pour l'ensemble de la métropole, sont des pas qui n'avaient jamais été franchis.
L'amendement no 497 n'est pas adopté.
Cet amendement tend à récupérer, sur l'action 09 du programme 123, 15,1 millions d'euros qui servent à appuyer des intérêts bancaires. Cette somme représente la hausse du budget de cette action entre 2007 et 2018.
Nous proposons de répartir cet argent entre trois actions qui ont connu des baisses de budget entre 2007 et 2018 : les actions « Logement », « Collectivités territoriales » et « Sanitaire, sociale, culture, jeunesse et sports ». Cette année, le Gouvernement a beaucoup dit que ces budgets seraient en hausse, ce qui, de notre point de vue et d'après nos calculs, n'est que partiellement vrai, car ces augmentations concédées cette année ne compensent pas les baisses subies l'année dernière. Il manque ainsi 500 000 euros pour le budget de l'action « Sanitaire, sociale, culture, jeunesse et sports » et celui de l'action « Collectivités territoriales » accuse un recul de 39 millions d'euros. Quant à celui de l'action « Logement », il est en baisse de 8,4 millions d'euros.
Cet amendement d'appel vise à mettre à nu une situation et à appeler l'attention sur les faux-semblants d'augmentation du budget, qui ne prennent pas en compte l'inflation ni la démographie des territoires bénéficiaires de ces budgets, et qui équivalent donc à un statu quo, voire à un recul sur certains postes qui nous semblent essentiels.
Madame Obono, vous soulevez des problèmes importants, notamment à propos des aspects sociaux, sportifs et culturels notamment. Cependant, vous proposez de récupérer des millions sur l'appui au financement des entreprises, qui est également un élément très important du développement économique de nos territoires. Même si la commission ne s'est pas prononcée sur cet amendement, j'émets, à titre personnel, un avis défavorable.
Madame la députée, votre amendement supprime des crédits du fonds vert, dont je soulignais tout à l'heure l'utilité. Je m'étonne surtout de la raison que vous invoquez : selon vous, ce ne serait pas du vrai argent et ce ne seraient pas de vrais projets. Or, ce sont, au total, 36 millions d'euros de bonification. L'Agence française de développement – AFD – accorde 325 millions d'euros de prêts et finance ainsi 1,3 milliard d'euros de vrai argent pour de vrais projets, qui sont précisément ceux dont vous considérez qu'ils doivent être financés. Ils le sont donc.
En matière de continuité territoriale, les crédits sont préservés, comme je l'ai déjà dit. Ce sont ainsi plus de 2 millions d'euros supplémentaires qui sont destinés à moderniser LADOM. Le fonds d'échanges à but éducatif, culturel et sportif – FEBECS – est à nouveau doublé : on est bien, là encore, au rendez-vous des besoins. Quant à la ligne budgétaire unique – LBU – , elle ne diminue pas et le produit des cessions des sociétés immobilières d'outre-mer – SIDOM – sera versé, comme je l'ai dit tout à l'heure, en loi de finances rectificatives. Enfin, le Gouvernement vient d'annoncer 17 millions d'euros supplémentaires pour agir dans le domaine de l'accession à la propriété et de l'aide à la rénovation : cet amendement sera, lui aussi, porté. Vous dites, enfin, que l'action « Conduite des politiques publiques » accuse une baisse de 18 % : c'est normal, car il s'agit de la ligne budgétaire qui finançait les assises des outre-mer ; celles-ci étant terminées, nous n'avons pas renouvelé ce budget.
Il faut nous dire des choses vraies pour pouvoir, le cas échéant, mettre en place de nouveaux projets, mais il ne faut pas réduire à néant des efforts engagés depuis de très nombreuses années, notamment pour ce qui concerne le fonds vert, dont nous avons tous besoin.
L'amendement no 401 n'est pas adopté.
La parole est à M. Olivier Serva, rapporteur spécial, pour soutenir l'amendement no 416 .
Madame la ministre, notre majorité a l'occasion de montrer que son coeur est à gauche.
Exclamations sur les bancs des groupes FI et GDR.
Ça va faire plaisir au Président : le coeur à gauche et le portefeuille à droite !
L'article 199 undecies C prévoit une réduction d'impôts dans les départements d'outre-mer et il est ici proposé de mettre fin à la défiscalisation pour passer au crédit d'impôt pour le logement social collectif.
Se pose cependant un problème, dont je sais que vous êtes consciente, madame la ministre : dans les habitations individuelles de logement social, des centaines de familles, notamment en Martinique et en Guadeloupe, sont dans l'attente et dans l'inquiétude. Je vous le confirme – vous pouvez me faire confiance : je les ai rencontrées et je vois encore ces personnes qui se trouvent dans l'indigence la plus extrême et n'ont pas les moyens de rénover leur habitation individuelle sociale.
Nonobstant les problèmes, juridiquement justes, d'abus de droit et de transfert de défiscalisation en crédit d'impôt, notre majorité doit apporter une réponse à ces personnes en difficulté. Tel est l'objet de mon amendement – que je trouve tellement bien que j'émets un avis favorable.
Vous avez raison, monsieur le rapporteur spécial, outre-mer, les besoins en réhabilitation sont énormes. Mais ce n'est pas parce que je vais vous demander de retirer votre amendement que je ne suis pas une femme de gauche.
Je crois qu'en la matière, je n'ai de preuve à fournir à personne dans cet hémicycle.
Dans les territoires d'outre-mer, 13 % des logements sont insalubres. C'est beaucoup trop et, bien sûr, il faut agir. L'année dernière, j'ai soutenu un amendement visant à nous donner une année supplémentaire pour évaluer l'outil que constitue l'article 199 undecies C du code général des impôts. Aujourd'hui, la couleur politique me semble avoir peu à faire dans le constat que ce dispositif est douteux et que les projets concernés peuvent être attaqués juridiquement. Je ne défendrai donc pas cet outil.
En revanche, nous devons en trouver d'autres pour répondre aux problèmes rencontrés. Le rétablissement des aides personnalisées au logement destinées à l'accession – l'APL accession – pendant une année, et le nouveau dispositif que nous construirons en 2019 doivent y contribuer. Je veux que nous puissions travailler ensemble sur cette double réponse qu'il est nécessaire de mettre en place pour les territoires d'outre-mer.
En conséquence, monsieur le rapporteur spécial, je vous demande de retirer votre amendement. Je rappelle que le dispositif que vous défendez concerne huit opérations, toutes mises en oeuvre par le même opérateur ; je ne suis pas sûre que ce soit cela que vous souhaitiez favoriser !
Les arguments de Mme la ministre m'ont convaincu : je retire mon amendement.
Exclamations sur les bancs des groupes FI et LT.
C'est une transplantation cardiaque : il s'arrache le coeur de gauche pour le mettre à droite !
Sourires.
Je signale que la ministre a indiqué qu'avant la fin du mois de décembre, une analyse précise des divers éléments permettrait de construire un outil alternatif en faveur des plus indigents.
Je reprends l'amendement, monsieur le président ! Je souhaite dire que…
Monsieur Letchimy, vous reprenez l'amendement, mais cela ne donne pas lieu à un débat : nous passons directement au vote. Si vous en doutez, demandez à M. David Habib, qui se trouve juste derrière vous et qui a déjà présidé des débats. Je ne peux pas faire autrement à la place qui est la mienne.
L'amendement no 416 n'est pas adopté.
La parole est à M. Olivier Serva, rapporteur spécial, pour soutenir l'amendement no 417 .
Madame la ministre, je sais que la question des délais de paiement des collectivités territoriales en outre-mer constitue un sujet de forte préoccupation pour vous. Cela concerne les commerçants, les artisans, les entreprises du BTP qui servent finalement de banquiers dans un monde où ces derniers n'accordent que difficilement des financements.
L'amendement vise à créer un fonds qui permettrait au moins d'apurer le stock des créances que les entreprises locales détiennent sur les collectivités, car, derrière ces dettes, il y a des enjeux en termes d'emploi, de sécurité juridique et économique. Les entreprises qui ne sont pas payées ont tendance à ne pas payer leurs charges sociales, à ne pas déclarer leurs employés et à ne pas embaucher en bonne et due forme. Avis favorable.
Monsieur le député, je ne vous surprendrai pas en vous disant que nous faisons vraiment le même constat.
Cela dit, la réponse du Gouvernement se fera en deux temps, parce que je ne peux pas aller plus rapidement. Le premier temps, ce sera, en 2019, 10 millions d'euros consacrés à supprimer la garantie demandée aux entreprises qui cèdent leurs créances aux banques publiques d'investissement. Cette mesure permettra de réinjecter 25 millions d'euros de trésorerie dans l'économie réelle.
Vous proposez de mettre en place un mécanisme de responsabilisation des gestionnaires publics qui correspond à un second temps de notre action. Vous comprenez que je ne peux pas prendre ce type de décision seule, en tant que ministre des outre-mer. Il faut mener sur ce sujet un travail complet. Dans le cadre de la conférence nationale des territoires, organisée par le Premier ministre, qui se réunit régulièrement, un groupe spécifique se consacrera à la mise en place d'un dispositif de responsabilisation des collectivités. Nous aurons aussi un débat sur ce sujet à l'occasion du rassemblement des maires à Paris, car nous devons avancer avec les collectivités. Nous effectuerons un travail spécifique similaire lors de la venue des présidents de région. Monsieur le rapporteur spécial et président de la délégation aux outre-mer de l'Assemblée, je vous propose d'être associé à cette démarche.
Aujourd'hui, nous en sommes déjà à une première étape, que je vous ai décrite ; faites-moi confiance, nous irons vers la seconde ! Je vous demande, en conséquence, de retirer votre amendement.
J'ai entendu les explications convaincantes de la ministre, et je retire l'amendement.
Exclamations sur plusieurs bancs des groupes GDR, FI, LR et LT.
L'amendement no 417 n'est pas adopté.
La parole est à M. Jean-Hugues Ratenon, pour soutenir l'amendement no 488 .
L'amendement no 488 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
Monsieur le rapporteur spécial, je suis à gauche, j'y reste, et je considère qu'il est des actions de gauche qu'il faut mener clairement. Lorsque l'on est à gauche, on n'est pas entre les deux. On est clairement à gauche ou clairement à droite.
Exclamations et sourires sur les bancs du groupe LaREM.
C'est une question de philosophie et de fidélité à une vision des choses. Le balancier entre la gauche et la droite, à un moment donné, il s'arrête, qu'on le veuille ou non !
Mêmes mouvements.
Madame la ministre, je veux vraiment vous aider. Je pense sincèrement que les pouvoirs et l'organisation du ministère des outre-mer devraient être reconfigurés au sein du Gouvernement et de la République. Vous menez des politiques segmentées et, que vous le vouliez ou non, les pays d'outre-mer, éloignés qu'ils sont de 8 000, 12 000 ou 24 000 kilomètres, ne constituent pas des territoires qui puissent à la fois bénéficier directement des politiques d'État et mettre en place des politiques tenant compte des différences et des particularités. Il s'agit d'un double enjeu que l'on ne peut pas maîtriser.
Je ne vous demande pas d'être ministre de l'éducation lorsque nous parlons d'éducation, mais une cohérence globale est nécessaire pour accompagner ces pays – et je ne parle pas d'une mise sous tutelle mentale – vers une émancipation économique, sociale et culturelle. Ce qui manque, c'est le socle de la culture et du développement. Sans cela, vous continuerez à panser les bobos et les plaies du passé. Ce qu'il faut, c'est instaurer dans ces pays des mécanismes autonomes de développement économique.
Aujourd'hui, l'un des grands enjeux dans nombre de ces pays est l'illettrisme, qui concerne 50 % de la population à Mayotte et 19,5 % à la Martinique. C'est inacceptable ! Il faut mener une politique globale, qui ne peut être uniquement budgétaire. Je soutiens un amendement d'appel en espérant que vous ne raisonnerez pas dans une logique de guichet, mais dans une logique de projet.
Cher collègue, vous avez raison : à Mayotte, en Martinique et dans les outre-mer, on rencontre bien plus qu'ailleurs de véritables problèmes d'illettrisme. Il s'agit souvent d'un tabou qui constitue un frein à l'emploi.
Cependant, ce que vous proposez va au-delà de la mission « Outre-mer » et concerne également le programme 334 « Livre et industries culturelles » de la mission « Médias, livre et industrie culturelles ».
Je vous signale, même si cela est insuffisant, que l'Agence nationale de lutte contre l'illettrisme a mis en place un plan pluriannuel.
Il commence lentement à produire ses effets. Le service militaire adapté, le SMA, constitue également une véritable réussite pour lutter contre l'illettrisme.
La commission des finances ne s'étant pas prononcée sur l'amendement, c'est à titre personnel que j'émets un avis défavorable.
Monsieur Letchimy, nous avons toujours débattu dans cet hémicycle sur le ministère des outre-mer, qu'il ait été un plein ministère, un secrétariat d'État dépendant du ministère de l'intérieur ou qu'il puisse être, comme certains le verraient bien, placé auprès du Premier ministre. Pour ma part, vous le savez, je reste persuadée qu'à côté du droit commun, il y a tout ce que nous pouvons appeler la « différenciation ». C'est cela que j'ai envie de porter.
Or cela nécessite de pousser beaucoup plus loin, jusqu'à la question, dont nous débattons souvent ensemble, du statut des territoires d'outre-mer, de leur évolution vers plus de liberté et de démocratie économique. Sur l'ensemble des sujets, il s'agit que les territoires prennent encore plus de responsabilités que celles qui sont aujourd'hui les leurs. Seulement, il n'y a pas de demande en la matière !
À part la vôtre, monsieur le député, il n'y a pas de demande. J'ai toujours dit qu'en tant que ministre des outre-mer, il ne m'appartenait pas de porter un tel débat sans que les territoires aient demandé à penser une évolution statutaire ou une relation différente à la France, selon l'espace concerné.
S'agissant du sujet soulevé par votre amendement, je ne rappellerai pas l'ensemble des dispositifs mis en place par le ministère de l'éducation. Afin de disposer d'une analyse plus fine de la situation, j'ai demandé à chaque préfet de travailler avec les recteurs et les directeurs des affaires culturelles de chaque territoire pour désigner un délégué régional illettrisme et livre, lecture. Je souhaite animer cette équipe à partir du ministère des outre-mer pour apporter, avec le ministère de l'éducation, des réponses plus spécifiques aux besoins des outre-mer. Je suis donc défavorable à l'amendement.
Madame la ministre, votre réponse est très intéressante en ce que vous avez répondu très favorablement à une partie de l'amendement que j'ai défendu au nom de Mme Josette Manin. Elle a fait deux propositions, dont l'une concerne la répartition des crédits de la mission, et l'autre vise à la mise en place, pays par pays, d'un délégué régional chargé de la lutte contre l'illettrisme.
Si je comprends bien votre réponse, vous pourriez sous-amender l'amendement afin d'en accepter la seconde partie avec laquelle vous venez d'expliquer que vous êtes d'accord. Je ne voudrais pas que vous puissiez être en désaccord avec vous-même : donnez votre accord immédiatement et sous-amendez !
Sourires.
C'est bien essayé, monsieur Letchimy. Qu'en pensez-vous, madame la ministre ?
Monsieur le député, pour être en accord avec moi-même, je vous demande de retirer l'amendement dont une moitié est déjà satisfaite. Les mesures que j'annonce n'étant pas de nature législative, vous comprendrez que je ne présente pas de sous-amendement. Il reste qu'une partie de ce que vous évoquiez est déjà acquise.
Puisque la parole de la ministre, vaut un engagement écrit, comme tout ce qui se dit ici, je prends acte de sa décision de mettre en place des délégués, territoire par territoire. Je retire l'amendement.
L'amendement no 522 est retiré.
Vous voyez que cela peut arriver, même à gauche !
La parole est à Mme Danièle Obono, pour soutenir l'amendement no 399 .
Cet amendement d'appel insiste sur la nécessité d'un plan global pour les outre-mer afin de garantir le droit inconditionnel des populations à disposer d'un d'accès à l'eau.
Le droit d'accéder à l'eau potable est un droit reconnu dans de nombreux pays et par des organisations internationales dont la France est membre. Une résolution de l'Assemblée générale de l'ONU a, en particulier, reconnu, en 2010, « l'importance que revêt l'accès équitable à une eau potable salubre et propre et à des services d'assainissement, qui fait partie intégrante de la réalisation de tous les droits de l'homme ». L'accès à l'eau potable est ainsi un « droit fondamental, essentiel au plein exercice du droit à la vie et de tous les droits de l'Homme ». Ce droit à valeur constitutionnelle, qui a été reconnu de plusieurs façons en droit interne, n'est pourtant pas appliqué sur l'ensemble de nos territoires, et, en la matière, la situation des outre-mer reste particulièrement préoccupante.
Premièrement, on note un manque important d'informations sur la collecte, l'assainissement et la distribution de l'eau : les informations sont parcellaires ou inexistantes du fait d'un manque visible de coordination et de communication entre les territoires concernés.
Deuxièmement, lorsque les informations existent, elles révèlent de très fortes disparités avec la situation dans l'Hexagone. Ainsi, alors que le prix moyen du mètre cube d'eau était en 2013 de 2,03 euros au niveau national, il varie de 2,22 euros à Saint-Pierre-et-Miquelon à 5,28 euros en Martinique. Au regard du taux de pauvreté plus élevé en outre-mer, le poids sur le budget des ménages des dépenses liées à l'eau courante est clairement disproportionné et inégalitaire – 0,8 % dans l'hexagone contre 1,65 % pour la Martinique par exemple.
Mais pour qu'elle arrive jusqu'aux ménages, encore faut-il pouvoir acheminer cette eau. Et, là encore, l'écart est flagrant : alors que le rendement des réseaux est de 79,9 % en France hexagonale, il est seulement de 53 % en outre-mer. De plus, une partie très importante de la population n'a tout simplement pas accès à l'eau. Ainsi, à Mayotte et en Guyane, on estime que près de 20 % de la population ne dispose pas d'eau potable à proximité du domicile.
Par ailleurs, il est à noter que la qualité même de l'eau est très loin de celle de l'eau distribuée sur le territoire hexagonal : à La Réunion, 52 % des habitants sont alimentés par des réseaux dont la sécurité sanitaire est insuffisante, et des parasites seraient présents dans l'eau pour 5 % des abonnés.
Cet amendement vise donc à prélever un euro sur l'action 04 « Financement de l'économie » du programme « Emploi outre-mer », pour abonder un nouveau programme dénommé« Plan global pour le droit d'accès à l'eau des outre-mer ».
Madame Obono, je partage tout à fait votre analyse. Vous avez raison, l'accès à l'eau est un droit constitutionnel et fondamental. Et dans les outre-mer, je pense à Mayotte mais aussi à mon territoire, la Guadeloupe, c'est une vraie difficulté. Nous avons mis en place en Guadeloupe, avec les collectivités territoriales et un peu l'État, un plan pour arrêter les tours d'eau d'ici à 2022. Cela dit, nous avons dorénavant un fonds exceptionnel d'investissement dont une partie conséquente sera forcément consacrée à l'accès à l'eau dans ces territoires reculés. Notons aussi la fréquente faillite de la sphère communale ou intercommunale en ce domaine.
Je retiens que l'enjeu que vous mettez en avant reste entier et, comme je comprends la démarche symbolique d'un euro, j'émets un avis de sagesse.
Madame la députée, le plan que vous sollicitez existe déjà sous la dénomination d'Eau DOM. Ce plan a été lancé en juin 2016 et se décline au travers de contrats de progrès. Il s'agit, en effet, de permettre aux collectivités de répondre aux besoins considérables en matière d'investissement. Reconnaissons, toutefois, et M. le rapporteur spécial l'a dit, que les causes de cette situation sont connues et que cette compétence ne relève pas de l'État, même si celui-ci doit être aux côtés des collectivités en la matière.
Sur la période 2019-2022, près de 80 millions d'euros sont prévus au titre de l'Agence française pour la biodiversité, et le triplement des crédits en provenance du Fonds européen d'intégration, dits « crédits FEI », permettra également d'apporter une partie de la réponse, de même que l'augmentation des moyens dédiés aux contrats de convergence. En outre, la reconduction du fonds vert permettra aussi des financements pour les projets en matière d'eau et d'assainissement, car il s'agit bien d'une adaptation.
Madame la députée, vous le voyez, ce n'est pas un euro que prévoit le Gouvernement pour résoudre cette problématique, mais bien des millions, mis à la disposition des collectivités pour répondre aux énormes besoins des territoires d'outre-mer. Chacun a ses responsabilités et, en la matière, les fuites d'eau ne sont pas qu'aux robinets… Avis défavorable.
L'amendement no 399 n'est pas adopté.
La commission ne s'est pas prononcée, mais j'émets un avis défavorable à titre personnel.
L'amendement no 486 , repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.
Il s'agit, là encore, d'un amendement d'appel à un euro symbolique. Notre groupe veut que soient enfin garantis la construction et l'entretien d'infrastructures sanitaires à la hauteur des besoins des populations.
Cet amendement est la traduction de sollicitations de citoyens et de citoyennes. Il s'appuie notamment sur le rapport de la Cour des comptes de 2014 consacré à la santé en outre-mer, dans lequel celle-ci indiquait que « malgré leurs spécificités géographiques, humaines et organisationnelles, les départements et collectivités d'outre-mer ont en commun d'être confrontés à des problématiques sanitaires d'une nature et d'une ampleur souvent particulières ». Il nous a été ainsi signalé, par divers acteurs du secteur, le manque de moyens des hôpitaux publics, notamment en Martinique, illustré par la fermeture du service d'hématologie du CHU de l'île, et à La Réunion, où l'hôpital de Saint-Pierre a connu une grève très importante du personnel, tandis que les difficultés sont manifestes pour les dialysés à l'établissement de l'AURAR – Association pour l'utilisation du rein artificiel à La Réunion. Rappelons aussi le manque de moyens immobiliers et humains du centre hospitalier de Mayotte et, bien évidemment, le manque de moyens pour lutter au mieux contre l'empoisonnement au chlordécone en Guadeloupe, sujet sur lequel j'ai déjà, comme d'autres collègues, interpellé le Gouvernement.
Cet amendement propose donc de prélever un euro sur l'action 04 « Financement de l'économie » du programme « Emploi outre-mer », pour abonder un nouveau programme : « Fonds d'urgence d'investissement dans les infrastructures sanitaires ».
Sur les crédits de la mission « Outre-mer », je suis saisi par le groupe La France insoumise et par le groupe de la Gauche démocrate et républicaine d'une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
Quel est l'avis de la commission sur l'amendement no 503 ?
Madame Obono, comme pour l'eau, vous avez tout à fait raison, les problématiques de santé, d'accès aux soins et de risques de perte de chance dans nos territoires ultramarins sont réelles. Je suis bien placé pour le savoir : nous avons en Guadeloupe le seul hôpital de France qui ait brûlé. Je suis sensible à votre argumentation, en particulier sur le chlordécone, cette molécule terrible au sujet de laquelle toutes les responsabilités doivent être reconnues.
Malgré tout, il y a des efforts évidents dans les territoires, y compris en Guadeloupe où un nouveau CHU sera construit pour 580 millions d'euros. Il est vrai qu'il s'agit de réduire le chemin qui reste à parcourir. La commission ne s'est pas prononcée sur votre amendement, mais j'émets à titre personnel un avis défavorable.
Oui, l'État est conscient des difficultés que connaissent les territoires ultramarins en matière de santé, notamment en ce qui concerne les CHU, que ce soit en Martinique, en Guadeloupe, en Guyane, à Mayotte ou à La réunion. Sur la période 2017-2018, 1 milliard d'euros a été consacré à répondre à ces problèmes dans les territoires d'outre-mer.
Au-delà de ce montant, le Gouvernement a été au rendez-vous lors de l'incendie qu'a évoqué le rapporteur spécial. Je rappelle aussi la décision, antérieure à mon arrivée au ministère, de prise en charge à 100 % par l'État de la construction d'un nouvel hôpital en Guadeloupe. Il faut également noter l'intervention en Martinique à travers le fonds de roulement pour l'hôpital, mais aussi pour la rénovation de bâtiments, ainsi que la mise sous tutelle, en quelque sorte, pendant quelques mois, le temps qu'une équipe ad hoc pense une nouvelle politique pour l'établissement – la question se posera d'ailleurs avec les élus de Guyane dans quelques jours.
