Intervention de Stéphane Peu

Réunion du jeudi 25 octobre 2018 à 10h05
Commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la république

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaStéphane Peu :

Je rejoins tout ce qui a été dit par nos collègues à propos de la dématérialisation et quant au fait qu'il est absolument nécessaire – même si le mouvement de dématérialisation est normal et si je le soutiens – de maintenir les possibilités d'un accueil physique.

Je souhaite dire aussi ma grande préoccupation concernant l'accueil des étrangers. Vous le savez, je suis élu de la Seine-Saint-Denis. Tous les matins, chaque jour de l'année, dès cinq heures, des queues se forment devant la préfecture de Bobigny, et elles ne cessent de s'allonger au fil des ans – il est vrai que cela vaut aussi pour d'autres préfectures – sans qu'il y soit jamais apporté de solution. Or, vous le savez – et je vais faire le lien avec un autre débat qui a émergé dans notre pays –, un État, pour être respecté, doit être respectable. En l'espèce, ni les personnels de l'État en charge de ces dossiers ni les usagers ne se sentent respectés : les uns, du fait des conditions de travail, les autres en raison des conditions d'accueil. Il en ressort un État dont l'autorité est inévitablement affaiblie.

Dans mon groupe, beaucoup de députés ont été élus dans ces territoires que l'on dit oubliés de la République. En tant que commissaire aux Lois, j'ai participé à une mission pilotée par François Cornut-Gentille et Rodrigue Kokouendo sur la situation de la Seine-Saint-Denis. Nous avons été reçus par le Premier ministre, qui nous a beaucoup écoutés et a porté une attention particulière aux conclusions de notre rapport, lequel doit désormais se traduire par des actes et des choix budgétaires. Votre prédécesseur, lors de sa passation de pouvoirs, a parlé de cette République où l'on vit de plus en plus côte à côte et où l'on vivra, un jour peut-être, face à face. La République ne peut être incarnée, pour partie, par l'État – son rôle, sa respectabilité, son autorité – et voir, dans des départements comme la Seine-Saint-Denis, un État aussi affaibli et, de ce fait, déconsidéré et en manque d'autorité.

Dans ma circonscription, l'arrondissement de Saint-Denis, qui compte 650 000 habitants, soit plus que bien des départements français, ne dispose toujours pas d'une préfecture de plein exercice, alors même que l'État a acheté des locaux en 2012 en plein centre-ville. À l'heure actuelle, nous n'avons toujours pas vu l'once d'un début d'opération d'installation de cette sous-préfecture. L'État se retrouve propriétaire de locaux vacants, depuis six ans, au centre même de Saint-Denis.

Il y va de l'autorité et de la respectabilité de l'État et de la République. Dans l'un des arrondissements les plus pauvres de France, où la criminalité est la plus élevée, où les questions qui se posent à la République le sont d'une façon extrêmement aiguë, on ne peut avoir un État qui s'efface. Quand l'État s'efface, la République s'affaisse. Il est impossible de ne pas répondre à notre rapport, qui a fait l'unanimité sur les bancs de l'assemblée. Il est urgent d'apporter des réponses, lesquelles passent par des budgets qui prennent en compte cet impératif politique. Or, sauf erreur de ma part, il ne me semble pas avoir vu de sommes inscrites pour implanter une sous-préfecture de plein exercice dans l'arrondissement de Saint-Denis.

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