Je souligne que la ministre de la santé a mis en place un groupe de travail pour mieux prendre en compte les difficultés des territoires d'outre-mer. Elle s'est rendue dans la plupart d'entre eux, et continuera à les visiter régulièrement.
Je conclurai en notant qu'à Mayotte, plus de 200 000 euros ont été débloqués en urgence pour répondre aux différents besoins. Avis défavorable.
Les débats sont fort intéressants, balayant les différents problèmes sociaux et économiques que soulève cet amendement sur l'eau défendu par notre collègue. Toutefois, nous, députés socialistes, avons ouvert la discussion sur cette mission en regrettant de ne pas avoir pu disposer bien en amont du DPT, le document de politique transversale, qui n'a été mis en consultation qu'à l'ouverture de la discussion.
Madame la ministre, vous nous avez renvoyés, à juste titre, à l'ensemble des ministères qui devaient, dans un « réflexe outre-mer », se mobiliser sur tous les thèmes que nous avons abordés et abonder les budgets pour nous soutenir, tant en matière de santé qu'en matière de transports, etc. Or, en feuilletant le DPT, nous constatons aux pages 393 et suivantes qu'il y a une baisse des crédits de l'État, tous domaines confondus : moins 500 millions pour La Réunion, moins 240 millions pour la Guadeloupe, moins 210 millions pour la Martinique, moins 18 millions pour la Guyane.
Je n'ai pas le chiffre pour Mayotte, mais le constat est là. À titre d'exemple, alors que je viens d'évoquer le réflexe outre-mer, qu'il y a énormément de problèmes et que nous sommes tous mobilisés comme le Gouvernement, nous constatons le recul sur ces lignes budgétaires.
M. Jean-Hugues Ratenon applaudit.
Je suis profondément déçu de découvrir à l'instant ces chiffres, et je rejoins Ericka Bareigts quand elle dénonce le fait que nous n'ayons pas eu le DPT plus tôt – j'ai sacrifié mon dessert pour pouvoir l'analyser très rapidement ! Je me suis rendu compte que la dotation pour la Guyane était en diminution de 18 millions d'euros, comme la collègue vient de le dire.
Je ne vais pas faire le florilège de tout ce que j'y ai constaté, mais j'ai noté que des programmes ont subi une véritable saignée : le programme 138 « Emploi outre-mer » baisse de 79 %, le programme 112 « Impulsion et coordination de la politique d'aménagement du territoire » de 61 % sur trois ans, le programme « Administration pénitentiaire » de 35 % sur trois ans également, les crédits alloués à la culture baissent de 39 % en un an.
Madame la ministre, vous disiez tout à l'heure qu'il faut utiliser les bons chiffres : hélas ! nous nous rendons compte qu'au moment où je vous parle, nous ne savons pas lesquels sont réellement les bons. Si l'on veut vraiment travailler à l'amélioration de l'attractivité du territoire, il y a des lignes de force sur lesquelles on ne peut être fébriles. Or quand je vois les diminutions drastiques opérées sur certains programmes tels que l'emploi outre-mer, je me dis qu'on a tout fait sauf ce qu'il aurait fallu pour permettre à nos territoires de progresser. Je regrette fondamentalement que les choses se passent ainsi au cours d'un débat qui en réalité n'en est pas un.
Rappel au règlement
Au titre de l'article 58, alinéa 1, monsieur le président. J'ai fait, cet après-midi, au nom de mon groupe, un rappel au règlement pour regretter de ne pas disposer du document de politique transversale censé permettre aux députés d'avoir un consentement éclairé au moment de voter la mission. Le président de l'Assemblée m'a dit que j'étais hors sujet et que je ne devrais pas m'inquiéter. Or on découvre à présent, en examinant ce fameux document, un enfumage d'un milliard. C'est-à-dire qu'il y a un milliard d'impasses sur le budget des outre-mer !
Entre le moment où l'on a examiné les crédits de la mission « Outre-mer » et celui où l'on a eu accès au document de politique transversale, un milliard s'est évaporé dans la nature. Si ce n'est pas de l'enfumage du Parlement et si cela ne mérite pas un éclairage précis des parlementaires que nous sommes, je ne sais pas ce que c'est. Tout à l'heure, la ministre a refusé d'entendre parler de mépris, mais il y a bien apparemment mépris eu égard à la manière dont nous sommes informés de l'affectation concrète des crédits.
Mission « Outre-mer » (état B)
L'amendement no 503 n'est pas adopté.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 108
Nombre de suffrages exprimés 103
Majorité absolue 52
Pour l'adoption 75
Contre 28
Les crédits de la mission « Outre-mer » sont adoptés.
Il concerne les effets négatifs de l'extraction illégale d'or en Guyane sur l'environnement et la société.
Du point de vue de l'environnement, c'est l'utilisation du mercure, utilisé pour séparer l'or du minerai, qui pose problème. L'organisation non gouvernementale WWF estime ainsi que 1,3 kilogramme de mercure est utilisé pour extraire un kilogramme d'or. Son usage est interdit depuis 2006, mais les personnes pratiquant l'orpaillage clandestin l'utilisent encore massivement. Toujours selon WWF, 157 000 hectares de forêt ont été détruits du fait de cette pratique, et 72 % de cette dégradation est apparue depuis 2008.
C'est également un désastre social, qui voit les plus pauvres habitants du Suriname ou du Brésil s'opposer aux précaires de Guyane pour extraire un or allant surtout enrichir les plus puissants du monde entier.
Si des réponses institutionnelles ont été apportées, elles ne constituent pas des réponses satisfaisantes, face à l'ampleur du phénomène et des dégâts écologiques et humains causés par l'orpaillage clandestin.
Cet amendement vise à ce que soit dressé un bilan des politiques de lutte contre l'orpaillage clandestin dans le cadre d'un rapport que le Gouvernement remettrait au Parlement, portant sur le coût pour les finances publiques, ainsi que les conséquences sociales, économiques, environnementales et budgétaires de la lutte contre l'orpaillage clandestin en Guyane, et des moyens supplémentaires nécessaires à mobiliser.
Nous avons, suite au débat en commission, retravaillé cet amendement, afin de prendre en compte les discussions ainsi que les remarques du rapporteur. Nous espérons donc qu'ainsi retravaillé, il sera adopté.
Chère collègue Obono, effectivement, la lutte contre l'orpaillage illégal constitue une vraie problématique guyanaise. D'ores et déjà, un certain nombre de moyens, issus notamment de l'armée, ont été mis à disposition de l'opération Harpie visant à lutter contre ce phénomène. Plus de 800 sites ont été détruits entre 2016 et 2017, mais il est vrai qu'il s'agit d'un travail titanesque qui doit être régulièrement remis sur le métier.
L'une des clés de la lutte contre l'orpaillage clandestin est la coopération transfrontalière. Vous avez raison, chère collègue, il faut être extrêmement vigilant sur ce point. S'il me semble que nous partageons le constat, qui est bien connu, je ne crois pas qu'un rapport supplémentaire puisse nous éclairer davantage sur la situation.
C'est ainsi que la commission a émis, concernant cet amendement, un avis défavorable.
Collègues, je me sens véritablement en colère, mais je vais essayer de contenir ma colère. Je ne vois pas ce qu'il peut en coûter au Gouvernement de donner un avis favorable à une telle proposition, qui ne mange pas de pain. En tout cas, un tel rapport coûterait moins cher que les opérations Harpie que l'on ne cesse de déployer, depuis des années et même des décennies, dans la forêt guyanaise, sachant pertinemment qu'elles sont totalement inefficientes. Pour un site détruit, trois se montent dans les vingt-quatre heures qui suivent !
Nous avons déjà relevé que les 200 manifestants à Notre-Dame-des-Landes ont été évacués par 2 500 gendarmes, alors même qu'ils ne demandaient rien d'autre que de vivre dans un espace de paix, et qu'en Guyane, a contrario, entre 8 000 et 10 000 orpailleurs illégaux ont été identifiés, et qui, eux, sont en train de creuser le territoire et de piller les ressources nationales. À ceux-là, c'est une opération Harpie, avec environ 250 à 300 gendarmes et 300 militaires, que l'on envoie. Or, collègues, cela fait des lustres que l'on sait pertinemment cette guerre que nous conduisons contre ces orpailleurs illégaux n'en est pas une, et à la date d'aujourd'hui, strictement rien n'a changé.
Des tonnes et des tonnes d'or sont extraites du sol guyanais, du mercure est déversé, polluant nos eaux et empoisonnant les populations au méthylmercure, une substance qui induit des comportements suicidaires. Ce qui se passe là-bas est un scandale ! Collègues, il faut que vous compreniez que cette situation ne peut plus durer.
Nous avons connu le scandale des essais nucléaires dans le Pacifique, puis celui du chlordécone en Martinique et en Guadeloupe, et aujourd'hui, nous sommes incapables de mettre un terme au déversement de mercure par des orpailleurs clandestins. Au contraire, même, le Gouvernement va certainement donner prochainement un avis favorable à la compagnie minière Montagne d'Or qui, en plus du mercure, va déverser du cyanure sur un territoire classé parmi les trois territoires au monde les mieux alimentés en eau douce disponible par habitant !
Je crois véritablement qu'il faut arrêter de jeter l'argent des contribuables par la fenêtre, parce que c'est exactement ce que nous faisons avec ces opérations Harpie. Donnons-nous les moyens, comme nos collègues l'ont suggéré, de mettre à plat ce problème afin que la représentation nationale ait la capacité de tirer les conclusions qui s'imposent et d'apporter les vraies réponses que la Guyane, comme le monde entier, attendent.
La Guyane, joyau au sein du bassin amazonien, est aujourd'hui menacée par la nouvelle théorie de protection de l'environnement de son voisin brésilien, se résumant à mettre des bulldozers partout dans la forêt amazonienne. Chers collègues, il faut que nous nous donnions les moyens de protéger ce joyau national. Je demande donc que nous prenions nos responsabilités en votant en faveur de cet amendement proposé par nos collègues du groupe La France insoumise.
Applaudissements sur les bancs des groupes FI et GDR.
Je réagis au refus de cet amendement, qui est incompréhensible.
Autant les précédents amendements étaient, comme nous l'avons clairement annoncé, des amendements d'appel qui avaient vocation à mettre l'accent sur des problématiques budgétaires que nous pensions devoir être débattues, ou au moins entendues, à l'Assemblée nationale, autant il nous semblait, madame la ministre, monsieur le rapporteur, qu'il y avait, s'agissant de celui-ci, un accord. C'est, en tout cas, ainsi que nous l'avions entendu, au moment de sa discussion en commission. C'est d'ailleurs pour cette raison que nous l'avons retravaillé afin d'intégrer les demandes formulées notamment par M. le rapporteur.
Ce refus de rapport est donc, compte tenu de la situation que nous connaissons, incompréhensible. Vous avez parlé des opérations militaires Harpie, mais tout le monde sait et dit qu'elles sont aujourd'hui insuffisantes. Sur le terrain, le constat des personnels du parc amazonien de Guyane est clair : ils passent aujourd'hui un temps fou à essayer d'intervenir, en lien avec les militaires, mais c'est un échec total.
Or cette situation a des conséquences, non seulement sur la nature, sur les personnes, mais également sur les communautés qui vivent en Amazonie et dont les vies sont complètement déstructurées. Les empoisonnements décrits par notre collègue sont une réalité. Or, monsieur le rapporteur, vous nous parlez des prochaines coopérations que nous mettrons en place avec un Brésil désormais dirigé par un anti-écologiste convaincu, …
… pour qui la seule politique de préservation de l'environnement consistera à détruire encore plus cette forêt.
Si le Parti des travailleurs n'avait pas tapé dans la caisse, les choses se seraient peut-être passées différemment. Corrompus !
Je trouve problématique et grave que la seule réponse qui soit apportée à notre demande de rapport dressant un état des lieux afin de répondre aux interrogations des populations et de se donner les moyens véritables de répondre à un problème dont la gravité va s'accentuer dans les prochaines années et avoir des répercussions écologiques pas simplement pour la Guyane, mais pour toute la région, soit un avis défavorable qui n'est absolument pas argumenté. C'est particulièrement lamentable.
Il me semble l'on peut s'exprimer, y compris sur des sujets aussi délicats que celui-ci, sans s'énerver.
J'ai refusé ce rapport pour une raison simple : l'opération Harpie 2, qui s'est appuyée sur de nouveaux moyens, a démarré en 2017 et a déjà obtenu des résultats.
Madame la députée, avant ma nomination au Gouvernement, je siégeais dans cette assemblée depuis 2007. Je sais donc très bien ce que nous avons fait et ce que l'ensemble des parlementaires de la Guyane a fait sur ce sujet. Je sais également ce que les gouvernements qui se sont succédé ont pu faire. Harpie 2 constitue une nouvelle réponse ; Harpie 2 ça marche.
Madame la députée, vous n'êtes pas sur le territoire pour le voir.
Le 11 septembre dernier, dans le cadre de Harpie 2, une énorme opération a été lancée, qui a marché.
La lutte contre l'orpaillage passe également par l'organisation de cette filière. Avec Nicolas Hulot, nous avons demandé un rapport sur l'ensemble de cette filière. Nous l'attendons dans les mois qui viennent. Si j'ai dit cette année non au rapport, c'est tout simplement…
La continuité de l'État, comme celle du Gouvernement, existe !
J'ai dit non au rapport cette année parce qu'il ne m'est pas possible de vous fournir aujourd'hui les résultats détaillés de l'opération Harpie 2. Prenons rendez-vous l'année prochaine : je serai à vos côtés.
L'amendement no 504 n'est pas adopté.
Sur l'amendement no 403 , je suis saisi par le groupe de la Gauche démocrate et républicaine d'une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
La parole est à Mme Danièle Obono, pour soutenir cet amendement, qui fait l'objet de deux sous-amendements.
Il s'agit de demander un rapport qui nous permettrait de disposer d'éléments clairs permettant de distinguer, d'une part, ce qui peut relever, pour certaines entreprises ou catégories d'entreprises, d'un effet d'aubaine par rapport aux aides économiques versées au titre de la mission « Outre-Mer » et, d'autre part, ce qui peut relever d'un réel soutien à l'autonomie des collectivités d'outre-mer et d'une incitation financière à l'emploi.
Compte tenu de la situation actuelle, du plaidoyer de Mme la ministre en faveur de l'attractivité économique, du retard pris et des problématiques liées, sur ces territoires, aux effets d'aubaine de nature économique, il nous semble qu'un rapport sur la question ne serait pas superflu, si l'on veut véritablement se donner les moyens d'un développement économique endogène en lien avec la transition écologique.
Je réponds, madame la ministre, à votre précédente intervention. Je ne suis pas élue de la Guyane, mais je m'y suis rendue. J'ai été très heureuse d'y rencontrer des citoyens et des professionnels comme les membres du Centre national de préservation de la forêt amazonienne. Je suis aussi élue de la République et il me semble qu'il est de ma responsabilité de défendre l'intérêt de nos concitoyens et de nos concitoyennes de Guyane, parce qu'il y va de notre intérêt commun.
Si nous faisons ces demandes de rapports, c'est parce que nous pensons qu'il serait utile de se pencher plus précisément sur des problèmes qui ne sont toujours pas réglés. Or le retard pris s'agissant des outre-mer est, comme cela a été dit, endémique et systématique. Madame la ministre, vous avez peut-être siégé sur les bancs de cette assemblée pendant dix, vingt ou trente ans, mais cela fait dix, vingt ou trente ans que ces problèmes sont dénoncés et qu'aucune solution ne leur est apportée. C'est pour cette raison que nous insistons sur ce rapport, comme nous avons insisté sur le précédent. Je ne crois pas que ce soit être à la hauteur des attentes et des exigences tout à fait légitimes de nos concitoyens et de nos concitoyennes que de les rejeter d'un revers de main.
Chère collègue Danièle Obono, vous abordez avec ce rapport une problématique tout à fait pertinente puisqu'une réforme des aides d'exonérations sociales importante est en cours. Votre demande est donc tout à fait justifiée.
Cependant, je préférerais que nous puissions repousser un peu la date de sa remise, précisément parce que nous sommes en pleine refonte des exonérations sociales. Vous souhaitez que le rapport soit remis dans un délai de trois mois à compter de la promulgation de la présente ; je propose un sous-amendement indiquant que le rapport soit remis avant le 31 décembre 2020.
Sourires.
Cela nous laissera le temps nécessaire au recul et à une analyse tout à fait pertinente des mesures relatives à l'emploi, aux entreprises et à la création d'entreprise.
Le second sous-amendement propose d'exclure du rapport les dispositifs d'appui au financement bancaire, qui sont spécifiques.
Sous réserve de l'adoption de ces deux sous-amendements, je suis favorable à l'amendement no 403 .
Dans le cadre d'échanges sur le bilan avec les entreprises, celles-ci nous ont conseillé, à partir du moment où les nouveaux dispositifs étaient mis en place au 1er janvier 2019, de retenir un délai correspondant à deux cycles, précisément celui que proposent les sous-amendements du rapporteur. Par conséquent, sous réserve de l'adoption de ces deux sous-amendements, j'émets un avis favorable à l'amendement no 403 .
Permettez-moi, monsieur le président, de revenir brièvement sur la question du document de politique transversale, dont on a beaucoup parlé.
D'abord, je voudrais signaler qu'il n'y a pas que le document relatif aux outre-mer qui a été publié avec retard. Ensuite, si quelques orateurs ont énervé l'ensemble de l'hémicycle en faisant des déclarations que je juge, pour certaines, exagérées, je confirme que le milliard d'euros dont il est question correspond bien au périmètre des exonérations de charges. Disons les choses clairement : c'est la même chose que pour le CICE, dont vous n'avez jamais vu apparaître le montant dans le document de politique transversale.
Prenons donc un peu de temps. Si vous voulez, dans les jours qui viennent, faire le point sur ce document et discuter d'éventuelles mesures que vous y auriez repérées, je suis à votre disposition.
Nous n'avons eu le document qu'en séance, madame la ministre : ce n'est tout de même pas normal !
Vous avez raison de dire que c'est trop tard, monsieur Jumel. Je le reconnais sans discuter.
Toutefois, je le répète, il n'y a pas que pour les outre-mer que le document de politique transversale est publié avec retard.
Il reste que vous avez raison de dire que cela fait particulièrement problème, puisque le document est paru alors que nous avions déjà commencé le débat. Du coup, tout le monde s'est précipité pour le consulter et certains se sont énervés. Je préférerais que nous prenions un peu de temps pour en discuter avec ceux qui le souhaiteraient, de manière que nous puissions apporter une réponse si le montant de 1 milliard ne correspondait pas aux exonérations de charges. Néanmoins, l'analyse que j'en fais, en accord avec les membres de mon cabinet et avec les services du ministère, c'est que cette somme correspond exactement au montant des exonérations.
Madame la ministre, nous ne demandons qu'à comprendre, vous le savez, mais cela fait tout de même 1 milliard à retrancher des 18 milliards d'euros.
Non ! C'est juste qu'ils ne sont pas répartis !
Vous les répartirez comme vous le voudrez, peu importe : cela fait 1 milliard en moins, et non en plus. Entre moins et plus, il y a une différence !
Il s'agit d'une somme qui est tout de même très importante. Je comprends donc les interventions de Jean-Philippe Nilor et d'Ericka Bareigts. Dès le départ, on vous a dit que le budget des outre-mer n'augmentait pas, mais qu'il était stable. D'ailleurs, je vous félicite d'avoir tenu le coup et de ne pas avoir laissé sabrer votre budget. Le budget n'est pas en diminution, mais ce que vous présentez comme une augmentation de 470 millions d'euros correspond en réalité à ce que vous avez reporté ou recyclé. C'est votre choix ; ce n'aurait pas été le mien.
De surcroît, nous ne prenons connaissance du document de politique transversale qu'en cours de séance. Vous dites que ce n'est pas spécifique aux outre-mer, mais c'est grave ! La majorité devrait comprendre qu'aujourd'hui, nous avons voté en aveugle.
Mais non ! Vous aviez des éléments du budget.
Si, c'est un vote à l'aveuglette, car si nous avions disposé de chiffres précis, nous aurions pu noter qu'il y avait 1 milliard d'euros en moins.
Je vous demande donc de vérifier ce point. Vous me connaissez, je n'ai pas envie d'en faire toute une histoire, mais comment rendrons-nous compte de cela aux populations ? Qu'allons-nous leur dire ? Que vous avez gagné la bataille et que vous avez réussi à maintenir le budget des outre-mer ? Non, car cela n'est vrai que pour le périmètre du ministère de la rue Oudinot, et non pour la totalité des crédits en faveur des outre-mer, qui, eux, diminuent de 1 milliard. Nous avons donc été amputés de 1 milliard d'euros.
Madame la ministre, vous dites qu'il n'y a pas que pour les outre-mer que le document de politique transversale n'a pas été remis aux élus ; c'est vrai, mais la différence, c'est que la mission « Outre-mer » est la première à être étudiée. Pour les autres missions, nos collègues disposeront d'un peu de temps pour se déterminer en connaissance de cause, tandis que nous, comme nous sommes les pionniers, nous sommes la seule mission pour laquelle l'examen aura commencé sans que nous disposions d'aucun document. Cela, il faut avoir l'honnêteté de le reconnaître. Voilà encore un régime d'exception pour les outre-mer – mais, comme je le signalais, les régimes d'exception ne sont pas toujours favorables ; bien au contraire, quand il s'agit de nous, ils sont souvent défavorables.
La parole est à M. Philippe Dunoyer, rapporteur pour avis de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République.
Je voudrais signaler que ce débat, je l'ai évoqué, modestement, en page 18 de mon rapport pour avis – et tout cela est détaillé dans le document de politique transversale, dont chacun convient, à commencer par la ministre, que l'envoi plus que tardif est préjudiciable.
Comme je l'ai indiqué lors de ma présentation, l'action budgétaire de l'État en faveur des outre-mer, telle qu'elle apparaît au travers des différentes missions, s'élève bien à 18,5 milliards d'euros, et même à 24 milliards d'euros si l'on y ajoute l'aide fiscale. Ce que l'on constate dans le tableau que vous trouverez dans mon rapport et dans le document de politique transversale – et c'est pourquoi cela a suscité des questionnements dans les territoires – , c'est que les sommes non réparties entre collectivités bénéficiaires sont passées de 180 millions d'euros, pour un effort budgétaire global de 17,5 milliards d'euros, en 2018, à 1,7 milliard d'euros, pour un effort budgétaire global de 18,5 milliards d'euros, en 2019. D'où cette somme de 1 milliard : il s'agit non pas d'une disparition, mais d'une affectation prospective à laquelle le ministère devra procéder, en liaison avec les différents territoires.
Pour résumer : non, le milliard n'a pas disparu, l'enveloppe reste la même ; en revanche, l'incertitude quant à la répartition des sommes porte, non plus sur 180 millions, mais sur 1,7 milliard d'euros.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 105
Nombre de suffrages exprimés 98
Majorité absolue 50
Pour l'adoption 96
Contre 2
L'amendement no 403 , sous-amendé, est adopté.
Suspension et reprise de la séance
La séance, suspendue à vingt-deux heures cinquante-cinq, est reprise à vingt-trois heures.
Nous abordons l'examen des crédits relatifs au conseil et au contrôle de l'État, aux pouvoirs publics, à la direction de l'action du Gouvernement, aux investissements d'avenir et au budget annexe relatif aux publications officielles et à l'information administrative (no 1302, annexes 10, 32 et 15 ; no 1288, tome XII).
La parole est à M. Daniel Labaronne, rapporteur spécial de la commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire.
Monsieur le président, monsieur le ministre chargé des relations avec le Parlement, madame la secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie et des finances, mesdames les rapporteures spéciales de la commission des finances, madame la rapporteure pour avis de la commission des affaires économiques, mes chers collègues, le projet de loi de finances pour 2019 renforce les moyens alloués à la mission « Conseil et contrôle de l'État ». Si nous la votons, cette mission se verra octroyer, l'an prochain, des ressources portées à des niveaux inédits. Il est en effet proposé de lui consacrer 756,25 millions d'euros en autorisations d'engagement – AE – et 680,56 millions en crédits de paiement – CP – , soit une hausse, respectivement, de 11,23 % et de 2,43 % par rapport à 2018.
Si je me félicite de la progression globale des crédits et des emplois de cette mission, je n'ignore pas les contraintes spécifiques auxquelles se trouvent confrontés les responsables de programmes. Ces contraintes soulèvent, de mon point de vue, la question de l'adéquation des moyens budgétaires dédiés aux programmes au regard des missions croissantes que le législateur leur assigne.
Aussi, je ne m'attarderai pas sur le Haut Conseil des finances publiques, qui, selon moi, devrait être rattaché au programme 164, relatif aux juridictions financières.
S'agissant du programme 165, relatif aux juridictions administratives, je veux souligner le nouvel effort, très substantiel, consenti, notamment, en faveur de la Cour nationale du droit d'asile – CNDA. Pour ce programme, en effet, le projet de loi prévoit une hausse de 15 % en autorisations d'engagement et de 3,4 % en crédits de paiement, lesquels atteignent ainsi le montant exceptionnel de 420,05 millions d'euros.
Les équivalents temps plein travaillés connaissent également une progression très significative, avec 132 emplois créés, dont 122 viendront renforcer la CNDA et 10 les tribunaux administratifs. Le projet de loi de finances comporte, par ailleurs, une hausse des crédits d'investissement nécessaire à l'engagement de l'opération de relogement de la Cour.
Je veux tout particulièrement souligner l'adéquation des moyens budgétaires à notre ambition politique. D'une part, ces moyens permettront à la CNDA de confirmer les résultats obtenus – et attendus – quant à la réduction des délais de jugement, et ce malgré une hausse significative des recours ; d'autre part, ils lui donneront des ressources budgétaires en rapport avec les exigences découlant de la loi « asile et immigration », à commencer par la réduction de la durée de traitement des demandes d'asile.
Par ailleurs, on notera avec intérêt l'investissement confirmé des juridictions administratives dans le développement des outils numériques. La programmation pour 2019 devrait ainsi accompagner le déploiement de l'application Télérecours citoyens, laquelle marque une nouvelle étape dans la dématérialisation des procédures pour les justiciables, conformément au voeu du législateur.
En ce qui concerne le programme 164, le projet de loi marque en réalité une certaine consolidation des ressources allouées aux juridictions financières. Les autorisations d'engagement demandées, 232 millions d'euros, progressent de 5,94 %. L'évolution de leur montant résulte de deux facteurs : d'abord, une croissance modérée des dépenses attendues de personnel ; ensuite, une relance nette des dépenses immobilières et de celles liées à l'approfondissement des grands projets informatiques. On notera, en revanche, que la revalorisation des crédits de paiement se limite à 1 % et que le plafond d'emplois demeure stable, à 1 840 équivalents temps plein travaillés.
En eux-mêmes, ces chiffres attestent une gestion vertueuse, pour ne pas dire rigoureuse. Toutefois, cette programmation budgétaire pose la question de l'adéquation des moyens aux missions des juridictions financières. En effet, elle ne répond pas complètement, de mon point de vue, à la question des marges de manoeuvre qui leur sont laissées, tant pour la conduite de leur réforme – notamment le vaste chantier de la dématérialisation – que pour l'exercice des missions croissantes que leur confie le législateur. Je pense, par exemple, à la certification des comptes des collectivités territoriales et aux contrôles facultatifs des comptes des établissements et services sociaux, qui aujourd'hui connaissent des développements décisifs.
Aussi, les moyens alloués à la Cour des comptes peuvent, à mes yeux, s'apparenter à un plancher, à un socle, qu'il faudra soit relever, si le législateur assigne de nouvelles missions à la Cour, soit maintenir, à moins de considérer qu'existeraient à la Cour des comptes des gains de productivité insoupçonnés, ce que je ne crois pas.
De même, le programme 126 se voit doté de 40,23 millions d'euros, avec un maintien du plafond d'emplois. Les ressources du CESE – Conseil économique, social et environnemental – sont stabilisées ; or, par la future la réforme constitutionnelle, le législateur lui confiera de nouvelles prérogatives.
J'espère donc que les moyens alloués à cette institution seront ajustés en conséquence.
Malgré ces réserves, je vous invite, mes chers collègues, à adopter les crédits de la mission « Conseil et contrôle de l'État ».
Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes LaREM et MODEM.
La parole est à Mme Lise Magnier, rapporteure spéciale de la commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire.
Monsieur le président, monsieur le ministre, madame la secrétaire d'État, monsieur le rapporteur spécial, madame la rapporteure spéciale, madame la rapporteure pour avis, mes chers collègues, en préambule, je tiens à constater l'effort de maîtrise des dépenses réalisé par les différents pouvoirs publics concernés, puisque les enveloppes sollicitées pour 2019 sont identiques à ce qu'elles étaient en 2018, hormis pour la chaîne Public Sénat, dont la dotation diminue de 2,2 %, conformément à son contrat d'objectifs.
Rappelons que les dotations demandées par l'Assemblée nationale et le Sénat sont inchangées depuis 2012, à hauteur, respectivement, de 517,9 millions et de 323,6 millions d'euros. Pour autant, il est à noter que les budgets, eux, ne sont pas constants. Celui de la Présidence de la République augmente ainsi de 2,580 millions d'euros, hausse financée par le prélèvement sur les disponibilités, et celui du Sénat, de 2,813 millions. Le budget de LCP-AN, La Chaîne parlementaire-Assemblée nationale, augmente de 273 063 euros, et les budgets de l'Assemblée nationale, du Conseil constitutionnel, de la Cour de justice de la République et de Public Sénat demeurent constants par rapport à 2018.
Après ces propos liminaires, il me semble nécessaire de vous faire part des engagements pris en faveur d'une transformation des administrations concernées. La recherche d'efficience et de modernisation du fonctionnement de nos administrations est nécessaire et elle impose la restructuration de leurs dépenses, même à budget constant.
Ainsi, les crédits de personnel ou de l'administration de la Présidence de la République connaîtront une hausse sensible de 3,47 %, mais celle-ci est nécessaire à la réorganisation des services consécutive à l'audit réalisé pour améliorer les conditions de travail et l'efficience.
À l'Assemblée nationale, les crédits pour charges parlementaires augmentent de 6 millions d'euros, principalement sous l'effet du déséquilibre accru de la caisse de retraite des députés après la normalisation du régime de pensions, mais aussi de la mise en place de l'AFM – avance de frais de mandat – ou de l'augmentation du crédit collaborateur.
Les charges de personnel devraient, en revanche, connaître une baisse de 5 millions d'euros. La volonté de recourir à davantage de contractuels pour remplir certaines fonctions trouve sa traduction dans le budget pour 2019, puisque la baisse de la masse salariale des personnels statutaires est estimée à près de 10 %, tandis que les charges relatives au personnel contractuel augmenteraient de 23,55 %.
Le Conseil constitutionnel connaît également une augmentation sensible de ses dépenses de personnel, à hauteur de 4,02 %, du fait d'une professionnalisation et d'un renforcement des effectifs, mais aussi d'un plan de transformation et de la création d'un service de communication pour mieux faire connaître cette institution, qui souhaite s'ouvrir davantage au grand public.
En outre, l'Assemblée nationale, le Conseil constitutionnel et la Présidence de la République se sont engagés à poursuivre une stratégie de performance de l'achat public afin de rationaliser leurs dépenses. Mais la bonne gestion budgétaire passe aussi par la définition d'une stratégie pluriannuelle. Tant sur les programmes immobiliers qu'en matière de pilotage des ressources humaines, la définition de programmes pluriannuels permet de définir les besoins au plus juste. La Présidence de la République consacrera 5,065 millions en autorisations d'engagement et 4,695 millions en crédits de paiement à la réalisation de nécessaires travaux immobiliers ainsi qu'à la poursuite de son plan de transformation numérique. En parallèle, un schéma immobilier sur six ans est en cours de réalisation pour atteindre des conditions de travail plus acceptables et fluidifier les échanges entre les services. Toutefois, le financement de ce plan, estimé à 55 millions d'euros, se fera hors dotation de la Présidence de la République.
De la même façon, le Conseil constitutionnel a établi un plan triennal de travaux et d'aménagement, notamment pour des travaux de performance énergétique. Surtout, il s'est engagé dans une véritable transformation numérique qui a nécessité un effort budgétaire conséquent en 2018, poursuivi, dans une moindre mesure, en 2019.
En 2019, l'Assemblée nationale poursuivra la trajectoire de financement de l'hôtel de Broglie, un audit étant également prévu sur l'ensemble de ses mètres carrés, afin de les affecter et de les utiliser au mieux. Cette approche rationnelle doit effectivement être privilégiée à une approche en coupe ou en silo, trop souvent observée dans les grandes administrations. Si je suis convaincue de la nécessité de mener à bien ces réformes et ces aménagements, j'invite vivement les pouvoirs publics à mettre en place les outils de suivi, d'analyse et de pilotage qui permettront de vérifier qu'elles assurent effectivement des gains d'efficience et des économies de fonctionnement.
Je terminerai par un rapide focus sur La Chaîne parlementaire-Assemblée nationale, dont le contrat d'objectifs est en cours d'élaboration. Le développement de l'activité de la chaîne parlementaire nécessite aussi la conclusion de nouveaux partenariats avec d'autres médias, avec l'INA – Institut national de l'audiovisuel – , et certainement un rapprochement des moyens avec Public Sénat comme avec la direction de la communication de l'Assemblée nationale. Il me semble impératif que l'Assemblée nationale participe pleinement au développement de la chaîne parlementaire, d'abord par la mise à disposition de locaux adaptés au déploiement de l'activité, ensuite par une meilleure transmission de l'agenda des événements qu'elle organise.
C'est ensemble que nous réussirons à valoriser davantage le travail parlementaire, le rôle des élus et, ainsi, à répondre à la crise de la démocratie participative que nous traversons, qui pourrait avoir des conséquences majeures lors des prochaines échéances électorales.
En conclusion, mes chers collègues, je vous invite à voter les crédits de la mission « Pouvoirs publics ».
Applaudissements sur les bancs du groupe MODEM et sur quelques bancs du groupe LaREM. – M. Philippe Vigier applaudit également.
La parole est à Mme Marie-Christine Dalloz, rapporteure spéciale de la commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire.
Monsieur le président, monsieur le ministre, madame la secrétaire d'État, monsieur le rapporteur spécial, madame la rapporteure spéciale, madame la rapporteure pour avis, mes chers collègues, je commencerai par quelques mots sur le budget annexe « Publications officielles et informations administratives », qui retrace les activités de la DILA, la direction de l'information légale et administrative. En charge de ce rapport spécial depuis sept ans, j'ai pu observer la mutation considérable de la DILA, qui a totalement pris le virage numérique. Cette transformation ne s'est pas faite sans douleur compte tenu des plans de départs anticipés, qui ont atteint soixante-huit ETP – équivalents temps plein – en 2017 et sont prévus à trente-huit en 2019. Malgré la diminution des recettes du budget annexe, il est toujours exécuté en excédent, à hauteur de 11 millions d'euros en 2019. Je suis donc pleinement favorable à son adoption.
J'en viens à la mission « Investissements d'avenir », dont les crédits s'élèvent à un peu plus de 1 milliard d'euros en 2019. Nous sommes donc loin du rythme de décaissement initialement annoncé de 2 milliards d'euros par an ; si bien que, d'après les échéanciers qui m'ont été transmis, les 10 milliards d'euros déjà engagés sur le PIA 3 – le troisième programme d'investissements d'avenir – , en AE uniquement, ne seront pas tous inscrits en CP sur l'ensemble du quinquennat. Il manquerait 2,68 milliards d'euros. Monsieur le ministre, madame la secrétaire d'État, n'était-il pas prévu de mettre en oeuvre le PIA 3 sur la durée de la législature ?
Il est encore trop tôt pour évaluer l'impact des crédits que nous votons dans le PIA 3, car leur mise en oeuvre prend du temps. Chacune des actions fait l'objet d'une convention entre le secrétariat général pour l'investissement – SGPI – et un opérateur ; puis vient le temps des appels à projets et de la sélection des lauréats, avant la contractualisation entre l'opérateur et le lauréat et, enfin, le décaissement des crédits. L'addition de tous ces délais fait que les crédits des deux premiers PIA sont encore en phase de décaissement. Depuis 2010, sur les 57 milliards d'euros des trois programmes d'investissements d'avenir, seuls 20 milliards sont décaissés.
Ce décalage entre le vote et le décaissement des crédits rend complexe le suivi des investissements.
Le secrétariat général pour l'investissement et les opérateurs ne distinguent pas toujours les enveloppes des différents PIA, d'autant que de nombreuses actions du PIA 3 financent finalement des dispositifs engagés lors d'exercices précédents. À cela s'ajoutent les substitutions budgétaires, lorsque les enveloppes des PIA permettent de financer discrètement les dernières annonces de tel ou tel ministre ou du Président de la République.
Plus de huit ans se sont écoulés depuis les premières dépenses d'investissements d'avenir et nous ne disposons pas encore d'évaluation globale des effets des PIA, qu'il s'agisse de retours financiers ou socio-économiques. Monsieur le ministre, quand pourrons-nous avoir une vision claire des retombées des PIA ?
Enfin, s'agissant de la mission « Direction de l'action du Gouvernement », j'ai souhaité cette année me concentrer sur les dépenses du Premier ministre et de son cabinet. Alors que tous les ministres se voient imposer une réduction drastique de leur cabinet, les effectifs de celui du Premier ministre s'élèvent à 496 ETP, soit 69 membres de cabinet et 427 personnes chargées des fonctions support. Les dépenses de personnel au titre du programme 129 s'élèvent à 19 millions d'euros, alors qu'elles ne comprennent que la moitié des effectifs, …
… les autres personnels étant mis à disposition par différents ministères. Ils sont répartis dans cinq hôtels particuliers du 7e arrondissement de Paris dont les dépenses hors loyers atteignent 4,4 millions d'euros par an.
Et moi qui croyais que la nouvelle majorité avait mis fin à tout cela !
À cela s'ajoutent des frais de représentation de 70 000 euros, des frais de déplacements de 4,1 millions d'euros, …
… dont 3 millions pour les vols de l'escadron de transport, d'entraînement et de calibration, l'ETEC.
Les dépenses d'intendance sont de 2,3 millions d'euros qui ne comprennent que les produits alimentaires, les prestations hôtelières et les vêtements. La seule tournée en Nouvelle-Calédonie de novembre 2017 a coûté 816 744 euros.
Tout cela représente des sommes non négligeables. Je déplore avant tout le manque de transparence sur ces dépenses.
C'est ce manque de transparence qui crée la suspicion et alimente des scandales hautement préjudiciables à la confiance entre les citoyens et la classe politique.
Monsieur le ministre, vous engagez-vous à améliorer la transparence sur les dépenses du Premier ministre ?
Je conclurai en évoquant un point qui ne concerne pas que cette mission, mais l'ensemble du budget qui nous est présenté : celui de la non-comptabilisation des loyers budgétaires. D'après mes informations, cette mesure est sortie cet été de nulle part, prenant de court les responsables de programmes. Ainsi, en ce qui concerne la mission « Direction de l'action du Gouvernement », les crédits semblent diminuer de 150 millions d'euros, mais c'est la somme des loyers budgétaires.
À l'échelle de la mission, cette astuce de présentation est impressionnante. À l'échelle du budget de l'État, c'est 1 milliard d'euros de crédits qui disparaît artificiellement – une belle manière de réduire la dépense publique sans effort !
Pour le principe, je suis donc défavorable à l'adoption des crédits de la mission « Direction de l'action du Gouvernement ».
Applaudissements sur les bancs du groupe LR.
La parole est à Mme Monique Limon, rapporteure pour avis de la commission des affaires économiques.
Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le rapporteur spécial, mesdames les rapporteures spéciales, chers collègues, « il faut réapprendre à voir large et loin : ceux qui se laissent écraser par la tyrannie du court terme sont condamnés à toujours réagir au lieu d'agir, à toujours saupoudrer au lieu de choisir, bref à toujours subir ». Je reprends ici les mots de M. Juppé et M. Rocard, qui furent à l'origine, au coeur de la crise de 2008, du premier programme d'investissements d'avenir dont nous étudions actuellement la troisième version, le PIA 3.
J'interviens ici, au nom de la commission des affaires économiques, comme rapporteure pour avis de la mission relative aux investissements d'avenir, et plus particulièrement sur les programmes 422 et 423 qui concernent la valorisation de la recherche et la modernisation des entreprises.
Tout d'abord, en termes strictement budgétaires, il faut retenir que le rythme de décaissement des crédits du programme d'investissements d'avenir suit la trajectoire pluriannuelle prévue depuis l'année dernière. En 2019, un peu plus de 1 milliard d'euros devrait donc être payé aux opérateurs comme l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie, l'ADEME, ou Bpifrance, conformément à la feuille de route établie par le SGPI. Même si nous ne maîtrisons pas le calendrier réel de décaissement des crédits par les opérateurs, je rappelle que les crédits de paiement du PIA 3 sont désormais votés annuellement, ce qui permet un contrôle parlementaire bienvenu.
Comme il est d'usage, j'ai souhaité conférer une approche thématique à mon rapport, choisissant les actions agricoles et environnementales du PIA. Nous faisons face à ce que je considère comme un défi de société fondamental : la transition de notre pays vers un modèle d'agriculture et d'alimentation durables. Ce choix d'évaluation du PIA répond à une double motivation de ma part.
Tout d'abord, l'existence d'une demande sociale dynamique et construite autour d'enjeux forts : le moindre recours aux produits phytosanitaires, l'amélioration du bien-être animal, l'amélioration de la qualité de l'alimentation, la transition vers un modèle agricole plus soutenable écologiquement mais toutefois performant. L'innovation est souvent la clé de ces transitions.
Ensuite, il était primordial à mes yeux de montrer qu'à la parole succédaient des actes, après l'adoption par le Parlement, le 2 octobre dernier, du projet de loi pour l'équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole et alimentaire et une alimentation saine, durable et accessible à tous, dite « loi EGALIM ». Il convient de veiller à ce que les ambitions qu'elle affiche soient complétées par les leviers financiers à même de garantir son succès. C'est à ce niveau qu'intervient le PIA.
En effet, même si les approches sont hétérogènes et souvent complexes, les réalisations du PIA en matière de développement durable sont toutefois tangibles. Et ce processus continue de suivre son cours. Prenons un exemple auquel seront sensibles ceux qui ont suivi les débats sur le projet de loi EGALIM : le PIA soutient la R& D d'une entreprise française, TRONICO, afin de développer une technique non intrusive de détection du sexe des poussins in ovo – dans l'oeuf – , afin d'éviter le broyage de nombreux poussins ou de canetons après la naissance.
En outre, le PIA valorise nos territoires. Je me félicite, à ce titre, du lancement des « Territoires d'innovation-Grande ambition » par la Caisse des dépôts et consignations, action qui mobilisera 450 millions d'euros dans le cadre du PIA 3. L'appropriation du PIA par les acteurs locaux va donc dans le bon sens et doit être encouragée. Bien d'autres exemples pourraient être cités, mais l'important est de retenir que le PIA donne la chance de mûrir et de concrétiser les solutions écologiques de demain, que ce soit par une intervention directe, en prêts ou en subventions, ou par un meilleur financement des entreprises, grâce aux interventions du PIA en fonds propres.
Néanmoins, le tableau n'est pas entièrement satisfaisant. Il faut bien admettre que le critère d'éco-conditionnalité qui devait présider à la sélection des projets n'est pas pris en compte à sa juste valeur. La mission d'évaluation et de contrôle sur le PIA et la transition énergétique, créée en 2016 par l'Assemblée, avait fait état de seulement 17 % de crédits affectés effectivement au développement durable. Il semble donc opportun de lancer une réflexion sur les objectifs officiels de 60 % de projets soutenant la transition écologique.
Le bilan en matière d'agro-écologie demeure en particulier assez mitigé, si bien que certains acteurs ont pu nous parler d'un « trou dans la raquette » du PIA. Pour y remédier, repenser en partie ses outils semble nécessaire. De fait, les critères très exigeants de sélectivité des projets sur le plan économique ou financier peuvent constituer une barrière au fléchage du PIA vers les sujets phytosanitaires ou vers le recours au biocontrôle. Le cas du marché des alternatives au chlordécone, dont les ravages aux Antilles ont été reconnus par le Président de la République, illustre bien mon propos. Ce marché de niche offre trop peu de débouchés en termes de géographie et de produits, ce qui semble l'exclure de la logique de co-investissement en consortium, qui est le standard du PIA. Aussi la quête de l'excellence économique ne doit-elle pas être un obstacle au financement de projets d'intérêt général répondant clairement à une demande sociale ou à des enjeux de santé publique.
Ces dernières remarques me conduisent à conclure par des propositions concrètes pour accroître l'efficacité du PIA dans les secteurs environnementaux et agricoles. La première proposition consiste à profiter du mouvement de rapprochement des instituts de transition énergétique et des instituts de recherche technologique afin de créer un organisme innovant concentré sur le secteur agricole et agroalimentaire. La deuxième vise à rendre la clause d'éco-conditionnalité plus ferme dans les appels à projets du PIA afin d'assurer son effectivité dans la sélection, tout en la concentrant sur les projets pour lesquels elle est pertinente. Enfin, troisième proposition, il s'agit de profiter de l'évaluation des dix ans du PIA pour examiner l'opportunité d'intégrer un critère de « valeur ajoutée sociale » au choix des projets, sans dénaturer pour autant leur contenu en innovation.
Espérant que mes dernières propositions trouveront un écho favorable parmi vous puisque leur application doit donner un nouveau souffle au PIA, je vous remercie, chers collègues, pour votre attention.
Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM.
Nous en venons aux interventions des porte-paroles des groupes.
La parole est à M. Philippe Vigier, pour le groupe Libertés et territoires.
Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le rapporteur spécial, mesdames les rapporteures spéciales, madame la rapporteure pour avis, chers collègues, j'ai eu l'honneur, pendant cinq ans, d'être rapporteur spécial de la mission « Conseil et contrôle de l'État » et en particulier sur le Conseil d'État, la Cour des comptes, le Haut Conseil des finances publiques et le Conseil économique, social et environnemental. Dans les conclusions du rapport de M. Labaronne, j'ai retrouvé le souhait, que j'avais exprimé, de fusionner le Haut Conseil et la Cour. Je n'ai pu y parvenir en cinq ans mais peut-être l'actuel rapporteur spécial rencontrera-il un plus grand succès que moi. Votre prédécesseur non plus, monsieur le ministre chargé des relations avec le Parlement, n'y est pas arrivé. L'heure est à l'efficience.
J'émets un autre souhait, complémentaire, puisqu'une réforme constitutionnelle est à l'ordre du jour : que la saisine de la Cour des comptes et celle du Conseil d'État puissent être le fait des parlementaires. Je nourris quelques espoirs pour cette réforme attendue, reportée et finalement, si j'ai bien compris, reprogrammée pour le début 2019.
Je concentrerai mon propos sur le travail de Lise Magnier concernant l'Élysée, le Sénat, l'Assemblée et les chaînes parlementaires puisque, l'année précédente, j'étais le rapporteur de la même mission.
Chers collègues, une loi organique importante a été promulguée le 15 septembre 2017 : celle pour la confiance dans la vie politique. La confiance suppose qu'une même exigence s'applique à tous les organes délibérants que sont l'Assemblée, le Sénat, le Conseil constitutionnel – le gardien du temple – et, naturellement, l'Élysée. Cette exigence est d'autant plus forte pour les parlementaires qui, ne serait-ce que parce qu'ils votent la loi, doivent s'appliquer à eux-mêmes les règles de transparence, d'efficience – surtout à l'heure où nous demandons à nos compatriotes des efforts, dont il me paraît essentiel qu'ils soient partagés par les institutions que je viens de citer.
En ce qui concerne l'Assemblée nationale, des progrès restent à faire. À périmètre constant de l'enveloppe depuis 2012, Lise Magnier l'a bien montré, il faut aller puiser dans les réserves pour équilibrer le budget. Des économies peuvent être réalisées sur des contrats, sur des sous-traitances. Cela ne signifie pas qu'il faille, comme le prédécesseur de Richard Ferrand à la présidence de l'Assemblée en avait lancé la réflexion, externaliser de nombreuses tâches. Au contraire, je pense qu'il faut des fonctionnaires dont la neutralité est assurée, …
… et qui pourront à tout moment être présents pour nous accompagner. C'est une exigence absolue.
Il est tant d'autres domaines, que j'avais signalés dans mon rapport et que Lise Magnier a très bien repris, dans lesquels nous pourrions réaliser de vraies économies d'échelle et qui nous permettraient d'avoir une assemblée moderne et encore plus exemplaire qu'elle n'est.
J'en viens au contrôle lui-même. Il faudra avoir le courage, comme c'était le cas à une époque, de décider que le budget de l'Assemblée est voté par les députés. Ça, ce serait un gage de transparence : chacun connaîtrait les engagements pris et l'utilisation des fonds, et le contrôle s'en trouverait favorisé par cette sorte de dualité qui existe entre le député membre de la commission des finances mandaté au titre de la LOLF – loi organique relative aux lois de finances – et la commission d'apurement des comptes présidée par notre collègue Marie-Christine Dalloz. La vraie efficacité résiderait dans le fait que les uns et les autres travaillent davantage ensemble, la Cour des comptes certifiant nos comptes. Nicolas Sarkozy avait demandé cette pratique pour l'Élysée ; nous devons l'instaurer à l'Assemblée en gage de confiance vis-à-vis de nos compatriotes, parce qu'il y a toujours une petite ombre qui plane au-dessus des grandes institutions comme le Parlement ou le Conseil constitutionnel.
J'y insiste parce que, chers collègues, il y a va de la crédibilité du travail parlementaire. Une fois de plus, alors que nous allons examiner une réforme constitutionnelle, cette exigence du contrôle s'impose à nous tous comme elle s'impose pour chacune des missions que nous passons en revue dans le cadre de l'examen du projet de loi de finances.
Je souhaite que nous allions plus loin parce qu'il y a vraiment des économies d'échelle à faire. J'en avais d'ailleurs proposé pour Public Sénat et LCP-AN, consistant en une mutualisation de matériels et pas du tout en diminution du temps d'antenne ou des effectifs des journalistes, bien au contraire. Il s'agit d'être toujours plus informé mais avec plus d'efficacité.
Pour terminer, si nous voulons continuer d'avancer sur le chemin de l'exigence et de la confiance, nous devons aller plus loin dans ces missions de contrôle, étant bien entendu que contrôler ne signifie pas qu'on doive dévoiler ce qu'il n'y a pas à dévoiler, même si rien n'est à cacher. Tout ce qui se passe ici doit être l'objet du meilleur contrôle. Je suis convaincu que le nouveau président de l'Assemblée, Richard Ferrand, aura à coeur de faire évoluer encore notre belle institution.
La parole est à Mme Olivia Gregoire, pour le groupe La République en marche.
Monsieur le président, monsieur le ministre, madame le secrétaire d'État, mes chers collègues, j'interviens aujourd'hui, au nom du groupe La République en marche, sur les missions « Conseil et contrôle de l'État », « Pouvoirs publics », « Direction de l'action du Gouvernement » et « Investissements d'avenir », une lourde tâche, heureusement facilitée par la grande qualité des rapports spéciaux rédigés par nos collègues, qu'il faut saluer. Les sujets abordés sont, pour la plupart, techniques, qui renvoient à des dispositifs ou à l'action d'acteurs indispensables au bon fonctionnement de notre économie et de nos institutions.
La mission « Direction de l'action du Gouvernement » regroupe ainsi de nombreux opérateurs dans un souci évident d'optimisation de la gestion publique. Cela permet aux parlementaires, année après année, d'obtenir une vision fidèle et instructive du travail de ces acteurs, tout en prenant connaissance des priorités identifiées par le Gouvernement. À ce titre, nous saluons cette année la création de quinze ETP au sein de la CNIL – Commission nationale de l'informatique et des libertés – , qui permettra à celle-ci de poursuivre ses missions historiques et d'en prendre de nouvelles en charge, en lien avec l'exécution du RGPD – règlement général sur la protection des données.
Sur la mission « Conseil et contrôle de l'État », brillamment présentée par notre collègue Daniel Labaronne, nous rappellerons simplement l'importance de continuer à faire correspondre les moyens accordés aux acteurs aux charges, nouvelles ou anciennes, qui leur sont confiées. La Cour des comptes s'engage, par exemple, aujourd'hui dans la certification des comptes de certaines collectivités locales ou d'établissements médico-sociaux ; le Conseil d'État, de son côté, remplit des tâches et rédige des rapports toujours plus nombreux. Notre attention en tant que parlementaires doit être de permettre à ces acteurs de remplir correctement leurs missions, en bonne cohérence. Nous saluons donc ici la sincérité des budgets étudiés ainsi que l'augmentation des crédits et ETP accordés aux juridictions administratives, notamment à la CNDA.
Concernant la mission « Pouvoirs publics », notre groupe souligne la quasi-stabilité des crédits proposés par rapport à ceux accordés l'an passé : c'est bien là le signe d'instances attachées à maîtriser leurs dépenses. Je pense en particulier à la présidence de la République ou encore à La Chaîne parlementaire et à Public Sénat. En ce qui concerne l'Assemblée nationale et le Sénat, une réflexion devra probablement être menée, à terme, pour moderniser, rationaliser et mieux évaluer leur financement, comme le disaient justement Lise Magnier et Philippe Vigier à l'instant.
Je m'arrêterai plus longuement sur la mission « Investissements d'avenir », qui fait écho au programme 134 « Développement des entreprises et régulations », dont je suis la co-rapporteure spéciale avec mon collège Xavier Roseren. Le PIA, aujourd'hui en phase 3, est devenu l'une des composantes du grand plan d'investissement, dit GPI, qui, avec un fonds de 57 milliards d'euros, prévoit, sur le quinquennat, d'accélérer la transition écologique ; d'édifier une société de compétences, en lien avec ce qui a été fait cette année dans la loi sur la liberté de choisir son avenir professionnel ; d'ancrer notre compétitivité sur l'innovation autour d'initiatives comme celles dévoilées très récemment par Mounir Mahjoubi pour numériser nos TPE et PME ; de construire l'État de l'âge numérique afin de transformer et de moderniser son action. L'intégration du PIA au GPI a montré la volonté du Gouvernement d'investir plus efficacement, en adoptant une démarche globale, lisible, crédible et en rompant avec des pratiques depuis trop longtemps diffuses et éparses.
Ce ne sont pas tant les véhicules retenus qui importent que les résultats obtenus. En ce sens, le contrôle parlementaire ne peut réellement s'accomplir qu'en bénéficiant d'une vision synoptique. Notre collègue Amélie de Montchalin, rapporteure spéciale sur le programme « Recherche et enseignement supérieur », le soulignait déjà l'an dernier avec précision : « l'éparpillement [... ] des circuits divers de financement de la recherche ne facilite pas la lisibilité, le contrôle et l'efficacité de la dépense publique en matière de recherche et d'innovation ». Nous ne pouvons, de nouveau, que partager ce constat.
J'appelle ainsi l'attention de l'ensemble des groupes sur la nécessité de mieux estimer l'efficacité des dispositifs mis en oeuvre. L'année 2019 sera celle de l'évaluation ex-post, socio-économique du PIA 1. Celle-ci viendra compléter le rapport d'étape publié début 2016 par le comité d'experts indépendants constitué par France Stratégie, lequel pointait des progrès à réaliser en matière d'évaluation. L'enjeu pour les prochaines années se situe donc là, avec une représentation nationale mieux informée et mieux éclairée.
Applaudissements sur les bancs des groupes LaREM et MODEM.
La parole est à Mme Marie-Christine Dalloz, pour le groupe Les Républicains.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je voudrais dire en introduction que, sur les missions « Investissements d'avenir » et « Direction de l'action du Gouvernement », en particulier – mais il doit y en avoir d'autres – , nous n'avons pas obtenu les documents dits « jaunes budgétaires ». Monsieur le ministre, je vous rappelle que la LOLF impose, dans son article 39, que « chaque annexe générale destinée à l'information et au contrôle du Parlement est déposée sur le bureau des assemblées et distribuée au moins cinq jours francs avant l'examen, par l'Assemblée nationale en première lecture, des recettes ou des crédits auxquels elle se rapporte ». Or, pour un certain nombre de missions, nous n'avons pas reçu ce document – et nous sommes plus près des cinq jours après l'examen ! Je souhaite donc juste nous rappeler au bon souvenir de l'ensemble de votre administration.
Concernant la mission « Conseil et contrôle de l'État », je n'ai pas de remarque particulière sur son périmètre.
Sur la mission « Pouvoirs publics », plusieurs éléments. Tout d'abord, s'agissant des crédits alloués au budget du Président de la République, une affaire estivale nous a rappelé à quel point il était difficile de retracer ceux qui sont alloués aux personnels de son cabinet. Nous aurions intérêt à faire la lumière sur l'ensemble des avantages qui leur sont consentis. Qu'il s'agisse des appartements ou des véhicules mis à disposition, il y a eu suffisamment de polémiques dans le courant de l'été pour justifier que l'on obtienne la transparence et que l'on mette fin à l'opacité sur ces avantages annexes.
Le déficit du budget de l'Assemblée nationale s'élevait, en 2017, à 26 888 913 euros. Le prélèvement sur les disponibilités de l'Assemblée nationale de 2018 – ce n'est pas la même chose, me direz-vous, mais quand même, il y a un lien – s'élève à 49 707 404 euros. Le « bleu » nous dit quelque chose de très intéressant : pour l'année 2019, le déficit comptable de l'Assemblée nationale sera « significatif ». Je ne sais pas si, comme moi, vous faites un peu de projections mais il est difficile de savoir à quel niveau un « déficit significatif » se situe. Que l'on ne nous dise pas, comme Mme la rapporteure l'a souligné, que cela provient des investissements réalisés : l'acquisition de l'Hôtel de Broglie ou les travaux réalisés ici, à l'Assemblée nationale, ne justifient absolument pas le niveau du déficit actuel. Des mesures ont été prises ; il faut être attentif et vigilant. Le budget de l'Assemblée nationale ne peut pas durablement être clôturé avec un déficit de cette sorte.
Philippe Vigier a rappelé tout à l'heure qu'il existait une convention avec la Cour des comptes, mais celle-ci n'est absolument pas autorisée à juger de l'opportunité des dépenses. Seuls le collège des questeurs et le bureau de l'Assemblée nationale le peuvent. La Cour des comptes procède par sondages pour vérifier la véracité des écritures qui ont été passées, mais sa mission n'est pas de juger en opportunité. En revanche, il serait intéressant que l'on puisse procéder, dans cette maison, à une comptabilité analytique. C'est une carence terrible que de ne pas disposer d'une telle comptabilité.
Enfin, concernant la mission « Direction de l'action du Gouvernement », que je connais depuis quelques années, j'ai trouvé quelque chose de très intéressant. Jusqu'à maintenant, dans tous les gouvernements qui se sont succédé, quelles que soient la tendance politique et la majorité, le porte-parole du Gouvernement avait toujours une mission de base. On a connu M. Le Foll, ministre de l'agriculture et porte-parole, ou encore M. Castaner, ministre des relations avec le Parlement et porte-parole. Aujourd'hui, le porte-parole n'est que porte-parole : son décret d'attribution ne fait mention que du porte-parolat et ses crédits sont rattachés au budget du Premier ministre. Cela doit vouloir dire quelque chose mais, très honnêtement, c'est assez novateur !
Applaudissements sur les bancs du groupe LR.
La parole est à Mme Sarah El Haïry, pour le groupe du Mouvement démocrate et apparentés.
Monsieur le président, monsieur le ministre, madame la secrétaire d'État, madame la rapporteure, mes chers collègues, la mission « Conseil et contrôle de l'État » voit ses crédits augmenter de plus de 2 %, principalement sous l'effet de la progression des crédits du programme 165. Cette augmentation est en grande partie justifiée par la nécessité de créer des emplois affectés spécifiquement à la Cour nationale du droit d'asile, comme l'a souligné notre collègue Daniel Labaronne dans son rapport.
Cette augmentation permet d'espérer une réduction des délais de jugement, plus que nécessaire dans ces situations, et pourrait également contribuer à atteindre l'objectif gouvernemental de réduction à moins de six mois des délais de traitement des demandes d'asile. De plus, dans un contexte où les contentieux ont fortement progressé – plus 30 % environ entre 2016 et 2017 – , il s'agit d'une augmentation bienvenue. Accorder des moyens humains pour répondre à une demande qui ne cesse de s'accroître est donc bien conforme aux engagements pris lors des débats sur le projet de loi asile au printemps dernier.
La mission « Direction de l'action du Gouvernement » est également la preuve que nous pouvons répondre aux objectifs fixés par le Président de la République d'une administration transparente et plus efficace. Le sujet a été évoqué par notre collègue Marie-Christine Dalloz, mais nous avons une interprétation un peu différente : nous saluons la décision du Gouvernement de mettre fin à la pratique des fameux loyers budgétaires. Si elle a permis de sensibiliser les ministères aux enjeux budgétaires de leur emprise immobilière, cette pratique n'était toutefois plus vraiment pertinente. De plus, elle était source de complexité en raison des flux financiers observés en comptabilité budgétaire mais neutralisés en comptabilité nationale. Sur cette même mission, nous soutenons plutôt la revue des missions des administrations déconcentrées de l'État, lancée à l'initiative du Premier ministre, afin de supprimer les fameux doublons entre les missions assurées par les services de l'État, les collectivités territoriales et les opérateurs et d'optimiser ainsi les moyens de fonctionnement.
Troisième point, qui nous paraît important, la mission « Investissements d'avenir ». Nous ne pouvons que demander au Gouvernement de suivre les recommandations formulées par la Cour des comptes quant à la décomposition des crédits de paiement, y compris au-delà de 2021, ainsi que la mise en place d'un dispositif de contrôle interne budgétaire formalisé, et surtout permanent, sur le périmètre de cette mission. Cela renforcera évidemment la crédibilité de l'action publique mais permettra surtout plus de transparence. Pour reprendre les propos de notre collègue Vigier, il est effectivement nécessaire de dissiper certaines ombres – et en l'occurrence, il y en a !
En écho aux propos de ma collègue Lise Magnier, l'équilibre des budgets de la mission « Pouvoirs publics » repose, en partie, sur des prélèvements sur des réserves. Notre groupe s'interroge profondément sur la pérennité de cette gestion : que se passera-t-il lorsque les réserves seront épuisées ? C'est pour cela que nous saluons les travaux de modernisation mis en oeuvre dans un certain nombre de nos institutions, pour gagner à la fois en efficience, en qualité de condition de travail et en performance.
Au-delà de ces missions et en élargissant un peu le cadre budgétaire pour 2019, je souhaite, au nom de mon groupe, insister sur le fait que, pour cette mission relative au contrôle de l'action de l'État, la mère des réformes est la réforme institutionnelle. Le président Coty, qui a vécu le passage de la IVe à la Ve République, disait qu'un régime « ne sait se défendre que s'il sait se réformer ». Il est temps aujourd'hui de réformer, et c'est pourquoi nous nous félicitons de la confirmation, par le ministre chargé des relations avec le Parlement, de l'inscription de la réforme constitutionnelle à notre ordre du jour dès le début de l'année 2019.
Une démocratie qui fonctionne doit se fonder sur un équilibre entre un parlement fort et un gouvernement fort, le second pouvant s'appuyer sur le premier. Elle doit se fonder, au-delà, sur un véritable contrôle de l'action de l'exécutif par le Parlement, celui-ci ne devant pas se borner à « contrôler l'action législative du Gouvernement », selon la formule d'un de vos prédécesseurs au perchoir, monsieur le président – Philippe Séguin. C'est ainsi, également, que nos concitoyens retrouveront confiance dans leurs institutions. Notre démocratie en sera renforcée.
Applaudissements sur les bancs du groupe MODEM.
Merci, madame la députée, d'avoir ainsi rendu hommage au grand président qu'était Philippe Séguin.
La parole est à Mme Marie-Noëlle Battistel, pour le groupe Socialistes et apparentés.
Monsieur le président, madame la secrétaire d'État, monsieur le ministre, mesdames et messieurs les rapporteurs, chers collègues, les missions relatives au conseil et au contrôle de l'État, aux pouvoirs publics et à la direction de l'action du Gouvernement recouvrent des sujets importants sur lesquels les citoyens et les élus que nous sommes exercent une vigilance particulière. À l'heure où l'on parle de maîtrise de la dépense publique, de réforme de l'État et d'exemplarité, vous comprendrez que je m'attarde quelques minutes sur ces questions.
Les crédits de la mission « Pouvoirs publics » semblent de prime abord marqués par la stabilité, à l'exception du budget de l'Élysée qui continue d'augmenter comme il le fait depuis le début du quinquennat, passant de 103 millions en 2018 à 106 en 2019. Dans ce domaine, chacun s'accorde à reconnaître que de nombreux progrès avaient été accomplis, notamment grâce au règlement du 29 novembre 2016 reprenant les normes applicables à la gestion budgétaire et comptable publique, qui s'est traduit, comme vous le savez, par une réduction considérable du budget de l'Élysée, passé de 109 millions d'euros en 2012 à l'objectif fixé de 100 millions en 2017.
On constate sur ce point une rupture nette avec les efforts accomplis jusqu'à présent. J'appelle en particulier votre attention sur les dépenses de personnel de la Présidence de la République, qui représentent plus des deux tiers du budget global et qui augmentent de plus de 2,5 millions d'euros. Il aurait peut-être été souhaitable, à la suite des événements que nous avons connus cet été, d'avoir plus de précisions sur le personnel au service de l'Élysée, comme l'a d'ailleurs relevé notre collègue Dalloz.
Le groupe Socialistes et apparentés présentera donc un amendement visant à réduire ce budget afin de financer les missions de la Chaîne parlementaire, dont l'objectif est de rapprocher le Parlement des citoyens.
Le budget dédié aux assemblées parlementaires pose également question. Pour apprécier convenablement la stabilité du budget de l'Assemblée nationale, qui nous est présenté avec une très légère baisse de 0,07 %, il est nécessaire de le mettre en perspective avec les budgets précédents, grevés par les dépenses exceptionnelles – estimées à environ 35 millions d'euros – liées au renouvellement de l'Assemblée, qui avaient, de fait, engendré une augmentation de 13 millions d'euros, soit de 2,5 %, par rapport au PLF 2016, et de près de 26 millions par rapport au budget 2015. On peut donc se demander si le « bleu » budgétaire ne sous-évalue pas les besoins.
En tout cas, il est regrettable de ne pas avoir de précisions quant au coût des missions d'évaluation des politiques publiques, qu'elles soient menées par les commissions permanentes ou par le comité d'évaluation et de contrôle. À cet égard, le budget alloué ce dernier mériterait d'être précisé afin que nous puissions le comparer avec celui d'autres institutions étrangères.
Si le CEC produit déjà des travaux de qualité, sa mission est suffisamment essentielle pour mériter une augmentation sensible des crédits qui lui sont consacrés. Or ce n'est pas le cas : les fonds alloués aux études ne dépassent guère les 100 000 euros. Pour y remédier, le groupe Socialistes et apparentés proposera de prélever sur le budget de l'Élysée les crédits nécessaires pour renforcer les moyens d'évaluation du Parlement, afin que ce dernier puisse effectuer les missions de contrôle que lui confère la Constitution et auxquelles nous sommes très attachés.
J'en viens à la mission « Direction de l'action du Gouvernement ». S'agissant de la coordination du travail gouvernemental, on peut noter deux particularités. La première touche les services de l'information du Gouvernement, dont les crédits ont atteint 19,8 millions d'euros en 2018 avant de redescendre à 13,3 millions dans ce PLF, ce qui pose la question du fléchage des dépenses. La seconde particularité concerne l'augmentation de 40 % du budget des « études et recherches » de France stratégie ; la question se pose du moyen de garantir la neutralité des évaluations menées par cette institution et d'organiser les éventuels appels d'offre.
S'agissant du Défenseur des droits, dont le nombre de saisines a bondi de plus de 17,3 % en l'espace de seulement deux ans, on peut légitimement se demander si les moyens sont à la hauteur des missions qu'il exerce. En effet, la majorité des emplois créés par le PLF 2019 au sein du programme « Protection des droits et libertés » bénéficierait à la CNIL.
La mission « Conseil et contrôle de l'État » nous interpelle également par bien des aspects, mais compte tenu du temps qui m'est imparti, je m'attarderai seulement sur la Cour nationale du droit d'asile. L'augmentation conséquente des affaires traitées par la CNDA nécessite plus que les 122 équivalents temps plein supplémentaires que vous nous proposez. Entre 2010 et 2017, leur nombre a en effet doublé. Par ailleurs, la réforme « Asile et immigration » que vous avez votée cette année impose à la CNDA de diminuer drastiquement les délais de jugement à cinq mois en collégiale et à cinq semaines en juge unique, ce qui nécessite, là aussi, des moyens supplémentaires. Étant donné la gravité de la situation, chers collègues, de simples mots et les quelques moyens supplémentaires envisagés ne suffiront malheureusement pas pour traiter chacun avec dignité.
Vous comprendrez, chers collègues, l'approche de notre groupe sur ces missions importantes. Il ne s'agit pas de dépenser plus, mais de dépenser mieux ; de favoriser l'action du Parlement et de lui permettre d'assurer ses missions de contrôle et d'évaluation indispensables à la démocratie ; de maîtriser les dépenses de l'Élysée, comme chacun s'y était engagé. Il s'agit enfin de nous donner les moyens de répondre à l'objectif de raccourcir les délais d'attente des demandeurs d'asile.
Sans moyens à la mesure de tous ces sujets, nous ne pourrons que constater que la volonté affichée ne suffit pas.
Applaudissements sur les bancs du groupe SOC.
La parole est à M. Michel Zumkeller, pour le groupe UDI, Agir et indépendants.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mesdames et monsieur les rapporteurs, mes chers collègues, nous sommes aujourd'hui appelés à nous prononcer sur les crédits des missions « Conseil et contrôle de l'État », « Pouvoirs publics », « Direction de l'action du Gouvernement » et « Investissements d'avenir » pour l'année 2019.
Les crédits de la mission « Pouvoirs publics » restent au même niveau qu'en 2018. Les dotations de l'État poursuivent ainsi la trajectoire « zéro augmentation en volume », ce qui est à saluer. Le budget des deux assemblées est stabilisé depuis cinq ans : 517 millions d'euros pour l'Assemblée nationale et 323 millions pour le Sénat, soit près de 84 % des crédits de la mission.
Toutefois, il faut rappeler que l'équilibre de ces budgets n'est permis que par des prélèvements sur les réserves. Une telle situation nous amène à nous poser la question de la rationalisation des dépenses et de la réorganisation des services. Non seulement les réserves ne sont pas inépuisables, mais il est surtout indispensable, à un moment où des efforts sont demandés à nos concitoyens, que nous puissions montrer l'exemple avec la gestion quotidienne de nos assemblées.
La diminution du nombre de parlementaires, si elle est mise en oeuvre, n'aura pas d'impact dans la mesure où le Gouvernement a promis que les économies dégagées serviraient à améliorer la qualité du travail du Parlement et – espérons-le – à créer un office parlementaire du budget chargé d'assister les parlementaires des deux chambres dans leur travail.
Monsieur le ministre, pouvez-vous nous éclairer sur la vision du Gouvernement concernant le niveau de la dotation de l'État et la dynamique de l'évolution des charges des assemblées parlementaires, laquelle nous paraît difficilement compatible avec l'exigence d'un budget équilibré ?
Nous saluons la hausse de crédits de la mission « Conseil et contrôle de l'État », qui va permettre notamment la diminution des délais de traitement du contentieux relatif à la Cour nationale du droit d'asile par la création d'emplois et de chambres de jugement. Néanmoins, nous nous interrogeons sur la baisse d'environ 8 % de la dotation du programme 340, relatif au Haut Conseil des finances publiques.
Concernant la diminution du nombre des membres du CESE que certains d'entre nous appellent de leurs voeux, elle doit s'accompagner d'une redéfinition des missions et d'une valorisation des travaux de ce conseil.
Monsieur le ministre, le Gouvernement compte-t-il à terme fondre les crédits du programme 340 dans le programme 164 « Cour des comptes et autres juridictions financières » ? Qu'en est-il de la montée en gamme du Haut Conseil, qui doit lui permettre de rendre un avis plus détaillé sur l'évolution des dépenses du budget de l'État ?
Je ferai quelques remarques sur la mission « Investissements d'avenir ». On peut tout d'abord s'interroger sur le choix d'un décaissement progressif des crédits de paiement de la mission, qui créé un effet « d'attente » sur la mise en oeuvre de certaines actions du PIA 3 et alourdit la contrainte de gestion des opérateurs.
Néanmoins, l'utilité de la mission n'est plus à démontrer. Il nous parait primordial, au travers de la mission « Investissements d'avenir » que l'État conserve son rôle d'État stratège. Il doit investir dans les domaines d'avenir, mais aussi rattraper les retards et accompagner les territoires qui en ont le plus besoin. Cette aspiration de l'État stratège doit également se matérialiser dans la politique du logement, la fiscalité ou encore la politique industrielle.
Enfin, l'augmentation des crédits de la mission « Direction de l'action du Gouvernement » résulte principalement de la hausse des effectifs et, plus marginalement, du dynamisme de certaines dépenses de fonctionnement, notamment des loyers et des charges immobilières des directions départementales interministérielles, DDI. Vous connaissez la philosophie de notre groupe : le financement des priorités aurait dû être intégralement assuré par des économies.
Dans la même logique que s'agissant des assemblées parlementaires, il est indispensable que nos concitoyens puissent constater que les services liés au Premier ministre sont gérés dans la plus grande transparence et avec la plus grande rigueur possible.
Monsieur le ministre, pouvez-vous nous éclairer sur les raisons qui ont conduit à la suppression des loyers budgétaires du périmètre de la mission, dont ils représentaient 9 % en 2018 ?
Tout en restant très attentifs aux réponses que vous apporterez à nos interrogations, les membres du groupe UDI-Agir et Indépendants voteront les crédits de ces missions.
Applaudissements sur les bancs du groupe UDI-Agir. – Mme Cendra Motin applaudit également.
Monsieur le président, monsieur le ministre, madame la secrétaire d'État, messieurs les rapporteurs, mes chers collègues, en guise de propos liminaire à cette discussion budgétaire, je souhaite rappeler que toutes les données budgétaires présentées par le Gouvernement sont tronquées, puisqu'elles ne prennent en compte ni l'inflation – 1,3 % – , ni l'augmentation de la population – 0,4 %. Ainsi, dans le cadre de la mission « Conseil et contrôle de l'État », il est dit que la justice administrative voit ses crédits augmenter de 3,4 %, alors que la hausse n'est en réalité que de 1,66 %, soit environ 7 millions d'euros.
Cela étant, pour une fois que les crédits de la justice sont augmentés, nous ne pouvons que nous en réjouir, d'autant que ces 7 millions d'euros sont affectés à la Cour nationale du droit d'asile, comme nous l'avions demandé lors de l'examen du PLF pour 2018 et celui de la loi « Asile et immigration ». Nous nous interrogeons cependant sur vos intentions : ces crédits supplémentaires vont-ils servir à accueillir dignement les personnes réfugiées en leur offrant une procédure de qualité ou sont-ils destinés à renforcer la machine à expulser mise en place par Emmanuel Macron et son ex-ministre Gérard Collomb ?
Rappelons que ce texte de la honte a été vertement critiqué par le Défenseur des droits. Est-ce pour cela que vous baissez son budget de 400 000 euros cette année » ? Est-ce une sanction politique ? De façon générale, nous nous inquiétons du gel des crédits de toutes les autorités administratives indépendantes, qui sont pourtant des contre-pouvoirs – à moins que ceci n'explique cela.
Concernant en revanche le Haut Conseil des finances publiques et la dépense « Communication et international » du CESE, nous sommes d'accord avec vous : cessons les dépenses dont l'utilité reste à prouver.
Venons-en maintenant à la mission « Pouvoirs publics ». En regardant dans le « bleu » budgétaire les différentes autorisations d'engagement de ces dernières années, on constate un véritable déséquilibre entre les pouvoirs exécutif et législatif, Emmanuel Macron utilisant sans rechigner les moyens d'hyper-présidentialisation prévus par la Ve République.
Alors que le budget de l'Élysée n'avait pas augmenté depuis 2012, l'arrivée au pouvoir d'Emmanuel Macron a été marquée par une forte hausse : 3 %, soit plus 3 millions d'euros. Celle-ci est d'autant plus significative qu'elle est reconduite dans le budget 2019, alors même que le Parlement, lui, est mis à la diète depuis huit ans. Nous parlions tout à l'heure d'une démocratie renforcée à travers l'équilibre de ces deux pouvoirs mais le budget ne va décidément pas dans ce sens.
En outre, cette hausse était censée être exceptionnelle. Lors du PLF pour 2018, le Gouvernement expliquait qu'elle correspondait à une « mise à niveau des équipements destinés à assurer la sécurité des personnes et des biens. » Pourquoi est-elle donc reconduite ? Pourquoi les 3 millions d'euros n'apparaissent-ils pas dans les autorisations d'engagement pour 2019 ? Alors que, nous le savons, cette somme, en 2018, était notamment liée à la réorganisation de la sécurité du Président – dans laquelle M. Benalla était impliqué – , il nous semble que l'Élysée devrait a minima faire preuve de transparence quant à cette reconduction, cela a été diversement exposé.
Par ailleurs – cela aussi a été évoqué – , nous nous interrogeons sur les déplacements privés et les vacances du Président de la République. Certes, celui-ci les paye avec ses deniers mais les montants, comme le relève la Cour des Comptes dans son rapport de juillet 2018, « ne comprennent pas la masse salariale des agents mobilisés ». Nous estimons que la représentation nationale devrait connaître le coût réel de ces déplacements, loin des coups de communication.
Toujours concernant l'Élysée, nous souhaiterions savoir pourquoi une partie des dépenses anticipées pour 2019 – 3,78 millions d'euros – serait financée par les recettes propres de l'Élysée. Outre le fait que cette somme ne figure pas dans le budget présenté au Parlement, nous aimerions connaître le montant des « disponibilités » de la Présidence de la République et l'usage qu'il en est fait.
Nos amendements seront autant d'occasions de revenir sur toutes ces interrogations.
Enfin, après les annonces relatives au plan pauvreté – 2 milliards – , nous pensons que le Président de la République devrait montrer l'exemple en allouant par exemple à l'aide alimentaire les 3 millions d'euros supplémentaires dont est gratifié le budget de l'Élysée.
Pour le groupe de la Gauche démocrate et républicaine, la parole est à M. Sébastien Jumel.
Monsieur le président, madame la secrétaire d'État, monsieur le ministre, mesdames et monsieur les rapporteurs, chers collègues, dans le cadre de l'exercice budgétaire parlementaire, nous devons discuter à cette heure tardive d'un certain nombre de missions à caractère disparate mais qui demeurent essentielles en ce qu'elles témoignent du bon fonctionnement de nos institutions.
En premier lieu, nous constatons – cela a été dit avant moi – que les crédits de la mission « Conseil et contrôle de l'État » sont en augmentation, bien que celle-ci soit à nuancer, puisque en raison de leur forte concentration en dépenses de personnel, la mission est peu sujette à de significatives évolutions.
Néanmoins, force est d'admettre que le budget de la CNDA croît à hauteur de 36 millions d'euros, une hausse correspondant à la création des cinq chambres de jugement supplémentaires.
Ne nous y trompons pas cependant, ces moyens supplémentaires n'ont qu'une seule finalité : accentuer la politique du chiffre pour se mettre en conformité avec les objectifs gouvernementaux, notamment ceux qui ont été actés dans la loi sur l'asile et l'immigration visant à traiter en six mois le délai moyen de traitement des demandes d'asile. Notre groupe a combattu ce projet de loi et la logique comptable de l'asile qui le fondait, dénoncée à juste titre par les rapporteurs de la CNDA puisqu'elle fait primer la question des délais de jugement sur la qualité de l'instruction des demandes et des décisions rendues.
Aussi, si les comptes rendus annuels font la part belle aux volumes d'activité, avec une attention particulière au nombre de jugements et au délai de traitement des dossiers, ils masquent surtout les conditions de travail délétères des agents de la CNDA. Vous vous rappelez tous de la grève de ses agents : pendant 28 jours, de mi-février à mi-mars, ils n'ont eu de cesse de dénoncer des procédés d'organisation quasi-industriels, qui s'apparentent à une forme de « travail à la chaîne ».
Les conséquences sur la qualité du travail sont telles que plus de 85 % des cadres de la CNDA sont des contractuels, ce qui n'est pas sans soulever des problèmes compte tenu de la nature régalienne des fonctions occupées – peut-être cela a-t-il inspiré le Premier ministre qui, si l'on en croit les déclarations qu'il a faites voilà quelques jours, veut transformer l'ensemble des services publics de l'État. Pire, ces agents restent en poste généralement moins de deux ans. Ils partent en raison d'une surcharge d'activité et de l'impossibilité de traiter les dossiers avec humanité.
Telle est aujourd'hui la réalité à la CNDA. Or la réponse budgétaire, bien qu'améliorée, n'est à l'évidence pas encore à la hauteur des problèmes rencontrés par les agents de la Cour.
Le même constat vaut pour les tribunaux administratifs, dont la situation est très préoccupante. Ces juridictions contiennent le phénomène de montée en puissance des contentieux sociaux, mais pour combien de temps ? Le contentieux est en évolution croissante depuis quarante ans, tant du point de vue strictement quantitatif que qualitatif. Et les propositions contenues dans les projets gouvernementaux sur la réforme de la justice, que nous examinerons à partir du 20 novembre, ne sont pas de nature à nous rassurer sur ce point.
Par ailleurs, cela a été dit, nous observons la stagnation des moyens dédiés au programme « Protection des droits et des libertés ». Il en est ainsi pour le Défenseur des droits, dont le budget diminue légèrement, ce qui était déjà le cas en 2018 et ce qui soulève des questions, tant ses missions sont essentielles et saluées comme telles par l'ensemble des acteurs. Cette réduction de moyens demeure particulièrement incompréhensible alors que le Défenseur des droits occupe une place de plus en plus prépondérante dans le débat public – il suffit pour s'en convaincre de voir comment son travail est utilisé dans nos débats, dans nos rapports et dans nos réflexions.
Une telle expertise n'est pourtant pas encouragée par le budget que nous examinons aujourd'hui, alors même que des institutions de ce type ont vocation à être des contre-pouvoirs – je le dis alors que l'on nous annonce un remake de la réforme des institutions ; nous espérons que la copie sera substantiellement corrigée, sinon, le risque est grand d'aggraver encore la confusion des pouvoirs et d'amplifier leur concentration.
Enfin, la mission « Investissements d'avenir » ne nous semble pas à la hauteur des enjeux, spécifiquement en matière écologique. Certes, elle suit la trajectoire prévue lors de la dernière loi de finances, poursuivant les dépenses et intégrant le troisième programme d'investissements d'avenir dans le « Grand plan d'investissement ». Mais peut-on parler d'avenir lorsque l'on observe un énorme recul sur la rénovation thermique des bâtiments ? Peut-on parler d'avenir alors que le budget minore les nécessaires transformations de notre modèle énergétique, lesquelles réclament de s'écarter du prisme de l'orthodoxie budgétaire ? Nicolas Hulot a lui-même considéré que libéralisme, marché et écologie étaient incompatibles.
Pour toutes ces raisons, notre groupe, mesurant les avancées mais, aussi, le caractère opaque du contrôle exercé, s'abstiendra.
Applaudissements sur les bancs du groupe GDR.
Madame la secrétaire d'État, mesdames et monsieur les rapporteurs, mesdames et messieurs les députés, je vous remercie de vos différentes interventions et salue la qualité du travail des rapporteurs spéciaux.
Je vais m'efforcer d'apporter des compléments, des éclaircissements, en me pliant à l'indispensable exercice de synthèse et de concision qu'imposent les cinq minutes de temps qui me sont imparties. Je laisserai à ma collègue Agnès Pannier-Runacher le soin de vous répondre sur la question des investissements d'avenir.
S'agissant de la mission « Conseil et contrôle de l'État », le rapporteur spécial, ainsi que M. Jumel, Mme Battistel et Mme El Haïri ont mis l'accent sur les crédits dégagés en faveur des juridictions administratives et, singulièrement, de la Cour nationale du droit d'asile. Les appréciations étaient certes différentes mais tout le monde a reconnu la réalité des créations d'emplois : 122 nouveaux postes sont ainsi destinés à renforcer les moyens de la CNDA, dont les effectifs sont portés à 648 équivalents temps plein. Cet effort doit permettre la création de cinq nouvelles chambres de jugement afin d'atteindre les objectifs fixés par le législateur en matière de délais de jugement dans un contexte de hausse de son activité – 22 % en 2018.
Monsieur Jumel, je crois que votre groupe s'est ému du statut des personnels de la CNDA. Les contractuels y sont en effet nombreux, mais un concours d'attaché spécifique sera ouvert en 2019 et en 2020 afin de renforcer le nombre de fonctionnaires titulaires parmi les rapporteurs de la Cour.
Une enveloppe de 6,92 millions d'euros est également attribuée à la CNDA au titre des frais de justice, en hausse de 47 % par rapport à l'an passé. L'augmentation des dépenses locatives du programme doit également permettre la prise à bail, l'aménagement et l'exploitation de nouvelles surfaces pour la Cour compte tenu de l'augmentation des effectifs. Avec ces crédits, nous nous dotons de moyens à la hauteur des exigences exprimées lors du débat sur la loi pour une immigration maîtrisée, un droit d'asile effectif et une intégration réussie, comme l'ont notamment souligné M. Labaronne et Mme El Haïry.
Ce budget n'en néglige pas pour autant les autres juridictions administratives : en effet, si les délais de jugement sont en diminution sur une longue période, il n'en demeure pas moins qu'en moyenne le contentieux augmente de 6 % chaque année. Les règles de procédure peuvent être aménagées pour faire face à cette hausse du contentieux, par exemple avec le développement du recours à la médiation, mais il faut aussi adapter les dotations budgétaires. Dix postes sont ainsi créés dans ce budget en faveur des tribunaux administratifs.
Permettez-moi en outre, à l'instar de Mme Grégoire, de me féliciter des économies réalisées grâce à Télérecours et du meilleur accès des citoyens à la procédure que permet cette application.
Enfin, le rapporteur spécial Daniel Labaronne a souligné le caractère vertueux de la gestion de la Cour des comptes et des juridictions financières dans un contexte d'élargissement constant de leur périmètre d'intervention. En rupture avec les exercices précédents, celui de 2017 a été marqué par un taux d'exécution des crédits de personnels de plus de 99 %. La Cour va entrer dans une démarche de rattrapage des dépenses de personnels, parallèlement au renforcement du poids des personnels de contrôle, et la sous-consommation de son plafond d'emplois devrait progressivement se résorber.
M. Zumkeller et d'autres m'ont interrogé sur le devenir du Haut Conseil des finances publiques : j'aurai l'occasion de donner des précisions sur son budget lors de la discussion des amendements.
Quant à l'existence même du programme 340 – nombre d'entre vous en ont parlé – résultant d'un amendement parlementaire à la loi organique de 2012, elle fait l'objet d'interrogations récurrentes. Le Gouvernement ne serait pas défavorable à une fusion avec le programme 164, eu égard à la relation très étroite que le Haut conseil entretient avec la Cour des comptes et compte tenu du fait que les dispositions internationales ne rendent nullement obligatoire l'existence d'un programme distinct.
Enfin, sur les crédits du CESE, je partage l'analyse du rapporteur spécial : la dotation est calibrée à l'activité prévisible du Conseil en 2019.
J'en viens à la mission « Pouvoirs publics ». La rapporteure spéciale Lise Magnier, comme son prédécesseur M. Vigier, a salué l'effort de maîtrise des dépenses des pouvoirs publics, avec une reconduction en 2019 des dotations demandées en 2018.
La hausse des dépenses du titre 2 du Conseil constitutionnel correspond à une légère augmentation de l'effectif et doit permettre une plus grande professionnalisation encore de ses personnels. Le Conseil poursuit également sa politique de transformation numérique dans un contexte de rationalisation des dépenses de fonctionnement, notamment à travers la modernisation de la fonction achat.
La dotation demandée par la Présidence de la République est identique à celle de l'an passé. Madame Battistel, madame Rubin, vous m'avez interpellé sur le niveau de ce budget. Les moyens consacrés au renforcement de la sécurité de la Présidence et du Président, renforcement qui a justifié une hausse de 3 millions d'euros en 2018, doivent être reconduits. Nous reviendrons sur cette dotation lors la discussion des amendements.
Monsieur Zumkeller, monsieur Vigier, vous me demandez l'analyse du Gouvernement sur l'évolution des dotations ou des budgets des assemblées. Vous comprendrez que le principe constitutionnel d'autonomie des pouvoirs publics me conduise à m'abstenir de tout commentaire à ce sujet.
Sur la mission « Direction de l'action du Gouvernement », la suppression des loyers budgétaires a soulevé beaucoup d'interrogations, notamment de la part de Mme Dalloz. Des éléments ont été apportés dans le cadre de la discussion générale ; je n'y reviens pas, sinon pour dire que cette suppression, qui concerne l'ensemble des ministères civils, constitue une mesure de simplification budgétaire et comptable qui allège les coûts administratifs de gestion.
Mme Dalloz m'interroge aussi sur les dépenses du Premier ministre et de son cabinet. Les effectifs s'élèvent, comme vous l'avez rappelé, à 496 agents, dont 69 membres de cabinet. Un conseiller technique « justice », un conseiller technique « recherche et innovation » et un conseiller technique « politiques contractuelles territoriales » ont rejoint le cabinet civil, tandis que les effectifs du cabinet militaire ont diminué d'un agent.
L'augmentation des effectifs chargés des fonctions support s'explique par la prise en charge de la gestion des courriers des secrétariats d'État rattachés au Premier ministre. Madame Dalloz, vous avez vous-même fait la démonstration de la parfaite transparence de l'ensemble de ces dépenses, puisque vous venez à l'instant de donner des chiffres très précis.
Pour le reste, l'accent est mis sur la sécurité, avec la création de quinze postes pour le groupement interministériel de contrôle – GIC. Hors titre 2, le GIC bénéficie de 1,5 million d'euros de crédits supplémentaires afin d'assurer son bon fonctionnement. L'Agence nationale de sécurité des systèmes d'information – ANSSI – bénéficie, quant à elle, de 13 millions d'euros de plus, hors titre 2.
Un effort particulier est consenti en faveur des autorités administratives indépendantes du programme, avec vingt créations d'emplois, dont quinze pour la CNIL, afin d'accompagner l'entrée en vigueur du règlement général pour la protection des données – RGPD. S'agissant, enfin, des administrations déconcentrées, Mme El Haïri a rappelé que la circulaire du Premier ministre du 24 juillet 2018 sur l'organisation territoriale des services publics doit permettre de renforcer la cohérence et l'efficacité de l'intervention de l'État dans les territoires et de réinventer un service public de proximité. Pour 2019, le programme permet de poursuivre l'harmonisation des dépenses d'action sociale de proximité des services déconcentrés.
Pour finir, je voudrais m'associer au satisfecit accordé par Mme Marie-Christine Dalloz au budget de la Direction de l'information légale et administrative et saluer les efforts d'évolution de ce service.
Je vous demande donc de voter les crédits de ces trois missions et de ce budget annexe.
Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes LaREM et MODEM.
Sourires.
La parole est à Mme la secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie et des finances.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mesdames et messieurs les rapporteurs, mesdames et messieurs les députés, je veux, à mon tour, saluer les rapporteurs et les rapporteurs spéciaux pour leur travail. À la différence de mon collègue Marc Fesneau, j'adopterai une perspective un peu plus large, dans la mesure où le programme d'investissements d'avenir est un programme complet, qui s'inscrit dans la politique générale du Gouvernement, et non dans une série de budgets spécifiques.
Comme vous le savez, le Gouvernement s'est engagé dans la transformation de notre modèle économique et social. Je voudrais rappeler que cette transformation repose sur deux piliers : les réformes, d'une part, celles que nous avons engagées à marche forcée depuis seize mois, et les investissements qui transforment, d'autre part. C'est tout le sens du grand plan d'investissement lancé par le Gouvernement. Celui-ci comporte un chapitre spécifique sur la transition énergétique, doté de 20 milliards d'euros. Il me semble donc – pour répondre aux questions qui ont été posées à ce sujet – que cette question est correctement prise en compte, puisqu'elle l'est dans le PIA.
Le PIA 3 est un élément clé de ce grand plan d'investissement et il représente un effort important d'investissement dans l'avenir. Je me félicite du fait que vous puissiez exercer un suivi régulier de l'utilisation des crédits de paiement et en débattre chaque année, ce qui n'était pas forcément le cas auparavant. Je précise également, pour répondre à la question qui a été posée au sujet de l'évaluation, que l'élaboration de ce PIA 3 s'est fondée sur les conclusions du comité d'examen à mi-parcours, qui ont été publiées en mars 2016. Vous voyez donc que ce PIA 3 fait effectivement l'objet d'un contrôle. Mais nous construisons sur le long terme, et il est probable que c'est en 2020 que nous prendrons vraiment la mesure de ce qui a été enclenché.
Le PIA est un levier stratégique pour repousser la frontière de l'innovation. Les technologies vont plus vite que nos entreprises, plus vite que notre capacité à nous représenter l'avenir. Nous n'avons qu'une seule solution : prendre de la hauteur et anticiper. Il nous faut mettre l'innovation au coeur des programmes, au coeur de l'industrie, au coeur de nos filières. C'est notamment l'objet du plan sur l'intelligence artificielle et du plan Nano 2022.
Avec le PIA 3 et ses 10 milliards d'euros actés par la loi de finances pour 2017, l'État se donne les moyens de transformer profondément le tissu économique français – et je précise que le déroulement du PIA se fait conformément à la programmation budgétaire que nous avions annoncée. Il se donne les moyens d'aider les entreprises à investir intensément, inlassablement. C'est bien pour cela que l'un de ses axes consiste à accélérer la modernisation des entreprises. L'État se donne aussi les moyens d'investir et d'inscrire son action dans le temps long. Il faut prendre le temps d'aller rechercher, avec les opérateurs et les acteurs privés, les solutions qui permettront d'irriguer l'ensemble de notre économie. Pour l'avoir fait dans d'autres fonctions, je sais le temps que prennent les fonds de fonds et les investissements dans les entreprises : c'est bien cela qu'il faut accompagner sur le long terme.
Nous voulons nous ancrer et capitaliser sur une nouvelle dynamique d'investissement public. Le PIA a d'ores et déjà permis de financer des projets d'excellence, qui permettront à la France de prendre un temps d'avance. Citons, par exemple, l'Institut de recherche technologique Jules Verne qui, avec ses partenaires académiques et industriels comme Airbus et le CNRS, travaille sur la collaboration entre l'homme et le robot, ou la start-up DNA Script, qui développe l'ADN de synthèse en santé, mais aussi pour le stockage de données.
Le troisième volet du PIA introduit plus de transversalité, une régionalisation renforcée et une cohérence avec les approches de filières.
Quatre grands types d'action vont continuer à monter en puissance. Je pense d'abord au concours d'innovation, dont la première vague d'appel à projets a donné lieu à la sélection de quatre-vingt-neuf projets innovants de PME, tandis qu'une deuxième vague d'appel à projets est en cours.
Le PIA vient par ailleurs soutenir le capital-risque français et aide à combler les lacunes de marché. Le fonds French Tech Seed vient d'être lancé et, puisque certains d'entre vous nous ont interrogés sur nos engagements, je tiens à indiquer que 100 millions d'euros ont déjà été engagés dans ce fonds en 2018, tandis que 250 millions d'euros ont été engagés dans le fonds national d'amorçage 2 en 2018. Je voudrais encore citer le fonds Multicap Croissance 2, qui vise à mettre des gros tickets pour faire changer de taille des ETI ou des PME et le fonds Internationalisation de Bfpifrance, qui vise à accompagner les PME et les ETI au moment de leur développement international – je sais que c'est un sujet cher à votre coeur. Les projets structurants pour la compétitivité sont également financés, avec une régionalisation du dispositif des projets de recherche et développement structurants pour la compétitivité – PSPC. Enfin, la garantie de prêts France Num par Bpifrance favorise la numérisation des TPE et des PME.
Le PIA 3 vient par ailleurs en appui des contrats stratégiques de filières que nous sommes en train de signer, tout l'enjeu étant de s'assurer de la parfaite cohérence des projets financiers avec les projets de filières. Pour prendre un exemple, nous venons de signer le contrat sur la chimie et les matériaux, et la plateforme industrielle est bien intégrée dans ce contrat : c'est à nous d'assurer cette parfaite cohérence.
L'innovation doit devenir une nouvelle discipline, un nouveau sport collectif. Le PIA change la donne depuis bientôt dix ans : ses effets se font déjà sentir et ils se feront sentir de plus en plus. L'innovation est une décision collective, celle de construire les avantages compétitifs futurs des entreprises françaises. Je retiens, madame la rapporteure pour avis, l'idée qu'il faut préciser certains éléments de choix de nos dossiers. J'entends également les remarques relatives à la valorisation sociale et à la filière agricole. Je serai ravie d'en discuter avec vous.
Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes LaREM, MODEM et LT.
J'appelle les crédits de la mission « Conseil et contrôle de l'État », inscrits à l'état B.
Sur ces crédits, je suis saisie de plusieurs amendements.
La parole est à Mme Marie-Noëlle Battistel, pour soutenir l'amendement no 263 .
Vous exprimez la préoccupation louable, que je partage, de garantir à la Cour nationale du droit d'asile les moyens d'un bon fonctionnement. Or il me semble que votre amendement est déjà largement satisfait par la programmation des crédits et des emplois pour 2019, puisque le projet de loi de finances prévoit d'affecter à la Cour 129 des 132 emplois créés au bénéfice des juridictions administratives, moyennant quoi les effectifs de la CNDA vont passer de 456 à 548 équivalents temps plein. En outre, la Cour bénéficiera d'un renforcement de ses crédits de 30,04 % par rapport à 2018.
C'est parce que nous partageons le souci louable de renforcer les effectifs de la CNDA que nous l'avons déjà prévu dans le projet de loi de finances pour 2019. Cela étant dit, il me semble qu'il est de bonne politique d'adapter les ressources d'un organisme à sa charge effective de travail. Il est vrai que la CNDA a rencontré des difficultés au cours des années 2017 et 2018, du fait de la hausse des flux de demandeurs d'asile et de l'augmentation du nombre de recours formés à l'encontre des décisions de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides – OFPRA – , puisque plus de 80 % des décisions de l'OFPRA font l'objet d'un recours auprès de la CNDA. Néanmoins, lorsque nous les avons auditionnés, les responsables de la CNDA nous ont indiqué que les effets de la crise migratoire survenue en 2015 s'estompent et qu'ils tablaient sur une baisse du nombre de réfugiés. Dès lors, je ne crois pas nécessaire d'aller au-delà de l'effort très important qui a été fait dans le cadre de ce projet de loi de finances, surtout si cela doit se faire au détriment des juridictions financières.
Je vous invite donc à retirer votre amendement. À défaut, j'émettrai un avis défavorable.
Je suis un peu moins optimiste que vous, monsieur le rapporteur spécial, sur l'évolution du nombre de dossiers à traiter et sur le nombre d'équivalents temps plein que vous allez attribuer à la CNDA au travers de ce budget. Il nous semblait nécessaire d'aller encore plus loin, notamment parce que la loi relative à l'asile et à l'immigration, qui impose des délais plus courts, va mettre les personnels sous pression. C'est la raison pour laquelle nous ne retirerons pas notre amendement.
Il est vrai que la CNDA doit faire face à un nombre important de demandes et de recours et qu'elle doit en outre répondre à la volonté du législateur de réduire les délais de jugement, désormais fixés à cinq mois pour les procédures ordinaires et à cinq semaines pour les procédures accélérées.
Néanmoins, comme je l'ai déjà indiqué, cinq chambres nouvelles vont être créées en 2019 et, d'ici au mois de mars prochain, la Cour pourra compter sur le renfort de quatre-vingt-dix-huit rapporteurs supplémentaires, soit une augmentation de 50 % de sa capacité de jugement. La CNDA se voit également attribuer une enveloppe de près de 7 millions d'euros au titre des frais de justice, ce qui représente une hausse de près de 47 % par rapport à l'an passé. En parallèle, la cour doit pouvoir bénéficier de surfaces supplémentaires correspondant à l'arrivée de nouveaux agents, ce qui sera le cas à l'horizon 2024. Ce bâtiment hébergera également le tribunal administratif de Montreuil, qui occupe actuellement des locaux en location. En attendant la mise à disposition de ces locaux, il a été décidé de louer 3 300 mètres carrés supplémentaires.
J'ajoute enfin, puisque vous proposez d'affecter les crédits d'un certain nombre de missions à la CNDA, que les juridictions financières que vous comptez mettre à contribution à hauteur de 6 millions d'euros au travers de cet amendement, réalisent déjà d'importants efforts dans un contexte d'élargissement de leur mission. Une telle ponction mettrait en danger leur capacité d'intervention, comme un certain nombre d'orateurs l'ont rappelé.
Pour toutes ces raisons, le Gouvernement émet un avis défavorable sur cet amendement.
L'amendement no 263 n'est pas adopté.
La parole est à Mme Emmanuelle Ménard, pour soutenir l'amendement no 192 .
Mon amendement consiste à transférer 3 785 000 euros du programme 126, « Conseil économique, social et environnemental », vers le programme 165, « Conseil d'État et autres juridictions administratives ».
Pourquoi proposer un tel transfert ? Parce que tout le monde se demande à quoi sert le Conseil économique, social et environnemental. Il sert essentiellement à recaser les amis, en attendant que le paysage politique leur soit plus favorable. Il joue essentiellement le rôle de « plan social pour les recalés du suffrage universel », pour reprendre les mots de François Hollande. Tout cela finit par coûter très cher et, alors que l'utilité et l'efficacité du CESE restent à prouver, je m'étonne que son budget continue d'augmenter. En 2019, il passera ainsi de 40 047 508 euros à 40 233 319 euros.
Faut-il comprendre que les économies, c'est pour ceux qui peuvent en faire, comme les retraités ou les agriculteurs, mais pas pour les institutions largement critiquées, voire inutiles ?
Rappelons à votre bon souvenir une enquête que j'ai relue avec intérêt et qui fut publiée en septembre 2017 par un journaliste de France Inter. Il y expliquait le fonctionnement du CESE, cette chambre des dépités de 233 membres « censés éclairer le Gouvernement sur des sujets de société mais dont l'avis est purement consultatif. Peut-être est-ce pour cela, poursuit-il, que chaque nouvelle promotion – tous les cinq ans – recèle son lot de politiques déchus, syndicalistes en fin de carrière, artistes en mal de succès. Ils viennent trouver là, sinon une retraite tranquille, du moins un strapontin doré en attendant des jours meilleurs. On les trouve surtout dans le contingent des quarante « PQ » – personnalités qualifiées – , directement nommées par l'Élysée. »
La lecture cet article, à laquelle je vous invite, rend incompréhensible la hausse du budget de cette institution, qui survient au moment même où le Gouvernement prévoit une réforme constitutionnelle et où le nombre de membres du CESE devrait passer de 233 à 155. C'est pourquoi je propose ce transfert de crédits.
Madame Ménard, vous présentez une série d'amendements par lesquels vous tentez de retirer 3,79 millions au CESE pour les porter sur d'autres lignes budgétaires. Je le dis d'emblée, je serai défavorable à tous ces amendements.
Il faudrait peut-être attendre la révision constitutionnelle qui donnera de nouvelles prérogatives au CESE pour connaître précisément la teneur de ses missions et y adapter ensuite les ressources budgétaires. Il me semble préférable de procéder ainsi. Vous mettez la charrue avant les boeufs. Il est nécessaire d'affecter avec cohérence les budgets aux missions et aux programmes. Or, d'emblée, vous voulez retirer des crédits au CESE avant même de connaître ses nouvelles prérogatives.
Par conséquent, je ne saurais être favorable à cet amendement, d'autant plus que le Conseil a engagé une démarche importante pour rationaliser ses dépenses budgétaires. Aujourd'hui, il satisfait l'ensemble des missions qui lui sont confiées, dans l'attente de celles qui lui seront données à la suite de la réforme constitutionnelle. Ce n'est qu'à ce moment-là, je le répète, que nous pourrons adapter les lignes budgétaires.
Vous avez déposé sept amendements, madame Ménard, qui tendent, à chaque fois, à retirer 3,79 millions d'euros au CESE, soit un total de 26 millions d'euros. Sachant que son budget total est de 40 millions, on comprend vite le sort que vous réservez à cette institution.
Permettez-moi, monsieur le président, de répondre plus longuement à cet amendement qu'aux suivants, qui procèdent de la même logique.
Tout d'abord, s'agissant du budget des juridictions administratives, la maîtrise des délais de jugement, alliée au maintien de la qualité des décisions rendues, demeure la préoccupation majeure de ces juridictions, dont les délais moyens de jugement s'améliorent. Par ailleurs, la réduction du stock des dossiers en instance depuis plus de deux ans, tant en première instance qu'en appel ou en cassation, atteste de l'assainissement de la situation. Il n'en reste pas moins que, sur une longue période, le rythme de croissance annuel s'établit à 6 %. Plusieurs aménagements des règles de procédure, ainsi que le développement des modes de règlement alternatif des litiges devraient permettre de faire face à cette hausse.
Si l'essentiel des hausses de crédit au programme 165 concerne la CNDA, le Gouvernement a également souhaité soutenir les autres juridictions administratives. Dix créations d'emplois permettront de renforcer les effectifs des juridictions administratives. La garde des Sceaux a également annoncé, hier, qu'une neuvième cour administrative d'appel devrait voir le jour en région Occitanie afin, notamment, de décharger les cours de Bordeaux et de Marseille, qui sont les plus chargées.
J'en profite pour saluer les efforts réalisés par les juridictions administratives pour contenir leurs dépenses de fonctionnement, notamment grâce au développement de l'application Télérecours, qui représente une économie de 9 millions d'euros depuis sa création.
Le Gouvernement considère, par conséquent, que le budget est calibré aux besoins des juridictions administratives.
Concernant le budget du CESE, il s'élève pour 2019 à un peu plus de 40 millions d'euros, en très légère hausse, environ 186 000 euros, par rapport à l'an passé.
Compte tenu du calendrier de l'examen de la réforme constitutionnelle, comme l'a rappelé le rapporteur spécial, et d'adoption des lois organiques qui seront nécessaires pour mettre en oeuvre les modifications intervenues, la dotation du CESE pour 2019 ne s'écarte pas fondamentalement de sa trajectoire antérieure et doit lui permettre, à travers les expérimentations annoncées par le président Patrick Bernasconi, de préfigurer ces transformations.
Ces dernières années, le CESE a consenti des efforts importants, qu'il s'agisse de la mise en place d'un nouveau règlement budgétaire et comptable, conformément aux recommandations de la Cour des comptes, de l'assainissement de la situation de la caisse des retraites, du développement de ressources propres qui financent l'entretien du palais d'Iéna. Nous devons saluer ces efforts.
Avis défavorable.
Monsieur le ministre, vous parlez de rationalisation, de réforme constitutionnelle, de nouvelles attributions accordées au CESE mais la moindre des choses aurait été de ne pas augmenter du tout le budget de cette institution. Or, vous louez ses efforts pour verrouiller les dépenses alors qu'elles sont en hausse perpétuelle, et que la légitimité de cette chambre est fortement remise en cause. Ce n'est pas moi qui le dis, mais cette enquête menée par les journalistes. Je vous invite d'ailleurs à la lire car elle est très approfondie et nous apporte des informations très instructives quant au taux d'absentéisme des conseillers, aux salaires et aux indemnités versés. C'est un gros système qui tourne à vide, très peu saisi pour avis par le Parlement, à tel point que le CESE en est réduit à s'autosaisir.
J'ai bien entendu vos arguments mais je ne comprends pas que vous préfériez laisser la situation en l'état dans l'attente de la réforme constitutionnelle et allouer pendant un an encore à cette institution un budget très important et en augmentation, alors que des efforts considérables sont demandés aux Français, à commencer par les retraités.
L'amendement no 192 n'est pas adopté.
La parole est à Mme Emmanuelle Ménard, pour soutenir l'amendement no 197 .
L'amendement no 197 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
La parole est à Mme Emmanuelle Ménard, pour soutenir l'amendement no 203 .
L'amendement no 203 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
La parole est à Mme Emmanuelle Ménard, pour soutenir l'amendement no 207 .
Quand je lis dans le « bleu » que « le CESE s'inscrit résolument dans une démarche de performance globale et de meilleure utilisation des deniers publics dans un contexte de nécessaire redressement des finances publiques », j'en suis un peu attristée, je l'avoue. Cela ne suffit pas ! La montagne des beaux discours accouche souvent d'une souris et l'on prend vraiment les Français pour de perpétuelles vaches à lait. En 2017, le taux de prélèvement obligatoire a atteint 45,3 % du PIB. Les Français doivent se serrer la ceinture, mais on s'aperçoit que tout le monde n'est pas logé à la même enseigne. Dans cette République où le mot « égalité » figure partout, la réalité nous rappelle l'inégalité de traitement entre les Français. Car le budget du CESE n'est pas strictement identique à celui de l'année dernière, comme je l'ai rappelé. Pour 2019, il sera augmenté de 185 811 euros.
Est-ce à dire que les avantages qui fleurissaient de ci de là n'ont pas vraiment été réduits, ni contrôlés ? Je pense au salaire moyen des agents, qui avoisine les 4 000 euros par mois, aux 150 000 euros annuels attribués au secrétaire général, au fait que certains agents puissent ne travailler, en moyenne, qu'un jour sur deux sur une année, aux pensions diverses et variées versées aux anciens du CESE, aux indemnités de frais, pour un taux d'absentéisme largement supérieur aux 30 % ou 35 % officiels.
Vous avez beau insister sur les efforts consentis par le CESE, son utilité future et son caractère indispensable, à 40 millions d'euros par an, le contribuable peut considérer que le coût de cette planque destinée aux « recalés du suffrage universel » est excessif, surtout s'agissant d'une institution dont beaucoup cherchent l'utilité et la légitimité.
L'amendement no 207 , repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.
Cet amendement d'appel tend à supprimer les dépenses de l'action « Communication et international » du programme « Conseil économique, social et environnemental » pour les dédier à une fin réellement utile et justifiée : un fonds pour l'accessibilité.
En effet, si le CESE commence enfin à jouer son rôle de soutien et d'expertise auprès de l'Assemblée nationale et du Gouvernement, ses dépenses dédiées à la communication et à l'international nous paraissent toujours aussi peu justifiées que l'an dernier. Nous proposons par conséquent de les supprimer pour les réattribuer au responsable du programme 165, à savoir le vice-président du Conseil d'État, afin de créer un fonds destiné à une cause prioritaire, conforme à l'intérêt général, l'accessibilité des personnes en situation de handicap et des personnes âgées aux services publics, aux transports, à l'éducation, au logement, aux soins, aux services et aux différentes offres médico-sociales.
Cette mesure nous permettrait par ailleurs de respecter enfin la loi de 2005 relative à l'accessibilité.
Vous proposez de transférer le budget dédié aux dépenses de communication du CESE vers le Conseil d'État pour développer l'accessibilité.
Ces dépenses de communication participent à l'influence de la société civile dans le débat public et la définition des orientations politiques de l'État. Il ne me semble donc pas opportun de les supprimer. Par ailleurs, parmi les représentants du Conseil d'État que j'ai auditionnés, personne ne m'a signalé de besoins particuliers en ce qui concerne l'accessibilité.
Avis défavorable.
Sur tous les bancs de cette assemblée, nous partageons le souci de renforcer l'accessibilité pour nous mettre en conformité avec la loi de 2005, mais nous comprenons mal la logique de votre amendement.
Tout d'abord, pourquoi confier au Conseil d'État, dont ce n'est ni la mission ni le champ d'expertise, le soin de gérer un fonds consacré à l'accessibilité ? Cela n'a pas de sens.
Vous voulez redéployer 1,4 million d'euros mais rappelons que chaque année, le budget des ministères – hors collectivités – consacre près de 10 milliards à l'accessibilité. Nous devons aussi saluer les efforts consentis par les collectivités locales dans ce domaine.
Enfin, le CESE s'est montré exemplaire en la matière puisqu'il a inscrit, en 2013, dans son programme pluriannuel d'investissements, une série d'opérations pour rendre ses locaux accessibles aux personnes à mobilité réduite et offrir un accompagnement adapté à toutes les personnes en situation de handicap.
Sur une période de trois ans, le coût de la mise en accessibilité du palais d'Iéna a été estimé à près de 2 millions d'euros, et les travaux devraient démarrer au premier trimestre 2019, financés par le budget propre du CESE.
Avis défavorable.
L'amendement no 390 n'est pas adopté.
Cet amendement d'appel tend à supprimer le Haut Conseil des finances publiques et de mobiliser ses crédits à une fin réellement utile et justifiée pour 2019 : les salariés et ex-salariés de GM& S.
Ce Haut Conseil est une institution antisociale qui a été créée en 2012 en application du second paragraphe de l'article 3 du traité sur la stabilité, la coordination et la gouvernance au sein de l'Union économique et monétaire.
Son rôle est de donner un avis sur le respect par la France des principes d'orthodoxie budgétaire. Mais comme, ici, la plupart des députés sont acquis à ces principes, un avis supplémentaire sur le sujet semble inutile.
L'adoption de cet amendement permettrait d'affecter 428 189 euros à des entreprises en difficulté, en l'occurrence, en 2019, à la reprise avec maintien des emplois de l'entreprise GM& S. Il s'agit de transférer cette somme sur le programme 126 « Conseil économique, social et environnemental », le CESE pouvant ensuite la réattribuer à l'entreprise.
Vous proposez de priver de ses ressources le Haut Conseil des finances publiques : or la mission de cette institution, qui est d'éclairer le Parlement et le Gouvernement sur l'évolution des finances publiques, ne revêt pas par essence un caractère antisocial. Le Haut Conseil ne formule que des avis qu'il appartient aux pouvoirs publics de suivre ou de ne pas suivre. Dans ce domaine, le Parlement est souverain.
Par ailleurs, je ne pense pas que la vocation du Conseil économique, social et environnemental soit de remplir les fonctions d'un fonds de restructuration ou d'aide aux entreprises. Votre démarche est certes louable, et nous invite à considérer la situation de l'entreprise que vous avez évoquée, je vous demande de bien vouloir retirer cet amendement d'appel, faute de quoi j'émettrai sur celui-ci un avis défavorable.
Madame la députée, dans un mouvement inverse de celui que vous nous avez auparavant proposé, vous nous proposez de doter maintenant le CESE de moyens complémentaires pour régler la situation de GM& S, équipementier automobile de la Souterraine, qui préoccupe le Gouvernement.
Je rappelle toutefois qu'effectuer des missions de ce genre n'entre pas dans les attributions du CESE. Dans cet amendement comme dans le précédent, il y a, me semble-t-il, une confusion des genres. Chaque conseil a son rôle : ce n'est pas celui du CESE d'intervenir en faveur d'un équipementier automobile, même si la préoccupation, comme le rapporteur spécial l'a souligné, paraît légitime.
Quant au Haut Conseil, il s'agit d'un organisme indépendant dont la mission est, je le rappelle, de rendre un avis sur les prévisions macroéconomiques sur lesquelles sont construits les projets de textes financiers, d'apprécier la cohérence des objectifs annuels présentés par le Gouvernement avec la trajectoire de solde structurel et d'identifier ex post les écarts constatés. Cette institution apporte donc au Gouvernement des informations précieuses. Elle représente, de plus, un petit programme, dont le montant des crédits est faible et les évolutions peu significatives. Avis défavorable.
L'amendement no 391 n'est pas adopté.
Les crédits de la mission « Conseil et contrôle de l'État » sont adoptés.
J'appelle les crédits de la mission « Pouvoirs publics », inscrits à l'état B.
Sur ces crédits, je suis saisi de plusieurs amendements.
La parole est à Mme Emmanuelle Ménard, pour soutenir l'amendement no 214 .
Avant 2018, le budget accordé à la présidence de la République s'élevait à 100 millions d'euros. Cette enveloppe est habituellement ventilée en quatre grandes catégories : les dépenses de personnel, les dépenses de fonctionnement, les déplacements présidentiels et les investissements.
Depuis l'année dernière, le budget a augmenté de 3 millions pour répondre aux enjeux importants en termes de sécurité, comme l'avait souligné Christophe Castaner, à l'époque porte-parole du Gouvernement. Il fallait débloquer de nouveaux fonds pour améliorer la sécurité du Président de la République et celle des systèmes informatiques.
Si la sécurité du Président est une priorité pour assurer la stabilité de nos institutions, toutefois, à la lumière des différents scandales des derniers mois, les Français sont en droit de se demander si, avant d'augmenter les crédits, il ne serait pas possible de chercher l'argent dans l'enveloppe existante, dont l'utilisation peut laisser perplexe. Déjà, en un an et demi, quelques scandales ont mis à mal la promesse d'Emmanuel Macron d'un nouveau monde et celle d'en finir avec les tambouilles politiciennes : on n'oublie pas facilement l'affaire Benalla et les nombreux avantages en nature accordés à ce dernier, comme l'ont rappelé d'autres collègues avant moi.
Exclamations sur les bancs du groupe LaREM.
C'est la vérité.
Il me semble donc difficile pour le Président de la République de demander aux retraités de réaliser des économies, sans s'appliquer le même principe, d'autant qu'il dépense l'argent des Français d'une façon parfois étrange. C'est la raison pour laquelle cet amendement vise à revenir à l'enveloppe de 100 millions d'euros initialement accordée au budget de la présidence.
La parole est à Mme Lise Magnier, rapporteure spéciale, pour donner l'avis de la commission.
Madame Ménard, vous proposez de diminuer de 3 millions d'euros la dotation de la présidence de la République, la ramenant ainsi à 100 millions, à savoir à son niveau effectif de 2017. Toutefois, l'année dernière, Philippe Vigier, alors rapporteur spécial de la mission « Pouvoirs publics », a longuement expliqué les raisons de la hausse de 3 millions de la dotation. Je les ai également rappelées cette année, la justifiant par la nécessité de renforcer la sécurité de la présidence de la République et non du seul Président de la République, notamment par le renforcement du groupe de sécurité de la présidence de la République, le GSPR, à hauteur de quatorze équivalents temps plein, et par des investissements en matière de sécurité physique et informatique. Or il est nécessaire de reconduire ces dépenses d'année en année : nous n'allons pas supprimer les quatorze ETP créés l'année dernière.
La commission des finances n'a pas examiné cet amendement. À titre personnel, j'émets sur celui-ci un avis défavorable.
Madame la députée, vous avez déclaré ne pas vouloir que la dotation de la présidence de la République augmente d'une année sur l'autre, mais les crédits pour 2019 demeurent stables par rapport à 2018. Comme l'a rappelé la rapporteure spéciale, l'augmentation a été votée en 2017 pour l'exercice 2018, pour des raisons de sécurité dont vous avez vous-même rappelé la légitimité.
Il ne s'agit évidemment pas de baisser la garde : nous ne diminuerons pas, pour l'année prochaine, les effectifs du GSPR qui ont été augmentés de quatorze équivalents temps plein l'an passé, ou les effectifs chargés des télécommunications et de l'informatique, renforcés à la suite des recommandations de l'ANSSI.
J'ajoute que 82 % des personnels de la présidence sont mis à disposition par d'autres administrations et que les dépenses de personnel évoluent sous l'effet d'un glissement vieillesse technicité positif sur lequel la présidence n'a aucune prise. Dans le même temps, les dépenses de fonctionnement se stabilisent à 15 millions d'euros, un montant identique à celui de 2018, qui était légèrement en hausse du fait du renforcement des dispositifs de sécurité.
La présidence de la République a pu contenir cette évolution grâce à la négociation de marchés importants – la billetterie aérienne, la blanchisserie, les impressions ou la meilleure gestion des abonnements à la presse. Ces efforts se poursuivent cette année grâce aux économies de gestion réalisées lors du renouvellement de la solution d'impression.
Les dépenses de déplacement augmentent cette année de 700 000 euros, du fait de la densité de l'agenda international, notamment de la présidence du G7, ainsi que d'une mesure technique qui représente 300 000 euros : l'actualisation du barème des tarifs des avions à usage gouvernemental. Les économies se poursuivront en 2019 : une meilleure anticipation des déplacements, ainsi que la création d'un pôle opérationnel dans le cadre du plan de transformation des services de la présidence devraient permettre un pilotage encore plus précis du budget consacré aux déplacements.
De façon générale, l'instauration d'un plan de transformation devrait non seulement faciliter l'exercice d'une mission en décloisonnant les services et en optimisant la communication interne, mais également créer des économies de gestion en mutualisant les effectifs et les équipements. C'est donc un avis défavorable qu'émet le Gouvernement.
L'amendement no 214 n'est pas adopté.
La parole est à Mme Marie-Noëlle Battistel, pour soutenir l'amendement no 260 .
Cet amendement vise à abonder les crédits des deux assemblées parlementaires, afin de mieux financer leurs missions d'évaluation des politiques publiques, qui sont de leur compétence et auxquelles nous sommes très attachés, comme je l'ai déjà souligné lors de mon intervention en tant que porte-parole de groupe.
Cet amendement vise à diminuer la dotation de la présidence de la République de 6 millions au profit des deux assemblées parlementaires. Je ne reviendrai pas sur la nécessité de maintenir la dotation à 103 millions d'euros. Votre amendement ramènerait donc cette dotation à 97 millions d'euros, ce qui aurait des conséquences néfastes en matière de fonctionnement courant de la présidence de la République.
Par ailleurs, les deux assemblées parlementaires ne se sont pas encore prononcées sur la forme que prendra le renforcement de leurs moyens d'évaluation et de contrôle. En tout état de cause, l'éventuelle création d'une agence parlementaire d'évaluation budgétaire sera financée principalement par des redéploiements.
Je rappelle que le format proposé par nos collègues Jean-Noël Barrot et Jean-François Eliaou pour cette agence serait d'une quarantaine de personnes, pour un coût annuel estimé à 5 millions d'euros, alors qu'à l'heure actuelle le comité d'évaluation et de contrôle de notre assemblée est assisté de cinq administrateurs, un administrateur-adjoint et deux assistants de direction et de gestion. Le coût de cette structure est donc bien supérieur aux 100 000 euros que vous avez mentionnés dans l'exposé sommaire de votre amendement.
La section de fonctionnement du budget de l'Assemblée prévoit pour 2019 d'ouvrir des crédits à hauteur de 350 000 euros pour financer les études et les expertises de notre CEC. Votre amendement est donc satisfait pour cette année. Il est prématuré de prévoir un budget pour une agence d'évaluation qui n'est pas encore créée. C'est la raison pour laquelle je vous demande de retirer l'amendement. Sinon, avis défavorable.
J'aurais pu formuler le même jugement sur l'amendement précédent : vous me permettrez d'être surpris par cet amendement, ainsi que par les amendements nos 517 et 396 . Je rappelle que l'article 7 de la loi organique relative aux lois de finances prévoit une dérogation à la règle de présentation des crédits par programmes et missions concourant à une politique publique. La LOLF dispose ainsi qu'une mission spécifique regroupe les crédits des pouvoirs publics, chacun d'entre eux faisant l'objet d'une ou de plusieurs dotations.
Comme il est possible de le lire dans le rapport de la commission spéciale de l'Assemblée nationale sur la LOLF, cette disposition a pour objet de respecter les principes de la séparation des pouvoirs et de l'autonomie des assemblées parlementaires, qui sont garantis par la Constitution. Je vous rappelle que, dans sa décision no 2001-456, le Conseil constitutionnel a rappelé que « la règle selon laquelle les pouvoirs publics constitutionnels déterminent eux-mêmes les crédits nécessaires à leur fonctionnement [… ] est en effet inhérente au principe de leur autonomie financière qui garantit la séparation des pouvoirs ».
Il a assorti d'une réserve d'interprétation l'article 115 de la loi de finances pour 2002, qui évoquait des dotations demandées par les pouvoirs publics, en explicitant le fait que l'emploi de ce terme ne devait pas porter atteinte au principe d' « autonomie financière » des pouvoirs publics. C'est d'ailleurs sur ce fondement que le Gouvernement s'abstient toujours du moindre commentaire sur le budget des assemblées.
C'est donc avec regret qu'il quitte sa réserve pour émettre un avis défavorable sur cet amendement qui porte atteinte à l'autonomie constitutionnelle des pouvoirs publics.
L'amendement no 260 n'est pas adopté.
La parole est à Mme Christine Pires Beaune, pour soutenir l'amendement no 517 .
Bien qu'ayant entendu vos remarques, monsieur le ministre, je le défendrai tout de même, d'autant que, lorsque le Président de la République veut diminuer le nombre des parlementaires et donc diminuer le budget de l'Assemblée, il porte atteinte à la séparation des pouvoirs.
Cet amendement concerne le budget de la présidence de la République. Des efforts sont demandés aux Français, notamment aux retraités et aux plus modestes, à la fonction publique, aux collectivités territoriales : dans un contexte de redressement des comptes publics, rien de plus normal. Toutefois, un Français semble s'exonérer de l'effort collectif : le Président de la République. Si je compare l'actuel quinquennat avec celui du président Hollande, je rappelle que celui-ci, à son arrivée, avait baissé de 8 % le budget de l'Élysée, alors que l'actuel Président a décidé de l'augmenter l'année dernière. Or il se trouve que le budget de l'Élysée est un des plus élevés des chefs d'État et de gouvernement des grandes puissances, puisqu'il est bien plus élevé que celui de la chancellerie allemande, qui s'élève à 41 millions, que celui du palais de Buckingham, qui s'élève à 31 millions, ou même que celui de la Maison Blanche, qui est de 55 millions. Il nous semble donc possible de revenir à un budget de 100 millions d'euros.
Il n'est évidemment pas question de baisser les dépenses de sécurité : celles-ci sont légitimes et ne doivent pas être remises en cause. Cependant, il aurait été possible de privilégier un financement en interne, par une réduction des autres postes budgétaires.
Madame la députée, les conséquences de votre amendement seraient de ramener la dotation de la présidence de la République non pas à 100 millions, comme vous l'avez affirmé, mais à 97 millions. Si le montant de 100 millions a prévalu de 2012 à 2017, je rappellerai que les rapporteurs spéciaux de la mission « Pouvoirs publics » ont considéré dès 2015 qu'il était insuffisant. Je vous rappelle également que le contexte sécuritaire a évolué depuis cette date.
Vous proposez par ailleurs d'augmenter de 6 millions d'euros la dotation destinée à La Chaîne parlementaire pour faciliter sa transformation en un modèle de média global. Je ne reviendrai pas sur l'argument développé par M. le ministre. Comme vous, madame Pires Beaune, je soutiens pleinement cette évolution, qui permettra en effet de rapprocher le Parlement des citoyens, comme je l'ai dit tout à l'heure. Lors de son audition, le nouveau président directeur général de LCP m'a d'ailleurs exposé en détail la stratégie qu'il compte développer sur trois ans. Mes chers collègues, je vous invite tous à en prendre connaissance : c'est passionnant !
Il est possible que des redéploiements de crédits soient nécessaires, étant entendu que les perspectives de mutualisation de certains moyens, notamment avec Public Sénat, sont d'ores et déjà plus étayées. Comme je l'ai déjà dit, cette nouvelle stratégie doit s'accompagner de la recherche de nouveaux partenariats avec d'autres médias et acteurs proches de l'Assemblée nationale, comme l'INA ; elle doit aussi bénéficier d'un soutien plus affirmé de notre assemblée elle-même.
Les contrats d'objectifs et de moyens des chaînes parlementaires pour la période 2019-2012 sont en cours de finalisation. Ils ne sont pas tout à fait arrêtés à ce jour. Il serait donc prématuré de prévoir, le cas échéant, une augmentation de la dotation.
La commission des finances n'a pas examiné l'amendement no 517 mais à titre personnel, je lui donne un avis défavorable.
Sans vouloir prolonger nos débats, permettez-moi de répondre à Mme Pires Beaune. Le Président de la République et le Gouvernement n'ont jamais dit qu'ils souhaitaient diminuer les crédits des assemblées. Quand bien même ils le voudraient, ils ne pourraient pas le faire, pour les raisons constitutionnelles que j'ai exposées tout à l'heure. Avis défavorable.
L'amendement no 517 n'est pas adopté.
L'amendement no 396 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
Les crédits de la mission « Pouvoirs publics » sont adoptés.
Je suis saisi d'un amendement, no 397 , portant article additionnel après l'article 77 et pouvant être rattaché à la mission « Pouvoirs publics ».
La parole est à Mme Sabine Rubin, pour le soutenir.
Comme je l'ai dit tout à l'heure, le Président de la République supporte le coût de ses déplacements privés. Cependant, les montants présentés dans le dernier rapport de la Cour des comptes ne comprennent pas la masse salariale des agents mobilisés. Ce rapport nous apprend que, dans les six mois qui ont suivi son investiture, Emmanuel Macron s'est payé des vacances pour 151 400 euros. Je le répète, il s'agit d'un montant hors masse salariale.
Par cet amendement, nous demandons « un rapport d'information sur le coût exhaustif des dépenses liées aux déplacements privés du programme "Présidence de la République", en incluant notamment la masse salariale des agents mobilisés et tout autre frais non pris en compte par la Cour des comptes dans son rapport annuel sur les comptes et la gestion des services de la présidence de la République ». Ainsi, nous aurons des informations transparentes.
Madame la députée, votre amendement appelle de ma part deux remarques.
Vous demandez un rapport gouvernemental qui analyserait les dépenses de la présidence de la République. Si je rejoins les remarques de la Cour des comptes sur la nécessité de développer des outils de comptabilité analytique afin d'améliorer la transparence des dépenses de la présidence de la République, vous comprendrez que cette demande de rapport gouvernemental me laisse assez perplexe...
Sur le fond, vous écrivez dans l'exposé sommaire de votre amendement qu'Emmanuel Macron s'est « payé » des vacances pour 151 400 euros en 2017. Or nous savons tous que la protection par la puissance publique des personnalités les plus exposées est nécessaire vingt-quatre heures sur vingt-quatre et sept jours sur sept.
S'il fallait, comme vous le suggérez dans votre amendement, que les présidents élus remboursent les frais occasionnés par leur sécurité même lorsqu'ils sont en vacances ou lorsqu'ils se déplacent à titre personnel, cela signifierait que seuls les « ultra-riches », comme vous aimez à les qualifier, seraient à même d'exercer les plus hautes fonctions de la République.
« Eh oui ! » et applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LaREM.
Cela poserait, vous en conviendrez, un petit problème pour notre démocratie.
Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes LaREM et MODEM.
Je ne sais pas si je pourrai développer une meilleure argumentation que celle de la rapporteure spéciale,...
… ou une argumentation aussi claire ! Je rappelle simplement que les déplacements privés du chef de l'État et de son épouse ne sont pas pris en charge par l'État. Un déplacement privé à bord d'un des avions de l'ETEC – l'escadron de transport, d'entraînement et de calibration de l'armée de l'air – donne lieu à l'émission d'un titre correspondant au coût du transport, que le président règle directement par chèque. Comme Mme la rapporteure spéciale l'a rappelé tout à fait excellemment, aucun organe placé sous la responsabilité du Gouvernement n'est compétent pour rendre le rapport réclamé par Mme Rubin. Cette question relève de la Cour des comptes, qui l'aborde d'ailleurs dans son rapport dès cette année. Avis défavorable.
Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes LaREM et MODEM.
Il n'y a rien d'excellent, mes chers collègues, d'autant que les propos de M. le ministre correspondent exactement à ce que j'ai dit : M. le Président de la République supporte le coût de ses déplacements privés. Il n'y a aucun souci sur ce point. Relisez l'exposé sommaire de mon amendement : nous n'avons pas dit que c'était normal ou anormal. En revanche, nous demandons plus de transparence sur ces coûts car les montants communiqués n'incluent pas la masse salariale des agents mobilisés par ces déplacements. C'est tout !
Je n'ai pas parlé de « président des riches ».
Exclamations sur plusieurs bancs du groupe LaREM.
J'ai dit que le Président de la République payait bien sûr ses déplacements en vacances. On voit ce que coûte sa sécurité, mais on ne voit pas bien ce que cela représente en termes de masse salariale. Nous demandons tout simplement un peu plus de transparence. Il n'y a là rien d'excessif !
L'amendement no 397 n'est pas adopté.
J'appelle les crédits de la mission « Direction de l'action du Gouvernement », inscrits à l'état B.
Sur ces crédits, je suis saisi de plusieurs amendements.
La parole est à Mme Emmanuelle Ménard, pour soutenir l'amendement no 213 .
Il s'agit de supprimer 2 066 954 euros du programme 129 « Coordination du travail gouvernemental », plus précisément de son action no 1.
Les perdants du présent projet de loi de finances sont nombreux : les retraités, avec l'augmentation de la CSG pour 60 % d'entre eux et une revalorisation des pensions de 0,3 %, donc inférieure à l'inflation ; les agriculteurs, avec la modification du dispositif relatif aux travailleurs occasionnels demandeurs d'emploi dit « TODE » ; les collectivités territoriales, avec une baisse de budget supplémentaire pour les chambres de commerce et d'industrie, la réduction drastique du nombre de contrats aidés et un quasi-gel des dotations ; les automobilistes ; et j'en passe… Malgré cela, le chef de l'exécutif n'a pas pris la peine de montrer l'exemple en faisant lui aussi des économies : on constate même que les crédits de paiement ouverts augmentent de plus de 2 millions d'euros entre 2018 et 2019. Je voudrais lui proposer de réduire cette somme.
Je vois par exemple que le Premier ministre peut accorder des subventions aux fondations et associations oeuvrant en faveur des droits de l'homme ou au développement de la citoyenneté. Que le Premier ministre et son cabinet souhaitent aider ces organismes, pourquoi pas, mais à quel titre ? En 2017, lors de l'examen du projet de loi pour la confiance dans la vie politique, le Gouvernement avait beaucoup insisté pour supprimer la réserve parlementaire, sous prétexte que les parlementaires devaient se concentrer sur l'exercice de leurs missions – voter la loi, contrôler le Gouvernement et évaluer les politiques publiques. Mais ce raisonnement ne pourrait-il pas s'appliquer aussi au Premier ministre ? Sa fonction première est d'être le chef de l'exécutif et non un distributeur de subventions. « Faites ce que je dis mais ne faites pas ce que je fais ! »
En tout cas, un effort budgétaire serait bienvenu de la part de ceux qui sont à la tête du Gouvernement. C'est pourquoi je propose cette suppression de crédits.
Madame Ménard, vous proposez de supprimer 2 millions d'euros – j'arrondis le chiffre – sur le programme 129. Or ce programme est essentiellement constitué de dépenses de personnel, à hauteur de 62,8 millions d'euros. Ces dépenses augmentent d'ailleurs de 1,8 million d'euros, soit un peu moins de 2 millions d'euros, entre 2018 et 2019.
Ces crédits correspondent aux dépenses du cabinet du Premier ministre et des secrétariats d'État qui lui sont rattachés, du secrétariat général du Gouvernement, du service d'information du Gouvernement et de diverses autres structures rattachées aux services du Premier ministre, notamment le comité d'indemnisation des victimes des essais nucléaires – il existe énormément d'organismes de ce genre. Je remarque que le périmètre d'intervention des ministères a changé depuis le dernier remaniement : le cabinet de M. Mounir Mahjoubi est sorti du périmètre des services du Premier ministre alors que celui de M. le porte-parole du Gouvernement y est entré. Il serait d'ailleurs intéressant de connaître le coût du secrétariat d'État du porte-parole.
La commission des finances n'a pas examiné cet amendement. Cependant, à titre personnel, je lui donne un avis défavorable, parce qu'il porte essentiellement sur des dépenses de personnel et sur l'indemnisation des victimes des essais nucléaires.
Contrairement à ce que vous dites, madame Ménard, le Gouvernement donne l'exemple.
Je compléterai d'abord les propos de Mme la rapporteure spéciale sur le périmètre. À structure constante, les crédits de l'action no 1 augmentent d'environ 500 000 euros, uniquement en raison de l'évolution naturelle de la masse salariale des agents publics – c'est ce qu'on appelle le GVT, glissement vieillesse technicité, que l'on retrouve d'ailleurs sur toutes les actions du programme. Le reste de l'augmentation des crédits entre 2018 et 2019, soit 1,5 million d'euros environ, résulte de mesures de transfert : en effet, les emplois de la délégation interministérielle aux Jeux olympiques et paralympiques et de la délégation interministérielle à la stratégie nationale pour l'autisme ont été pris en charge sur le programme 129. Je ne reviendrai pas sur les explications données par Mme Dalloz sur les autres missions financées par ce programme.
L'augmentation des crédits de l'action no 1 est donc due, pour l'essentiel, à des changements de périmètre et à des mécanismes d'augmentation automatique des rémunérations. Il n'y a pas lieu de chercher, derrière cette augmentation, la moindre volonté du Gouvernement d'augmenter les crédits consacrés aux cabinets ministériels. D'ailleurs, comme vous le savez, les effectifs et les rémunérations versées aux membres des cabinets ministériels sont aujourd'hui strictement maîtrisés et limités, dans le respect du décret du Président de la République du 18 mai 2017. Avis défavorable.
L'amendement no 213 n'est pas adopté.
La parole est à Mme Marie-Noëlle Battistel, pour soutenir l'amendement no 261 .
Il vise à augmenter de 2 millions d'euros le budget du Défenseur des droits, de façon à permettre à cette autorité d'exercer les importantes missions qui lui sont confiées. Cela apparaît d'autant plus nécessaire que le nombre de saisines a augmenté de 17,3 % en deux ans.
Le Défenseur des droits bénéficiera en 2019 de deux équivalents temps pleins supplémentaires : c'est l'une des rares autorités administratives indépendantes – avec une autre dont nous parlerons plus tard – qui verra sa masse salariale augmenter.
Permettez-moi de souligner la bonne gestion des services du Défenseur des droits. Les demandes adressées au Défenseur des droits sont en constante progression ; …
… pour autant, son budget n'a pas évolué. Je salue donc la gestion rigoureuse du Défenseur des droits, M. Toubon. Des économies ont été réalisées grâce à l'intégration du centre de gouvernement Ségur-Fontenoy, qui a permis une mutualisation des fonctions support et de la documentation avec d'autres services. Attendons donc de voir si les deux équivalents temps pleins supplémentaires permettront de répondre au surcroît de travail et à l'organisation nouvelle du Défenseur des droits suite à l'implantation sur le site Ségur-Fontenoy avant de décider l'affectation de crédits supplémentaires. La commission n'a pas examiné cet amendement mais, à titre personnel, j'y suis défavorable.
Madame la députée, le Gouvernement est défavorable à cet amendement et je reprendrai à cet égard une partie des éléments de réponse apportés par Mme la rapporteure spéciale.
La dotation du Défenseur des droits a été reconduite en 2019 au niveau atteint en 2018. Cette stabilisation des moyens a d'ailleurs été consacrée avec l'accord du président Toubon, dont on doit saluer le travail de rationalisation.
Cette année, le défenseur des droits bénéficie en outre de deux créations d'emplois dans le cadre de l'expérimentation de médiations préalables obligatoires. À l'inverse, les crédits de fonctionnement courant des directions départementales interministérielles sur le programme 333, sur lequel vous proposez de prélever, sont déjà en diminution globale de 500 000 euros par rapport à la loi de finances initiale pour 2018, en structure constante. Durcir encore cette trajectoire se révélerait très délicat, alors même qu'un effort conséquent sur leurs moyens de fonctionnement a déjà été demandé aux DDI au cours des dernières années.
La présence de l'État dans les territoires, à laquelle vous-même souscrivez et que vous réclamez souvent, est donc fondamentale et votre amendement la fragiliserait.
L'amendement no 261 n'est pas adopté.
La parole est à Mme Marie-Noëlle Battistel, pour soutenir l'amendement no 262 .
Cet amendement tend à augmenter le budget de la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique, compte tenu de l'élargissement de ses missions, qui n'ont cessé d'évoluer.
Je rappelle que la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique a été créée en 2013, à la suite d'une affaire bien connue : l'affaire Cahuzac. C'est exactement à cette époque, en effet, qu'est née cette autorité administrative indépendante, qui est depuis lors montée en puissance, car elle s'est vu confier de plus en plus de missions. Le registre des personnes suivies et contrôlées aujourd'hui s'est étendu à la fonction publique – à tout le monde. Depuis l'année dernière, sont désormais également concernés les représentants d'intérêts, dont le registre requiert un travail supplémentaire.
Dans le budget 2019 figurent cependant aussi deux équivalents temps plein supplémentaires alloués à cette autorité. En outre, selon M. Nadal, président de la HATVP, faute de nouveaux locaux, aucune progression n'est possible. Cet organisme étant confiné dans des locaux trop exigus pour l'ensemble de son personnel, les deux équivalents temps plein ouverts dans le budget 2019 me semblent suffisants. La commission n'a pas examiné cet amendement mais, à titre personnel, j'y suis défavorable.
Madame Battistel, le Gouvernement est défavorable à cet amendement, pour les raisons évoquées par Mme la rapporteure spéciale. La dotation en crédits de fonctionnement de la Haute Autorité a été reconduite en 2009 à hauteur de celle de 2018. Cette autorité bénéficie de la création de deux emplois – j'en ai d'ailleurs discuté avec le président Nadal, que j'ai rencontré avant de vous présenter ces éléments – , ce qui confirme les efforts accomplis ces dernières années pour accompagner l'accroissement de ses missions.
Je rappellerai quelques chiffres : depuis sa création, l'effectif de la Haute Autorité est passé de 20 à 51 équivalents temps plein. Il faut reconnaître que ses missions ont été élargies, mais je ne connais pas beaucoup de structures qui aient bénéficié d'un accroissement en postes aussi significatif.
Par ailleurs, vous proposez de prélever sur des crédits destinés à assurer la présence de l'État dans les territoires, qui relève aussi de la cohérence de l'action du Gouvernement. Or, je crois que vous partagez aussi ce souhait de cohérence. À défaut de retrait, avis défavorable.
L'amendement no 262 n'est pas adopté.
Je présenterai d'abord la philosophie générale de cet amendement et de ceux qui suivent, après quoi je reprendrai chacun d'entre eux dans le détail.
Ces amendements ont pour objet d'opérer un transfert de fonds depuis l'action 16 du programme 129, « Modernisation de l'action publique », devenue « Coordination de la politique numérique ». Ils visent à prendre de l'argent de ce fonds pour le verser au programme 308, c'est-à-dire, à chaque fois, à des autorités que nous souhaitons renforcer. Malgré ce qui est dit, en effet, le budget, malgré une augmentation faciale de 1 million d'euros, est en baisse de 0,6 % pour ce programme relatif aux autorités administratives indépendantes.
Si nous proposons de prendre systématiquement l'argent sur les crédits de cette action 16, c'est parce que ces crédits sont utilisés par le Gouvernement pour payer des cabinets de conseil privés afin d'organiser des plans sociaux dans de nombreux services de l'État. Nous préférons orienter ces crédits, prétendument destinés à la modernisation numérique, vers les autorités administratives indépendantes.
Le premier amendement, no 394 , tend à opérer un transfert de 526 137 euros au profit du Conseil supérieur de l'audiovisuel, une institution qui doit selon nous être renforcée, alors que le projet de loi de finances prévoit au contraire de réduire ses crédits de 1,4 %. La même mécanique s'appliquera aux amendements suivants.
Je rappelle que le CSA est, de toutes les autorités administratives indépendantes relevant de la mission « Direction de l'action du Gouvernement », celle qui bénéficie de la plus forte dotation. Celle-ci s'élève en effet à 37,6 millions d'euros pour 2019, le Conseil employant 284 équivalents temps plein. Aucune mission nouvelle ne lui est confiée. Il me semble donc préférable de maintenir les crédits en l'état.
J'ai déjà présenté mon argumentation à propos du Défenseur des droits et de la HATVP. Quant au contrôleur général des lieux de privation de liberté, dont j'ai rencontré en avril dernier, car cela relève du périmètre de ma mission, le secrétaire général, M. André Ferragne, aucune mission supplémentaire n'a été confiée non plus à cette autorité administrative indépendante et son budget ne connaît pas de tensions. Elle bénéficie en outre de 38 000 euros de plus que l'an dernier, ce qui doit correspondre au glissement vieillesse technicité évoqué plusieurs fois par M. le ministre, pour assurer le nécessaire équilibre de la masse salariale.
Pour toutes ces raisons, j'émets à titre personnel un avis défavorable à cet amendement et aux suivants.
Madame Rubin, sans reprendre les arguments de Mme la rapporteure spéciale, auxquels le Gouvernement souscrit, je soulignerai que, pour le CSA comme pour les autres entités, le périmètre reste sensiblement le même et qu'il n'y a donc pas lieu de leur affecter des crédits supplémentaires.
Nous nous demandons cependant pourquoi vous proposez de prélever sur ce programme 129. En effet, contrairement à ce que vous dites, il s'agit du service d'information du Gouvernement et certaines mesures de dématérialisation ne doivent pas être décrites comme vous l'avez fait. Ces mesures permettent en effet d'améliorer la relation aux citoyens, comme nous l'avons d'ailleurs évoqué à plusieurs reprises. Cette dématérialisation permet certaines procédures et il ne saurait être question, pour le Gouvernement, de réduire les crédits de ce programme. L'avis du Gouvernement est donc défavorable sur cet amendement, comme sur ceux qui suivront.
L'amendement no 394 n'est pas adopté.
Je répondrai sur l'ensemble, puis j'indiquerai les chiffres correspondant à chacun de mes amendements.
En tant que citoyenne, je considère – et certains d'entre vous pourront aussi en témoigner – que la dématérialisation ne rend pas forcément aux citoyens les services que vous évoquez, et que c'est parfois l'inverse. Cette dématérialisation se traduira en outre par la suppression de nombreux emplois de proximité. C'est la raison pour laquelle nous proposons en effet de prélever de l'argent sur les crédits de cette mission.
Les arguments que vous avancez me poussent à insister sur le fait que cette action n'a, selon nous, pas d'intérêt et nous proposons d'en transférer les crédits aux autorités administratives indépendantes, afin de conforter leur budget, qui est en baisse. C'est le cas du CSA, dont les crédits subissent une baisse de 1,4 %. J'ai bien entendu que le Défenseur des droits bénéficierait d'équivalents temps plein supplémentaires, mais ses crédits subissent néanmoins une baisse de 1,9 %, soit 421 457 euros. Quant à la Haute autorité pour la transparence de la vie publique, la baisse de ses crédits est de 0,65 %. Je ne m'étendrai pas sur tous ces amendements, dont vous avez compris la philosophie. Toujours est-il que les postes sont gelés et que leur nombre est même en baisse compte tenu des critères d'inflation que j'évoquais dans l'intervention que j'ai faite au nom de mon groupe.
L'amendement no 392 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
L'amendement no 395 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
L'amendement no 393 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
Les crédits de la mission « Direction de l'action du Gouvernement » sont adoptés.
J'appelle les crédits de la mission « Investissements d'avenir », inscrits à l'état B.
La parole est à Mme Sabine Rubin, pour soutenir l'amendement no 398 .
Cette proposition va à l'encontre de la philosophie du programme d'investissements d'avenir, qui ne répond pas à une logique sectorielle ou de planification, mais suit le cycle de l'innovation. Ainsi, un fonds de planification n'a pas de lien suffisant avec l'innovation. En outre, la transition écologique est déjà présente dans les programmes que vous proposez d'amputer – le programme prioritaire de recherche de l'Agence nationale de la recherche – ANR – sur les alternatives aux produits phytosanitaires, les démonstrateurs et territoires d'innovation de grande ambition – TIGA – de l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie – ADEME – et de la Caisse des dépôts et consignations.
Par ailleurs, la coopération public-privé, que vous dénoncez, est au coeur du fonctionnement du PIA : ce sont les appels d'offres, le consortium et les sociétés d'accélération du transfert de technologies – SATT – , et s'il s'agit d'un financement public seulement, c'est dans les budgets des ministères ou de l'ADEME qu'il faut porter cette proposition. Avis défavorable, donc.
Défavorable. Toutefois, la commission n'a pas examiné cet amendement et il s'agit donc d'un avis personnel.
Je ne répéterai pas le point de vue de la rapporteure, qui me semble avoir très bien traité le sujet. L'avis du Gouvernement est donc défavorable.
L'amendement no 398 n'est pas adopté.
La parole est à Mme Emmanuelle Ménard, pour soutenir l'amendement no 315 .
Cet amendement tend à transférer 55 millions d'euros de l'action 3, « Démonstrateurs et territoires d'innovation de grande ambition » du programme 422, « Valorisation de la recherche » vers l'action 3, « Industrie du futur » du programme 423, « Accélération de la modernité des entreprises ».
En effet, à l'heure où l'industrie ne représente plus que 12,6 % du PIB de la France et où le chômage est source d'angoisse pour de nombreux Français, il est plus urgent que jamais d'agir, car l'industrie est un secteur stratégique, qui génère non seulement des emplois, mais aussi la majorité des exportations de la France.
Je soutiens, bien sûr, sans réserves le développement de l'innovation sur nos territoires, mais l'action « Démonstrateurs et territoires d'innovation de grande ambition » voit son budget multiplié pratiquement par cinq, puisqu'il passe de 70 à 330 millions d'euros. À la lumière de ces chiffres, il me semble peut-être plus opportun de répartir différemment ce budget pour qu'il soit plus équilibré et puisse bénéficier davantage à l'action « Industrie du futur ». C'est en effet une action stratégique, car elle doit offrir aux entreprises un accompagnement pour faire face aux transformations actuelles qui touchent le secteur industriel.
Je tiens, en revanche, à souligner que ces évolutions doivent bien être au service de l'ensemble du secteur industriel car, il faut bien le reconnaître, l'évolution vers une industrie de pointe, compétitive à l'international, laisse parfois de côté certains secteurs plus traditionnels au profit quasi exclusif de grands technopôles de l'aéronautique, de l'informatique ou de la biotechnologie. Je voudrais donc que l'on n'oublie pas les autres secteurs de l'industrie française, héritiers d'une longue histoire, qui se battent aujourd'hui pour maintenir une partie de leur production en France et s'imposer sur le marché mondial. Ils doivent eux aussi pouvoir bénéficier de ce budget.
D'une manière générale, je suis convaincue qu'une grande réflexion doit être engagée sur le secteur industriel afin de maintenir et de valoriser une production française qui allie à l'innovation et à l'excellence un riche héritage tout en assurant des emplois pérennes. Le financement de projets industriels innovants prévus par l'action « Industrie du futur » doit pouvoir y contribuer.
Madame Ménard, vous souhaitez augmenter les crédits de l'action « Industrie du futur », que la loi de finances pour 2017 avait déjà doté de 350 millions d'autorisations d'engagement, aucun crédit de paiement n'a été prévu pour cette action, ni en 2018 ni en 2019. Deux conventions entre l'État et Bpifrance sont attendues pour la mise en oeuvre de cette action, mais une seule est conclue à ce jour. Nous sommes donc encore en attente d'une convention.
Je ne peux être favorable à votre amendement qui vise à supprimer des crédits de l'action « Démonstrateurs et territoires d'innovation de grande ambition », car on sait qu'une partie des financements confiés à l'ADEME permet de développer et de mettre sur le marché des technologies innovantes en faveur de la transition énergétique écologique – je pense à l'exemple de l'éolien flottant qui a été financé dans le cadre de cette action. La commission n'a pas examiné l'amendement, mais, j'émets un avis défavorable.
Sans reprendre les excellents arguments de la rapporteure spéciale, que je partage, j'ajoute que notre approche des filières industrielles ne se limite pas aux biotechnologies. Nous travaillons aujourd'hui, au sein du comité national de l'industrie, sur seize filières industrielles qui font actuellement l'objet de la signature de contrats stratégiques de filière.
Les deux derniers contrats signés concernent, d'une part, le secteur naval, qui voit se mêler le nautisme, des filières nouvelles comme celle de l'éolien marin et d'autres, inscrites dans l'histoire de notre industrie, comme l'industrie navale, et, d'autre part, le secteur de la chimie et des matériaux qui comprend l'industrie papetière et la plasturgie.
Nous avons bien compris que la réindustrialisation de notre pays passe aussi par un examen attentif de ces filières. S'il restait la moindre ambiguïté sur ce point, sachez que l'ensemble du PIA bénéficie à toutes ces filières. Je suis défavorable à l'amendement.
L'amendement no 315 n'est pas adopté.
La parole est à Mme Fadila Khattabi, pour soutenir l'amendement no 501 .
Cet amendement d'appel vise à introduire dans la mission « Investissements d'avenir » un nouveau programme, « Fonds pour l'innovation et le développement des entreprises artisanales ».
Aujourd'hui, l'un des problèmes majeurs auxquels sont confrontées les entreprises artisanales tient au financement de leur développement, et de leur adaptation aux mutations de l'économie, en particulier de leur transformation numérique. Les outils financiers existants sont souvent inadaptés au modèle économique de la petite entreprise. Cette situation freine la croissance des entreprises artisanales, alors que ce secteur présente un exceptionnel potentiel de développement et d'innovation.
Il me semble donc important d'accompagner les artisans dans leur transformation digitale, surtout si l'on sait que seulement 41 % d'entre eux disposent d'un site web, 15 % vendent en ligne et 25 % utilisent les réseaux sociaux.
Il s'agit donc d'un défi majeur pour l'artisanat, en cohérence avec les mesures que nous avons adoptées dans le cadre de l'examen du projet de loi relatif à la croissance et à la transformation des entreprises – dit « PACTE ».
Il est nécessaire que la spécificité des entreprises artisanales soit prise en compte par une action dédiée et distincte, afin de leur permettre de financer les dépenses liées à la numérisation des entreprises, à la protection de la propriété intellectuelle, ou encore au conseil en stratégie numérique.
Pour y parvenir, l'amendement vise à flécher 50 millions de crédits de paiement vers le financement d'un nouveau programme dédié à un fonds pour l'innovation et le développement des entreprises artisanales.
Madame la députée, votre amendement répond à la préoccupation entièrement légitime que l'artisanat demeure le premier employeur de France, avec 3 millions d'artisans actifs. Artisanat et innovation ne sont pas antagonistes, c'est pourquoi le PIA est déjà mobilisé en faveur de l'artisanat, en particulier grâce à son action à destination des filières de formation en apprentissage.
Notre majorité n'a pas éludé la question du soutien aux artisans. Je pense notamment à la création du label EPV, entreprise du patrimoine vivant, à la facilitation de l'installation de nouveaux artisans, ou à la reconnaissance du conjoint salarié dans le projet de loi PACTE.
Toutefois l'objet du PIA reste de soutenir les changements technologiques du futur et, bien que vos arguments soient tout à fait pertinents, le PIA ne me semble pas être le vecteur adapté à une politique de soutien à l'artisanat en général. Il conviendrait plutôt d'encourager, et nous le ferons, les projets artisanaux innovants, et de répondre aux appels d'offres du PIA pour obtenir des financements, par exemple en matière de numérisation, de « cotravail » ou de structuration des filières. Je demande le retrait de l'amendement.
Madame la députée, je ne peux que partager votre souci d'oeuvrer en faveur des entreprises artisanales. C'est dans cet esprit, Mme la rapporteure pour avis vient de le rappeler, que le Gouvernement a voulu simplifier leur vie quotidienne, grâce au projet de loi PACTE, ou à la loi pour la liberté de choisir son avenir professionnel, en faveur de la formation professionnelle. Comme vous le savez, cet effort doit se poursuivre avec la réforme de l'assurance chômage pour les artisans et indépendants.
S'agissant des entreprises artisanales et de leur numérisation, je partage avec vous l'idée que la transformation digitale des entreprises d'un à neuf salariés constitue un défi majeur, car la marche à franchir est sans doute plus importante que celle que doit franchir une PME. Il me semble cependant que les dispositifs ouverts dans le cadre du PIA doivent conserver une approche transversale – nous y sommes très attachés. Ils sont, évidemment, ouverts à toutes les entreprises, quels que soient leur taille et leur secteur d'activité.
Je veux signaler l'existence d'un dispositif qui répond en partie, me semble-t-il, à vos préoccupations. Je pense à la garantie de prêt France Num, qui dispose de 30 millions d'euros de garanties afin de financer 1 milliard d'euros de capacité de prêts destinés à des projets très concrets, proches de ceux que vous avez mentionnés : la numérisation des produits, la numérisation des fonctions commerciales ou RH, la cybersécurité, la formation des employés au numérique… Il n'y a pas de seuil particulier, et l'on peut penser que l'entrée dans ce type de dispositif est sans doute plus aisée que dans ceux, plus exigeants, du PIA. Pour toutes ces raisons, et afin de préserver la cohérence intersectorielle du PIA, je vous suggère retirer l'amendement.
Au regard des explications qui m'ont été données par Mme la rapporteure pour avis et par Mme la secrétaire d'État, je retire mon amendement.
L'amendement no 501 est retiré.
La parole est à Mme Emmanuelle Ménard, pour soutenir l'amendement no 316 .
Il me semble nécessaire de rappeler l'irremplaçable rôle des PME dans le tissu économique français : elles représentent 99,9 % de nos entreprises, et presque la moitié de l'emploi salarié. Puisque l'adaptation de l'offre française au marché international est un facteur clé pour le développement de nombreuses entreprises, il est pertinent de renforcer le budget qui aide les PME à se développer à l'international.
Évidemment, le secteur de l'enseignement et de la recherche doit être valorisé puisqu'il assure la formation de ceux qui seront, plus tard, les acteurs de la société, toutefois la création de nouvelles sociétés universitaires, censées expérimenter de nouveaux modèles de gestion des universités avec les entreprises, ne semble pas avoir apporté les fruits attendus. Ces sociétés se caractérisent en effet par leur grande complexité, donc par une certaine opacité. Le budget alloué se limite aux projets de grande ampleur, ce qui exclut les petites universités au profit de celle des grandes villes, c'est pourquoi il me semble plus cohérent de le rééquilibrer afin qu'il bénéficie davantage aux PME. Je propose en conséquence le transfert de 20 millions d'euros du programme 421 « Soutien des progrès de l'enseignement et de la recherche », vers le programme 423 « Accélération de la modernisation des entreprises » et plus précisément vers son action 7 « Fonds à l'internationalisation des PME ».
Comme vous, madame Ménard, je pense qu'il est préférable d'accompagner nos entreprises à l'exportation. L'excellent rapport spécial de Nicolas Forissier sur le commerce extérieur en montre bien l'utilité et l'intérêt. Je regrette donc d'autant plus que, lors de l'examen de la première partie du projet de loi de finances, nous ayons brutalement réduit les ressources des chambres de commerce et d'industrie qui assuraient un véritable accompagnement en la matière.
En 2018, 100 millions d'euros de crédits de paiement ont été ouverts pour le fonds à l'internationalisation des PME. Il devrait être à terme doté de 200 millions pour investir en fonds propres, mais, en fait, rien n'a encore été décaissé. Je pense qu'il est trop tôt pour augmenter aujourd'hui les crédits d'un fonds qui vient d'être créé par Bpifrance avec les 100 millions votés l'année dernière. Avant d'attribuer des crédits nouveaux, attendons de voir comment ces 100 millions seront utilisés ! La commission n'a pas examiné l'amendement, mais, à titre personnel, avec les regrets et les réserves dont je vous ai fait part il y a un instant, j'y suis défavorable.
Madame la députée, un fonds spécifique, destiné aux PME et aux ETI, a été créé pour accompagner les entreprises à l'exportation. Cela me semble répondre parfaitement à votre préoccupation.
Par ailleurs, votre amendement est gagé par le retrait d'une enveloppe budgétaire destiné à l'action 6, « Créations expérimentales de sociétés universitaires et scientifiques » du programme 421, dont l'opérateur est la Caisse des dépôts. Cette action, qui vise à renforcer l'autonomie des universités, des écoles ou de leurs regroupements, est, en fait, assez importante puisqu'il s'agit d'aider les établissements qui souhaitent expérimenter de nouveaux modes de gestion en leur permettant de valoriser l'ensemble de leurs compétences et de leur actif, donc de donner cette autonomie qu'un certain nombre d'entre vous appelle de leurs voeux.
L'appel à manifestation d'intérêt est ouvert du 23 mars 2018 au 23 mars 2023. Il y a une assez grande transparence dans le processus, et il me semble difficile de priver cette ligne budgétaire de ses moyens. Je suis défavorable à l'amendement.
L'amendement no 316 n'est pas adopté.
La parole est à Mme Emmanuelle Ménard, pour soutenir l'amendement no 317 .
L'amendement no 317 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
La parole est à Mme Emmanuelle Ménard, pour soutenir l'amendement no 353 .
L'amendement no 353 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
La parole est à Mme Marie-Noëlle Battistel, pour soutenir l'amendement no 268 rectifié .
Il vise à ajouter 10 millions d'euros au budget du programme « Accélération de la modernisation des entreprises », tout particulièrement à l'action « Grands défis », pour laquelle aucun crédit n'apparaît dans le texte qui nous est soumis. Cette absence de financement nous paraît d'autant plus regrettable que cette action a vocation, selon les documents budgétaires, à « catalyser la transition écologique et les changements de business models technologiques qu'elle emporte ».
Je me permets de rappeler que cette action est l'une des plus fortement dotée en autorisations d'engagement. Elles s'élevaient à 700 millions d'euros dans la loi de finances initiale pour 2017. En revanche, plus rien n'est inscrit pour 2019. Votre amendement modifie ces autorisations d'engagement, ce qui peut poser un problème.
Pour 2018 et 2019, aucun crédit de paiement n'est inscrit pour cette action alors que toutes les autres actions du PIA 3 ont bénéficié de crédits de paiement. Je comprends votre étonnement et je le partage : c'est une des seules actions pour laquelle aucune convention n'a été conclue avec l'opérateur, la Caisse des dépôts. Je crois comprendre que cette action est la « poire pour la soif » du PIA 3, comme le disait l'une des personnes que j'ai auditionnées. Comme je l'évoquais tout à l'heure, le descriptif de l'action est suffisamment vague pour financer on ne sait pas quoi – pratiquement tout, en fait – , en fonction des priorités du Gouvernement.
Tout cela fait que je suis très ennuyée par cet amendement, mais convient-il de donner davantage de moyens à cette action ? Je ne crois pas, et pour ces raisons, même si la commission n'a pas examiné l'amendement, j'émets un avis défavorable pour ne pas renforcer la pratique d'une utilisation de crédits sans convention.
Sept cents millions d'euros d'autorisations d'engagement ont en effet été ouverts pour financer l'action « Grands défis », et la structuration d'un fonds dédié permettra tout d'abord d'apporter massivement, dès leur naissance, des capitaux à des projets entrepreneuriaux très ambitieux. Le PIA3 sera ainsi à même d'assumer la prise de risque importante inhérente à l'ambition attachée à ce type de grands projets. La réflexion concernant la structuration et la finalité de cette action est encore en cours, notamment pour intégrer un volet subventionnel consacré à l'appui des projets d'envergure portés par les acteurs publics ou privés et répondant aux enjeux de la société numérique ou aux défis énergétiques et environnementaux. L'articulation avec les grands défis financés chaque année en subventions et en avances remboursables par le fonds pour l'innovation et l'industrie, le FII, sur proposition du conseil de l'innovation, doit également être prise en compte. C'est pourquoi la convention devra être publiée probablement courant 2019 et que la mise en place des crédits de paiement suivra en fonction des articulations qui seront décidées entre les différents dispositifs. Par conséquent, il n'y a pas recul sur l'engagement mais une réflexion qui reste à parachever pour que l'ensemble soit le plus cohérent possible. Pour ces raisons, l'avis est défavorable.
Je voudrais être sûre d'avoir bien compris : si vous n'avez inscrit aucun crédit sur cette ligne cette année, c'est parce que vous considérez qu'aucune convention ne sera signée et que le dispositif ne sera opérationnel que l'année suivante, n'est-ce pas ?
Les autorisations d'engagement ne sont pas consommées et nous sommes en train de finaliser la convention avec l'opérateur. Il n'y a donc pas de risque quant à la capacité à accompagner ces projets.
L'amendement no 268 rectifié est retiré.
La parole est à Mme Emmanuelle Ménard, pour soutenir l'amendement no 351 .
Je voulais rappeler par cet amendement qu'accompagner les entreprises face aux évolutions du système de production industrielle est absolument indispensable. D'expérience, on voit bien que les industries qui parviennent à survivre, et même à se développer, sont celles qui ont fait le choix stratégique de se positionner à la pointe de l'innovation. Pourtant, je rappelle que d'autres secteurs plus traditionnels parviennent également à se maintenir, et pour certains à prospérer, au prix de sérieux efforts : je pense par exemple aux entreprises de verrerie, dans le nord de la France, entreprises qui conservent leur production dans notre pays, ce qui maintient de nombreux emplois, et qui se positionnent à un niveau d'excellence, nous dévoilant un autre aspect de la question industrielle que nous ne devons pas oublier, à savoir que la production industrielle tient une place irremplaçable dans l'identité de certains territoires et ne saurait être considérée qu'en fonction de chiffres et de statistiques. Cette identité est un atout à valoriser dans le contexte de la mondialisation puisqu'elle apporte une expérience indispensable en plus de sa capacité d'innovation.
Je ne reviendrai pas sur le transfert de crédits proposé car je m'attends à un avis défavorable – puisqu'il procède de la même logique que mes amendements précédents.
Sourires.
Tout à l'heure c'était 10 millions ; ici, c'est 5 millions. Je redis que le fonds est doté de 100 millions d'euros. Laissons donc déjà se déployer des crédits accompagnant des actions en faveur de l'internationalisation, et attendons une contractualisation ferme pour mesurer les effets et évaluer les besoins. Aujourd'hui, c'est largement prématuré. L'avis est défavorable à titre personnel.
Avis défavorable pour les raisons que j'ai déjà exposées.
L'amendement no 351 n'est pas adopté.
Les crédits de la mission « Investissements d'avenir » sont adoptés.
J'appelle les crédits du budget annexe « Publications officielles et information administrative », inscrits à l'état C.
Les crédits du budget annexe « Publications officielles et information administrative » sont adoptés.
Nous avons terminé l'examen des missions « Conseil et contrôle de l'État », « Pouvoirs publics », « Direction de l'action du Gouvernement », « Investissements d'avenir », et du budget annexe relatif aux publications officielles et à l'information administrative.
La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.
Prochaine séance, cet après-midi, à quinze heures :
Questions au Gouvernement ;
Suite de la discussion de la seconde partie du projet de loi de finances pour 2019 : examen des crédits des missions « Justice », « Culture », « Médias, livre et industries culturelles ».
La séance est levée.
La séance est levée, le mercredi 31 octobre 2018 à une heure cinquante.
Le Directeur du service du compte rendu de la séance
de l'Assemblée nationale
Serge Ezdra